« Alors comme ça tu arrêtes le droit ? A qui je vais prendre les cours maintenant quand je ne serais pas là ? » demanda Harry d’un air désespéré. Mason ne put s’empêcher de rire puis de secouer la tête quelque peu exaspéré. « Désolé de te l’annoncer mais… il posa la main sur l’épaule de son ami et afficha une mine accablée et désolée à la fois tu vas devoir aller en cours. Mais tu as encore quelques mois pour te préparer psychologiquement, rassure-toi. » La fin des cours n’était que dans un mois et il y avait l’été avant la prochaine rentrée, cela lui laissait trois bons mois avant de devoir retourner en cours. Il avait donc le temps de se trouver un autre « pigeon » pour prendre ses cours. Harry allait lui manque, c’était certain. Il ne connaissait personne de meilleur pour organiser des fêtes ou pour simplement lui changer les idées. Tout semblait vraiment simple avec lui et c’était très appréciable. « Et ton père, il en pense quoi ? » Mason haussa les épaules. A son grand étonnement, Carl ne l’avait pas si mal pris que ça. Il avait bien pris une semaine avant de finalement lui annoncer qu’il arrêterait ses études de droit à la fin de cette année mais son père ne s’était pas mis en colère et n’avait pas essayé de l’en dissuader. Il lui avait juste demandé s’il était bien sûr de lui. « Rien du tout. Il n’a aucun mot à dire là-dessus de toute façon. » C’était vraiment maintenant. Avant ça, le jeune homme laissait son père complètement dicter sa vie. A vingt-et-un ans il était temps qu’il reprenne les commandes. Après, cela ne voulait pas dire qu’il comprenait vraiment pourquoi son père l’avait laissé tranquille là-dessus. Il avait peut-être enfin compris que c’était en le laissant faire ce qu’il voulait qu’il allait gagner un peu d’estime de la part de son fils. Sa campagne électorale allait entrer dans une phase importante il devait vraiment être de son côté. Tout pour les apparences hein. Mais bon ça allait bien à Mason, il se sentait enfin un peu plus libre. « Permet-moi de trouver ça louche quand même. » Il pouvait bien lui accorder ça, il avait trouvé lui aussi trouvé ça louche. Mais il voulait profiter du fait que son père le laisse tranquille donc il ne se posait pas plus de questions que ça. « Et tu nous abandonnes pour quoi du coup ? » demanda Mark qui était resté silencieux jusqu’ici. Mark allait lui manquer aussi, ils travaillaient toujours ensemble et il était presque aussi doué et bosseur que lui. Il n’aurait plus de compétition pour être premier de la promo à présent, sans arrogance aucune. « Histoire. » répondit-il avec un sourire. Il avait toujours voulu faire histoire, il avait hérité cette passion de sa mère qui serait son professeur l’an prochain. Elle était très heureuse qu’il fasse histoire d’ailleurs et qu’il puisse enfin faire ce qu’il souhaitait. Elle l’avait toujours soutenu durant toutes ces années, elle ne cautionnait pas vraiment ce que Carl faisait mais elle n’était pas vraiment en position de faire quoi que ce soit. Carl était Carl et il était bien difficile de s’opposer à lui. « D’ailleurs, j’étais venu pour mon inscription à la base. » dit-il en tournant la tête dans la direction où il comptait se diriger d’une seconde à l’autre. « Tu dois aller t’inscrire genre là tout de suite ou ça peut attendre ? Non parce qu’on aurait pu aller boire un verre juste pour profiter encore de toi mais je vois que tu es devenu trop bien pour être vu une seconde de plus avec nous ! » le taquina alors son ami. Le jeune homme ne répondit rien. En tournant la tête, son regard c’était posé sur quelqu’un qu’il n’aurait jamais pensé voir ici et qu’il n’aurait jamais pensé revoir un jour en fait, peu importe l’endroit. Connor. Connor était là juste devant lui, avec son frère. Il était de retour à New York. La voix de son ami s’éloigna progressivement et une boule se forma immédiatement dans sa gorge. Il détourna cependant le regard de peur qu’il ne le voie en train de le fixer. Il l’avait peut-être déjà vu, il ne pouvait pas vraiment le dire. Si c’était le cas, il l’ignorait vraiment bien et s’ignorer l’un et l’autre lui convenait. Ce n’était ni le moment ni l’endroit pour des retrouvailles qui s’annonçaient difficiles. « Hey, Mason, t’es avec nous ? » Harry le ramena bien vite à la réalité, dieu merci. Il en vint même à se demander s’il n’avait pas imaginé Connor se tenant juste en face de lui. Il s’autorisa à jeter un nouveau coup d’œil dans sa direction pour se rendre compte que ce n’était absolument pas le cas. « Ouais mais je dois vraiment y aller là les gars, on se voit en cours plus tard. » dit-il en reportant son attention sur eux. Il était prêt à partir d’ailleurs mais il vit Connor se mettre à avancer et il ne réussit pas à bouger. Son frère et lui passèrent juste à côté d’eux, sans qu’il semble faire attention à leur petit groupe. Tout se déroulait parfaitement, Mason allait pouvoir respirer à nouveau. Seulement… « C’est pas Connor là ? » Le fait que Mark ait également fait partie de l’équipe de natation au lycée et qu’il ait également été ami avec Connor lui avait échappé pour une raison étrange. « Hey Connor ! » l’interpella-t-il, le faisant se stopper. Mason allait partir mais son ami le retint par le bras. « Tu savais qu’il était revenu, toi ? » Il prit une grande inspiration et secoua la tête. Il était dans l’impossibilité de prononcer un seul mot… Connor allait s’approcher, son cœur battait à tout rompre et il ne pouvait pas fuir.

Mason se sentait vraiment très mal. Autant que lorsque son père était rentré et l’avait fait redescendre de son petit nuage et où il avait réalisé qu’il devait tout arrêter avec Connor. Autant que lorsqu’il avait essayé de l’éviter pour repousser le moment où il allait lui annoncer qu’il voulait tout arrêter. Autant que lorsqu’il avait appris qu’il était parti pour la Croatie. Il se sentait mal et il avait tout fait pour ne jamais connaitre un tel sentiment à nouveau. C’était dans cet état qu’il avait passé l’été il y a trois ans et il avait mis du temps à aller mieux. Puis Grace était arrivée et tout avait été plus facile après. La jeune femme avait été une véritable bouffée d’air frais et il avait cessé de se sentir mal. Il avait rangé Connor dans un coin très reculé de son esprit et il avait très bien vécu comme ça pendant ces trois ans. Grace et lui ne s’étaient pas quittés et il lui avait finalement demandé de l’épouser. Puis il avait continué ses études de droit et sa petite guerre silencieuse avec son père avant de finalement réussir à lui « tenir tête », en quelque sorte, en choisissant d’arrêter de suivre le chemin qu’il avait tracé pour lui. Et ironiquement son courage l’avait mené droit à Connor. Comme s’il ne pouvait pas tout avoir en même temps. Il fallait forcément que quelque chose n’aille pas pour lui. Et ça n’allait pas du tout là, il avait envie de disparaitre ou de ne jamais avoir eu l’idée de changer d’orientation. Pourquoi avait-il fallu qu’il vienne s’inscrire aujourd’hui hein ? Il aurait pu choisir n’importe quel autre jour mais non il avait fallu qu’il choisisse pile celui où il serait là. Qu’est-ce qu’il pouvait se détester, détester son père, détester tout le monde en fait. Il en voulait à tout le monde pour quelque chose qu’IL avait fait. Pour le moment il en voulait surtout à Mark aussi parce que cet idiot avait eu la bonne idée d’interpeller Connor alors qu’il était en train de partir et que Mason était en train de se calmer. Il le frapperait à la première occasion. En fait non, il l’étranglerait. Il avait très envie de l’étrangler plus même que de partir d’ici. « Mark ! » Eh voilà, Connor l’avait entendu et avançait vers eux maintenant. Il avait l’air… détendu, content, c’était un peu étrange. Peut-être qu’il se forçait à faire tout ça mais peut-être aussi qu’il avait vraiment réussi à tourner la page lui et que Mason se montait la tête pour rien. Peut-être qu’il pouvait essayer de se détendre lui aussi. Essayant de redonner une contenance, Mason se racla la gorge et se laissa même aller à fixer Connor quelques secondes tandis qu’il arrivait vers eux. C’était une mauvaise idée, ça faisait remonter bien trop de choses à la surface et c’était douloureux. Dieu merci, il n’avait pas eu à lui serrer la main. Ça n’aurait pas été supportable. « Putain, ça fait vraiment longtemps ! T'es rentré quand ? » Heureusement la voix de Mark le sortit rapidement de là et il put se concentrer sur autre chose. Son cou et son envie d’y place ses mains par exemple. Mais ouais, ça faisait longtemps. Trois ans. Une éternité… Et pourtant il se souvenait de tout ce qui s’était passé entre eux comme si c’était hier. « Deux semaines à peine. » C’était tout récent… Mason se demandait encore pourquoi il était revenu. Surement un coup de sa mère. Les élections n’étaient plus que dans quelques mois à présent et il fallait bien qu’elle montre à quel point sa famille était unie. Son père l’avait briefé et lui avait demandé d’être présent auprès de lui dès qu’il le lui demanderait et de faire des efforts. « Et alors la Croatie ? J'imagine que t'as pu nager là-bas avec toutes les plages qu'ils ont ? » Mason fit tous les efforts du monde pour ne pas soupirer et ne pas paraitre désobligeant. Pourtant ce n’était pas l’envie qui lui manquait et il avait encore plus envie de frapper Mark aussi. Pourquoi il insistait à vouloir faire la conversation comme ça ? C’était quoi son problème au juste ? « Un peu oui. » Un peu… Mason savait à quel point nager était important pour Connor, ils s’étaient rapprochés grâce à la natation après tout… Ça avait une signification toute particulière pour eux. Alors sa réponse vague comme ça indiquait qu’il était tout aussi mal à l’aise que lui et qu’il avait tout autant envie d’en finir. « Et du coup tu seras ici l'année prochaine ? » Mason eut comme un sursaut. Il était juste venu accompagner son frère pour son inscription. Il allait repartir en Croatie dans quelques temps. Il ne pouvait pas… « Oui, on est venus s'inscrire avec mon frère. J'ai pris ... » Encore raté. Le finlandais était un bien mauvais parieur. Son cœur tambourinait de nouveau dans sa poitrine tandis que son regard croisait celui de Connor. Pas histoire. Tout sauf histoire… « Histoire. » Histoire. Evidemment, il aurait dû sans douter, il ne savait pas pourquoi il avait espéré entendre une autre réponse. Une scène lui revint alors en mémoire. C’était trois ans plus tôt avec Connor, toujours. Il lui confiait à quel point il détestait son père et combien il n’avait pas envie de faire droit. Son ami, à l’époque, l’avait encouragé à faire ce qu’il voulait faire à savoir histoire… Tout en lui confiant vouloir faire histoire également. Mark se tourna vers lui et il dut se forcer à reprendre une contenance. « C’est drôle ça, Mason aussi va commencer histoire à la rentrée ! » Ah ah ah oui très drôle, hilarant même. Mason hocha quand même la tête pas très assuré lançant un regard à Connor pour essayer de déceler une quelconque réaction. « Qui irait cru que son père le laisse arrêter le droit hein ? » ajouta-t-il comme pour enfoncer un peu plus le clou. Parler de son père devant Connor n’était surement pas la meilleure idée qui soit, ou parler de son père tout court. Le finlandais ne répondit rien, se contentant d’acquiescer d’un signe de tête. Il fallait arrêter ça au plus vite à présent il n’en pouvait plus de devoir faire comme si tout allait bien devant Harry et Mark, il n’en pouvait plus de se forcer à éviter de regarder Connor. Il devait partir. « En parlant de mon père, je dois y aller là, il m’attend. » dit-il en regardant sa montre. Ce n’était qu’un prétexte bien évidemment. Son père était toujours une bonne excuse. « Je préfère ne pas être en retard, désolé les gars, à la prochaine ! » Il fit un signe de tête à Harry et Mark et s’attarda un peu plus longuement sur Connor, le regardant fixement dans les yeux. « Content de t’avoir revu. » dit-il en tournant les talons sans laisser la chance à quiconque de lui répondre. Il était vraiment content de l’avoir revu, c’était ça le pire. Malgré les souvenirs que cela faisait remonter et le mal que cela pouvait lui faire, le voir lui avait manqué, Connor lui avait manqué. Quant à pouvoir lui parler, ça allait être une autre histoire… Ils avaient beaucoup de choses à régler et ce ne serait pas facile. Mais au moins il était là. Mason décida de zapper son inscription et de sortir par une autre entrée. Il n’avait plus franchement la tête à ça, ça pouvait bien attendre. Devinez qui, une fois sortit, apparu une nouvelle fois dans son champ de vision. Gagné ! Connor. Qui se dirigeait vers sa voiture. Sans savoir pourquoi, Mason se mit à courir dans sa direction. « Connor ! » cria-t-il dans l’espoir qu’il s’arrête. « Attends ! » répéta-t-il ensuite. Connor s’arrêta effectivement et Mason put arrêter de courir pour le rejoindre. Il ne se stoppa qu’une fois à sa hauteur. « Je ne mentais pas tu sais. » commença-t-il. Il garda ensuite le silence quelques secondes se demandant s’il avait vraiment le droit de dire ce qu’il allait dire. « Je suis vraiment content de te revoir. »

Mason avait essayé, vraiment essayé de rester et de faire comme si tout allait bien. De faire comme s’il n’avait pas été le pire des enfoirés trois ans plus tôt. Il le faisait depuis tout ce temps avec succès. Seulement là… Il n’y était pas arrivé. Pas avec Connor en face de lui, en chair et en os. Ce n’était pas à un souvenir qu’il devait faire face là, mais à une personne bien réelle. Connor, en l’occurrence, et un Connor surement toujours très remonté contre lui et avec raison. Il s’en voulait à lui-même alors… Mais c’était tellement plus facile quand il n’était pas là. Etre là avec lui, avec les autres, en public… Cela demandait trop d’efforts, c’était presque… éreintant. Oui c’est ça, éreintant et il n’avait pas la force de rester plus longtemps. Seulement, Mark ne semblait pas décidé à les laisser tranquille. Mark était un type gentil mais il était beaucoup trop sociable et enthousiaste. Sans compter qu’il n’avait pas vu Connor depuis trois ans non plus donc il était d’autant plus enthousiaste. Mason avait envie de le faire taire par tous les moyens et il n’avait aucune difficulté à imaginer que c’était également le cas de Connor. Ce n’était pas tant qu’il n’était pas content de le revoir. Il avait juste imagine des retrouvailles différentes. Pas en plein milieu d’un hall avec tout ce monde autour d’eux. Là où le finlandais pourrait prendre le temps de s’expliquer et d’essayer de s’excuser. C’était impossible ici. Et puis trop soudain aussi, évidemment il ne s’attendait pas à ce que Connor l’appelle pour qu’ils prévoient des retrouvailles mais il aurait préféré d’autres circonstances quand même. Surtout qu’il venait de découvrir qu’ils allaient se retrouver ensemble à la prochaine rentrée, en histoire. Mason en voulait encore plus à son père. C’était lui qui l’avait forcé à faire droit et lui encore qui ne s’était pas opposé à ce qu’il abandonne en plein milieu. Pourquoi avait-il fallu qu’il lui donne ce qu’il voulait alors qu’il ne l’avait jamais fait de toute sa vie ? C’était assez ironique à constater quand même, ce qu’il aimait lui faisait du mal. Il en était même malade, là. Ça aurait pu s’arrêter là, Connor et lui auraient paniqué intérieurement en comprenant qu’ils allaient être ensemble à la rentrée mais non, il avait fallu que Mark en rajoute une couche en parlant de son père. Foutu Carl Ramsey. « Oui, étonnant ! » fit Connor en le regardant avec insistance. Mason n’eut pas le courage de soutenir son regard et il ne put que baisser la tête. Il lui en voulait tellement, plus qu’il ne le pensait en fait. Et il sentait sa colère aussi. Tout ramenait au fait qu’il l’ait rejeté, qu’il n’ait pas été capable de faire face à son père. Il n’avait pas été capable de lui avouer qu’il était avec mec. Carl l’aurait tué. Littéralement, il n’aurait pas accepté ça et aurait fait de sa vie un enfer. Du coup Mason avait choisi d’être lâche et il devait aujourd’hui vivre avec ça. Il n’arrivait plus à faire face à Connor là, le fait qu’ils parlent de son père avait été la goutte de trop et il était assailli de souvenirs et de pensées désagréables. C’était la zizanie dans son esprit et il avait juste envie que tout cela s’arrête maintenant. Il salua donc tout le monde, s’excusa et prit enfin la fuite. Il décida de ne pas aller s’inscrire tout de suite. Il voulait… Il ne savait pas ce qu’il voulait en fait, il voulait juste partir d’ici. Le jeune homme sortit donc sans attendre. Seulement, la première personne qu’il vit après avoir posé le pied à l’extérieur fut Connor. Connor, comme par hasard. Poussé par un élan impulsif, il se mit à courir à sa poursuite, allant même jusqu’à crier son nom pour qu’il l’attende. Il ne savait pas pourquoi il était en train de faire, c’était la dernière chose qu’il pensait avoir envie de faire et pourtant, il se retrouva bien vite à quelques dizaines de centimètres de lui, tout essoufflé. Mason s’efforça de soutenir le regard perdu de Connor quelques secondes, en silence. Puis il lui répéta ce qu’il lui avait dit un peu plus tôt : il lui avait manqué, vraiment. Et quand bien même il n’avait pas le droit de lui dire ça, il n’avait pas pu s’en empêcher. L’instant qui suivi lui sembla durer une éternité. Il avait même retenu sa respiration, attendant que la colère de Connor se déverse sur lui. Il le méritait en tout cas, il méritait de se faire chasser comme un moins que rien et Connor avait entièrement le droit de lui tourner le dos et de simplement partir. Pourtant, il lui faisait toujours face. « Pourtant la dernière fois qu'on s'est vus tu devais être plutôt content de te débarrasser de moi. » Mason se remit à respirer normalement, il était plutôt soulagé. Il lui avait quand même fait un reproche mais comme il s’était attendu à bien pire, il ne se sentait pas si mal que ça. « C’est ce que tu penses ? » En  pensant bien, ce n’était pas tellement étonnant qu’il pense ça mais c’était entièrement faux. « C’est la décision la plus difficile que j’ai eu à prendre de ma vie. » Il baissa de nouveau la tête, pas certain de savoir s’il devait, pouvait, continuer ou non. Il savait ce qu’il voulait lui dire mais il n’était pas sûr que Connor veuille l’entendre. Pas sûr non plus que ce soit l’endroit idéal. « Je m’en veux toujours énormément, plus que ne peux te l’imaginer et… Je suis désolé. » Comme si ça pourrait suffire. Mason se sentait incroyablement stupide et avait une grande envie de faire marche arrière. Il aurait dû laisser tomber, ça n’allait mener à rien. « Alors, comment va ta fiancée ? » Alors ça… Le finlandais releva la tête vers lui, surpris d’entendre ce mot dans sa bouche. « Tu es au courant ? » Il se sentait mal… Sa décision de demander à Grace de l’épouser n’avait pas été facile à prendre et il avait énormément pensé à Connor, à ce qu’il aurait pensé de tout ça. Il s’était attendu à ce qu’il en veuille beaucoup. Mais bon, il savait déjà qu’il était lâche, son opinion de lui ne pouvait surement pas se dégrader encore plus. « Tu veux vraiment parler de ça ? » Il n’avait pas envie de mêler Grace à tout ça, il se sentait déjà assez mal vis-à-vis d’elle.

Sans savoir pourquoi, sans s’en empêcher ou se dire qu’il ne devait pas et plutôt choisir de faire demi-tour, Mason se mit à courir à la suite de Connor dès qu’il l’aperçut en sortant des bâtiments de l’université. S’il avait été choqué et pris au dépourvu en voyant son ancien… ami… là, à Columbia, alors qu’il ne s’y attendait pas du tout, là il se sentait plus enclin à lui parler. Bon, ils n’allaient sans doute pas connaitre de vraies bonnes retrouvailles mais au moins il allait pouvoir lui adresser la parole sans gêne, sans avoir peur de quoi que ce soit. Parce qu’avec Mark et Harry et tous les gens autour ça n’avait pas été évident pour le finlandais. Impossible même. Personne n’était au courant de ce qui s’était passé entre eux il y a trois ans et personne ne devait l’être. Jamais. Son père le tuerait et cela ruinerait sans doute sa carrière dans la politique. Disons que c’était un peu contraire à ses idées que son fils puisse avoir eu une aventure gay. Mason n’avait jamais vraiment réussi à tenir tête à son père, il avait toujours « préféré » la lâcheté. C’était précisément ça qui avait éloigné Connor et ça qu’il lui reprochait. Il ne lui avait donné aucune explication mais Connor n’était pas stupide, il n’avait sans doute eu aucun mal à le comprendre. Il était bien placé pour le savoir en plus. Soit. Mason avait réussi à faire se stopper Connor. C’était assez difficile de l’avoir en face de lui comme ça. Il avait fourni tout un tas d’efforts pour l’oublier ces trois dernières années. Il avait cru y être arrivé mais il s’était bien vite rendu compte que ce n’était qu’une illusion et qu’il suffisait d’un rien pour faire voler tout ça en éclat. Seulement ça il n’avait pas le droit de le lui dire. Pas après tout ça, parce que c’était lui qui avait pris la décision de tout arrêter. Il n’avait pas le droit de regretter alors que tout était de sa faute et il le savait très bien. Néanmoins, tout comme il n’avait pu s’empêcher de courir après Connor, il ne put s’empêcher de lui faire savoir qu’il était content de le revoir parce que c’était l’entière et unique vérité. Il ne voyait pas pourquoi il avait besoin de mentir alors que personne ne les écoutait, là. Bien évidement Connor ne le croyait pas. Il avait le droit. Mason essaya de se mettre à sa place un instant. Si Connor avait « rompu » avec lui comme il l’avait fait il en serait sans doute venu aux mêmes conclusions et aurait tout autant de mal à le croire. Le brun avoua donc que c’était la décision la plus difficile qu’il avait eu à prendre de sa vie. Il s’excusa ensuite même si cela ne servait sans doute à rien. Cela n’apaisait même pas sa culpabilité. Connor ne répondit rien à tout ça mais Mason voyait que cela le faisait quand même cogiter. Il ne savait pas trop ce que cela voulait dire et encore moins ce qu’il pensait mais au moins il ne l’envoyait pas bouler tout de suite. C’était un peu rassurant quelque part. Néanmoins sa période de répit fut courte puisque Connor lui parla de Grace. Sa fiancée… Il ne savait pas qu’il était au courant et il ne voulait pas qu’il le soit en fait même si c’était un peu sans espoir. « Ton père t'as jamais dit que les informations pouvaient circuler très vite dans le milieu ? » Effectivement, c’était tout à coup plus logique pour lui. C’était stupide de sa part d’avoir pu penser qu’il pourrait lui cacher éternellement. Surtout avec la date du mariage approchant à grands pas. Mason lui demanda quand même s’il tenait vraiment à parler de ça. Ce n’était pas un sujet avec lequel il était à l’aise et encore moins quand il devait en parler avec Connor. Surtout qu’il ne voulait pas encore plus mêler Grace à tout ça, elle ne méritait pas ça. « De quoi veux-tu qu'on parle alors ? » Mason haussa les épaules, voulant se donner un air nonchalant alors qu’il était très nerveux. Pourtant Connor semblait détendu lui. Semblait. « Je ne sais pas. D’autre chose. » Il voulait savoir tout un tas de choses sur Connor et sur ce qu’il avait fait pendant trois ans. Où il était allé, comment il allait, ce que tout cela lui avait apporté, s’il était heureux. S’il avait réussi à tourner la page ou non. Quelque chose lui disait que non vu sa réaction mais comme ils n’avaient jamais rien réglé c’était peut-être normal. C’était sans doute ça qu’ils devaient faire là. Sans aucun doute en fait. Ils devaient s’expliquer pour de bon et mettre les choses à plat. Mason en tout cas. Mais là, alors qu’il savait que c’était le moment et que ses excuses ne suffisaient, il ne se sentait plus du tout prêt à le faire. Mais il ne pouvait pas fuir à nouveau alors que c’était lui qui l’avait retenu. « On devrait… » commença-t-il hésitant. Il se tut et toussota nerveusement. Non, il n’allait pas y arriver. Allez Mason, allez. « Comment c’était en Croatie ? » Et voilà, il s’était dégonflé. Il se gifla mentalement avant d’inspirer longuement, faisant signe à Connor d’attendre pour le laisser continuer. « J’ai paniqué, d’accord ? J’ai eu peur. J’ai toujours aussi peur là maintenant et je n’arrive pas à m’expliquer tout ça, je n’arrive toujours pas à l’accepter. Et je sais que ça n’excuse rien du tout mais c’est tout ce que je peux te dire. Que j’ai eu peur et que j’ai préféré fuir plutôt que d’affronter tout ça. C’était plus facile. » Il soupira et se passa une main sur le visage. Il tentait de ne pas lâcher Connor du regard mais ce n’était pas vraiment facile. « J’ai ne jamais réussi à faire comme si rien ne s’était passé tu sais. Et ça me bouffe vraiment mais je n’arrive pas à m’y faire. » Mason pinça alors les lèvres. Il ne savait pas s’il allait arriver à en dire plus maintenant. Il avait un peu déballé tout ça sans s’en rendre compte non plus – mais il valait mieux sinon il n’aurait jamais rien dit. Il attendait et avait peur de la réaction de Connor maintenant.

Mason y était maintenant. Il allait enfin lui dire ce qu’il attendait sans doute d’entendre depuis trois ans… Ou il aurait dû le faire en tout cas. Il avait longtemps imaginé ce moment, tenté de voir ce qu’il lui dirait une fois qu’il aurait Connor en face de lui. Mais le dire à voix hautes, dans la vraie situation c’était tout autre chose que de le dire dans sa tête. Dans sa tête c’était bien plus facile. Les mots venaient tous seuls et il ne craignait pas la réaction du croate. Mais là, là… Le finlandais n’arrivait plus à émettre le moindre son. Il était juste certain de ne plus vouloir parler de Grace, elle n’avait rien à faire dans toute cette histoire elle était juste une sorte de dommage collatéral malheureusement. Il ne lui restait donc plus qu’à s’expliquer. C’était évident, ça tombait sous le sens et il ne pouvait le nier. Il commença donc à parler mais, une fois n’est pas coutume, hésita et finit par se taire. Il reprit ensuite rapidement la parole, lui demandant comment ça s’était passé en Croatie. Ça aussi il se l’était toujours demandé. A chaque instant il s’était demandé où il était, avec qui, ce qu’il faisait… S’il était heureux aussi. Parce que c’était le plus important pour lui. Il savait qu’il lui avait fait du mal et il espérait que sa « blessure » avait réussi à guérir avec le temps. Qu’il n’était pas resté comme lui, avec la plaie toujours ouverte. Il s’en rendait d’autant plus compte maintenant qu’il l’avait en face de lui mais il n’avait fait que soigner la sienne surface. Soit. Il fit signe à Connor d’attendre avant de parler parce qu’en fait il n’avait pas fini. Il y avait un moment où il fallait arrêter de tourner autour du pot et de toujours repousser. La situation n’avancerait pas sinon et il le fallait. Il déballa donc ce qu’il avait sur le cœur, avec plus ou moins de forme et plus ou moins de clarté. « Je ... Okay. Je ... J'imagine que c'est de ma faute si ce moment vient avec trois de retard. » répondit Connor après ce qu’il lui avait semblé une éternité. Il avait eu le temps de s’attendre à toutes les réactions : qu’il se mette en colère, qu’il se mette à lui rire au nez, qu’il l’ignore simplement… Mais pas à ça en fait. Ce n’était en rien de sa faute, rien n’était de sa faute et c’était lui le seul fautif. « Je sais pas où on allait à l'époque de toute façon ... Mais peu importe, ça fait trois ans de toute façon. Même si ... Même si j'avoue que j'ai mis un certain temps à passer au-dessus de tout ça, c'est ... Ouais ça fait trois ans. » Trois ans et pourtant… Pourtant, ça faisait toujours aussi mal. Pourquoi n’arrivait-il pas à faire comme si de rien n’était ? Il avait Grace, il était heureux avec elle, et il était supposé l’être pour le restant de ses jours. C’était assuré. Mais non, ça ne lui convenait pas. Mason ne répondit rien. Là encore, il ne savait pas tellement quoi lui dire. A part s’accabler encore plus lui-même et se répéter, il ne voyait pas bien ce qu’il pouvait lui dire. Heureusement, Connor l’empêcha de trop se poser de questions sur ce sujet. « Tu voulais me dire autre chose ou ... ? Parce que mon frère m'attend du coup. » Le brun jeta un œil à la voiture de Connor un peu plus loin. Il pinça les lèvres, quelque chose venait de lui venir à l’esprit et il ne savait pas s’il pouvait lui dire… Néanmoins, il ouvrit tout de même la bouche : « Après trois ans tu penses qu’on pourrait… essayer d’être amis ? » Il ne savait pas quelle idée il avait eu ni si elle était si bonne que ça mais, s’ils faisaient des efforts ils arriveraient peut-être à rendre les choses plus normales. Après tout ça ne coutait rien d’essayer… Puis il ne voulait pas l’avoir en dehors de sa vie plus longtemps. Ils avaient été d’excellents amis avant tout ça et son amitié avait été – était – précieuse. C’était une manière un peu étrange de se racheter sans doute. « Je suis sur qu’on pourrait y arriver. En tout cas, je pense qu’on peut… » Il le regarda alors très sérieusement, sans ciller et sans dévier le regard.