Sortir. S’aérer. Penser à tout sauf aux récents évènements qui avaient bousculé sa vie ; tels étaient les objectifs que Lula et ses enfants s’étaient fixés entre deux séances chez le psychologue pour les deux femmes de la maison. En effet, elles avaient été témoins de choses horribles. Toyiah plus que Lulani. La mère de famille ne cessa de s’inquiéter pour sa fille et de ce fait, avait un peu trop tendance à la surprotéger ; elle savait que cela ne durerait qu’un moment et que, très vite, Toyiah réclamerait un peu de distance, c’était en partie ce qui expliquait sa présence ici. La philippine se tenait là, devant la vitrine d’un magasin pour enfants qu’elle détaillait du regard avec la tête légèrement penchée sur le côté, un sourire aux lèvres. Lorsqu’Olivia lui avait demandé de l’accompagner pour une séance shopping, Lula n’avait pas hésité à répondre par l’affirmatif. Rien de tel que faire les boutiques avec une amie pour se changer les idées, en particulier ce type de magasins qui la rendait à chaque fois complètement gaga. Son regard se posa alors sur un joli petit ensemble pour fille qu’elle trouvait adorable, un cadeau idéal pour cette naissance à venir. L’autre point positif à faire des emplettes avec Olivia, c’était que Lula pouvait garder un œil sur ce qu’elle achetait et veiller à ne pas prendre la même chose. Récemment, elle avait eu l’idée de lui faire un cadeau personnalisé ; un album photo entièrement personnalisé de sa main grâce à cette méthode que l’on appelle scrapbooking. Face à cette vitrine toute mignonne, la jeune femme se surprenait à rêvasser et à envisager la possibilité d’avoir un troisième enfant, mais cette idée fut rapidement balayée par le souvenir de ce qu’était devenue sa vie sentimentale. Désertique. Aussi méfiante qu’angoissée à l’idée que l’heureux élu ne soit pas accepté par ses enfants, Lula n’avait toujours aucun homme dans sa vie et – même si elle refusait de se l’avouer – cela lui manquait par moment : la philippine était comme tout le monde après tout, elle aussi avait besoin de petites attentions ou de quelques petits mots tendres.

En observant son reflet dans la vitrine, Lulani distingua la silhouette familière d’Olivia venir à sa rencontre et se tourna aussitôt vers elle avec un grand sourire peint sur le visage. Bien vite, elle posa également un baiser sur sa joue et détailla Olivia du regard sans se dépeindre de son sourire. Elle faisait vraiment plaisir à voir. Lula avait toujours trouvé que les femmes enceintes dégageaient de la bonne humeur communicative qui lui fit rapidement oublié ses soucis. Les deux jeunes femmes s’étaient connues par le plus grand des hasards et depuis, elles avaient gardé de très bon contact. Lula ressentait même le besoin de la protéger. C’était étrange comme son petit côté enfantin et dynamique pouvait lui rappeler Kina, un trait de caractère qui l’avait toujours fasciné. « Salut, je suis vraiment contente que l’on passe cette après-midi ensemble… Les boutiques pour enfant, je pourrais y passer des heures si je ne me fatiguais pas si vite… Tu vas bien ? ». En guise de réponse, Lulani se contenta de lui répondre par un simple signe de tête accentué par ce sourire qui ne semblait plus vouloir quitter ses lèvres. « Je ne te le fais pas dire, je suis toute excitée à l’idée de passer la porte. » répondit-elle, le regard pétillant de joie. « En tout cas, tu es magnifique et tu as l’air de te porter comme un charme. » reprit-elle. En effet, Olivia était parfois bien trop pâlotte, mais elle savait que c’était aussi dû à cette satanée maladie. Aujourd'hui, Olivia avait de belles couleurs sur ses joues et sa robe ne faisait que ressortir son teint frais. « Quelles sont les dernières nouvelles du bébé ? Et le futur papa, comment va-t-il ? ». D’un mouvement de tête, Lula l’invita à commencer leur petite virée et lui tint la porte pour s’engouffrer dans le tout premier magasin, comme elles l’avaient convenu. Il fallait dire que les deux jeunes femmes avaient fait tout un programme pour leur journée shopping, une organisation quasi-ministérielle pour l’occasion ! A peine eurent-elles mis un pied à l’intérieur que Lula se munie d’un panier à provisions et contempla les tous premiers articles en ne pouvant s’empêcher de s'exclamer un « Kawaii ! ».

« C’est très gentil à toi, effectivement je vais très bien, j’appréhendais un peu le fait d’avoir un si gros ventre et tout ce qui allait avec, enfin je pense que j’ai de la chance… Ca va vraiment bien pour moi. ». A sa remarque, Lula se mit à rire légèrement, amusée par le comportement d’Olivia qui n’était pas sans lui rappeler le sien lorsqu’elle était tombée enceinte pour la première fois. D’ailleurs, elle avait passé des heures à discuter avec elle du déroulement de sa grossesse à Palapag, du moment où elle l’avait appris au futur papa jusqu’au moment où elle avait tenu la petite Toyiah dans ses bras. C’était au tour d’Olivia maintenant de connaître la joie de mettre un petit être au monde et de le voir pour la toute première fois. « Je suis soulagée de l’apprendre. » dit-elle en ponctuant sa phrase d’un petit signe de tête ravi. « Je suis vraiment très contente d’être enceinte… Et puis depuis que le bébé se met à bouger, c’est encore mieux. ». Rien qu’à cette pensée, le regard de Lulani se mit à briller. Elle se souvenait encore parfaitement de la sensation étrange qu’avaient provoqué Toyiah et Mason lorsqu’ils remuaient dans son ventre, c’était tout simplement magique, en particulier lorsqu’ils se mettaient à ‘communiquer’ avec l’extérieur. En effet, il suffisait que Matthew ou Lula ne posent la main sur son ventre bien rebondi pour que le futur bébé donne un petit coup pour manifester sa présence. « Quand tu poses ta main sur ton ventre et qu’il te réponds en te donnant un petit coup, c’est juste… parfait. » dit-elle d’une voix rêveuse.

« Le bébé lui va bien, les médecins sont vraiment confiants, pour Timothy c’est autre chose, il veut pas me le dire, mais je pense qu’il commence à vraiment stresser, maintenant que l’on a préparé la chambre du bébé et que l’accouchement se rapproche… Et toi, dis-moi comment vont les enfants ? Ils sont où aujourd’hui ? ». Ainsi donc, maman & futur bébé allaient bien ; que de bonnes nouvelles ! C’est toujours une crainte lorsque l’un des parents est malade, mais Lula décida de ne pas soulever ce point. « Réaction tout à fait normale d’un futur papa, en plus pour un premier enfant c’est parfaitement légitime. Mon ex-mari l’était également aussi, enfin à l’époque nous n’étions pas mariés et encore adolescents. » dit-elle en jetant un petit coup d’œil à Olivia, lui adressant un sourire en coin en lui faisant ainsi comprendre qu’il ne fallait pas qu’elle s’inquiète de la réaction de Timothy. Il semblait être un jeune homme charmant et attentionné envers la jeune femme. Même si Lulani se réveillait tous les matins avec le son de sa voix, elle n’avait encore jamais rencontré l’animateur radio en personne, cependant Olivia lui en avait parlé avec le plus grand bien et connaissait le tempérament de la jeune femme, elle ne doutait pas un seul instant de la véracité de ses propos. Olivia questionna ensuite Lula sur ses enfants. Elle aurait voulu lui dire que Toyiah traversait une mauvaise passe en ce moment, mais cela incluait forcément de révéler les déboires familiaux de son ex-mari et le travail de ce dernier à la CIA. La philippine s’était jurée de ne mettre personne en danger et préférait donc passer sous silence cette partie. « Ils vont bien. On a été pas mal secoués à cause de l’emménagement provisoire chez mon ex-mari dû à ce fichu problème de nuisibles, ça les a un peu… bouleversés de nous voir revivre sous le même toit et je les comprends, mais tout est revenu à la normale. Enfin, ils sont chez Mia, sûrement en train de s’amuser avec son petit frère, Daniel. ». Elle avait choisi l’option de la vérité déguisée, celle qui ne lui donnait pas l’impression d’être une horrible menteuse.

Voilà qu’à présent, les deux jeunes femmes se trouvaient dans l’immense magasin spécialisé dans la vente de produits pour enfants et leurs yeux se posèrent sur tout ce qu’il y avait à portée. C’était le genre d’endroit où tout est mignon et où tout donne l’envie irrépressible de dégainer la carte bancaire. « Il y a tellement de choses à acheter… Je ne sais plus par quoi commencer, on avait prévu quoi ? ». Lula quitta un énorme ours en peluche des yeux pour s’intéresser de nouveau à Olivia. « Eh bien, on avait prévu de commencer par l’étage supérieur, c’est la puériculture. Ça t’évitera les déplacements inutiles, tu te fatigueras moins vite et je pense que c’est plus raisonnable de terminer ensuite par le rez-de-chaussée pour les vêtements. » récita-t-elle, comme si Lula avait appris le programme sur le bout des doigts. « J’espère que tu es raisonnable, parce que si tu comptais sur moi pour stopper une fièvre acheteuse, je crois que s’est couru d’avance ! » s’exclama-t-elle avant de se mettre à rire légèrement. Ce qu’elle se sentait bien tout d’un coup. « Bénis soient les escalators ! » dit-elle avant de poser pied sur l'escalier roulant pour atteindre l'étage.