somebody that i used to know

ft timeo et sara

Sara.

Ce prénom, toujours ce prénom. Des mois et des mois qu'il me restait en travers de la gorge et qu'il m'empêchait de dormir la nuit. Sara, quatre lettres apparemment inoffensive, et qui pourtant, me faisait souffrir. Je l'aimais bien, pourtant. C'était joli, élégant et délicat. La personne qui le portait était en revanche un monstre. Ce prénom me hantait depuis si longtemps. Je ne cessais de penser à elle, chaque jour, je me demandais ce qu'elle était en train de faire, dans l'hypothèse où, bien entendu, elle soit encore en vie. Que faisait-elle ? Est-ce qu'elle était heureuse, qu'elle avait des amis ou un copain ? Était-elle malheureuse, seule et sans abri ? Pensait-elle a lui, regrettait-elle ce qu'elle avait fait ? J'espérais que oui, j'espère vraiment que oui. Qu'elle regrettait, et qu'elle souffrait. Parce qu'elle m'avait fait énormément de mal. Je voulais qu'elle aussi, ait mal à son tour; et pourtant, je l'aime tellement que je ferais quasiment tout pour qu'elle se porte bien. Des mois que je suis sans cesse habité par ces sentiments si contradictoire.

Je plantais ma fourchette dans mon plat de pâtes carbonara. J'en avais plus qu'assez de penser à elle; Nasty voulait que je retourne chez le psychologue à cause de ça. Parce que Sara me manquait et que je n'arrivais pas à accepter l'idée qu'elle m'ait abandonné. Ça peut paraître un peu égoïste, mais je pensais qu'elle m'aimait suffisamment pour ne pas me laisser comme ça. Dès que je repensais à tout ça, ça me causait des migraines horribles et ça m'empêchait de me concentrer. J'avalai un peu de mes pâtes -qui était délicieuse, soit dit en passant. J'avais un certain don pour faire cuire correctement les Pasta Box au micro onde-, reposai ma fourchette dans l'assiette et reprit mon livre. Bizarrement, ce soir, l'envie d'étudier un peu m'avait pris. Ça ne m'était jamais arrivé jusque là. Néanmoins, j'avais du mal à me concentrer. Mon esprit divaguait toujours sur autre chose, notamment sur cette satané Sara. Même quand elle n'était pas là, elle m'empoisonnait l'esprit ! Quelle garce. Je jetais un coup d'oeil à l'extérieur en soupirant. Même si mon appartement ne disposait pas du vue extraordinaire, j'éprouvais toujours un sentiment de vertige en regardant dehors. Tous ces grattes-ciel, ces immeubles imposants, cette foule qui se pressait sans arrêt... Savoir que j'étais seul dans tout ça, ça me donnait froid dans le dos.

J'attrapai mon crayon et griffonnai quelques notes sur mon livre. Des moyens mémotechniques. Par exemple, pour apprendre les noms de os de la cage thoracique qui étaient rachis, manubrium, acromion apophyse coracoïde, apophyse xiphoïde, sternum et cavité glénoïde, j'utilisais cette phrase : "Rachid, Manu, Accrochez-vous bien, Apolline et Coralie arrive ! Il s'agit de Apolline Xyphoïde, malheureusement, mais elle vous passera son Numéro ! Elle vit près du Canal de Glévis". Bon certes c'est tordu, mais je le suis donc tout va bien. J'adorais inventer des phrases sans queue ni tête, ça n'avait aucun sens, comme moi. Nan, mais sérieusement, la médecine c'était important mais tellement chiant. Je détestais ça, et pourtant, savez-vous pourquoi je suis dans ce milieu ? Sara, encore une fois. Elle voulait réellement que je fasse de bonnes études, et elle pensait que la médecine serait parfaite pour moi. Génial, merci sale garce.

Je m'accordais une petite pause; je dévorais mon plat de pâtes carbo devant Les Experts quand on sonna. J'étais persuadé que c'était Mrs Goulding, ma voisine d'en face, qui venait encore me donner de son ragoûtt dégueu. Cette pauvre femme avait perdu son fils l'année dernière et elle avait pitié de moi, alors quasiment chaque soir, elle me donnait un peu de son repas. Et quasiment chaque fois, elle me donnait de ragoût qui est, entre nous, vraiment immonde. Je me levais, ouvrit la porte et prononçai d'un air las : « Mrs Goulding, j'en veux pas de votre putain de ragoût à la no... » Je ne pus terminé ma phrase en voyant qui se tenait devant moi. Soit Mrs Goulding avait rajeunie d'environ cinquante ans, soit mes yeux me jouaient des tours, ou soit Sara se tenait bel et bien devant moi.

J'écarquillais mes yeux, incrédule. « Wow wow wow, c'est quoi le plan là ? » J'hésitai à lui fermer la porte au nez, mais avant ça, j'estimais qu'on devait avoir quelques explications. « Tu te casses pendant deux ans, et tu te ramènes comme ça chez moi ? Je rêve ou je rêve ? Tu te rends pas trop compte je crois ! Oh, et j'espère que tu t'es bien défoncée, que tu t'es bien faite défoncée aussi, pendant tout ce temps, n'est-ce pas très chère soeur ? » J'étais super, mais super remonté contre elle. En vérité, j'avais envie de fondre en larmes dans ses bras mais je ne pouvais pas faire ça.