Une soirée en solitaire. Une fois n’est pas coutume. Louise et Nicolas étaient partis en France pour l’anniversaire de leur grand-père, petite fiesta à laquelle Morgana était bien évidemment invitée mais elle avait hélas dû passer son tour : un contrat de garde du corps pour le temps d’un concert lui avait été remis entre les mains, et comme il fallait bien payer les factures commençant gentiment à s’accumuler, la jolie monégasque n’avait pas été en mesure de dire non. Surtout pas alors qu’il s’agissait d’un chanteur qu’elle idolâtrait depuis quelques temps et qu’en prime elle avait un accès backstage. Sauf que là, c’était l’avant-veille du concert et Morgana s’ennuyait comme une rate morte sans ses paris et les délires avec ses deux cocos préférés. Il n’y avait pas à dire, ce n’était pas pareil sans eux. Elle en était à son deuxième verre de scotch, à son énième soupir et bien que parler à quelqu’un n’était pas du tout dans ses envies du moment, elle amorça une approche avec le premier loulou à proximité… qui s’avérait n’être autre que Leroy. « Dites-moi que vous êtes seul ce soir et que je ne vais pas devoir trouver un autre coco à qui parler parce que je n’ai pas la patience de chercher. Morgana, enchantée. » D’accord, c’était plutôt brutal comme approche mais si elle n’était pas du tout pompette, la brunette n’avait pas envie de faire d’efforts particuliers ce soir. Elle n’était pas ici pour séduire… en théorie, puisque sa tenue était on ne peut plus séduisante en soit.

Ce soir, pas de baby-sitter pour Connor. Ce dernier était chez un ami toute la journée pour un anniversaire et passait également la nuit et la journée du lendemain là-bas. Du coup, en ce jour de congé, Leroy en avait profité pour dormir, faire du ménage et vérifier le courrier auquel il n'avait pas répondu. Seulement, le soir venu, il décida de sortir. Il avait passé tout son temps dans la maison, donc autant en profiter pour sortir, vu qu'il était seul. Allant dans un bar, il commanda un whisky, restant au bar et regardant les personnes alentours. Il n'avait pas dans l'idée de draguer ou se faire draguer. Juste une soirée tranquille, jusqu'à ce qu'une jeune femme lui adresse la parole. Poliment, il l'écouta tout en la regardant.

Leroy, enchanté également.

Il était surprit qu'elle soit si directe, mais ça l'amusait.

Je suis bien seul. Mais pourquoi voulez-vous parler ? On vous a posé un lapin ou vous attendez quelqu'un qui ne vient pas ?

Avalant une gorgée de whisky, il se demandait bien pourquoi c'était lui qu'elle avait choisit. il y avait du monde partout autour d'eux et il attendit sa réponse, se demandant si elle avait une idée derrière la tête ou si elle voulait simplement discuter avec lui.

Effectivement, c’était à se demander pourquoi elle l’avait choisi. Mais Morgana n’avait pas de « type d’homme » et pouvait piocher chez n’importe qui lorsqu’il s’agissait de remporter un pari, ou simplement de gagner une galante compagnie pour la soirée. En l’occurrence, aucune intention de sa part de séduire, elle était plutôt dans l’optique d’éviter tout silence pour ce soir. Le silence la tuait. Il la faisait rendre dingue et quelque chose lui disait que même une dose considérable d’alcool n’aurait pas pu l’aider à se détendre réellement. « J’ai une tête à avoir besoin de rancards ? » demanda-t-elle tout en arquant un sourcil, sans méchanceté ou même quitter ce sourire aussi insolence qu’attirant chez elle. « Je pourrais parler à n’importe qui et si je vous ai choisi, c’est parce que vous êtes à quelques millimètres de moi et que ça m’évite de lever mon séant de mon tabouret. C’est moins classe comme explication, hein ? Après tout vous êtes pas mal dans votre genre, pourquoi pas vous ? Surtout que vous êtes seul vous venez de le dire ! » Morgana haussa les épaules avant de claquer des doigts pour appeler le barman qu’elle connaissait extrêmement bien pour recommander une tournée. Hors de question de laisser leurs gosiers respectifs se dessécher. « Quand une miss se présente en général on répond, monsieur je me la joue brun ténébreux ! »

Détente était le mot du soir, mais apparemment il n'avait pas la même signification pour les deux jeunes gens. Morgana voulait parler et lui voulait du silence. Seulement, il se mit à parler à la jeune femme à son tour et l'écouta avec attention.

Je ne sais pas. Quelle tête doit-on avoir pour avoir besoin de rancards ? La mienne en fait peut-être partit ? En quoi voyez-vous ça ?

Il continua de regarder la jeune femme, amusée par le fait qu'ils parlent de choses aussi simples, mais ça l'amusait et au moins, ils ne se prenaient pas la tête sur des sujets sensibles.

C'est juste parce que je suis là. J'en prend note, mais pour le reste, je ne sais pas si ça vaut le coup. Vous êtes pas mal également, mais ce soir, je suis là pour me détendre, pas m'occuper de quelqu'un d'autre.

Avalant une gorgée de son whisky, il entendit la jeune femme claquer des doigts. Fronçant les sourcils, il la laissa faire, attentif à ce qu'elle faisait et disait.

Je l'ai fais. Vous êtes déjà éméché et vous n'avez pas entendu que je me suis présenté. Je vous ai dit Leroy, enchanté.

Il garda un sourire amusé aux lèvres, parce qu'il l'avait déjà dit et qu'apparemment, elle ne l'avait pas noté le moins du monde.

« En fait vous n’avez aucune tête précise mais je trouve ça juste amoral de boire seul. Quand on boit, c’est pour trinquer, non ? A moins que vous n’alcoolisiez votre désespoir auquel cas j’ai peut-être cassé votre groove ! » Morgana haussa les épaules avant de ne laisser un petit rire mutin peupler leur atmosphère sonore immédiate : effectivement, elle n’avait aucunement fait attention à son prénom ou à sa présentation, preuve non pas qu’elle était déjà éméchée mais plutôt qu’elle en avait suffisamment gros sur la patate pour être définitivement sourde à tout ce qui ne la concernait pas. C’était égoïste, certes, mais au moins Morgana ne se mettait pas d’œillère en se considérant comme petite brunette parfaite et bonnes sous tous rapports. « Vous savez quoi ? J’applaudirais bien au fait que vous ne vous occupiez que de votre petit cul. Qui est pas mal au demeurant, d’ailleurs ! Franchement, si vous saviez le nombre de types potentiellement tournés vers les autres et qui en vérité ne pensent qu’à leurs gueules… au moins vous êtes francs ! Vous avez d’autres qualités comme ça… Leroy ? Vous voyez, je vous écoute ! » Morgana lui fit un léger clin d’œil avant de déguster une nouvelle gorgée de son verre fraîchement servi. Elle n’était pas éméchée elle n’était même pas fatiguée elle était juste… le moral dans les chaussettes. Autant qu’elle évite de penser à ce qui lui était récemment arrivé. « Et votre job, c’est quoi ? »

Non, il n'y a rien de cassé. Mon fils est chez un ami jusqu'à demain soir et je suis donc seul jusqu'à ce moment là. Je n'avais pas envie de rester seul chez moi, alors j'ai voulu venir me détendre ici.

Rien de plus simple au final. Il voulait juste profiter d'un moment dans un bar, à ne pas avoir d'obligation, d'aucune sorte.

Merci pour le compliment. Je n'ai pas regardé le votre, mais je ne doute pas une seconde qu'il soit très agréable. D'autres qualités, je crois que non. Je ne suis pas un homme avec des qualités, en tout cas, pas d'après mon ex femme et mes parents.

Haussant les épaules, il savait que c'était bien les seules personnes qui allaient lui remettre les idées en place. En tout cas, c'est ce que tous croyaient à ce sujet.

Je suis médecin à New-York et rattaché au consulat anglais. Ca donne beaucoup de travail, mais c'est ce que j'aime. Disons, que je n'aime pas ne rien faire. Et vous Morgana, que faites-vous dans la vie, à part aborder des hommes dans des bars ?

Tiens, tiens… un homme qui pense ne pas avoir de qualité, voilà bien une chose aussi incongrue que rare ! Morgana ne manqua pas d’afficher un petit sourire amusé tandis qu’elle se gardait bien de l’interrompre, passant sûrement de son côté pour une prédatrice sans aucune cervelle… mais elle s’en moquait bien. Pour une fois, la monégasque ne cherchait pas à faire bonne impression ni à mettre en avant ses habituels arguments féminins auxquels aucun homme ne résistait jamais. En l’occurrence, juste pour cette fois, elle ne dirait pas non à rencontrer quelqu’un sans forcément que cela ne finisse par des gémissements dans une chambre d’hôtel avant qu’elle ne l’éjecte soigneusement de sa vie avec pertes et fracas. « Votre ex-femme et vos parents ont massacré votre belle confiance en vous dois-je comprendre ? Encore plus criminel ! » s’exclama-t-elle sans aucune douceur, n’ayant pas pour habitude de prendre de gants à moins que ce ne soit absolument nécessaire ET effectué dans le cadre de son travail uniquement. Autant dire que si Nicolas ou Louise se mettaient à chier dans la colle, elle serait la première à leur en faire la réflexion. « Allez, ne soyez donc pas choqué pour si peu ! Maintenant, les femmes sont indépendantes et prennent les devants avec les hommes, va falloir vous y faire ! Et puis merde, un médecin tout seul, c’est quand même sexy… moi, ne vous marrez pas mais je suis garde du corps. Comme quoi vous voyez, l’habit ne fait pas le moine et je ne fais pas que descendre des verres dans des bars ! » Accessoirement, elle était aussi ancienne championne de Kung-Fu mais ça, pas question d’en faire mention pour l’instant.

On peut dire ça. J'ai une famille qui fait souvent face aux médias, comme bientôt, j'aurai un nouveau cousin ou une nouvelle cousine. Ca va être diffusé partout et je sais que je vais devoir aller les voir. Evidemment, avec eux ça se passera bien, mais avec le reste de ma famille, mon divorce va revenir sur la table. Mais, avec le temps, je sais quand les arrêter ou quand ne plus écouter.

Avec la naissance du bébé du couple royal, il y allait avoir beaucoup de choses à gérer. Lui irait voir le bébé avec plaisir, laissant le temps aux nouveaux parents de se remettre des débuts. Mais, il savait aussi que son fils voudrait voir son cousin ou sa cousine. Ca serait amusant de le voir ainsi. Il n'avait pas connu de naissance dans leur famille encore, ou en tout cas, pas si attendu par tout le monde.

C'est sexy, mais avant que je vous la dise, vous ne saviez pas que j'étais médecin. Je n'ai pas la blouse pour le prouver. Mais je n'aurai jamais imaginé que vous soyez garde du corps. En général, se sont de gros bras, mais vous devez être plus cérébral avant de frapper.

La jeune femme n'était pas faite physiquement comme les autres garde du corps. Elle était fine et non toute en muscle. Mais, il se doutait qu'elle devait d'abord réfléchir et après frapper au besoin. Après tout, les hommes sont du genre à frapper en premier, mais elle devait être fine psychologue avant tout.

Si vous êtes garde du corps, vous devez être bien entraîné. Il ne vaut mieux pas que je vous mette au défi, je sens que je vais perdre sinon.

Morgana n’était pas une cérébrale à proprement parler, elle préférait agir que tergiverser pendant des semaines mais Leroy n’avait pas tort, elle avait oublié de n’être qu’une brute épaisse et avinée. Au contraire, elle avait une capacité d’analyse plutôt impressionnante et une discipline du fait de ses anciens titres de championne qui la plaçaient bien souvent au dessus de ses collègues ou même adversaire. Voilà pourquoi elle ne gagnait pas trop mal sa vie, bien que ce genre de boulot ne soit jamais payé des mille et des cents en général. La monégasque s’en fichait, car elle avait tendance à penser que l’argent pourrit tout et affaiblit les esprits… même si ce bon médecin n’avait pas l’air d’être un rat ou même quelqu’un d’imbu de sa personne. « Je suis une sexy garde du corps et vous êtes un sexy doc ! Lancez-vous des fleurs un peu, vous savez, personne ne le fera à votre place… ça fait du bien par où ça passe ! » La jeune femme esquissa un faible sourire, faible mais on ne peut plus franc, avant de ne s’esclaffer face à la réponse suivante de Leroy : effectivement, même en bras de fer et bien qu’il soit un homme, elle aurait tôt fait de lui mettre la culottée de sa vie. « Je suis obligée d’être la meilleure vous voulez dire ! Parce que je suis une femme et que je ne paye pas forcément de mine sur le terrain, je suis obligée de brandir les poings pour me faire respecter vous savez. Mais ça ne m’amuse pas pour autant… ce serait dommage de vous abîmer tout de suite non ? A moins que vous n’ayez des élans suicidaires mais là, j’aurais tendance à dire que ça vous regarde ! »

Vraiment ? Il va falloir que je pense à me lancer des fleurs pus souvent alors.

Il était amusé par la chose. Il n'était pas du genre à faire ce genre de choses, mais après tout, pourquoi pas.

En effet. Je préfère ne pas être abîmé. Mais c'est justement parce que vous ne ressemblez pas aux autres gardes du corps que vous êtes plus dangereuse. Vous devez prendre les gens par surprise et ça doit aider quelque peu je suppose.

Pour lui c'était vrai. Vu qu'elle n'était pas une montagne de muscle, elle devait souvent prendre ses ennemis par surprise. Ca devait avoir un effet positif sur son travail. Il voyait les choses ainsi.

Ca veut donc dire que vous êtes également une tornade au lit ? Parce que si c'est le cas, je veux bien dire que je suis suicidaire.

Un sourire amusé aux lèvres, il avala un peu de son breuvage, tout en fixant la jeune femme et voir si elle comptait le suivre sur ce terrain là, ou si elle allait le remettre à sa place.

Morgana le regarda soudainement, amusée qu’il ne prenne les devants alors qu’en théorie, c’était elle la prédatrice, c’est elle qui disait lorsque le jeu commençait et lorsqu’il finissait. Pourtant, ce soir, elle n’était pas venue pour séduire qui que ce soit mais plutôt pour éviter de tourner tel un lion en cage dans son grand appartement. L’inactivité lui avait toujours tapé sur les nerfs et ma foi, ce cher Leroy n’était pas de désagréable compagnie, bien au contraire. La monégasque se surprit à émettre un rire franc et sonore face à sa réponse avant de lever son verre et de trinquer en sa compagnie pour la forme. Voilà bien une rencontre des plus inattendues ! « Je ne vais pas vous faire l’affront de vous dire que je peux être dangereuse en vous abîmant, ce serait con, pas vrai ? » La jeune femme émit cependant un sourire légèrement plus taquin, mutin, provocateur. Leroy était en train de la lancer sur un terrain qu’elle maîtrisait diablement et bien qu’en l’occurrence il n’y ait pas le moindre défi pécuniaire lié à sa compagnie de la soirée… cela ne risquait pas de piment ! « Pourquoi juste au lit ? Il y a d’autres lieux pour s’envoyer au septième ciel chéri. » Et elle esquissa un léger clin d’œil tout à fait entendu. Allait-il chercher à se brûler davantage les ailes ?

Il sourit quand elle se mit à rire. Après tout, autant être audacieux, même s'il n'était pas là pour ça. Trinquant avec elle, il avala une gorgée de son verre, tout en l'écoutant parler.

Ca dépend. Je suis médecin, donc je saurai me soigner si je dois être abîmé.

Haussant les épaules, il sourit et partit sur un terrain qui pouvait être glissant. Cependant, à la réponse de la jeune femme, il hocha la tête positivement.

Oh mais je le sais. Je me disait juste que pour un début, le lit sera pas mal. Mais si vous préférez autre chose, on peut totalement aller sur ce terrain.

Finissant sa boisson, il regarda le barman pour lui demander combien il devait pour toutes les boissons, avant de regarder la jeune femme.

Par où voulez-vous commencer ?

Après tout, autant s'amuser, sauf si la jeune femme lui faisait comprendre qu'elle ne voulait pas finir la soirée avec lui.

Il y a bien un endroit en particulier qui vous tente et que vous n'avez pas encore pû expérimenter. Ce soir, c'est moi qui l'offre avec plaisir.

Du plaisir, il comptait bien en prendre et en donner. Evidemment, tout cela étant hypothétique, si la jeune femme préférait le faire tourner en bourrique et repartir sans lui.

« On ne dit pas que les docs sont ceux qui se soignent le plus mal ? Je serais sûrement une infirmière pas mauvaise ! » Morgana avait l’intention de le défier toute la soirée durant juste pour le plaisir car il s’agissait bien d’une première pour elle : jusqu’ici, la jolie monégasque n’avait jamais provoqué ni même séduit de médecin. Ce fameux Leroy avait l’air d’être aussi bouillant que de la lave et pour ainsi dire, si elle ne se retenait pas, la jeune femme lui aurait déjà arraché sa chemise sans même le plus petit état d’âme. Mais elle savait se maîtriser et, qui plus est, elle n’était pas encore suffisamment alcoolisée pour perdre totalement le contrôle. « Par où commencer ? Excellente question et j’ai une réponse tout aussi excellente : votre bureau ! Allez, un peu d’aventure chéri… sinon vous allez vous ennuyer toute votre putain d’existence ! » Morgana se mit à ricaner et à lui saisir les mains pour quitter l’endroit où ils étaient… il n’était pas question qu’elle essuie un non à vrai dire. Leroy pourrait toujours se plaindre par la suite mais un peu de piment ne risquait pas de lui faire de mal, surtout pas en présence de la jolie monégasque…