Ma sœur et moi, nous avions promis à nos parents que même si nous partions faire nos études en Amérique, nous reviendrions souvent au Luxembourg pour passer quelques week-ends avec eux. Mon père avait encore quelques cours à me donner, des cours qu’il donnait à Alexandr quand celui-ci était encore vivant et que c’était lui, qui était supposé gouverner le Luxembourg lorsque mon père ne serait plus de ce monde. Je détestais tous ses cours : des cours de politique, de stratégie militaire, d’économie. C’est dans ses moments-là, que je me disais qu’Alexandr me manquait, et que j’avais été bête de lui envier sa situation, car maintenant que j’étais à sa place, j’avais juste envie de partir en courant et de fuir toutes les responsabilités qui m’attendaient une fois que je serais à la tête du pays. Je n’avais rien contre l’idée de revenir au Luxembourg, mais je savais à l’avance que j’allais croiser ma mère, et que ma mère allait me bassiner tout le week-end avec Apollinaria, et que le seul mot qu’elle aurait à la bouche serait : mariage. Et le mot mariage, plus Apollinaria, ça ne me plaisait pas tant que ça en fait. Pire, ça me foutait des angoisses pas possibles. Le samedi se déroulait comme presque tous les samedis que je passais au château : je me levais tard, je déjeunais, je passais le reste de la matinée avec mon père et nous allions faire une partie de golf derrière le château en début d’après-midi, profitant du beau temps qui n’allait pas être présent dans les mois à venir. Je n’avais pas encore croisé ma sœur, mais le château était grand et je ne savais pas si elle arrivait aujourd’hui ou si elle était là depuis hier. Même à New-York la jeune femme et moi avions du mal à nous croiser. Non seulement nos études nous prenaient beaucoup de temps, mais en plus, New-York, c’est grand. Très grand même, assez pour avoir du mal à croiser un ami qui vit relativement loin de chez vous. Enfin, nous essayons de nous parler le plus possible, mais je dois avouer que je la sentais un peu bizarre depuis quelques semaines, et j’étais certains que c’était dû à ma mère qui avait certainement parlée de cet histoire de mariage avec Apollinaria. Je pouvais comprendre que ça lui fasse bizarre, et ça me faisait bizarre aussi de m’imaginer marié à l’ex-femme de notre frère décédé, mais c’était nos parents qui s’étaient mis cette idée en tête, et Apo et moi étions bien décidés à les faire changer d’avis et à se battre pour éviter ce désastre.

Après ma partie de golf avec mon père, je retournais au château et je croisais ma mère, qui commença à me cuisiner pour savoir où en était ma relation avec Apo. Je me fis un malin plaisir de lui annoncer que ma relation avec elle n’avait pas bougée d’un pouce, et qu’un mariage était de loin omis. Elle grogna un peu dans sa barbe que nous ne faisions aucun effort, et je remerciais le ciel d’avoir eu l’intelligence de ne pas lui dire qu’en réalité, la princesse et moi avions décidé d’enterrer la hache de guerre et de devenir amis. Je me changeais dans ma chambre pour me mettre plus à l’aise, décidant de ne porter qu’un simple t-shirt et un jean, puis je traversais le couloir du deuxième étage pour toquer à la porte de la chambre de ma sœur, malgré que je ne sache pas si elle était déjà là ou pas, attendant une réponse pour lui proposer d’aller faire un tour pour discuter.

Il n'y a pas de meilleur sentiment que celui d'être chez-soi. C'était ici que j'étais né, ici que moi et mes frères avions grandi, ici que je me sentais bien et en sécurité. J'avais passé une grande partie de mon été à sillonner le monde. New York et le Luxembourg bien sûr, mais aussi et surtout les plages paradisiaques de Cancun au Mexique, les rues de San Francisco et le quartier Latin de Paris. Je n'avais pas beaucoup vu ma famille durant ces semaines et à présent que les cours avait repris à Columbia ça n'allait pas aller en s'arrangeant. Mais j'avais la chance d'avoir à ma disposition tous les moyens de faire des aller-retours entre l'Europe et l'Amérique du Nord et ce de façon régulière. Ce weekend j'étais donc rentrée, surtout parce que ça faisait plaisir à maman de m'avoir à la maison en même temps que Nathan. En parlant de lui justement, je ne l'avais pas vu depuis ce qui me semblait être une éternité. Nous avions réussit à communiquer via textos et un ou deux appels sur skype, mais c'était tout. En fait je dois bien avouer que ces derniers temps j'avais autre chose en tête que de me soucier de mon frère, surtout que j'avais mes raisons de lui en vouloir un peu. Toute cette histoire entre lui et Apollinaria, et mes parents qui voulaient à tout prix les marier, je trouvais ça hyper glauque. En fait, ça me révoltait. Etrangement j'en voulais surtout à Nathan, sûrement parce que je savais qu'il avait longtemps été jaloux d'Alexandr, aussi bien parce qu'il était celui destiné au trône que parce qu'il s'était marié avec Apo. A présent j'avais l'impression que Nathan récupérait peu à peu tout ce qui avait autrefois appartenu à Alexandr et je ne pouvais m'empêcher d'avoir la désagréable impression que tout le monde semblait vouloir oublier mon frère ainé, décédé bien trop tôt, arraché à la vie… Je ne comprenais pas que mes parents puissent faire ça, je comprenais encore moins pourquoi Nathan ne faisait rien pour luter contre, pourquoi il se laissait faire… Alors oui, j'éprouvais un peu de colère envers mon frère mais en même temps je savais que ce weekend je n'aurai pas le choix et que lui parler et le voir ne serait pas en option. Aussi, lorsque je le vis se tenir devant la porte de ma chambre, à attendre que j'en sorte alors que j'étais déjà débout depuis un sacré moment, toute seule à trainer dans les petits recoins de notre vaste demeure, je pris une profonde inspiration. Il ne savait sans doute pas que j'étais fâchée, d'ailleurs lui et moi n'avions pas encore eu l'occasion de parler de tout ça, j'avais de toute manière était mise à l'écart de toutes discussions à ce sujet. Je décidais d'être gentille et de ne pas trop le brusquer à peine nos retrouvailles entamées. "Si c'est moi que tu cherches… Je suis par ici." Mon frère se tourna. On se fixait tous les deux quelques instants. Je me demandais qui allé finir par bouger le premier. Ma phrase était sortie un peu plus dure que je ne l'aurai voulu, je décidais donc de le rassurer en faisant le premier pas. Je m'approchais de lui, sans paraitre trop enjouée tout de même et je le serrais dans mes bras. "Comment ça va?". Je ne voulais pas le dire mais pourtant je le devais. Nathan était mon frère et je ne pouvais pas lui faire du mal, je ne voulais pas. "Tu m'as manqué" - lâchais-je dans un souffle. Je resserrais un peu plus fortement mon étreinte autour de lui avant de m'écarter à nouveau, instaurant une fois de plus une certaine distance entre nous.

J’étais convaincu qu’une discussion était nécessaire avec ma petite sœur. Je sentais bien que les choses étaient légèrement tendues entre nous. Pourtant, ça n’avait pas toujours été le cas, au contraire même. Lorsque Alexandr était encore vivant, nous étions tous les trois comme les doigts de la main : tout simplement inséparables. C’est vrai qu’étant des garçons, Alexandr et moi avions toujours été un peu plus proches, mais nous portions un regard très tendre et protecteur envers Nora. C’était la petite dernière de la famille, la petite princesse. Je crois qu’en fait, la jeune femme pensait que ça m’amusait, tout ça. C’est vrai que je ne me plaignais pas du fait que j’allais devenir le numéro un du pays d’ici quelques années. J’avais toujours envié Alexandr, parce que mes parents lui portait toujours un intérêt plus important et lui donnaient toujours tellement plus de responsabilités. Mais ça n’était pas pour ça que je m’étais réjouis de la mort de mon frère, au contraire, bien que jamais je n’avais montré ma peine, à quiconque. Je n’avais jamais pleuré en présence de mes parents, ni même en la présence de ma sœur. Je détestais montrer mes faiblesses, et Alexandr faisait aujourd’hui partie de mes faiblesses. Quant-à cette histoire avec Apollinaria, je n’étais pas plus ravi : elle et moi nous détestions depuis des années. Enfin, détester était un bien grand mot : adolescent, j’avais le béguin pour elle, et j’avais toujours été jaloux qu’elle ait choisie Alexandr au lieu de moi. Alors je lui avais fait payer en l’embêtant, et j’avais transformé cet « amour » en « haine », même si ces deux mots étaient bien trop extrêmes. Je ne voulais pas que ma petite sœur pense que je jubilais de la mort de mon frère, en profitant pour ramasser tous les avantages qu’il avait pu avoir durant sa vie.

Debout devant la porte de sa chambre, je toquais à la porte, vérifiant rapidement l’heure à ma montre : si elle était déjà là, elle devait sûrement être dans sa chambre, à moins qu’elle ne soit partie voir des amis d’enfances restés au Luxembourg ? En tout cas, personne ne répondait, et elle n’avait pas l’air d’être dans sa chambre. Je soupirais légèrement, et je m’apprêtais à faire demi-tour quand j’entendis une voir autrefois très familière, . "Si c'est moi que tu cherches… Je suis par ici." Un léger sourire se dessina sur mon visage et je me tournais, me trouvant alors nez à nez avec ma petite sœur. C’est là que je me rendis compte que je ne l’avais pas vu depuis vraiment longtemps. Je m’approchais alors d’elle, la prenant dans mes bras en la serrant contre moi quelques instants, "Comment ça va?" Je caressais rapidement son dos avant de me reculer juste de quelques centimètres pour mieux la regarder, « Ça va mh…plutôt bien, enfin…on va dire que ça va et toi ? », demandais-je à la jeune femme alors qu’elle se recula légèrement pour mettre plus de distance entre nous, ce qui m’étonna un peu. "Tu m'as manqué" Je souris et je pris sa main, déposant un baiser sur le dos de celle-ci, « Toi aussi tu m’as manquée soeurette… » Je commençais à marcher, l’entrainant avec moi, « On va faire un tour dans les jardins ? J’voudrais te parler d’un truc… » Officiellement, je ne lui avais jamais annoncé mon supposé futur mariage avec Apo, et je ne savais pas si elle était au courant, mais je voulais lui en parler moi-même.

Nathan m'interrogea à son tour pour savoir si j'allais bien. Si j'avais été honnête j'aurai sans doute dit que non, mais je n'avais pas envie d'en parler. J'étais simplement un peu de mauvaise humeur, pas de quoi fouetter un chat. Mais je savais que si j'osais dire que ça n'allait pas, mon frère essayerait de me sortir les verres du nez et la conversation s'éterniserait jusqu'à la fin des temps. Aussi, je répondais simplement: "Ca va.". Il attrapa ensuite ma main et en embrassa le dos. A l'intérieur de moi, ce geste me fit chaud au coeur, mais en extérieur je préférais ne pas le lui montrer, je m'empressais de tirer mon bras pour qu'il ne garde pas ma main dans la sienne trop longtemps. Je ne voulais pas céder, cette fois j'avais envie qu'il comprenne que je lui en voulais et surtout je voulais qu'il sache pourquoi. Je voulais qu'il s'explique, ou en tous cas qu'il m'explique ce que lui ressentait parce que moi, je bouillonnais littéralement de l'intérieur. Nathan me proposa ensuite d'aller faire un tour dans les jardins, il disait vouloir me parler d'un truc. J'essayais de garder un visage vide d'émotion. Etait-il assez bête pour croire que je n'étais pas déjà au courant de tout? Quoi qu'il en soit j'acquiesçais de la tête et passer derrière lui en disant: "Je vais prendre une veste et on y va." L'instant d'après, je pénétrais dans ma chambre. Une vaste pièce dans laquelle je me sentais si bien. Il n'y avait de meilleur endroit sur Terre pour moi que ce petit cocon… Je me dirigeais vers mon dressing, une petite pièce accolée à ma chambre, et attrapais un cintre sur lequel était posée ma veste en jean. J'attrapais aussi un foulard, comme j'étais du genre frileuse, mieux valait prévenir que guérir. Je ressortais en prenant garde de bien refermer la porte derrière moi pour que personne n'ai la mauvaise idée de venir y faire un tour pendant mon absence. Je détestais que ma mère, mon père ou n'importe qui d'autre vienne dans MA chambre alors que je n'y étais pas. J'avais l'impression qu'il s'agissait d'une intrusion dans ma vie privée et rien au monde ne pouvait me frustrer d'avantage! "C'est bon, on peut y aller" - lançais-je à Nathan. Je mis un bras dans l'une des manches de ma veste lorsque plusieurs petits sachets tombèrent de ma poche.Des préservatifs… Et merde! Ca m'apprendra à laisser mes affaires trainer chez mes potes, on a beau être à l'université je peux vous dire que niveau humour certains n'ont pas évolué et le coup des paquets de préservatifs mis dans les poches de quelqu'un pour l'embarrasser plus tard, ça fonctionne plutôt pas mal. La preuve. Je m'empressais donc de les ramasser et d'ajouter à l'intention de mon frère "Ce n'est pas ce que tu crois! Enfin si, ces petites choses sont bien ce que tu crois mais elles ne me servent pas à faire ce que tu crois… Hum… Moi et mes amis on fait des batailles d'eau, et la dernière fois on était à court de ballons alors on a utilisé ce qu'on avait sous la main…" Je sentais mes joues s'empourprer. Nathan et moi on ne parlait pas vraiment de ce genre de choses, mais j'imaginais qu'il savait que j'étais encore vierge tout comme le restant de mes proches. En tous cas il savait que je n'avais pas eu beaucoup de petits amis, jamais rien de sérieux et il savait que j'étais le genre de fille à réfléchir beaucoup avant de prendre des grandes décisions… Par déduction, mon frère devait forcément savoir que je ne l'avais pas encore fait. Pour ne pas qu'il ait le temps de poser de question je finis de mettre ma veste et remis les préservatifs dans mes poches avant de demander: "Bon, on y va faire cette ballade oui ou non?" . Mon Dieu, je ne voulais vraiment pas parler de sexe avec mon frère. J'avançais déjà à grand pas vers la sortie de la maison. J'avais besoin d'air. On traversa plusieurs couloirs et un escalier pour rejoindre le hall d'entrée. Une fois dehors, je m'arrêtais pour respirer l'air frais. Puis, alors que je reprenais ma marche pour rejoindre un petit chemin de terre, je me tournais à nouveau vers mon frère. "Alors, de quoi veux-tu me parler?"Je feignais l'ignorance, juste pour voir de quelle manière mon cher frangin allait m'annoncer la nouvelle.

"Ca va." Pas la peine de vous dire que sa réponse ne me satisfaisait pas tellement. Enfin, elle disait qu’elle allait bien, mais je voyais très bien que ça n’avait pas trop l’air d’être le cas. Et c’était en partie pour ça que j’avais voulu la voir aujourd’hui, en espérant qu’elle m’en parlerait. D’habitude, et surtout depuis la mort de notre frère, Nora et moi étions vraiment proches, et depuis plusieurs semaines, enfin, depuis le début des vacances d’été en fait, j’avais l‘impression qu’elle m’évitait. Je ne l’avais presque pas croisé au château, ou vraiment très rapidement. Nos petites séances de skype duraient beaucoup moins longtemps qu’avant, et je voyais très bien quand ma petite sœur avait un problème avec quelqu’un, et en l’occurrence, aujourd’hui, ce quelqu’un, ça semblait être moi. Pourtant, je n’avais rien fait de mal. Enfin, je ne pensais pas avoir fait quoi que ce soit de mal en tout cas. C’est vrai que je ne lui avais pas parlé de cette histoire de mariage avec Apollinaria, mais c’était tout simplement parce que ça n’avait aucune importance pour moi. "Je vais prendre une veste et on y va." J’hochais la tête doucement et je suivais mon regard sur ma petite sœur, qui entrait dans sa chambre pour attraper sa veste. Bizarrement, je me sentais nerveux. Nerveux, parce que j’avais peur d’entendre les reproches de Nora. Nerveux parce que je ne voulais pas me fâcher ou me disputer avec elle. "C'est bon, on peut y aller" Je souris et je fis un pas, avant d’entendre quelque chose tomber de sa veste qu’elle était en train d’enfiler. Je baissais mon regard à terre et…je crus mourir en voyant les préservatifs étalés sur le sol. Je ne connaissais rien de la vie sentimentale de ma sœur, et ça avait toujours été parfait ainsi. La jeune femme se baissa pour les ramasser, les mettant rapidement dans sa poche et je restais…figé sur place, comme si on m’avait montré quelque chose de spectaculaire. Et Nora eut le besoin de se justifier, ce qui rendit la situation encore plus…bizarre ? "Ce n'est pas ce que tu crois! Enfin si, ces petites choses sont bien ce que tu crois mais elles ne me servent pas à faire ce que tu crois… Hum… Moi et mes amis on fait des batailles d'eau, et la dernière fois on était à court de ballons alors on a utilisé ce qu'on avait sous la main…" Je passais une main dans ma nuque, et je me sentais presque autant rougir que ma sœur, rétorquant presque tout de suite, « Non mais…te justifie pas, t’es une grande fille maintenant tu fais ce que tu veux… », Lançais-je en me mordant la lèvre. J’avais presque envie de lui lancer quelque chose comme ‘’Mais je suis content de voir que tu te protèges en tout cas ! ‘’, mais les choses auraient été encore plus gênantes pour elle, même si je le pensais. "Bon, on y va faire cette ballade oui ou non?" J’hochais la tête silencieusement, et nous commencions à marcher jusque dehors. Les jardins du château étaient immenses, et même si il faisait un peu frais, cela faisait du bien de prendre l’air. Nous rejoignions un petit chemin en terre, et ma sœur brisa enfin le silence, en me posant la question fatidique : "Alors, de quoi veux-tu me parler?" Je me mordais la lèvre et je détournais mon regard vers le paysage qui s’offrait à nous, baissant parfois le regard vers le chemin que nous emprunterions en glissant mes deux mains dans mes poches de jeans. Je finis par inspirer et par commencer, « J’ai l’impression que…t’es distante avec moi depuis le début de l’été… » Je soupirais et j’haussais les épaules, « Maman t’a parlée de l’idée qu’elle s’est mise en tête ? Je dois absolument me marier… » Je ris un peu, toutes mes relations amoureuses avaient été désastreuses, alors me marier… « Et…les parents veulent absolument que j’épouse Apollinaria… » Je ris nerveusement, « C’est n’importe quoi hein ? Apo et moi on a décidés de se défendre et d’empêcher que ça arrive…j’ai pas envie d’être…le bouche trou qui remplacera Alexandr dans la vie d’Apo parce qu’elle n’aura pas eu le choix… » Après tout, Apo avait choisi Alex, même si j’avais toujours été jaloux de ça, puis j’avais eu pendant quelques années le béguin pour la brunette et supposée future femme.

Distante. Au moins Nathan n'était pas complètement aveugle, ça je n'en avais jamais douté d'ailleurs. Je n'avais pas vraiment essayé d'être subtile, je ne voulais pas cacher mes sentiments à mon frère même si jusque là je ne lui avais pas non plus tout dit. Je le regardais hausser les épaules et souffler. Il me demanda alors si notre chère mère m'avait parlé de l'histoire du mariage. A mon tour de souffler. J'avais une horrible envie de lever les yeux au ciel, mais ayant reçu une certaine éducation je savais aussi que faire cela était incroyablement mal poli, surtout face à un interlocuteur. Et puis je ne m'étais jamais montré sous ce visage face à Nathan. J'avais beau être énervée je n'étais pas non plus une sauvage. Quoi qu'il fasse il resterait mon frère… En m'annonçant qu'il devait absolument marier Apollinaria, il laissa un rire nerveux lui échapper. Je lui lançais un regard noir. "Ce n'est pas drôle Nathan! Et oui, figure toi que je suis déjà au courant. Heureusement que je n'attends pas qu'on me dise les choses en face parce que visiblement dans cette famille il y a un paquet de trucs qui semble ne jamais parvenir à mes oreilles. Mais figures toi que moi aussi j'ai un avis sur la question et que votre idée à tous les quatre ne me plait pas du tout!" C'était comme si je ne l'avais même pas entendu me dire que lui et Apo n'étaient pas d'accord, comme si je les voulais absolument responsables. Sa dernière remarque quant au fait d'être le bouche trou me laissa perplexe. Je ne pouvais pas me retenir de lui balancer: "Ah oui? Tu ne veux pas être son bouche-trou? Pourtant c'est pas toi qui rêvait de prendre sa place d'enfant héritier? Tu l'as maintenant, c'est toi qui succèdera à papa quand lui même disparaitra et soyons logique voyons… Si tu as eu le trône maintenant il te faut la fille! Je sais que tu as longtemps eu des sentiments pour Apo, je ne sais pas ce que tu ressens actuellement pour elle mais je ne suis pas sûre que ça te dérange tant que ça." Le problème n'était pas tant Nathan, ni mes parents, ni Apo, le problème était surtout que dernièrement Alexandr me manquait terriblement et en voyant que Nathan commençait à vraiment le remplacer, je ne pouvais m'empêcher de contenir de la colère en moi. Alexandr me manquait mais personne ne semblait le voir, pire même j'avais l'impression qu'il ne manquait plus à personne d'autre. J'étais consciente du fait que c'était un peu ridicule, mais tant pis! Sans même m'en rendre compte j'avais les larmes aux yeux, j'étais à deux doigts d'exploser en sanglots… Je me détournais de Nathan pour qu'il ne me voit pas pleurer. "Pourquoi? Pourquoi papa et maman ont eu cette idée? C'est le truc le plus stupide que j'ai jamais entendu! Apo était à Alexandr, si elle veut refaire sa vie il faut qu'elle le fasse avec un autre que toi. Tout ça c'est trop glauque! Marier le frère de son époux décédé, ça ne se fait pas! Et si jamais vous passer à l'acte, je te jure que je ne m'en remettrais jamais! Jamais!" Voilà que j'agissais en drama queen. Peu importe. Ma voix s'était resserrée. Je mourrais d'envie au fond de moi que Nathan me dise que lui aussi n'oubliait pas Alexandr, je voulais qu'il me jure sur sa vie et sur celle d'Apo que jamais eux deux ne seraient ensemble, et je voulais aussi qu'il me prenne dans ses bras. Mais je restais plantée là, à moitié de dos toujours dans l'optique qu'il ne voit pas les larmes perler sur mes joues. Je me pinçais les lèvres et ajoutais dans un souffle. "On ne peut pas l'oublier. On a pas le droit!" Evidemment, je parlais d'Alexandr. Je me tournais alors vers mon frère. J'avais attendu tout l'été pour lui en parler, durant ces deux mois je n'avais fait que ravaler mes sentiments, les contenir… et voilà qu'à présent j'avais explosé. Je n'avais pas pu les garder en moi plus longtemps. Je me sentais à bout de souffle comme si j'avais couru un marathon. Mon coeur me faisait mal, comme à chaque fois que je pensais à mon frère ainé. "Jure moi que ça n'arrivera pas Nathan. Jure moi que toi et Apo c'est juste une fantaisie des parents. Jure moi que tu ne l'aimes pas!" Nathan ne pouvait pas mentir, je le fixais si intensément que si jamais il osait me mentir je le verrai aussitôt. J'attendais sa réponse, impatiente de le prendre dans mes bras. Il fallait juste qu'il me fasse la promesse et tout serait réglé.

Quand je sentis le regard noir de ma petite sœur se poser sur moi, je compris tout de suite que le problème venait de là. Mais comment est-ce qu’elle avait su ? A tous les coups, ma mère avait cafté ou avait lancé une phrase bidon qui aurait mis la puce à l’oreille de la jeune femme. En plus de m’en vouloir de ne pas lui avoir dit, elle allait sûrement croire que j’avais essayé de lui cacher, ce qui était totalement faux et absurde. "Ce n'est pas drôle Nathan! Et oui, figure toi que je suis déjà au courant. Heureusement que je n'attends pas qu'on me dise les choses en face parce que visiblement dans cette famille il y a un paquet de trucs qui semble ne jamais parvenir à mes oreilles. Mais figures toi que moi aussi j'ai un avis sur la question et que votre idée à tous les quatre ne me plait pas du tout!" Je fronçais un peu les sourcils, et je regardais Nora du coin de l’œil. L’idée…de tous les quatre ? parce qu’elle pensait vraiment que c’était notre idée, à Apo et moi de nous marier ? C’était totalement absurde ! Nous n’étions même pas sortis ensemble, nous nous détestions mutuellement alors pourquoi est-ce que nous aurions, du jour au lendemain, décidés de nous marier ? Ca n’avait aucun sens, et je ne comprenais même pas comment ma sœur avait pu croire une chose pareille. Et quand ma sœur est en colère, elle déballe tout ce qu’elle a sur le cœur d’un coup, et je n’avais même pas le temps de me défendre que les reproches fusaient dans tous les sens, "Ah oui? Tu ne veux pas être son bouche-trou? Pourtant c'est pas toi qui rêvait de prendre sa place d'enfant héritier? Tu l'as maintenant, c'est toi qui succèdera à papa quand lui même disparaitra et soyons logique voyons… Si tu as eu le trône maintenant il te faut la fille! Je sais que tu as longtemps eu des sentiments pour Apo, je ne sais pas ce que tu ressens actuellement pour elle mais je ne suis pas sûre que ça te dérange tant que ça." Alors là, elle commençait à être plus que désagréable, et je serais les dents pour ne rien dire, et surtout, pour ne pas être grossier. Même si j’avais le langage plus facile avec ma sœur, je restais quand même assez poli. Mais je ne pouvais pas me retenir plus longtemps, et je m’arrêtais de marcher pour faire face à ma sœur, « Attends tu vas te calmer Nora s’il te plais ! Tu crois vraiment que j’ai mis un genoux à terre face à Apollinaria, pour lui demander de devenir ma femme ? T’es dingue ou quoi ?! C’est l’idée de papa et maman, pas la nôtre ! Et OUI j’ai toujours envié Alexandr parce qu’on lui portait plus d’importance comme il était l’hériter, mais tu crois quoi, que ça me réjouit de prendre sa place et d’être la roue de secours de tout le monde ?! La roue de secours du pays, la roue de secours d’Apo, j’suis aussi ta roue de secours à toi c’est ça ?! Je ne veux pas épouser Apo, tu comprends ça ?! » Je soupirais, le ton montait et heureusement que nos parents n’assistaient pas à cette discussion. Ma petite sœur me regarda, et je vis ses yeux briller : si elle se mettait à pleurer, j’allais devenir dingue.

"Pourquoi? Pourquoi papa et maman ont eu cette idée? C'est le truc le plus stupide que j'ai jamais entendu! Apo était à Alexandr, si elle veut refaire sa vie il faut qu'elle le fasse avec un autre que toi. Tout ça c'est trop glauque! Marier le frère de son époux décédé, ça ne se fait pas! Et si jamais vous passer à l'acte, je te jure que je ne m'en remettrais jamais! Jamais!" J’hochais la tête, croisant les bras au niveau de mon torse en soupirant une nouvelle fois : je ne pouvais pas dire mieux ! Cette situation était glauque, mais nos parents étaient beaucoup trop vieux jeu pour penser que c’était très, très bizarre qu’Apollinaria m’épouse. « Mais je sais bien que c’est glauque ! J’ai l’air heureux et épanoui là peut-être ? Alors arrête de me gueuler dessus bon sang ! » Je ne quittais pas la princesse des yeux, guettant chacune de ses réactions attentivement, elle semblait se calmer petit à petit, et elle finit par murmurer doucement, "On ne peut pas l'oublier. On a pas le droit!" Je fronçais légèrement les sourcils et je secouais la tête : pourquoi pensait-elle qu’on l’oubliait ? C’était absurde… « Personne n’oublie Alex Nora…on refait juste notre vie en essayant de… de ne pas penser au fait qu’il est mort… mais personne ne l’oublie… moi je ne l’oublie pas en tout cas… », murmurais-je doucement en faisant un pas vers elle. "Jure moi que ça n'arrivera pas Nathan. Jure moi que toi et Apo c'est juste une fantaisie des parents. Jure moi que tu ne l'aimes pas!"[/b] J’hochais la tête et je m’approchais encore doucement d’elle, et une fois à sa hauteur, je passais mes bras autour de son corps pour la prendre contre moi, la serrant le plus fort possible : c’était le genre de gestes tendres que nous n’avions pas eu l’un envers l’autre depuis des mois à cause d’un malentendu. « Je te le jure, je ne suis pas amoureux d’Apo…c’est vrai que j’ai eu le béguin pour elle mais j’étais jeune et j’ai fini par me faire une raison.. elle et moi on s’est mis d’accord pour tout faire pour empêcher que ce mariage n’arrive… fais-moi confiance… » Je me reculais légèrement pour la regarder, « S’te plais…dis plus jamais que la mort d’Alexandr m’arrange… »

Serrée contre mon frère, je sentais la pression redescendre. Au bout d'un instant, je m'écartais de son étreinte, essuyais mes larmes et soufflais un bon coup. Je laissais l'air frais remplir mes poumons, j'avais besoin de me calmer. Je me sentais vidé, comme si j'avais eu cet énorme poids sur moi et qu'il venait de s'envoler. J'avais passé des semaines à m'interroger à ce sujet, à m'inquiéter même, alors que tout aurait pu régler en quelques minutes avec Nathan, si au moins nous avions pris la peine de parler. Je le regardais, sa dernière phrase résonnait dans ma tête. Je m'en voulais d'avoir été si odieuse, si brutale, si… je regrettais à présent. "Excuse moi Nathan. Je… Je n'aurai pas dû m'emporter. Je regrette de t'avoir fait tout ces reproches et de t'avoir dit ces choses horribles. Mais pourquoi tu ne m'en as pas parlé avant? Pourquoi ne m'as-tu rien dit lorsqu'on s'est parlé cet été? J'admets que ça a été rare, mais tu aurais pu le faire, tu en avais l'occasion… Cette histoire m'a angoissé, j'étais prête à devenir dingue! " Les paroles rassurantes qu'il avait eu, sa promesse aussi de ne pas se marier avec Apo… Il avait juré ne pas être amoureux d'elle et à présent, s'il brisait ce pacte, chose que je ne l'imaginais pas faire, je ne pourrait plus jamais avoir confiance en lui. Mais je savais par avance que ça n'arriverait pas. Nathan ne m'avait jamais trahi. Tout ça me libérait. Mais je savais aussi au fond de moi que ma colère ne s'était pas totalement envolée. Mes parents…. Comment osaient-ils?! Je n'avais jamais vraiment eu mon mot à dire jusqu'à présent, les histoires avaient toujours été trop "compliquées" pour une "enfant" mais je n'étais plus une gamine à présent et je détestais que ma famille me cache des choses. En particulier depuis la mort d'Alexandr. J'avais envie qu'on me traite comme une adulte, qu'on arrête de faire les choses dans mon dos en pensant que toute manière ça n'était pas mes oignons. Tout ce qui touche à mes familles sont mes affaires et dans le cas de ce mariage arrangé, je me devais de défendre la mémoire d'Alexandr. Il n'était plus là pour le faire lui même alors moi, sa petite soeur, j'étais là pour lui.

"Qu'est-ce que vous allez faire pour éviter ce carnage?" Je regardais Nathan droit dans les yeux. Je voulais savoir s'ils avaient un plan de prévu, si il avait quelque chose d'infaillible déjà en tête ou si tout restait à faire. De mon côté je comptais bien en faire baver aux parents, jamais je ne pourrai leur pardonner un tel choix! Jamais! Je baissais les yeux au sol. Les bras croisés sur ma poitrine, j'agitais mon pied pour shooter dans les petits cailloux. Je faisais la même tête que lorsque j'étais petite, mon petit air boudeur… "Je crois que je vais avoir du mal à supporter papa et maman pour le restant du weekend… J'ai envie de retourner à New York. Je ne peux pas faire semblant d'être d'accord avec eux, et je refuse de ne rien faire! Je veux qu'ils comprennent que ça me blesse et que ça risque de briser notre famille entière ce genre de coup foireux! D'abord, j'ignorais qu'ils croyaient aux mariages forcés! C'est illégal ça! Je m'en fiche que tu sois un prince et que ça se fasse dans notre milieux… On est plus en l'an 1800 là! Il faut qu'ils évoluent un peu! Je ne comprends pas qu'ils nous fassent ça… vraiment pas!" Finalement je donnais un gros coup de pied dans la terre sous le coup de la colère.

Je savais que Nora n’avait pas voulu être méchante avec moi. C’était impossible, dans notre famille, d’être méchants les uns envers les autres. Lorsque nous finissions par nous disputer, que ça soit avec Nora, mais aussi avec Alexandr, nous finissions toujours par nous réconcilier ou par nous en vouloir d’avoir pu nous dire des choses horribles comme ça peut arriver très facilement lorsqu’on est en colère. Mais je vis que cette fois, Nora avait vraiment été très blessée et bouleversée par toute cette histoire, et je ne pensais pas que ça lui ferait cet effet. Je savais qu’elle serait fâchée en sachant qu’Apollinaria et moi étions presque fiancés, mais je ne pensais pas qu’elle serait autant bouleversée. "Excuse-moi Nathan. Je… Je n'aurai pas dû m'emporter. Je regrette de t'avoir fait tout ces reproches et de t'avoir dit ces choses horribles. Mais pourquoi tu ne m'en as pas parlé avant? Pourquoi ne m'as-tu rien dit lorsqu'on s'est parlé cet été? J'admets que ça a été rare, mais tu aurais pu le faire, tu en avais l'occasion… Cette histoire m'a angoissé, j'étais prête à devenir dingue! " Je souris un peu et j’haussais les épaules : c’est vrai que ça m’avait un peu blessé qu’elle pense sérieusement que tout ça m’était volontairement profitable, mais je pouvais tout à fait comprendre ce qu’elle ressentait. « T’en fais pas…je comprends, vraiment… mais… j’pensais pas que les parents étaient sérieux, mais aujourd’hui ils ne me parlent que de ça…», murmurais-je en souriant un peu pour la rassurer. "Qu'est-ce que vous allez faire pour éviter ce carnage?" Je soupirais et j’haussais les épaules, m’asseyant sur un petit banc au bout du petit chemin dans un coin sombre du jardin, afin de nous cacher du soleil qui tapait plutôt fort. « Pour l’instant… franchement… je n’en sais rien. », répondais-je en regardant ma petite sœur. « Apo et moi, on a fait la paix il y a seulement quelques semaines et…on essaie déjà à…apprendre à ce supporter…et à devenir amis, tu vois ? » Apo et moi avions toujours eu des relations très conflictuelles, notamment parce que je lui en avais toujours un peu voulu d’avoir choisi Alexandr au lieu de moi, même si à l’époque, elle n’était pas au courant que j’avais le béguin pour elle. « Mais on va finir par trouver… » Je regardais Nora jouer avec les cailloux à terre, encore debout alors que je m’étais assis sur le banc, les coudes appuyés sur mes genoux. "Je crois que je vais avoir du mal à supporter papa et maman pour le restant du weekend… J'ai envie de retourner à New York. Je ne peux pas faire semblant d'être d'accord avec eux, et je refuse de ne rien faire! Je veux qu'ils comprennent que ça me blesse et que ça risque de briser notre famille entière ce genre de coup foireux! D'abord, j'ignorais qu'ils croyaient aux mariages forcés! C'est illégal ça! Je m'en fiche que tu sois un prince et que ça se fasse dans notre milieux… On est plus en l'an 1800 là! Il faut qu'ils évoluent un peu! Je ne comprends pas qu'ils nous fassent ça… vraiment pas!" Je ris un peu et je pris sa main pour qu’elle se calme, l’attirant vers moi en l’obligeant presque à s’asseoir, « Hey…calme toi… » Je souris et j’ajoutais, « Apo et moi on compte pas se marier, alors y’a aucun risque pour que ça arrive, d’accord ? » Je lâchais sa main, « Allez, on parle d’autre chose ! Raconte-moi tes vacances ! »

L'idée que Nathan puisse voir Apollinaria seul me faisait vraiment bizarre. Eux qui n'avaient jamais pu s'entendre, eux qui n'avaient jamais pu tenir une seconde l'un près de l'autre sans se chamailler, eux qui s'étaient détestés ouvertement durant des années… Et voilà que maintenant ils essayaient d'être amis. Je me demandais si c'était vraiment la bonne tactique. Oui, parce que s'ils ne voulaient pas finir l'un avec l'autre il valait mieux qu'ils se déteste plutôt qu'ils s'apprécient, sait-on jamais qu'ils décident de changer d'opinion et qu'au final ils réalisent que le mariage ne soit pas une si mauvaise idée. Nathan avait beau m'avoir promis, un léger doute persistait au fond de moi-même. En plus ils ne semblaient pas avoir de plan concret.. "Donc jusqu'à présent, tout ce que vous avez fait pour éviter le mariage c'est de vous réconcilier pour faire ami-ami? Oui, ça me semble logique." dis-je ironiquement. Je n'avais pas été agressive ni même provocatrice. Je n'essayais pas d'énerver mon frère, je voulais juste comprendre où ils en étaient. "Comme tu l'as si bien dit, papa et maman ne parlent que de ça ces derniers temps, même à moi ils n'ont pas voulu le cacher bien longtemps… Quand ils me l'ont clairement annoncé, tu aurais vu leurs têtes… Ils étaient enchantés! Tout simplement ravis! Vous allez devoir mettre un coup d'accélérateur si vous ne voulez vraiment pas que ça arrive. Au rythme où ça va, dans quelques semaines on enverra Apollinaria chercher sa robe…" Et c'est là qu'une pensée atroce (à mes yeux) me traversa l'esprit. "Mon Dieu! Imagine qu'ils veulent la voir se marier avec toi dans la même robe qu'elle portait à son mariage avec Alexandr?!" Le ridicule de la situation m'exaspérait, bien sûr ce n'était qu'une supposition mais vu qu'ils étaient capables de leur demander de se marier, ils pouvaient aussi demander à Apo de ressortir son ancienne robe… Evidemment, cette robe était magnifique et elle lui allait à merveille. Je la revoyait dedans, se tenir aux côtés de mon frère, Alexandr. Je me souviens les avoir tellement envié ce jour-là. Je me demandais si moi aussi j'aurai la chance de pouvoir trouver quelqu'un avec qui me marier un jour. Je n'était qu'une adolescente à ce moment là, bon à dix neuf ans, on ne pouvait pas dire que je n'étais plus du tout une ado désormais, mais disons que j'étais quand même une jeune adulte, je n'avais plus rien à voir avec la gamine que j'étais à l'époque. J'avais grandi et mûri. Je devenais indépendante, et responsable comme jamais. Dire que mon prochain anniversaire je soufflerai mes vingt ans… J'avais moi-même du mal à réaliser, parfois j'avais encore l'impression de n'être âgée que de seize ans. C'était une période de ma vie tellement heureuse…

Nathan, assis à présent sur un banc, me regardait battre les cailloux avec mes pieds. Il rigola de me voir m'emporter. Puis avec son air calme et sa voix apaisante il me demanda de me calmer. Mais ça n'avait rien d'un ordre. Je détestais qu'on me donne des ordres et il le savait. Il était juste très cool et ça m'aidait un peu. Il avait toujours été comme ça avec moi, très compréhensif et gentil… Parfois, cet aspect de notre relation me manquait. Dans nos vies actuelles, on avait beau vivre dans la même ville, on avait du mal à se voir, à passer du temps l'un avec l'autre. Il m'attira vers le banc où je pris place à ses côtés. Il avait raison, je devais souffler un bon coup et attendre que les choses s'arrangent. Il voulait que je lui parle de mes vacances, je ne savais pas par où commencer parce que ces quelques mois d'été avaient été si intenses et remplis de tant de moments et de rencontres magiques… "Cancun était super! Je me suis vraiment amusé là-bas. J'ai rencontré pas mal de monde super sympa, les Mexicains savent vraiment mettre l'ambiance! Mais je crois que j'ai vraiment préféré San Francisco…" En réalité, si j'avais préféré SF au reste c'était sans doute dû à une rencontre en particulier, mais je ne savais pas trop comment j'aurai pu dire cela à mon frère. "La ville est superbe! Il y a beaucoup de vent, mais c'est vraiment agréable malgré tout! J'ai adoré y faire du shopping et puis il y a pas mal de choses à voir et visiter! Bon pour Paris, tu connais, comme toujours c'était superbe aussi! J'ai retrouvé d'anciens amis comme prévus et s'était franchement génial! Ca m'a fait plaisir de consacrer ces deux mois à ceux que j'aime, enfin en dehors de la famille tu vois…" J'avais voyagé avec quelques amis, et seule aussi pour en retrouver d'autres sur place. Mes destinations avaient été diverses et variées et je n'avais pas eu une minute pour m'ennuyer.

A vrai dire, pour le moment, Apo et moi évitions de parler du mariage. Nous avions convenus que nous devions d’abord apprendre à mieux nous connaître, et apprendre à nous apprécier avant de passer aux questions délicates de ce genre. Moi-même, je trouvais cette idée de mariage organisé, avec en plus, l’ex-femme de mon frère décédé complètement morbide, glauque. Moi qui m’était toujours sentie dans l’ombre d’Alexandr, ça n’était pas en épousant son ex-femme que j’allais me réconcilier avec ce sentiment d’être la quatrième roue du carrosse. Je voyais bien que ma petite sœur ne semblait pas à cent pour cent convaincue, mais bon, c’était notre futur qui était en jeu, pas le sien alors à nous de voir comment faire pour empêcher tout ça. "Donc jusqu'à présent, tout ce que vous avez fait pour éviter le mariage c'est de vous réconcilier pour faire ami-ami? Oui, ça me semble logique." Je ris un peu et j’haussais les épaules : eh bien oui. De toute façon, mes parents n’allaient pas me mettre un couteau sous la gorge demain pour aller offrir une bague de fiançailles à la jeune femme. Quoi que…ma mère ne parlait plus que de ça, et parfois elle disait même à quel point nous pourrions avoir de beaux enfants, chose qui me gênait terriblement. « On fait comme on peut ! », lançais-je à la demoiselle en soupirant discrètement, agacé qu’elle me casse les pieds à presque critiquer notre manière de faire. "Comme tu l'as si bien dit, papa et maman ne parlent que de ça ces derniers temps, même à moi ils n'ont pas voulu le cacher bien longtemps… Quand ils me l'ont clairement annoncé, tu aurais vu leurs têtes… Ils étaient enchantés! Tout simplement ravis! Vous allez devoir mettre un coup d'accélérateur si vous ne voulez vraiment pas que ça arrive. Au rythme où ça va, dans quelques semaines on enverra Apollinaria chercher sa robe…" Je la regardais, les sourcils froncés sans même oser la contredire ou casser sa pensée, "Mon Dieu! Imagine qu'ils veulent la voir se marier avec toi dans la même robe qu'elle portait à son mariage avec Alexandr?!" J’éclatais de rire et je secouais la tête, « Allez, penses plus à tout ça c’est à nous de gérer okay ? Je suis certains que tu as des problèmes autres que mon mariage avec Apollinaria… », répondais-je en lui souriant un peu, un sourire qui se voulait rassurant.

C’est vrai que j’avais toujours été comme ça : très calme, sans jamais paniquer même si l’annonce de mes parents de vouloir me voir avec Apollinaria créait un sentiment de panique générale dans mon esprit. Mais j’essayais de relativiser, me disant qu’elle et moi étions d’accord pour tout faire afin que cette union ne se fasse jamais. La tirant vers moi pour qu’elle s’assoit sur le banc, je décidais de changer de sujet, lui demandant comment ses vacances s’étaient passé. J’avais passé, quant à moi, des vacances plutôt paisibles aux Luxembourg, à subir les blablatages de ma mère qui essayait de me convaincre pour le mariage, et mes cours donnés par mon père qui m’enseignait comme diriger un pays, ce que j’étais destiné à faire lorsqu’il nous quittera. "Cancun était super! Je me suis vraiment amusé là-bas. J'ai rencontré pas mal de monde super sympa, les Mexicains savent vraiment mettre l'ambiance! Mais je crois que j'ai vraiment préféré San Francisco…" J’hochais la tête en l’écoutant parler : ma sœur me racontait souvent ses petites histoires, et l’été, ses voyages car elle adorait ça : voyager, un peu partout. Si j’avais eu le temps, j’aurais moi aussi voyagé. Si Alexandr avait été là, nous serions certainement partis ensemble quelques semaines sur un île entre frères comme nous avion l’habitude de le faire, et je n’aurais pas eu à suivre ses fichus cours mon père. J’aurais peut-être accompagné Nora dans ses voyages aussi, qui sait ? "La ville est superbe! Il y a beaucoup de vent, mais c'est vraiment agréable malgré tout! J'ai adoré y faire du shopping et puis il y a pas mal de choses à voir et visiter! Bon pour Paris, tu connais, comme toujours c'était superbe aussi! J'ai retrouvé d'anciens amis comme prévus et s'était franchement génial! Ça m'a fait plaisir de consacrer ces deux mois à ceux que j'aime, enfin en dehors de la famille tu vois…" Je souris, je l’enviais tellement. Paris me manquait beaucoup, parfois. Surtout lorsque j’étais en Amérique, en fait, la culture Européenne me manquait souvent énormément. « Eh bien…tu sembles t’être amusé, c’est le principal ! », dis-je à ma sœur, un large sourire sur les lèvres. « Et tu n’as pas pensé à ramener un ou deux souvenirs à ton frère ? Je suis terriblement vexé ! », lançais-je, sur un ton sérieux même si je la taquinais, bien évidemment. Elle avait eu sûrement plus de choses à penser, surtout qu’elle avait été certainement fâchée contre moi tout l’été à cause de cette histoire de mariage.

"Oui, c'est vraiment super! Mon été n'aurait pas pu être mieux!" J'avais surtout été marquée par une rencontre en particulier mais je ne voulais pas vraiment en parler avec mon frère, ni avec qui que ce soit d'ailleurs. J'aimais bien le fait que cet été m'appartienne à moi toute seule et que personne de ma vie de tous les jours ne sache vraiment ce que j'avais fait pour occuper mes journées lors de mes différents séjours aux quatre coins du globe. Je n'allais ni parler de ces soirées complètement folles que j'avais fait avec les Mexicains sur les plages de Cancun, en tout cas je n'entrerai pas dans les détails… Et je ne parlerai pas non plus d'Elliott, ce canon avec qui il a bien failli se passer quelque chose lorsque j'étais à San Francisco. Il m'avait fait découvrir la ville, ça avait été magique. On s'était embrassé et j'étais partie… Bien sûr je pensais encore beaucoup à lui, me demandant surtout si tout cela avait pu signifier quelque chose à ses yeux… Moi qui avais toujours été très sage, je m'étais surprise moi-même cet été! Mais il faut dire aussi, qu'avant lui aucun garçon ne m'avait fait un tel effet! Rien que d'y penser j'en avais des frissons. Mon frère me demanda ensuite si je lui avais ramené un souvenir. Il ajouta qu'il était vexé et ce avec un ton très sérieux. Je me doutais bien qu'il plaisantais. Et il devait sans doute croire qu'en effet, je ne lui avait rien rapporté mais ce n'était pas vrai. J'avais beau avoir été fâchée contre lui, j'avais malgré tout eu bon coeur. Je me pinçais la lèvre. "En fait… J'ai quelque chose pour toi. C'est dans ma chambre. Ce n'est pas grand chose mais lorsque je l'ai vu je n'ai pas pu m'empêcher de le prendre." Je sentais mes joue s'empourprer. Je sentais qu'on allait rentrer dans un de ces moments un peu tendre entre mon frère et moi. C'était plutôt drôle sachant que quelques minutes plutôt j'étais prête à le tuer. "Tu sais Nathan… même lorsque je suis fâchée, je t'aime quand même. Je ne pouvais pas rentrer sans rien avoir à te donner!" Je baissais la tête. J'avais beau dire assez souvent "je t'aime" à mes proches, je restais malgré tout très pudique parfois. Le vent ce mit à souffler, je remontais le col de ma veste sur mon cou. "J'ai froid, peut-être qu'on peut retourner à l'intérieur, comme ça je pourrai te donner ton cadeau, enfin, si ça te va?" Je me levai et regardais autour de moi, attendant que mon frère se décide. Le parc s'étendait devant moi, me renvoyant à mes souvenirs de petite fille. Je voyais mes frères se courir l'un après l'autre un peu plus loin près des arbres, et moi me balancer sur ma balançoire de l'autre côté. Soudain je levais les yeux vers un des gros arbres situé près de là où nous tenions actuellement. Je lançais un regard à Nathan et commençais à courir. Il devait sans doute se demander ce que je faisais et où j'allais comme ça. Arrivée au pied de l'arbre, je me tournais, Nathan était toujours sur le banc. Je levais les yeux sur l'échelle clouée au tronc et commençais à grimper, au bout de quelques secondes je me retrouvais sur le planché d'une cabane en bois. Une fois debout je me penchais à la balustrade que nous avions construit lorsque nous étions enfants et qu'Alexandr était encore là. Je me mis à crier "Nathan!" Il fallait qu'il me rejoigne! Nous n'avions pas monté dans cette cabane depuis des lustres… En fait, peut-être même que la dernière fois remontait à l'époque où Alexandr n'était même pas encore marié à Apollinaria.

"Oui, c'est vraiment super! Mon été n'aurait pas pu être mieux!" Je souris, ne quittant pas ma sœur du regard. C’est marrant, mais elle avait toujours cette expression là sur le visage lorsqu’elle me racontait une histoire qui lui plaisait, lorsqu’elle me racontait des vacances qu’elle avait passée. Et même si elle ne m’avait rien dit, rien qu’en la regardant dans les yeux, j’aurais su à quel point elle avait passé un bel été, à quel point elle s’était amusée, et ça me faisait plaisir. Vraiment. Même si moi je n’avais pas eu l’été le plus parfait qu’il soit, je n’étais pas jaloux du sien. Bon, si un peu…je dois avouer que passer les vacances qu’elle avait passée ne m’aurait pas dérangé le moins du monde. Je lui dis pour rire que j’étais vexé qu’elle ne m’ait pas ramenée des souvenirs de ses merveilleuses vacances, et la réaction de ma petite sœur ne se fit pas attendre, "En fait… J'ai quelque chose pour toi. C'est dans ma chambre. Ce n'est pas grand chose mais lorsque je l'ai vu je n'ai pas pu m'empêcher de le prendre." Je souris un peu et je relevais le regard vers elle, « Vraiment ? », demandais-je doucement, ayant du mal à cacher le petit sourire sur mon visage. Même si j’avais plus de vingt piges, quand ma petite sœur me disait qu’elle avait un cadeau pour moi, j’étais toujours très heureux. Surtout vu à quel point elle semblait m’en vouloir cet été : elle avait quand même pensé à moi, et ça me faisait chaud au cœur. "Tu sais Nathan… même lorsque je suis fâchée, je t'aime quand même. Je ne pouvais pas rentrer sans rien avoir à te donner!" Je me mordais la lèvre, ça me faisait bizarre de l’entendre me dire ça. Enfin...Nora était quelqu’un qui disait assez facilement à quelqu’un « je t’aime », mais pas moi. Et je ne pouvais pas me permettre de lui foutre un vent là-dessus. « Moi aussi je t’aime p’tite sœur… », murmurais-je en la regardant. C’était toujours tellement bizarre et inhabituel de dire ça, même aux personnes de ma famille, même à ma propre sœur. Le vent qui soufflait commençait à être très frais, et je frissonnais un peu en frottant mes mains l’une contre l’autre pour me réchauffer. "J'ai froid, peut-être qu'on peut retourner à l'intérieur, comme ça je pourrai te donner ton cadeau, enfin, si ça te va?" J’hochais la tête en lui souriant : retourner à l’intérieur ? Pas de problème ! Me donner mon cadeau ? Encore mieux ! Je me levais en même temps qu’elle, la suivant en regardant droit devant moi jusqu’à détourner mes yeux vers Nora, qui me lança un regard complice, m’obligeant à sourire encore plus quand la jeune femme se mit à courir. Je ris et je la suivais, sachant exactement où elle allait : nous passions toute notre vie dans la cabane en bois perchée en haut d’un gros arbre un peu plus loin Alex, Nora et moi. Je n’avais même plus pensé à cet endroit depuis des années. Je regardais Nora monter en haut en croisant les bras au niveau de mon torse, levant la tête pour essayer de la voir. "Nathan!" Je ris un peu et je plissais les yeux, essayant toujours de la voir. « Nora ? », criais-je à mon tour avant de commencer à monter à mon tour tout en haut, ayant parfois peur que tout ça ne tombe en ruine sous nos deux poids puisque nous étions quand même…légèrement plus lourds qu’il y a quelques années. Une fois tout en haut, je regardais autour de moi.. « Wow…ça fait…un bail qu’on est pas venus ici… »

Je me sentais bien. La pression était redescendue et j'avais le coeur palpitant. Mon frère venait de me dire qu'il m'aimait lui aussi, ça avait le don de me mettre en joie évidemment. Je savais, plus que quiconque, qu'il était important de dire ces choses là tant que l'on en avait encore l'occasion. Je tuerai pour pouvoir avoir la chance de dire ces trois petits mots à Alexandr… Aussi bizarre que cela puisse être ou aussi gêné que l'on puisse se sentir, il est primordiale de le dire malgré tout. J'aime mon frère, en fait, j'aime mes frères. J'aime aussi mes parents, même si pour l'instant je suis plutôt très remontée contre eux, et j'aime mes amis et le restant de ma famille.

Je m'étais vite échappée du banc où nous étions assis quelques instants plus tôt. A présent, j'étais "on top of the world" en tous cas c'est la sensation que j'avais lorsque je montais dans notre cabane lorsque j'étais enfant. A bien y penser, ça n'était pas si longtemps de cela. Je n'avais que dix neuf ans après tout. Parfois, j'avais vraiment l'impression d'être plus âgée, comme si la vie que j'avais déjà vécue avait été trop remplie pour une fille de mon âge. J'avais du mal à l'expliquer mais c'était ce que je ressentais. Et d'un autre côté, je ne voulais pas grandir trop vite, quitter l'adolescence était difficile, et si tout le monde pensait que c'était chose faite pour moi, ils se trompaient. Il y a encore des jours où j'aimerais rester la petite dernière, la chouchoute de tout le monde, celle qu'on câline et protège envers et contre tout. Nathan me rejoignit dans la cabane. Il semblait penser la même chose que moi. Cet endroit devait lui rappeler à lui aussi beaucoup de souvenirs. "Oui, ça fait un sacré bout de temps!" Je regardais droit devant moi, vers le château. "Tu te rappelles comme on se sentait en sécurité ici? Le monde aurait pu s'écrouler autour de nous, on en aurait rien eu à faire… Parfois, cette époque me manque. Aujourd'hui c'est beaucoup moins rose." Je n'étais pas la plus à plaindre au niveau des soucis, mais j'avais malgré tout mes peurs et mes angoisses et même si je n'avais pas la pression d'être la future Grande Duchesse du Luxembourg, j'avais malgré tout un certain poids à porter sur mes épaules. Les filles de mon âge se souciaient plutôt des garçons, des fringues et des cours, mais moi j'avais en plus de tout ça à me soucier aussi de ce qu'on dirait de moi si je n'agissais pas bien. Je devais faire attention à tout parce qu'au moindre faux pas je prenais le risque d'être ridiculisée aux yeux d'un paquet de gens. En arrivant à New York, certaines personnes du show bizz avaient tenté de faire de moi une star. J'avais acceptée de poser pour le Teen Vogue, et quelques interviews pour d'autres magazines féminin. Encore aujourd'hui j'y apparaissais par petites touches de temps à autres. Mais je ne me considérais pas comme une star. J'étais juste une princesse, et cette fonction m'avait été attribuée par naissance alors il n'y avait rien qui justifiait vraiment que l'on me porte de l'attention. J'en recevais malgré tout et ce n'était pas toujours déplaisant je devais bien l'avouer, mais ça me rajoutait tout de même un sacré stress.

Soudain, je me détournais du balconnet pour passer de l'autre côté. Dans la cabane il y avait encore de vieux jouets et quelque part au fond, dans un coin, j'aperçu quelque chose qui attira mon attention. Une boite métallique, avec tout un tas de couleur dessus et des motifs un peu farfelus… Je sautais presque dessus et l'ouvrais, balançant le couvercle par dessus mon épaule. "Mes photos!" Il y avait là-dedans plusieurs dizaines de photos de mes frères, de moi, de mes parents, de mes amis, et même des photos de paysages. J'en attrapais quelques unes et me mis à les regarder. Je m'assis par terre, en tailleur, comme les indiens, et me concentrais sur les images dans mes mains. Il y en avait une de Nathan. "Regarde ça! Bon sang, tu étais drôlement mignon quand t'avais dix ou onze ans… Je me demande ce qu'il s'est passé depuis!" J'éclatais de rire. J'aimais bien taquiner Nathan, mais pas seulement. La taquinerie était l'un de mes passe-temps favoris avec plus ou moins tout le monde. Je continuais de regarder les autres photos jusqu'au moment où je tombais sur une qui me figea sur place. Il s'agissait d'une photo d'Alexandr et Apo, ils n'étaient pas très vieux, peut-être dix sept ou dix huit ans maximum. Dans le fond, on pouvait voir Nathan. Il avait un regard noir et fixait les deux autres au premier plan. Je m'empressais de la remettre au fond du tas. La suivante me fit sourire d'avantage. "Il me manque tellement!" Je tendis la photo à Nathan. On pouvait nous voir tous les trois. Alexandr, Nathan et moi. On se tenait par le cou, serrés, moi au milieu. Mes deux frères me protégeant du reste du monde. On avait des sourires immenses sur ces photos. J'avais à la fois le coeur remplie de joie et hurlant de douleur. Les choses n'avaient plus rien à voir avec cette époque à présent et je devais l'accepter. Ce n'était pas mince affaire mais avec le temps ça commençait à aller un peu mieux.

Les gens semblaient penser que pour Nora, Alexandr et moi, c’était facile. Que d’être prince ou princesse du Luxembourg, ça nous donnait tout de suite tellement d’opportunités que ça voulait forcément dire que nous avions la vie facile. Et pourtant, ça n’était pas le cas. Oh non non non, notre vie n’était pas beaucoup plus facile que celle de n’importe qui. C’est vrai, nous vivions dans un château. C’est vrai, nous avions de beaux habits, nous connaissions les gens les plus importants du monde entier. C’est vrai que nous ne mourrions pas de faim, que nous avions des domestiques, mais pourtant…pourtant, nous n’étions pas si différent. Matériellement, oui, nous étions probablement différents. Notre famille, la famille De Luxembourg était probablement très très riche, probablement très très puissante, mais pour nous, ça ne changeait pas grand-chose. Et je crois que les gens avaient du mal à s’en rendre compte. Nous aussi nous étions heureux, mais nous aussi nous connaissions la peine et la souffrance. Et ça, surtout depuis la mort d’Alexandr. Car cela avait fait de mal à tout le monde, et plus particulièrement à ma sœur, qui avait l’air d’avoir encore du mal à faire son deuil.

C’est probablement pour ça que nous nous retrouvions ici, tout en haut de cet arbre dans cette cabane qui était notre refuge à tous les trois. Je n’étais pas venu ici depuis longtemps…depuis des années, et je sentais un pincement à mon cœur en mettant les pieds dans cet endroit. Ca me rappelait à quel point Alex, Nora et moi nous étions proches. Ca me rappelait à quel point mon grand frère me manquait. J’avais tellement peur de l’avenir maintenant que mon destin était tout tracé, maintenant que j’étais destiné à tout devoir supporter sur mes épaules, toutes les responsabilités qui, au départ, étaient destinés à mon frère. "Oui, ça fait un sacré bout de temps!" Je souris un peu, presque tristement en faisant le tour de la petite cabane. Sur les murs, des dizaines et des dizaines de photos étaient collées, presque les unes sur les autres. Que des souvenirs. "Tu te rappelles comme on se sentait en sécurité ici? Le monde aurait pu s'écrouler autour de nous, on en aurait rien eu à faire… Parfois, cette époque me manque. Aujourd'hui c'est beaucoup moins rose." Je souris un peu et je me mis près de ma sœur, regardant à mon tour le château en hochant la tête. Elle avait raison, nous avions toujours été tellement bien dans cette cabane. Et nos parents ne connaissaient pas l’existence de ce lieu, alors lorsque nous voulions vraiment être coupés du monde, il suffisait de rester ici..

Passant mes mains dans les poches de mon manteau, je frissonnais : l’air était de plus en plus froid, et avec cette hauteur, ça n’aidait pas. Sentant ma sœur se tourner, je me tournais à mon tour, la suivant à l’intérieur en souriant lorsque je vis la petite boite au fond de la cabane près des jouets qui commençaient à prendre sérieusement la poussière d’ailleurs. "Mes photos!" Je ris un peu et je me plaçais près d’elle, la regardant sortir les photos. « Wow…j’pensais pas que tu les avais encore ! », lançais-je en souriant alors que Nora s’arrêta sur une photo de moi assez vieille quand même.. "Regarde ça! Bon sang, tu étais drôlement mignon quand t'avais dix ou onze ans… Je me demande ce qu'il s'est passé depuis!" J’entrouvrais la bouche, regardant Nora d’un air un peu choqué. Je finis par rire avec elle, lui donnant un petit coup d’épaule, « Hey oh ! » Je souris et j’ajoutais, « Quoi que…ça expliquerait pourquoi j’arrive pas à garder une fille plus de trois mois ! ». Je ne compris pas trop pourquoi elle s’arrêta sur une photo d’Alex et d’Apo. C’était une photo pas trop vieille, datant des premiers mois où ils s’étaient mis ensemble. Les mois qui m’avaient fait le plus mal je dirais, car les voir ensemble n’avait pas été une partie de plaisir. Je tournais mon regard vers Nora, et elle changea très vite de photo, comme si elle se sentait gênée de me montrer ce genre de souvenirs. « T’inquiète pas…ça me fait plus rien de les voir ensemble Nora…j’ai tourné la page, vraiment… » Je lui souris timidement : bizarrement, j’avais l’impression de lui mentir en disant ça. Je n’avais plus de sentiments pour Apollinaria…enfin, je pensais ne plus avoir de sentiments pour elle. Depuis le temps…ça avait dû s’estomper, non ? "Il me manque tellement!" Je souris et je pris la photo qu’elle me tendait : une photo de nous trois. Une des dernières photos que nous avions fait tous ensemble je crois. Je soupirais, ne quittant pas la photo du regard. « Il me manque aussi…je…je sais pas si je serais capable de le remplacer… » Je fronçais un peu les sourcils et je lui tendais la photo, baissant le regard, « Je suis pas Alexandr…j’aurais jamais sa classe et son charisme… Je ne suis pas fait pour être sur le trône… »

Je rigolais à la réflexion de mon frère, lui et moi étions sans doute les plus irrécupérables question amour! On ne se tenait pas vraiment au courant de nos conquêtes, pratiquement inexistantes pour ma part et trop nombreuses pour Nathan (ou du moins j'imaginais). En fait nous étions tous les deux radicalement opposés à notre frère Alexandr sur ce point-ci. Lui qui avait épousé son amour et meilleure amie d'enfance… Lorsque j'étais gamine et jusqu'au moins mes quatorze ans, tout ce que je trouvais à dire à propos des garçons (mise à part mes frères et mon père) tenait en cinq lettres: BEURK! Bon et puis j'ai grandi, j'ai évolué et j'ai commencé à m'y intéresser un peu mais vraiment pas au point de sortir exclusivement avec l'un deux. Ce ne sont pas les occasions qui ont manqué, mais je n'ai jamais été très motivée. Le truc c'est que je n'ai jamais été amoureuse… enfin pas jusqu'à cet été. Je ne me suis jamais vu me lancer dans une relation avec quelqu'un pour qui je ne ressentais rien, je ne fais jamais les choses à moitié et surtout pas si je sais d'avance que ça ne me mènera nul part. A quoi bon perdre son temps? Mais cet été à San Francisco… j'avoue être tombée sous le charme total d'un bel inconnu. Nous avons passé quelques jours merveilleux, gravés dans ma mémoire. Malheureusement nous ne vivons pas assez proche l'un de l'autre pour envisager quoi que ce soit. Si seulement… En pensant à mon doux amour d'été, je ne pu m'empêcher de sourire de plus bel.

Nathan m'assurait une fois de plus que voir Apollinaria avec un autre ne lui faisait rien. J'avais bien vu ce regard qu'il avait dans cette photo, et je ne pouvais m'empêcher de me demander si le garçon de la photographie était encore présent quelque part en Nathan. Je n'osais même pas le regarder de crainte d'obtenir confirmation de mes pensées. Je décidais donc de croire Nathan, espérant de tout mon coeur qu'il ne se mente pas à lui-même. Les mots qu'il laissa échapper ensuite me prirent par surprise. Je savais bien entendu qu'Alexandr lui manquait, mais je ne savais pas vraiment que Nathan appréhendait son futur rôle. Et surtout pas qu'il ressentait une telle pression d'être comme Alexandr, ou en tous cas de l'égaler. Il est vrai que notre ainé était un garçon charismatique, plus que charmant, classe et intelligent. Il en avait fait baver des filles, mais il avait toujours su être fidèle à celle qui lui plaisait tant. Il aurait fait un souverain exceptionnel… Mais je ne pouvais pas laisser Nathan penser que lui même n'en été pas capable. "Moi je crois qu'Alexandr serait très fier de voir tous les efforts que tu fais pour satisfaire papa et pour être prêt à prendre tes responsabilités en temps voulu. Je sais que la pression qui repose sur tes épaules ne doit pas être simple à gérer, mais je pense sincèrement que tu seras à la hauteur Nathan." Je me pinçais les lèvres, toujours assise en tailleur, je remettais les photos dans la boite. J'attrapais la main de mon frère pour m'aider à me lever. "Alexandr était fantastique, tout le monde le voyait déjà devenir un grand-duc incroyable. Mais à présent c'est toi qui devra prendre cette place, et je ne crois pas que l'idée que les luxembourgeois ont de toi soit aussi dure que celle que tu as de toi-même! Pour une raison qui m'échappe, nous avons toujours été forts appréciés par la population et il n'y a pas de raison que ça change. Tu n'es pas Alexandr, Nathan. Mais ça ne veut pas dire que tu ne seras pas un bon souverain." Je lui fis mon plus beau sourire, tentant de me montrer rassurante. Je croyais véritablement en lui, du fond de mon coeur. "Tout arrive pour une raison. Tu es là où tu dois être. Que ce soit toi, ou Alexandr, ou même moi… nous avons cela dans le sang. Notre place est ici, la tienne est ici. Mais tu sais, tu es bien plus qu'un simple futur souverain du Luxembourg, je sus sûre que tu vas faire de grandes choses. Tu ne le sais peut-être pas encore, mais tu verras. Et puis d'ailleurs, papa ne te laissera jamais monter sur le trône avant que tu ne sois prêt. Crois-moi, il ne partira pas avant d'être sûr de t'avoir tout enseigné et plus encore." C'était toujours un peu triste de penser au jour où Nathan monterait sur le trône parce que cela signifiait aussi que notre père serait sans doute décédé et je n'avais franchement pas envie de penser à cela, mais malgré tout nous devions tous nous y préparer, et Nathan plus encore.

J'attrapais la main de mon frère et commençais à l'entrainer hors de la cabane. "Viens, on va chercher ton cadeau!". Nous devions à présent retourner dans le château et regagner ma chambre. On refit donc le chemin en sens inverse. Une fois à l'intérieur, je sentais mes joues rougir avec le froid. Le vent soufflais pas mal mine de rien! J'avais envie d'un chocolat chaud. Je pris les devant en montant les escaliers, je trottinais presque, impatiente de lui montrer ce que j'avais rapporter. J'ouvris la porte de ma chambre et invitais mon frère à pénétrer mon espace personnel, très féminin… J'allais fouiller dans ma vaste penderie à la recherche du souvenir. Puis je revins avec la chose cachée dans mon dos. "Tu m'excuseras, elle n'est pas emballée…" Je sortis de derrière moi une grosse boule à neige posée sur un socle blanc. A l'intérieur, le pont Golden Gate Bridge, archi connu à SF. Je renversais la boule et regardais la fausse neige retomber sur le pont rouge, puis je la tendis à Nathan. "Papa nous offrait toujours des boules à neige lorsqu'il partait en déplacement officiel à l'étranger, tu t'en souviens?" Bon d'accord, il les rapportait surtout pour moi, mais j'espérais malgré tout que mon frère apprécierait le geste. "Elle te plait?"

C’était assez rare, que ma sœur et moi parlions d’amour comme ça. Nous ne racontions jamais rien à ce niveau, et je me voyais mal être assis face à elle, buvant mon petit café comme si de rien était pendant que ma petite sœur me racontait tous les mecs qui étaient passés sur elle. Je savais qu’elle n’était pas comme ça, enfin, je l’espérais comme tous les grands frères qui se sentent obligés de surprotéger leur petite sœur comme je le faisais. Alexandr et moi avions toujours été très protecteurs à ce niveau-là : personne n’avait intérêt à toucher à notre petite Nora, personne n’avait intérêt à un jour lui faire du mal sinon, cette personne aurait à faire à nous, et elle passerait un sale quart d’heure. Pour le moment, nous n’avions jamais eu besoin d’aller jusqu’aux mains, mais je savais que je n’hésiterais pas une seule secondes qui cela devait arriver. Surtout depuis la mort d’Alexandr en fait. Nora était la seule sœur qui me restait, et je me voyais mal vivre sans elle. C’est pour ça que de penser qu’elle m’en voulait m’avait beaucoup perturbé : je ne voulais pas me disputer avec elle, ne pas lui parler pendant ses mois et l’entendre me faire une longue liste de mes défauts en guise de reproche. Nora était ma petite sœur adorée, et jamais je ne laisserai quelqu’un la toucher ou lui faire du mal moralement, et encore moins physiquement. L’avantage avec ma sœur, c’était que je savais que je pouvais tout lui dire. Elle essayait de ne pas me juger, et de me soutenir. Nos liens s’étaient sacrément ressoudés à a mort de notre frère et j’espérai que ça ne change jamais. J’avais besoin d’elle, plus que de n’importe qui en fait. La famille passait avant tout, ça c’était sûr.

Je comprenais ses inquiétudes vis-à-vis d’Apo et moi, mais j’essayais de la rassurer du mieux possible : il ne se passait rien entre elle et moi, et il ne se passerait rien. Ça serait tout simplement absurde, insensé. Enfin…dans mon esprit, devenir son ami était aussi une idée absurde alors qu’aujourd’hui, c’était ce que nous essayons d’être. Après, il fallait voir ce que ça allait donner et je n’étais pas sûr que nous nous arriverions. "Moi je crois qu'Alexandr serait très fier de voir tous les efforts que tu fais pour satisfaire papa et pour être prêt à prendre tes responsabilités en temps voulu. Je sais que la pression qui repose sur tes épaules ne doit pas être simple à gérer, mais je pense sincèrement que tu seras à la hauteur Nathan." Je souris un peu et je la regardais ranger les photos dans la boite, attrapant sa main pour me lever à mon tour tout en l’écoutant parler silencieusement, "Alexandr était fantastique, tout le monde le voyait déjà devenir un grand-duc incroyable. Mais à présent c'est toi qui devra prendre cette place, et je ne crois pas que l'idée que les luxembourgeois ont de toi soit aussi dure que celle que tu as de toi-même! Pour une raison qui m'échappe, nous avons toujours été forts appréciés par la population et il n'y a pas de raison que ça change. Tu n'es pas Alexandr, Nathan. Mais ça ne veut pas dire que tu ne seras pas un bon souverain." Je levais le regard vers elle, assez surpris : est-ce qu’elle pensait vraiment ça de moi ? Ça me touchait beaucoup, avec toute la pression que j’avais sur les épaules, je me sentais même presque soulagé que quelqu’un pense ça. "Tout arrive pour une raison. Tu es là où tu dois être. Que ce soit toi, ou Alexandr, ou même moi… nous avons cela dans le sang. Notre place est ici, la tienne est ici. Mais tu sais, tu es bien plus qu'un simple futur souverain du Luxembourg, je sus sûre que tu vas faire de grandes choses. Tu ne le sais peut-être pas encore, mais tu verras. Et puis d'ailleurs, papa ne te laissera jamais monter sur le trône avant que tu ne sois prêt. Crois-moi, il ne partira pas avant d'être sûr de t'avoir tout enseigné et plus encore." J’hochais la tête, elle avait tout à fait raison et j’étais heureux de lui avoir parlé de ça. Parce que si j’arrivais souvent à apaiser Nora, elle aussi avait ce pouvoir sur moi. Je m’avançais vers ma sœur et je me penchais pour la prendre dans mes bras, sans rien dire. Juste une étreinte qui dura quelques minutes avant de me reculer pour la regarder, « Merci beaucoup… »

Changer de sujet était la meilleure chose à faire dans ce cas-là. Je la laissais prendre une seconde fois ma main, alors que nous sortions de la petite cabane. "Viens, on va chercher ton cadeau!". Je ris et j’hochais la tête, « Ah ça c’est une superbe idée ! », lançais-je en riant à nouveau, descendant après elle sur la petite échelle qui nous avait permis de monter jusqu’à la cabane en bois. Je repris la main de ma petite sœur dans la mienne, et nous nous dirigions vers le château. L’air semblait encore plus froid que tout à l’heure, et je sentais Nora frissonner légèrement au contact du froid glacial contre notre peau. Suivant la jeune femme jusque dans sa chambre, je retirais mon manteau lorsque nous fûmes rentrés, regardant autour de moi avec un léger sourire nostalgique figé sur mes lèvres. Ca n’avait pas changé d’un pouce depuis la dernière fois que j’étais venu, et je me rappelai que, Nora, ayant la chambre la plus grande de nous trois, installait souvent lorsque nous étions petits une petite tente au milieu de sa chambre et parfois, l’hiver, nous dormions tous les trois dedans avec Alexandr, nous racontant même parfois des histoires qui faisaient peur à notre petite sœur pour la taquiner. "Tu m'excuseras, elle n'est pas emballée…" Je tournais mon regard vers elle alors qu’elle s’approchait de moi doucement, une magnifique boule de neige en verre dans ses mains. Mon sourire s’élargit et je m’approchais d’elle, la prenant dans mes mains. Elle était magnifique et la neige qui tombait sur le Pont de San Francisco semblait être de la vraie neige. "Papa nous offrait toujours des boules à neige lorsqu'il partait en déplacement officiel à l'étranger, tu t'en souviens?" Je ris un peu et j’hochais la tête, me penchant pour déposer un long baiser sur la joue froide de ma petite sœur, « Je me souviens oui…elle est magnifique, merci soeurette… » Je regardais à nouveau ma boule, la retournant une nouvelle fois pour faire tomber la neige. "Elle te plait?" J’hochais la tête, sans quitter la boule du regard en souriant, « Quand je pense que tu as été là-bas…c’était aussi beau ? » San Francisco devait être une ville magnifique à visiter. Moins grande et impressionnante que New-York, mais avec le soleil en plus, la plage et certainement les belles filles. « Tu t’es fait des amis là-bas ? La prochaine fois que tu y retournes, je veux venir avec toi, cours ou pas ! », lançais-je en relevant les yeux vers elle.

Je fixais la boule se renverser dans les mains de mon frère. La neige retombait et comme lorsque je ne n'étais encore qu'une gamine, j'étais fascinée. Nathan voulait savoir si c'était vraiment aussi beau. Evidemment, il n'y avait pas eu la neige, mais j'avais définitivement eu un gros coup de foudre pour cette ville. J'avais passé des journées entières à me balader dans les rues de China Town, ou encore à simplement flâner au parc. Cette ville était tellement agréable et elle avait beau être grande et importante, on s'y sentait aussi bien que dans une ville plus petite. Bizarrement je m'y étais sentie très bien dès mon arrivée. Je fis un large sourire à l'attention de mon frère. "C'est encore plus beau! J'ai eu la chance de ne pas avoir trop de vent, et quand je suis allée sur le Golden Gate Bridge, il n'y avait pas trop de brouillard, ce qui est assez rare à ce que l'on m'a dit. Je pouvais voir Alcatraz et le centre de la ville. Il y a pas mal de petits trucs sympa à faire, par exemple monter jusqu'à la Coït Tower, et là je peux te dire que mes mollets en ont pris un coup! Les rues sont parfois en pentes énormes. Mais c'est une ville charmante, je suis totalement sous le charme et je ne doute pas que tu le serais aussi!" Rien que d'y repenser je me sentais émue. Cette ville m'avait marqué non seulement par son charme mais aussi et surtout parce que j'y avais fait une rencontre qui m'avait retourné. Je ne voulais pas trop en parler, j'avais encore envie de garder cette histoire pour moi, dans mon jardin secret. Pour la première fois de ma vie j'avais ressentis les papillons dont tout le monde parle quand on tombe amoureux. Je sais que c'est rapide, et que je ne le reverrais sans doute jamais, mais ce n'est pas grave parce qu'il m'a donné un souvenir merveilleux à chérir pendant encore de longues années. Le premier amour, aussi court soit-il, ne s'oubli pas, n'est-ce pas? Je préférais donc rester évasive pour répondre à la seconde question de Nathan. "Oui, j'ai rencontré quelques personnes sympas. Mais tu sais, je marchais tellement la journée que le soir j'étais trop fatiguée pour sortir alors je n'ai pas pu vraiment rencontrer plein, plein de monde. Et puis je voulais vraiment prendre ces vacances pour me re-concentrer sur moi, pour la première fois de ma vie j'ai passé plus d'une minute à ne penser qu'à ma petite personne, sans me soucier d'autre chose. C'était fantastique!" Et je ne mentais pas. J'avais véritablement pu me concentrer sur moi-même durant cet été et cela m'avait fait le plus grand bien. "Il faut absolument que tu y viennes avec moi la prochaine fois que j'y retournes, et je pense que ça arrivera plus vite que tu ne le crois! Je te préviens!" Je laissais échapper un petit rire. Pourrais-je retourner à SF et réussir à ne pas chercher après mon amour éphémère? Ou bien étais-je condamnée à lui courir après…? Je sentis mon coeur se serrer. Penser à lui me donnait des frissons et j'avais même presque envie de pleurer. Je me ressaisissais aussitôt. Il n'y avait pas de quoi être triste pour le moment!

Nathan avait lui été contraint de rester au Luxembourg avec notre père qui lui avait donné des cours pour le préparer à son futur rôle. En y pensant, il n'avait vraiment pas dû s'amuser. Notre père avait sans doute pris tout ceci très au sérieux, et l'été de Nathan n'avait sans doute pas été de tout repos. "Tu ne m'as pas dit ce que tu as fais cet été? Cours tous les jours avec papa ou bien il t'a quand même laissé souffler un peu? En tous cas j'espère bien pour toi qu'il ne compte pas mobiliser tous tes étés jusqu'à ce que tu montes vraiment sur le trône, parce que sinon je crois que tu es mal barré!" J'avais envie de rire mais j'essayais de me contenir, après tout cela ne devait vraiment pas sembler marrant pour Nathan, plutôt comme un cauchemar. Qui aurait cru qu'être Grand Duc du Luxembourg demandait tant de préparation? Je regardais mon frère attendant sa réponse. J'étais heureuse de 'lavoir retrouvé et d'avoir enfin pu exprimer ce que je ressentais. Je me sentais apaisée bien que pas pas entièrement soulagée. J'espérais qu'à présent, tout allait s'arranger.