« Aaaah ! »
Ce matin, Zoé avait ouvert les paupières en sursaut. La raison ? Pour le moins surprenante, était l’heure. Oui, l’heure. Son réveil affichait neuf heures et demi tapantes. Heure à laquelle la jeune femme ne se réveille pour ainsi dire jamais facilement. Aujourd’hui n’y faisait pas exception : elle était contrainte de renoncer à de doux rêves, nichée dans les bras de Morphée pour retrouver son meilleur ami, dans le Queens. Nathan, avec qui elle partageait tout, sans ambiguïté. Zoé n’hésitait pas un seul instant à se confier à lui, à lui raconter ses pires souvenirs, son enfance parfois intimement difficile avec sa jalousie pour sa petite sœur. Ils se retrouvaient sur beaucoup de points, et s’entendaient à merveille, depuis les plus petites classes – âge auquel ils n’avaient que le statut de correspondants franco-anglais. Désormais, s’ils sont plus âgés, ils n’ont rien perdu à leur amitié, qui au contraire n’a fait que de se renforcer. A tel point que nombreuses sont les personnes à les croire en couple. C’était à la fois flatteur pour Zoé qui voyait Nathan comme un très bel homme, mais gênant de par sa relation avec Apollinaria. Il ne faudrait surtout pas qu’il y ait de quiproquo. Car l'anglaise était prête à tout pour lui : s'il allait mal, elle accourait. Et inversement. Tout semblait mieux lorsqu’ils étaient ensemble, comme ces journées où ils se retrouvaient pour faire quelques emplettes. Et cette fois, ce n’était pas n’importe lesquelles, il s’agissait d’une mission très importante : les cadeaux de Noël. C’est d’ailleurs au regard de l’importance de cette tâche (et aussi de leurs emplois du temps respectifs) qu’ils avaient décidé de se retrouver aux alentours de dix heures, horaire d’ouverture de la plupart des magasins.
Et aujourd'hui, la seule chose qui contrait l’enthousiasme de Zoé, c’était vraiment, vraiment cette heure. La preuve en est ; elle s’était levée en retard, malgré l’ardente sonnerie de son réveil. Ce fut un petit chiot, doté d'un pelage chocolat, qui répond au nom d’Oscar qui eut raison de son sommeil. Ce Labrador n’était autre que son animal de compagnie, qui avait la bonne idée de grimper sur elle pour lui lécher la joue. Cela était étonnant, mais utile finalement.
Les yeux mi-clos, les cheveux ébouriffés, Zoé se leva en trombe. Elle fit virevolter les draps de son lit, enleva les sous vêtements qu’elle portait en guise de pyjama, et courut dans la salle de bain. Elle prit une douche .. glaciale. Ce n’était visiblement pas son jour. Frigorifiée, elle se dépêcha de se préparer, attrapant des habits à l’arrachée. Elle jetait un œil à sa montre toutes les deux minutes, en espérant secrètement que le temps puisse se figer l’espace d’un instant, ou elle allait vraiment être retard. Malheureusement, la chance n’était pas avec elle, et les secondes passaient si vite qu’elles semblaient se dérouler sous ses pieds.
C'est donc en toute hâte quelle but une gorgée de thé vert, emporta une pomme, mis sa laisse à Oscar et sortit de chez elle. De toute évidence, Nathan était déjà là-bas. Il fallait que Zoé aille le plus rapidement possible car la dernière chose dont elle avait envie, c’était de le décevoir. Et la jeune femme mettait tout en œuvre pour que cela n’arrive pas. Histoire de se faire pardonner, elle s'arrêta donc brièvement dans une petite boulangerie française qui lui rappelait ses tendres souvenirs d'enfance partagés avec lui. Enivrée par l'odeur du pain chaud, elle acheta une petite viennoiserie et glissa un petit mot dans le sachet, avant de capter le regard brillant de son chiot : « Même pas en rêve. » dit-elle avec un petit rire aux lèvres.
La jeune femme s'approchait rapidement de l’endroit où ils s’étaient donné rendez-vous. Les rayons du soleil qui apaisaient l’air frais de Décembre se reflétaient sur une tête brune : Zoé avait tout de suite reconnu Nathan. Elle arriva près de lui sans dire un mot, un grand sourire sur le visage.

« Bonjour .. J'ai fait aussi vite que possible ! » Zoé, toujours dotée de ce large sourire à son ami, et lui tendit le sachet sortant tout droit de la boulangerie, la petite viennoiserie laissant échapper sa chaleur à travers la fraicheur du matin. « Pour m’excuser de mon retard … même si tu ne le mérites pas trop … »
Sur ces mots, Zoé laissa échapper un petit rire. C'était presque évident qu'elle le taquinerait, c'était devenu une habitude entre eux. Qui aime bien châtie bien ! Elle se blottit contre ce beau brun, ami si cher à son coeur.

Zoé s'était finalement inquiété pour rien ; son meilleur ami la connaissait si bien, qu'il était même étonné qu'elle n'ait pas plus de retard que ça. Un comble pour un Prince si ponctuel ! Parfois, l'Anglaise s'accordait un instant de lucidité en se questionnant sur lui : oui, il était Prince. Et oui, c'était son meilleur ami. Si quelqu'un lui avait dit qu'elle aurait une telle relation avec quelqu'un de ce rang, elle lui aurait ri à la figure. Mais c'était sans compter sur le naturel de Nathan, qui savait aussi bien suivre un protocole (même si cela ne semble pas être son intérêt premier) que de passer des journées dans l'anonymat. Il n'était pas de ces personnes influentes qui, par définition, ne vivent que de leur notoriété et le crient sur tous les toits. Et au fond, que Nathan ne soit pas comme eux contribuait sans doute à la pérennité de leur amitié. « Alors, qu’est-ce que tu racontes de beau ? Tu rentres en Europe pour les fêtes ? » Tiens, elle n'en avait même pas parlé avec ses frères et soeurs.
« Honnêtement, je ne pense pas. J'ai bien trop de choses à faire ici et je pensais organiser un petit repas de Noël chez moi. » Petit repas qui comprendrait une partie seulement de la fratrie, à savoir Primrose et Edwin, chacun accompagné de sa moitié. En y pensant, Zoé arbora des gros yeux et une bouche bée.
« Je vais tenir la chandelle ! » Elle regarda profondément son meilleur ami, en faisant mine de l'hypnotiser.
« Tu n'iras pas en Europe pendant les fêtes, non, tu viendras secourir ta célibataire de meilleure amie.. » Sur ces paroles, Zoé ne sut garder son sérieux et laissa s'échapper un léger rire, bien qu'au fond, elle serait plus que ravie de l'accueillir. Reprenant un esprit plus adéquate à une recherche intensive de cadeaux en tous genres, ils avancèrent vers un magasin, tout en discutant. Zoé n'en croyait pas ses oreilles, il venait de lui énumérer la liste des personnes pour lesquelles ils devaient trouver des présents. Jusque là rien d'extraordinaire. Mais dans cette liste non exhaustive, Nathan venait de prononcer le prénom d'Apollinaria : la demoiselle qui l'avait sentimentalement fait terriblement souffrir en choisissant son défunt frère à lui. Il avait évidemment été dévasté par cet amour à sens unique, et Zoé avait du le ramasser à la petite cuillère. Elle se souvenait de toutes ses soirées à le consoler, à lui expliquer qu'elle avait fait un choix qui le desservait mais qu'il ne pouvait pas lui en vouloir, qu'il devait simplement passer à autre chose. Passer le cap avait été vraiment compliqué, et pour être honnête, Zoé se demandait même s'il était réellement passé. Mais de là à imaginer qu'il avait remis le couvert avec elle ? Non jamais. Abasourdie, elle s'arrêta net et regarda son ami d'un air grave :
« Dis moi que c'est purement protocolaire. » Devant sa mine gênée, elle comprit de suite qu'il ne s'agissait pas là d'une blague.
« Nathan.. Tu es sûr de toi ? » Si elle s'écoutait, elle lui ferait la morale comme le fait une mère à son fils pour le protéger, mais elle se contint. Véritablement inquiète pour lui, elle en avait même oublié toute la folie de Noël, si chère à son coeur, pour laquelle ils s'étaient donné rendez-vous. La magie était tout à coup redescendue au plus bas, laissant s'envoler sa joie au profit d'une certaine forme de déception. Il ne l'avait pas déçu, non ça il ne le pourrait jamais. Elle serait toujours là pour lui, et c'était bien ça le problème : il lui était impossible de l'imaginer dans une mauvaise posture, surtout lorsqu'il s'agissait de sentiments amoureux. Et de surcroit, avec Apollinaria : elle était très gentille mais Zoé était persuadée qu'une relation de ce type ne ferait qu'empirer les choses. « Et puis tu m'avais dit que tu étais passé à autre chose.. » La nouvelle avait fait l'effet d'une bombe dans la tête de Zoé, elle n'en revenait pas. Et Oscar semblait l'avoir ressenti puisqu'il se mit à faire un petit bruit strident.
« Oh ne pleure pas mon beau.. » Zoé le porta contre elle pour lui adresser quelques caresses : même le chiot avait capté son désarroi. Elle regarda Nathan, soupira et lui décrocha un nouveau sourire face à la situation qu'Oscar venait de détendre.

« Je suis passé à autre chose ! Enfin…j’étais passé à autre chose… » Nathan était vraiment peu convaincant. Au fond, peut être qu'il essayait de se persuader lui-même qu'il avait réussi à passer outre son amour dévastateur pour la jeune femme. Mais il n'en était rien, selon Zoé. Longtemps elle avait lutté pour le sortir de son trou et tenter de l'amener vers de nouveaux horizons, mais s'il s'était prêté au jeu, il y avait toujours une part de lui près d'Apollinaria. Ce que déplorait sa meilleure amie au vue de la situation. « Tu sais, je t’avais dit qu’on s’était « associés » pour enterrer la hache de guerre et se battre ensemble pour que ce mariage stupide n’ait pas lieu… et bien il y a quelques semaines ont s’est embrassés…plusieurs fois et…on a même failli… » Zoé était vraiment surprise dans le sens où pendant quelques temps, alors que les choses étaient en train de tourner avec cette histoire de mariage, Nathan ne l'ait pas contacté pour quelque conseil que ce soit. Elle aurait au moins pu essayer de le faire revenir à la raison. Mais c'est d'une sincérité implacable qu'elle ajouta plutôt « Je serais bien mal placée pour te donner des conseils à ce sujet, tu sais comme ont déjà terminé quelques unes de mes soirées.. enfin bref. L'embrasser ne veut rien dire n'est-ce pas ? C'était une simple dérive ? Et puis, vous n'êtes pas allés au bout, c'est tout de même un signe non ? » Bon alors, tout d'abord, il faut savoir que l'Anglaise voit des signes partout : ce n'est donc pas un argument très fiable, mais c'était toujours un argument de plus, aussi pitoyable soit-il. Mais Zoé n'eut même pas le temps de prononcer un mot qu'il reformula plus honnêtement son idée : « Je crois que mes sentiments remontent à la surface… » L'épée de Damoclès était tombée, la fin du monde venait de s'abattre (haha). « Nathan... » La surprise avait laissé une place considérable à l'inquiétude. Zoé reposa Oscar par terre et s'approcha de son meilleur ami pour le prendre dans ses bras. « J'ai peur pour toi. » Elle quitta cette étreinte pour se reculer un peu et ajouter : « J'ai peur que tu fasses une bêtise et que ça te détruise. J'aimerais juste que tu me dises que ce n'est pas irresponsable, car tu sais ce qu'il t'en coûtera si c'est le cas .. » Elle ne voulait pas lui faire la morale ni lui dire que ce qu'il faisait était mal, non : il était assez grand pour faire ses choix seul. Et quoiqu'il décide, il était indéniable que sa meilleure amie resterait à ses côtés pour l'épauler ou au mieux, pour partager son épanouissement. Epanouissement qui semblait toutefois loin d'être acquis ; s'il continuait dans ce sens, ce n'était que le début de leur histoire et Zoé espérait qu'Apollinaria soit aussi sincère que lui. Si c'était le cas, l'anglaise serait ravie de voir qu'enfin Nathan avait repris goût à l'amour. Et si cela devait être grâce à celle qui avait involontairement détruit cet espoir, tant pis. Disons même "tant mieux" car il s'agirait là d'une fabuleuse histoire d'amour : l'histoire de deux êtres qui malgré tous les obstacles, réussirent à se retrouver ... Digne d'un véritable conte de fée ! Evidemment cette idée féérique qui lui traversa la tête ne sortit pas de sa bouche, de peur que son ami s'en serve comme argument principal.
Toujours est-il que Zoé reprit la marche vers un grand magasin dans lequel ils entrèrent. Cela leur apporterait sûrement un peu de légèreté face à cette discussion, qui reprit naturellement : « Tu comptes faire quoi ? » demanda-t-elle le plus simplement du monde. Pour un individu normal, le choix se résumerait à tenter l'aventure avec sa compagne et voir si cela fonctionne ou non. Mais Nathan n'était pas vraiment "normal", de par son statut de futur chef du Luxembourg : il se devait d'avoir une attitude irréprochable et abandonner l'idée de s'élever contre leur mariage au profit d'une célébration sincère scellerait presque à jamais leur union. Ce serait un coup de poker d'officialiser la chose, il fallait qu'ils soient tous les deux certains de leur choix. Sa meilleure amie le soutiendrait dans ce choix, mais elle ne pourrait rien faire de plus de peur de s'immiscer dans leur vie privée. Et le plus difficile pour elle était sûrement de laisser les sentiments de Nathan parler pour lui : elle était terrifiée à l'idée qu'Apollinaria, bien que très gentille, n'ait pas la force de vivre une telle histoire avec le frère de son défunt mari. Une situation assez glauque et complexe aussi bien d 'un côté que de l'autre.

« Mais dis pas de bêtises Zoé, quel genre de connerie tu veux que je fasse au juste ? On est pas dans une pièce de Shakespeare ! » C'est vrai que vu comme ça, Zoé était allée un peu loin dans ces propos, dans le sens où il ne pourrait rien lui arriver de terrible physiquement. Elle voulait simplement lui faire comprendre qu'en s'engageant à nouveau dans une telle relation, il risquait de remettre ses sentiments en péril. Mais les mots n'avaient pas forcément été adaptés à la situation et elle avait sorti les violons. « Oui excuse moi, je ne voulais pas sortir les mouchoirs.. Mais tu me connais ! » Elle rit légèrement avec lui, oh oui qu'il la connaissait, par coeur. Et il devait bien avoir compris dans cette formulation qu'elle obtenait un côté maternel, et ce, de plus en plus. Mais ne nous égarons pas. Nathan n'avait aucune idée de la tournure que prendraient définitivement les choses avec Apollinaria, mais il se confit à sa meilleure amie : « Crois-moi Zoé…ce soir-là, quand on s’est embrassé.. c’était juste…parfait, on étaient tous les deux sur un petit nuage… elle avait ce petit sourire et… » A cet instant même, à cette seconde près, Zoé avait entièrement retrouvé le Nathan éperdument amoureux d'autrefois. Il parait qu'aimer "fait tellement de bien que ça finit par faire mal" mais c'est assurément la plus belle chose qui soit. Et malgré les réticences qu'elle venait de lui présenter, c'est dans l'étonnement le plus total qu'elle se retourna vers Nathan, prit une profonde respiration et avoua : « Alors fonce. » Il venait également de lui dire que c'était compliqué notamment par rapport à Alexandr, et cela se comprenait tout à fait. Mais elle ajouta : « Sans me vanter .. » elle roula des mécaniques et clignant des yeux et en se passant la main dans les cheveux avant de continuer sérieusement : « Je pense te connaitre très bien et tu n'as jamais été aussi heureux que les fois où tu avais un lien un tant soit peu positif avec Apollinaria. Et puis.. tu as des étoiles dans les yeux quand tu parles d'elle. » Sur ces derniers mots, Zoé applaudit en sautillant sur elle-même. Elle était comme ça, à changer d'attitude aussi rapidement de l'éclair quand il s'agissait de se réjouir pour l'un de ses proches. C'est donc dans une belle excitation que Zoé redoubla d'efforts pour trouver le cadeau de rêve que pourrait offrir Nathan à sa belle. Il fallait que la magie de Noël agisse, qu'Apollinaria soit si éblouie par tant d'attentions qu'elle n'hésitera plus une seule seconde à lui ouvrir son coeur. « Cherchons donc ce cadeau parfait ! Déjà, as-tu prévu une soirée particulière ? » Les idées fusaient dans le cerveau de la jeune anglaise, et c'est cette fois son côté ultra-romantique qui ressortait. Pour lui montrer qu'il était sincère, Zoé pensait que Nathan devrait faire quelque chose de simple : une soirée à la lueur des bougies ou un rendez-vous dans un endroit romantique de New York, sous la neige et avec une musique de fond pour la faire danser.. Une soirée digne d'un grand film pour fleur bleue. Ne pas lui montrer son amour dans un bel hôtel ou dans un beau restaurant, aller simplement à l'essentiel. Revenir aux vraies valeurs certes, mais néanmoins avec un cadeau. Non mais, c'est le réveillon de Noël tout de même !

C'est donc ainsi qu'elle se mit à farfouiller un peu partout sur l'étalage qui se trouvait face à eux, passant la main entre différents bibelots inutiles. Rien ici. Ils ressortirent du magasin pour se diriger vers une valeur sûre : une bijouterie de luxe. Mais avant de se plonger dans la joaillerie, elle se tourna vers son ami. « Bon alors. Si on ressort de cette bijouterie avec quelque chose, c'est que tu te prépareras à sauter le pas vers l'officialisation. Ce n'est pas un peu trop tôt ? » Zoé n'essayait pas du tout de lui mettre une quelconque forme de pression, elle voulait juste comprendre vers quoi il comptait se tourner et donc ce qu'elle pouvait lui proposer. Un bijou était peut être classique et Apollinaria n'en manquait sûrement pas, mais cela revêtait une forme symbolique fondamentale : l'union de deux êtres par la pureté d'un diamant brut. Car comme disait Marylin Monroe, « diamonds are a girl's bestfriends » !

Le soutenir avait sans doute été la meilleure réaction à adopter, vu le petit soulagement que Zoé avait aperçu dans le regard de son meilleur ami. Peut être craignait-il sa réaction en se positionnant à nouveau comme le prétendant transit de cette belle brune ? Il avait pourtant tord de croire qu'elle pourrait se mettre en travers de leur chemin, car au fond et sans jamais lui avoir avoué, Zoé trouvait que le tragique de leur histoire ajoutait une touche considérablement romantique. Elle comprenait qu'il reste si attaché à elle, malgré notamment le fait qu'il soit son ex-beau-frère. Et puis, si Zoé se souvenait bien, Alexandr avait un jour fait promettre à son frère de ne jamais abandonné la femme dont il tomberait éperdument amoureux, quelques soient les barrières à franchir ; qu'il devrait se battre à corps perdu pour elle. Alors si, en sa mémoire, il appliquait ce conseil, il n'y aurait aucun remord à avoir. Alors évidemment, c'était plus facile à dire qu'à faire tant la situation était compliquée, mais cela en valait vraiment la chandelle comme le prouvait ses dires : « J’me sens vraiment bien, tu as raison… et je voudrais que ça dure ! ». Sur ces quelques mots, Zoé esquissa un sourire des plus sincères ; qu'est-ce qu'elle aimait le Nathan heureux, il ne lui manquait plus qu'un élément pour qu'il déborde de bonheur. Cet élément pourrait d'ailleurs se déclencher avec l'aide d'un cadeau particulier, à son image. Aussi, quand Zoé s'arrêta devant une bijouterie, il lui fit une remarque : « Apo doit avoir l’habitude de recevoir ce genre de banalité de la part d’un homme et… je pense que mon frère a dû lui en offrir la tonne… » Elle en avait oublié que leurs rangs respectifs leur offraient une situation financière plus que confortable et de ce fait, rempli d'objets luxueux en tous genres. « J'oublie parfois que vous faites partie de ce monde ! » C'était vrai, Nathan essayait tellement de vivre comme un simple étudiant à New York qu'un étranger qui le croise ne pourrait jamais deviner qu'il fait en réalité partie d'une richissime famille. Et c'est ce qui faisait plaisir, il ne profitait pas de son statut comme certains pourraient le faire. Comme son frère pouvait le faire. Voilà déjà une différence considérable avec Alexandr, qui le faisait se démarquer totalement de lui.

Il fallait donc continuer sur cette voie et lui offrir quelque chose qu'elle n'aurait potentiellement jamais eu, et c'était la raison pour laquelle ils quittèrent rapidement la bijouterie pour quelques autres magasins. « Ça rend la tâche impossible, c’est ça ? » Impossible ? Non, impossible is nothing. Ils allaient peut être galérer, mais ils trouveraient. Une chose immatérielle ? Il fallait que Nathan se souvienne d'un petit quelque chose, d'une chose qu'elle affectionnerait particulièrement, quelque chose qui la représente. « Je ne me souviens plus où j'ai entendu ça - peut être au détour d'une conversation - mais si je ne me trompe pas, elle aime beaucoup le dessin animé Anastasia. » Devant le scepticisme de son ami, Zoé roula des yeux en souriant. « Faut vraiment tout t'expliquer Nate ! » elle savait qu'il ne raffolait pas de ce surnom, « si elle se reconnait en Anastasia, tu pourrais être son Dimitri. Et si tu ne vois toujours pas où je veux en venir, je te dirais juste : boîte à musique. » Zoé était une personne pleine de vie et bourrée d'imagination ; elle trouvait son idée fabuleuse et trépignait d'impatience à l'idée de découvrir la réaction de Nathan.. Mais peut-être qu'il allait lui rire au nez et lui avouer qu'elle était partie un peu trop loin ! Auquel cas, cela donnerait lieu à une situation comique qui ne ferait, ma foi, pas de mal. Et il faut avouer que le comique inspirait grandement Zoé, qui fut à l'apogée de sa bêtise enfantine quand elle vit la couronne d'un déguisement de Prince pour enfant « Prince du Lux', quand l'énergie devient une force ! » cria-t-elle un poing en l'air comme un superhéros, en riant. Elle était assez fière d'elle, cela correspondait bien à Nathan et puis, elle savait pertinemment qu'il ne le prendrait pas au sérieux. La couronne bancalement posée sur sa tête, elle arborait un air de petite fille insouciante, euphorique mais adorable. Et histoire de se sentir moins seule, elle déposa une autre couronne sur la tête de son Prince préféré. Il avait maintenant fière allure ! Et si les gens savaient.. ils nous aideraient sans doute à trouver ce fameux cadeau, que dis-je ? Ces fameux cadeaux, puisque Zoé aussi avait une liste mais sur laquelle la plupart des prénoms étaient déjà barrés : il ne lui manquait plus que le cadeau d'Edwin, le plus important selon elle. Il ne fallait pas qu'elle se trompe et la barre était haute puisqu'elle avait la fâcheuse habitude de trouver, chaque année, un cadeau qui le surprenait. Mais elle gardait cela pour elle en attendant de réussir la principale mission que lui avait confié Nathan, à savoir : trouver un cadeau à sa princesse

Spoiler:

Etant petite, Zoé était une raide dingue de tous les dessins animés de Walt Disney, qui, accompagnés d'une tasse de chocolat blanc chaud et d'une couverture chaude, formaient le cocktail le plus appréciable de la jeune fille. Quand évidemment, elle ne se faisait pas déranger par une de ses soeurs, qui lui tirait la couverture. Toujours est-il qu'en tête de ligne se trouvait notamment Peter Pan pour ses idées farfelues et son côté aventurier. Et évidemment pour son côté fraternel avec la team des enfants perdus : un peu comme les Hanwell ! Mais l'ambiance était sûrement moins fraternelle du côté de son meilleur ami et aussi du côté de sa future femme, qui devait sûrement se retrouver en la princesse Anastasia. Car Zoé en était persuadée ; elle l'avait entendu un jour, au détour d'une conversation. Mais Nathan ne semblait pas de cet avis, du moins il n'avait pas eu la même version que son amie, qui s'était peut être mépris sur la personne. « Mais y’e ne suis pas Russe moi m’dame ! » Nathan trouvait visiblement l'idée de la boite à musique ridicule, et si Zoé avait imaginé faire un peu la moue pour vexer gentiment son ami, c'était sans compter sur l'humour du jeune homme. Et c'est en esquissant un large sourire qu'il enchaîna : « N’empêche, la couronne te va bien ! Dommage que tu n’ait pas l’étoffe d’une princesse, sans quoi je t’aurais bien demandé de m’épouser, ça aurait arrangée Apollinaria ! » Zoé s'arrêta net, le regard blasé. « PARDON ? Je n'ai pas l'étoffe d'une princesse ? MOI ? Mais j'ai toujours été une princesse ! » dit-elle avec une voix de petite fille, elle aimait en rajouter un petit peu plus quand il s'agissait de Nathan car elle adorait voir sa mine déconfite face aux regards des gens aux alentours. Mine déconcertante pour quelqu'un qui se dit prêt à franchir tous les obstacles inimaginables pour reconquérir sa belle, y compris le regard critique du reste du monde. Apollinaria semblait lui donner des ailes, « En fait…je sais déjà où on va passer notre soirée, j’ai juste besoin d’un petit cadeau aussi simple que le sera notre soirée dans une semaine… » Deux réactions se bousculèrent dans l'esprit de Zoé : une raisonnable et une plus ... féérique pour clore ses multiples bêtises, par laquelle elle commencerait. Parodiant une chanson du film Il était une fois, elle entama en virevoltant : « Un cadeau pour un amour sincère et un Nathan charmant pour lui plaire ! Être bien, rire et s’étonner de s’aimeeeer ! Et il voudrait tellement qu’Apo l’embrasse car ses baisers seront pleins de grâce ... Tous deux pour la vie ils vont danser, pour vivre ce rêve, ce conte de fééées ! » Zoé savait que pour certains, sa folie dérangeait. Mais avec Nathan, elle savait qu'elle pouvait être elle-même, même si ça pouvait le mettre parfois un peu mal à l'aise - elle savait qu'il ne lui en voudrait pas. Enfin, en règle générale. C'est donc prudemment, et après avoir chantonné, qu'elle reprit définitivement un air plus sérieux : « Je suis sûre que tu auras trouvé la meilleure solution. Puisque mes propositions ne te plaisent pas .. » elle lui fit un clin d'oeil ironique avant de poursuivre, « Alors, tu vas me la montrer cette surprise ? » D'un simple sourire, l'anglaise tenta de lui faire comprendre qu'il ne serait, quoiqu'il en soit, jamais ridicule. Enfin, au fond, elle espérait juste qu'il ait réussi à se démarquer d'Alexandr : ce qui semblait simple mais qui en réalité n'était pas une mince affaire. Prions pour qu'il ait prévu une soirée des plus romantiques, qu'il ait assez de bagages pour surprendre sa belle au point de lui faire totalement oublier son défunt époux. Mais pour le moment, l'heure était à la recherche de cadeau, qui devait être en totale adéquation avec l'idée qu'avait Nathan de son réveillon de Noël en amoureux. C'est donc avec impatience que son amie (et Oscar aussi apparemment) attendait de découvrir ce qui se tramait dans la tête de ce jeune Prince.

Les deux amis se connaissaient depuis des années, à vrai dire : Nathan était un des seuls amis d’enfance qu’avait gardé Zoé. Et pourtant, rien ne les prédestinait à se rencontrer. La jeune Hanwell était issue d’une grande famille londonienne et d’une fratrie de neuf enfants, tous plus différents les uns que les autres, mais qui se soutenaient malgré toutes les épreuves qu’ils ont, encore aujourd’hui, put surpasser ensemble. Ou plus ou moins. Il était vrai que depuis quelques années, la tension était vive entre les jumeaux de la famille. Pour cause ? En premier lieu, la jalousie qu’éprouvait profondément Zoé pour sa petite sœur atteinte d’une leucémie et qui avait attiré toute l’attention de son frère. L’adolescence passée avec Edwin avait ainsi été des plus tumultueuses, et elle ne l’avait pas ménagé, allant même jusqu’à des violences verbales … Qu’elle regrettait amèrement aujourd’hui. Mais cette mauvaise période était passée, au détriment d’une nouvelle, toujours peu glorieuse. Car si l’anglaise avait rejoint la ville de New York, c’était pour se rapprocher de son jumeau, qui sombrait dans une profonde dépression des suites de l’accident qui avait été fatal pour sa petite amie de l’époque. Faisant tout son possible pour revenir auprès de lui et lui démontrer l’étendue de son soutien, ils avaient, au fil du temps, retrouver leur complicité d’antan. Mais la tornade Zoé avait une nouvelle fois frappé, involontairement : terriblement prise par le nouveau travail de journaliste qu’elle venait de dégoter au sein d’un magazine de renom, elle avait délaissé –une nouvelle fois- son frère. Elle se sentait terriblement gênée mais il fallait qu’elle se rachète et qu’elle fasse passer définitivement au premier plan ses liens fraternels. C’est aussi pour cela qu’elle aimait Nathan si fort. Elle nouait avec lui une amitié profonde et lui vouait une véritable admiration ; non pas qu’elle lui faisait des éloges à tire-larigot, mais elle pensait intimement qu’il était une sorte d’homme parfait, de frère parfait. Et si jamais elle ne lui avait dit, c’est certainement parce qu’elle le connaissait trop bien pour savoir qu’il démentirait immédiatement la chose, se sous-estimant réellement. Car Zoé avait évidemment connu Alexandr, et elle avait également été présente lors du deuil qu’avait fait Nathan : c’était sans nul doute la pire chose qu’il avait pu vivre. Pendant cette période, Zoé se mettait régulièrement à sa place, imaginant le pire : cela lui avait ouvert les yeux vis-à-vis de son jumeau, elle savait qu’elle ne pourrait vivre sans lui, mais elle l’avait peut-être juste un peu mis de côté. Ce fut la pire chose qu’elle ait pu faire et il avait été grandement bon de lui pardonner tous ces faux-pas. Des faux pas que son meilleur ami avait suivi en direct, comme tout ce qu’elle avait entrepris dans sa vie. Il la connaissait absolument par cœur, et pourtant elle arrivait toujours, malgré tout, à le surprendre.

Autant dire que les quelques notes de musique directement sorties de la gorge de la demoiselle devaient être plutôt faux. Ou bien, elle venait de le surprendre simplement par la référence au dessin animé Raiponce, son préféré, puisqu’il s’agissait d’une princesse blonde loufoque armée d’une poêle. « Tu es tellement une fille... » ces quelques mots déclenchèrent chez Zoé un fou rire incontrôlable. Evidemment qu’elle était une fille ! Nathan avait de ces formulations parfois ! Elle était une fille, et quoiqu’il en dise, elle s’était sentie une véritable petite princesse à l’image d’Aurore et de ses boucles blondes, ou même encore d’une princesse secrètement destituée de son titre à l’instar de Cendrillon. Oui, comme toute petite fille, Zoé s’était imaginée à la place d’une de ses princesses de conte de fées. Grande fut sa surprise quand elle découvrit que son correspondant était un Prince ! Charmant ? Plutôt pour son âge. Maintenant qu’il y a prescription, nous pouvons aisément narrer que la petite tête blonde en pinçait pour son correspondant, qui, par définition, correspondait parfaitement à un son idéal de prince. Mais cette idée d’amour éternel ne fit pas long feu dans la tête de la petite britannique, qui se déclara elle-même meilleure amie officielle de Nathan. Ce qu’il sembla aussitôt accepter ; il allait sans dire que bon nombre des personnes qui approchaient la famille De Luxembourg étaient intéressés. Et si Zoé avait des étoiles dans les yeux en découvrant le château dans lequel il vivait, elle l’aurait tout autant aimé s’il vivait dans un appartement de banlieue. Ils s’étaient toujours beaucoup amusés, avaient vécu des périodes toutes aussi pénibles les unes que les autres, et avaient partagé les meilleurs moments ensemble. Autant dire que l’excitation de Zoé était à son comble quand il parla d’une surprise pour Apollinaria. « Bon…d’accord, mais promet moi d’être honnête ? Et essaie de te mettre dans la peau d’Apo pour voir si ça pourrait lui plaire ou pas… » La jeune femme acquiesça d’un hochement de tête rapide et impatient. Elle ferait tout son possible pour tenter de se mettre à la place de la princesse de Nathan, d’être à la hauteur de son rang. Mais loin d’être aisée était la tâche, aurait dit Maitre Yoda. Car il était de notoriété publique que ces deux jeunes femmes étaient totalement différentes : l’entente était cordiale, et une relation amicale pourrait même éventuellement être possible entre elles si elles passaient un tant soit peu de temps à deux. Mais pour exemple, tandis que Zoé pouvait tout à fait se retrouver à chiner des vieilles lampes industrielles en brocante, Apollinaria n’y aurait ja-mais songé. Aussi, Zoé se sentait d’humeur à se mettre dans la peau d’un personnage : mais elle ne put retenir une mine étonnée quand elle vit que Nathan l’amenait vers Brooklyn. Brooklyn ? C’était certainement un quartier que la femme dont il était éperdument amoureux n’avait jamais visité. Mais après tout, il voulait se démarquer de son défunt frère et surprendre agréablement et intensément sa belle. Le voyage s’annonçait particulièrement impressionnant de la part de ce jeune Prince, à l’allure tout à fait normale d’un étudiant lambda.

Quand le chauffeur s’arrêta, Zoé constata qu’il s’agissait d’un bâtiment plutôt … Vétuste en apparence. Sans vouloir parler trop vite, elle songea que sa surprise devrait être d’autant plus incroyable, s’il voulait pallier à la vétusté extérieure. Suivant son meilleur ami, ils traversèrent un long couloir noir avant que la demoiselle n’ait l’ordre d’attendre quelques minutes. Dans un petit cri de surprise : « Ohhh ! », elle trépignait d’impatience. Sautillant sur elle-même et arborant un large sourire faisant apparaître la blancheur de sa dentition, elle « J’ai trop hâte ! Na.. ? » - avant même de terminer sa phrase, il surgit devant elle et se mit sur le côté, lui laissant le passage libre vers la galerie. Avançant avec lenteur tant Zoé était abasourdie, elle resta toute silencieuse. C’est sans doute pour cela que Nathan se sentait gêné, et semblait même jusqu’à se justifier : « Je sais que c’est assez simple…surtout pour Apollianaria qui est une princesse et qui a l’habitude des soirées mondaines et de tout ce genre de chose…et des restaurant trois étoiles aussi.. Mais…je sais que l’hiver est sa saison préférée…et qu’elle adore la neige alors.. » .. Zoé observait tout avec attention, des étoiles dans les yeux. La photographie, avec le pionner Nicéphore Niepce, était un art qui passionnait la belle blonde avec également la peinture et le cinéma. Mais l’installation que venait de mettre en place son meilleur ami était … tout bonnement fabuleux. C’était magique et cela lui rappelait bel et bien le dessin animé Anastasia, avec les contrées Russes sous la neige. Une neige qui tombait à l’intérieur de cette même pièce. Zoé écarta ses bras, pencha la tête en arrière et tourna sur elle-même en souriant avant de s’immobiliser face à son ami. « Il n’y a pas besoin de chercher à se mettre dans la peau d’Apollinaria pour savoir que ce sera sans doute la plus belle nuit de toute sa vie. » La jeune femme arborait un air de petite fille, et Apo avait beau venir d’un milieu particulièrement riche et doté de toutes les choses qu’elle désirait.. Une scène comme celle que lui avait présenté Nathan ne s’achetait pas ; c’était le fruit d’une imagination débordante et découlait d’un amour sans faille. « C’est parfait Nathan. C’est comme dans un rêve, comme la scène romantique d’un film à l’eau de rose. Et puis cette neige ! » Si les deux demoiselles partageaient un point commun, c’était évidemment leur passion pour la neige tombant du ciel.
Cette scène irréelle rattrapait considérablement la façade du bâtiment dans lequel se trouvait la galerie, et Apollinaria serait définitivement convaincue une fois arrivée au bout de ce long et ennuyeux couloir. Un couloir que Zoé avait trouvé quelque peu.. glauque. C’est d’ailleurs la seule remarque qu’elle pouvait faire à son ami, qui se tenait là et avait tellement redouté sa réaction ; « Par contre, ce serait pas mal de poser des petites bougies le long du couloir … Histoire de l’arborer sobrement avant de lui cacher les yeux, parce que je doute qu’en dehors de la magie de cette pièce, Apollinaria aime ce quartier.. » Zoé rit légèrement, son meilleur ami avait voulu qu’elle soit franche et se mette dans la peau de sa chérie, c’est ce qu’elle avait tenté de faire. C’est tout naturellement que son attention se reporta sur les projections. « C’est enchanteur.. »