Certains disent que le travail n’est bon que pour amasser l’argent nécessaire pour vivre. D’autres vous diront que le travail c’est la santé. Austin, de son côté, vous assurera que se rendre chaque jour dans l’atelier du garage dans lequel il travaillait était une vraie partie de plaisir. Vrai fan de motos depuis son adolescence, il adorait avoir les mains crasses de cambouis à force de triturer les pièces des moteurs, il appréciait particulièrement les bruits qui se faisaient entendre au moment où lui ou un collègue se mettait à réparer une bécane et l’odeur d’essence ne lui était pas désagréable. En résumé, il nageait comme un poisson dans l’eau lorsqu’il se rendait sur les lieux de son travail et ses journées passaient généralement très vite, n’ayant pas le temps de se tourner les pouces entre les réparations à faire, les paperasses à remplir et les clients à accueillir et à rassurer quant à leur moto défaillante. Et en plus d’être un job-passe temps qu’il adorait, la mécanique permettait au jeune père de faire le vide dans sa tête, ce dont il avait particulièrement besoin ces derniers temps. Les mois se succédaient gentiment depuis le retour de Kiara à New York et il remontait la pente progressivement. Mais le récent retour de sa fille dans le cocon familial après qu’il ait gagné le procès visant à lui retirer la garde de son enfant ne se passait pas comme il l’avait espéré. Il avait eu l’espoir que les tensions s’apaiseraient rapidement, que Lua finirait par rapidement oublier sa rancœur à l’égard de la femme qu’elle jugeait comme étant la fautive de sa séparation subite d’avec son père et de son internement dans un foyer de New York. Mais les jours se succédaient et la gamine persistait à se montrer froide avec la philippine, ce qui était évidemment loin de plaire à Austin qui, malgré les paroles rassurantes de Kiara, commençait par perdre patience. Ce jour là donc, il espérait pouvoir se changer les idées en se mettant au travail sur une Harley-Davidson qui nécessitait une bonne remise à neuf au niveau de son moteur, de ses suspensions et de son embrayage. En arrivant au travail, il prit cependant le temps d’envoyer un sms à une de ses plus grandes amies. « Si tu as le temps, viens à l’atelier pour 10h, j’ai du travail pour toi ;-) ». Il connaissait Belle depuis un bon bout de temps, son père exerçant lui aussi le travail de mécanos. Tous les deux étaient donc très proche et, rapidement, Austin était devenu une sorte de mentor, un grand frère pour la jeune fille. Tous les deux adoraient passer du temps à réparer des motos tout en discutant, et le jeune père sentait qu’aujourd’hui était une journée idéale pour la convier à la réparation de cette fameuse Harley. Le message envoyé, il se mit dors et déjà au travail, démontant le moteur pour l’examiner de plus près et se mettre à le remettre à neuf, ce qui allait lui demander un certain temps. Lorsqu’il remarqua l’arrivée de Belle, ses mains étaient déjà noire de cambouis et des pièces étaient éparpillées un peu partout autour de la moto. « Tu es en retard ! » lui lança-t-il sur le ton de l’amusement, insistant sur le fait qu’elle avait dépassé l’heure de rendez-vous de cinq minutes. Mais rapidement, il lui adressa un clin d’œil et délaissa les outils qu’il tenait pour se nettoyer les mains avec un chiffon, de sorte à ne pas salir la jeune femme au moment où il encercla ses épaules d’un de ses bras pour aller poser un rapide baiser sur sa joue.

Dormir, dormir et encore dormir. Voilà le mot qu’elle n’arrêtait pas de se répéter encore et encore. Se concentrer était devenue une torture, tout comme marcher et parler. Elle était épuisée et tout son corps n’avait pas tardé à tirer l’alarme. Elle ignorait le nombre d’heures éveillée qu’elle avait enchaîné et le nombre de cafés qu’elle avait pu engloutir lorsqu’elle quitta le Lenox Hill pour se traîner jusqu’au métro et prendre le ferry qui la mena sur Staten Island. Retrouver l’appartement où elle vivait en colocation avec Aloysia, Ozalee et Norah fut une véritable délivrance pour l’américaine qui se traîna jusque dans sa chambre et se laissa lourdement tomber sur le matelas, la tête la première dans ses oreillers pour s’endormir comme tel. Il était six heures du matin lorsque Belle avait enfin terminé sa garde, environ sept heures lorsqu’elle arriva chez elle et la jeune femme sombra dans le sommeil jusqu’à sentir sous elle les vibrations de son portable qui la réveillèrent. Un grognement lui échappa alors qu’elle se contorsionnait pour sortir l’objet de la poche de son jean sans bouger le reste de son corps, tout du moins pas sans avoir le portable dans sa main. La tête tournée sur le côté, elle dégagea la mèche de cheveux bruns qui lui barrait la vue et lu en diagonale le message qu’elle venait de recevoir. Un soupire lui échappa. Aussi heureuse qu’elle pouvait être à l’idée de mettre les mains dans le cambouis, elle était tellement épuisée que le simple fait de se redresser dans son lit lui prit cinq bonnes minutes, celui d’aller dans la salle de bain tout autant de temps et la demoiselle resta bien plus de vingt minutes sous l’eau chaude. Chaudement habillée et prête à repartir de chez elle, Belle fit un détour dans un Starbuck une fois au coeur de New York City avant de prendre la direction de Brooklyn, connaissant le chemin menant au garage où travaillait Austin par cœur désormais. « Tu es en retard ! » Ne pouvant s’empêcher de lever les yeux au ciel, Belle laissa sa tête tomber en arrière tandis qu’elle rejoignait à grands pas son ami, soudainement plus réveillée à l’idée de pouvoir faire ce qui la passionnait : retaper des motos, même si elle était bien plus habile avec une voiture. Le bras d’Austin autour de ses épaules et un baiser donné sur sa joue suffirent à l’américaine pour retrouver le sourire et faire disparaître toutes traces – ou presque – de sa fatigue. « Figure-toi que moi aussi j’ai un travail. » Lâcha-t-elle d’un ton faussement agacé. « J’ai fini ma garde il y a approximativement plus de quatre heures.[/color][/b] » Et pourtant elle avait l’impression d’avoir quitté l’hôpital tout juste une demi-heure plus tôt. Cependant, Belle laissa bien vite son agacement de côté pour laisser l’excitation l’envahir en voyant la Harley-Davidson qui se tenait devant eux. « Elle est magnifique … dépouillée là, tout de suite, mais magnifique. » Elle n’était pas une grande connaissance pour ce qui touchait des motos, mais Austin l’avait déjà bien formé même si elle savait qu’elle avait beaucoup à apprendre de lui encore avant de lui arriver ne serait-ce qu’un peu à la cheville. Cependant, elle savait reconnaître un petit bijou lorsqu’elle en avait un devant elle, don – puisqu’elle considérait ceci comme tel – qu’elle tenait de son père.