ELLYOT & MAXIME

« Jamais tu éteins ton portable ? » Et jamais tu fermes ta gueule ? Se faisant violence pour ne pas laisser échapper ces mots, Maxime cessa de fixer sa cible quelques instants pour poser son regard sur la jeune femme assise à ses côtés qu’elle ne se gêna pas de fusiller du regard. On lui avait collé une novice dans les pattes et la jeune femme n’appréciait que très peu cette attention de la part de ses supérieurs, d’autant plus que ces derniers savaient pertinemment que son travail elle le faisait mieux lorsqu’elle n’avait personne à baby-sitter comme ça pouvait être le cas aujourd’hui. Malheureusement pour elle, elle n’avait pas le choix et devait supporter cette Laura, Laure ou Laurie – elle ne savait plus – pour plusieurs jours tout en tentant de se persuader qu’elle n’allait pas les faire repérer. Voilà plusieurs jours qu’elle suivait la même personne suivant les ordres qu’elle avait reçu comme un bon petit soldat qu’elle pouvait être et Maxime voulait être certaine d’avoir toutes les cartes en main avant de tenter d’approcher le jeune homme qu’elle se devait de mettre dans sa poche pour ensuite faire en sorte qu’il se retourne de lui-même contre ses employeurs. Elle avait lu son dossier – comme son frère avait lu celui de la sœur de sa cible – et elle savait par conséquent que sa mission ne serait pas bien difficile, mais l’Australienne voulait tout de même s’assurer que tout irait bien et qu’elle n’irait pas au devant d’une mauvaise surprise.

Faisant taire les mots qu’elle pensait envers Laura, Laure, Laurie, elle posa l’appareil photo qu’elle tenait encore jusqu’alors et se pencha pour attraper son iPhone, faisant rapidement glisser son pouce sur l’écran tactile pour ouvrir le message que son frère lui avait envoyé et poussa un soupire. « Fin de l’apprentissage pour aujourd’hui, j’ai d’autres devoirs qui m’appellent. » Déclara-t-elle simplement en mettant le contact puis en quittant la place où elle s’était garée pour espionner – car tel était le terme exact – l’homme qu’elle allait devoir approcher sous peu. Elle ne donna pas plus d’explications à sa « coéquipière » provisoire jugeant ne rien lui devoir et elle déposa cette dernière au pied d’un bâtiment à priori désaffecté et désert qui se trouvait en réalité être l’une des succursales de l’agence pour laquelle elle travaillait et dont le quartier général se trouvait à Melbourne. Maxime ne s’y éternisa pas plus longtemps n’ayant guère l’envie de devoir s’expliquer – ce qu’elle faisait très rarement depuis la naissance de son fils – et fila droit vers Coney Island où elle vivait en colocation avec l’une de ses plus proches amies, mais surtout là où se trouvait actuellement son frère qui avait promis pouvoir garder son neveu pour la journée. Garée dans l’allée, la jeune femme rejoignit le hall d’entrée en trottinant et sans même se dévêtir elle gagna le salon où elle trouva son frère et son fils. « Franchement, j’espère que t’as une bonne excuse Cam. » Annonça-t-elle tout en prenant son petit garçon dans ses bras, levant ensuite la tête vers son frère qui faisait bien deux têtes de plus qu’elle.

En guise de réponse, son jumeau opina du chef en lui adressant un sourire puis après lui avoir déposé un baiser sur le sommet de la tête, il s’éclipsa en vitesse, laissant l’Australienne seule avec son fils. Elle qui avait prévu de passer la journée à en savoir plus sur sa cible autant dire que c’était manqué, mais elle ne comptait pas rester enfermée plus longtemps chez elle et s’empressa donc de couvrir son fils correctement et reprit la voiture. Le centre-ville de Manhattan rejoint, Maxime passa une grande partie de l’après-midi avec Avery dans un parc, finissant avec une tonne de sable sur elle et dans ses chaussures avant de prendre la direction d’un Starbuck, son fils confortablement installé dans sa poussette. Sa boisson commandée et payée, la jeune femme fit de son mieux pour la maintenir dans sa main tout en dirigeant la poussette jusqu’à finir par se battre avec une table, la maudissant mentalement pour finir par être attirée par la porte qui venait de s’ouvrir. Curiosité oblige, à chaque fois que la jeune mère entendait ou apercevait une porte s’ouvrir elle se sentait obligée de regarder qui arrivait ou partait et ce jour-là … elle s’en serait passée. Le souffle coupé et cessant immédiatement de se battre pour passer, son regard resta fixé sur le jeune homme qui venait d’entrer et son sang ne fit qu’un tour. « Ellyot. » Souffla-t-elle en doutant sincèrement qu’il parvienne à l’entendre tant elle avait pu dire son prénom d’une toute petite voix. De toutes les personnes qu’elle pensait un jour recroiser dans New York le jeune homme face à elle était tout en bas de la liste et étant donné ce qui lui était arrivé après leur rupture, Maxime aurait réellement préféré qu’ils ne se recroisent pas de si tôt.

Loin d’avoir prévu de passer sa journée avec son fils – même si c’était loin de lui déplaire – elle devait s’en accoutumer et le faisait plutôt bien. Passer du temps avec Avery était ce qui lui manquait le plus ces derniers temps. Les deux emplois qu’elle avait lui donnait que peu de temps pour être avec son fils autant qu’elle le souhaitait, toutefois elle était bien trop fière de ce qu’elle accomplissait pour arrêter l’un ou l’autre. Elle aimait se dire qu’en contribuant à la justice de ce bas monde elle assurait à son petit garçon un meilleur avenir, un avenir plus sûr où il ne risquerait pas de mourir sans la moindre raison et où il ne serait pas enrôlé par une organisation véreuse comme Orchideus pouvait l’être. Quant à sa carrière de chanteuse, c’était une véritable passion pour elle, avant d’être sa couverture. Elle composait et écrivait elle-même ses chansons ce qui était un moyen pour l’australienne d’exprimer ce qu’elle avait sur le cœur sans se sentir trop mise à nue. Elle avait beau parfois se plaindre de sa vie, elle ne l’aimait pas moins pour autant même s’il fallait bien avouer qu’elle aurait souhaité avoir plus de temps à passer avec son fils. Toutefois, ce jour-là ce n’était absolument pas ce qui était prévu dans son emploi du temps.

Avery était supposé être gardé par Cameron pour laisser le temps à l’australienne de faire un peu plus de repérage concernant la dernière mission qui lui avait été confiée … ça et le fait de devoir faire du baby-sitting avec une nouvelle recrue de l’agence. Cependant, il avait fallu que son frère ait autre chose à faire et étant donné qu’ils étaient les deux seuls membres de leur famille sur le sol américain et qu’elle ne voulait pas ennuyer le parrain du petit garçon, elle ne pouvait pas refuser le fait de s’occuper de son propre fils, pas alors qu’au fond d’elle ce changement brutal dans l’organisation de sa journée lui faisait plaisir. En plus d’être séparée de la poupée Barbie futurement agent et pot de colle qui lui avait été confiée, elle pouvait avant tout et surtout avoir enfin un peu de temps avec son fils, que ce dernier soit légèrement malade ou non. Ainsi, la petite balade improvisée dans les rues de New York fit autant de bien au bébé qu’à la mère qui avait enfin l’impression d’en être réellement une et d’avoir l’occasion d’avoir une vie un tant soit peu normale, ne serait-ce que pour une journée. Même la table avec laquelle elle rencontra des difficultés – ou plus exactement la poussette – n’aurait su parvenir à gâcher sa joie d’être enfin loin de tout ce qui faisait habituellement partie de sa vie de tous les jours. En réalité, ce fut le jeune homme qui entra dans le café et qu’elle n’eut aucun mal à reconnaitre qui fit disparaître toute joie pour laisser place à la panique et au fait qu’elle n’avait plus la moindre idée de comment réagir. Ellyot était la dernière personne qu’elle pensait revoir un jour.

Le revoir par un pur hasard la mettait dans une situation qu’elle connaissait que peu souvent, le genre de situation où elle avait la sensation de perdre totalement le contrôle sur les évènements. « Je pense finalement que je devrais rebrousser chemin et ne pas te déranger, tu as d’autres préoccupations maintenant que de revoir ou régler tes comptes avec ton ex. » Surprise par les paroles prononcées par l’américain, Maxime resta quelques instants interdite, incapable de prononcer le moindre mot tandis qu’elle avait une bonne fois pour toute réussi à passer l’épreuve de la table. « Je … attends … pars pas comme ça. » Niveau réplique, l’australienne faisait bien mieux, mais elle continuait d’être incapable de penser correctement, perturbée par le retour brusque d’Ellyot dans son existence. Un soupire lui échappa. Maxime se redressa, une main sur l’une des poignées de la poussette dans laquelle se trouvait Avery, et l’autre allant masser nerveusement son front. « Ça te dirait qu’on prenne un café ensemble, pour parler ? » Dieu qu’elle en avait des choses à dire et même si l’australienne ne savait pas par où elle allait bien pouvoir commencer, à présent que le jeune homme était là elle refusait de laisser passer sa chance de lui reparler, de renouer avec lui et de lui avouer certaines choses qu’il était en droit de savoir, certaines choses concernant l’enfant qui s’était paisiblement endormi dans sa poussette.

Elle n’avait pas la moindre idée de par où commencer et c’était bien la première fois qu’elle avait cette sensation de ne rien maîtriser. Elle était une perfectionniste, ce qu’on lui reprochait assez souvent, mais qui était un atout dans son travail au sein du gouvernement. Elle aimait les choses bien faites, elle aimait parvenir à ses fins et surtout y parvenir comme elle l’avait décidé. Son histoire avec l’américain avait été bien loin de tout ça, elle n’avait rien maîtrisé, elle s’était contentée de subir et d’encaisser. Si à l’époque elle n’avait pas su comprendre la raison pour laquelle Ellyot avait été aussi froid et mauvais avec elle, aujourd’hui elle comprenait mieux, elle comprenait très bien même. Elle avait tant de choses à lui raconter, tant de choses à lui dire dont une plus importante, mais pour ça fallait-il encore qu’il accepte de rester et non pas qu’il prenne la fuite comme il semblait tant vouloir le faire. Peut-être aurait-elle dû le laisser faire et leur permettre de mener leur vie tranquillement chacun de leur côté ? Cependant, une petite voix dans sa tête ne cessait de lui répéter qu’il avait le droit de savoir et que malgré la présence masculine de Cameron dans la vie de son fils, le petit garçon dans sa poussette avait tous les droits de connaître son père … du moins si ce dernier acceptait de faire partie de la vie d’Avery. « Je… Euh… Je reste oui… » La pression sur ses épaules sembla diminuer légèrement lorsque l’américain accepta de rester. Un léger sourire étira les lèvres de Maxime qui, comme Ellyot, alla prendre place autour d’une table, rapprochant la poussette de son fils au plus près d’elle, à la fois au cas où il se réveillerait, mais aussi pour éviter de boucher le passage.

Son regard se posa sur le jeune homme qui s’empressa de faire signe à l’un des serveurs qui arriva pour prendre leur commande et, une fois son autre café commandé, la russo-australienne le regarda s’éloigner avant de se concentrer entièrement sur Ellyot. « Avant toute chose, je voulais te dire que je suis désolé d’être parti comme ça, désolé que notre histoire se soit terminée de la sorte, je n’ai rien contrôlé… » Son petit sourire se fit plus sincère, exprimant sans le moindre mal que pour elle, il n’avait pas besoin de s’excuser. Maxime comprenait parfaitement, sans doute parce qu’elle était devenue mère et que la venue d’Avery lui avait ouvert les yeux sur pas mal de choses dont l’attachement que son ex petit ami pouvait avoir pour sa petite sœur. « Arrête, t’as pas besoin de t’excuser, Ashley avait besoin de toi et tu étais là pour elle, le reste ça ne compte pas autant. » Tenta-t-elle afin de lui faire comprendre qu’elle ne lui en voulait pas. Pourtant, il était vrai que dans les débuts elle l’avait maudit, détesté et qu’elle avait prié pour ne jamais avoir à croiser sa route dans le futur, mais encore une fois, la naissance de son petit garçon avait beaucoup changé sa vision des choses et lui avait fait réaliser à quel point elle avait pu être égoïste. « Enfin, tu as refait ta vie, c’est l’essentiel, je ne m’en serais que plus voulu si je te recroisais aujourd’hui complètement déprimé par ma faute ! » Nerveusement, la jeune mère mordilla sa lèvre inférieure et remercia silencieusement le serveur de venir leur apporter leurs commandes à cet instant précis. Son café posé devant elle, elle remercia le jeune homme en lui adressant un large sourire, puis se concentra sur sa boisson, ses mains autour de la tasse pour en capturer la chaleur.

« Sinon, tu voulais me parler de quelque chose de particulier? » Maxime leva la tête vers Ellyot si brusquement que la salle où ils se trouvaient se mit à danser autour d’elle. Elle n’avait pas oublié en si peu de temps, mais elle aurait préféré discuter d’autre chose avant de lancer dans cet aveu difficile, mais il valait mieux que ça soit fait une bonne fois pour toute. Son regard dévia d’Ellyot vers Avery qu’elle regarda pendant de longues secondes, un soupire finissant par lui échapper tandis qu’elle relevait la tête vers l’américain. « Je précise d’avance que je te demande rien, je m’en sors très bien toute seule mais … » De nouveau, la russo-australienne mordit sa lèvre et détacha l’une de ses mains de sa tasse pour aller masser sa nuque. « Je ne t’ai rien dis parce que je savais que tu avais d’autres préoccupations, je voulais pas que tu penses que je le gardais uniquement pour que tu reviennes dans ma vie, mais même si je suis passée à autre chose, tu as le droit de savoir. » Maxime planta son regard dans celui de l’interne fasse à elle. Elle fit entre une grande bouffée d’oxygène dans ses poumons et expira tout doucement pour faire disparaître un tant soit peu le nœud d’angoisse qui s’était formé dans son estomac. « Ce que je voulais te dire c’est que le petit garçon que tu vois là, ce n’est pas le fils de n’importe qui … c’est ton fils Ellyot. » La jeune femme le jaugea alors du regard presque prête à le voir tourner de l’œil à tout instant – ce qu’elle aurait probablement fait à sa place. Le silence qui prit place entre eux ne l’aida pas le moins du monde à se détendre, toutefois la russo-australienne s’efforça de rester aussi sereine que possible dans l’attente de sa réaction.

Elle avait eu besoin de lui dire, autant pour se libérer de ce poids, mais aussi parce qu’à ses yeux il avait le droit de savoir. Elle l’avait caché pendant près d’un an, que ce soit à sa famille ou à l’intéressé. Elle n’avait rien dit à la fois pour le protéger sachant pertinemment que son frère aurait été rencontrer cet homme qui avait laissé sa sœur sans être amical, mais aussi parce qu’elle ne voulait pas lui imposer un enfant alors qu’elle savait qu’il avait déjà tellement d’épreuves à surmonter dans sa vie. La jeune femme avait donc été silencieuse, appréciant le fait qu’il soit parti de New York qui lui permettait de vivre sa grossesse sans avoir à craindre de le rencontrer dans la rue, le ventre plus imposant que jamais. Après la naissance d’Avery, elle n’avait pas plus cherché à reprendre contact avec lui. Elle s’en sortait plutôt bien et si jamais elle se sentait dépassée, elle avait toujours son frère pour la soutenir ou d’autres proches toujours près à lui venir en aide en cas de besoin, comme son meilleur ami et parrain de son fils. Mais maintenant, Maxime voulait qu’il sache. Quelque part, elle considérait cette rencontre due au hasard comme un signe qu’il était temps pour elle de se débarrasser de ce secret et permettre – peut-être – à son petit garçon de connaître son père.

Elle n’avait pas été adoptée, mais sa mère l’avait été pour avoir perdu ses parents lorsqu’elle était enfant et son père n’avait jamais connu les siens et même si Mila et Ethan n’en parlaient pas souvent, elle savait néanmoins que son père aurait aimé retrouver ses parents biologiques mais n’avait jamais pu le faire, ce qu’elle ne voulait pas pour son fils. Il l’avait elle, mais elle savait que plus tard la question concernant son père serait posée et en saisissant l’occasion d’en parler à Ellyot elle allait pouvoir se passer de cette situation gênante où elle n’aurait pas eu la moindre idée de la réponse à fournir à son garçon. L’air perdu qu’elle put lire dans le regard de l’américain ne la surprenait pas. C’était une nouvelle difficile à avaler, surtout après une bonne année sans se voir. Elle lui avait annoncé ça de but en blanc n’aimant pas tourner autour du pot, il était tout à fait normal que l’interne ait besoin d’un temps d’adaptation pour encaisser ce qu’elle venait de lui avouer. « Tu ne rigoles vraiment pas quand tu me dis que je suis le papa de ce petit bout pas vrai hein ? Tu ne me ferais pas cette mauvaise blague ? Non parce que si c’est une blague ça ne me fait pas rire parce que je serais déçu si ce n’est pas le cas maintenant même si je dois dire que c’est très compliqué dans ma tête… » Maxime secoua tout d’abord la tête de droite à gauche. Non, elle ne plaisantait pas, elle était tout ce qu’il y avait de plus sincère. Il était réellement le père d’Avery et n’avait pas à craindre qu’elle soit en train de lui faire une plaisanterie de mauvais goût – d’autant plus que ça ne lui ressemblait absolument pas.

« Je te promets que je ne plaisante pas, Avery est bien ton fils. » Dit-elle d’une voix calme et douce. À peine avait-elle terminé sa phrase que dans la poussette l’enfant commença à s’agiter. L’attention de Maxime se porta sur son fils vers qui elle se pencha pour le prendre dans ses bras et le déposer sur ses jambes tout en le serrant doucement contre elle. « Et tu ne me demandes rien mais euh… C’est mon fils, enfin, je ne veux pas te le prendre ni rien mais je pourrais le voir ? Le reconnaître ? T’aider pour lui quand même si je le veux ? Je ne veux pas que tu supportes tout pour ça Max… Tu l’as déjà fait jusqu’à maintenant… » La russo-australienne ne put s’empêcher de froncer légèrement les yeux. Elle ne doutait pas un seul instant qu’il ne tenterait pas de le lui prendre – dans le cas contraire il était probable qu’il ait quelques problèmes – mais le reste la surprenait quelque peu, une surprise qu’elle ne put cacher. « T’es sûr de le vouloir ? Un enfant c’est beaucoup de responsabilités Ellyot … Je ne dis pas que je te crois incapable de t’occuper de lui, mais je veux être sûre que tu le veux vraiment avant d’accepter quoi que ce soit. » Maxime avait toujours confiance en lui, malgré l’année qui s’était écoulée sans le voir elle jugeait le connaître tout de même un minimum pour être capable de lui faire confiance, mais il s’agissait de son petit garçon et la jeune femme était pire qu’une mère poule avec lui, ayant toujours peur que quelque chose de mal lui arrive.

Son fils était toute sa vie, il l’avait été dès qu’elle avait appris être enceinte. Pas un seul instant elle n’avait envisagé d’avorter ni même de le faire adopter une fois né. Il avait pris une place si importante dans sa vie qu’elle ne supportait même pas l’idée d’être loin de lui pour quelques jours, pourtant son travail l’y obligeait. Avec l’annonce de sa grossesse, elle avait d’autant plus mûri, elle s’était forcée à grandir plus rapidement afin de s’occuper convenablement de l’enfant qu’elle allait avoir. Ses proches avaient été surpris par ce changement qui opérait en elle, mais tous avaient été derrière elle et c’était encore le cas aujourd’hui. Même si être mère impliquait de sérieuses responsabilités, elle avait tenu le coup car il y avait toujours eu des personnes derrière elle prêtent à lui tendre la main si jamais elle en avait besoin. Son métier d’agent pour le gouvernement lui demandait parfois beaucoup de temps et beaucoup d’énergie. Ce métier la forçait à s’éloigner de son fils, parfois même à mettre sa vie en danger, mais elle s’était toujours arrangée pour que ce ne soit pas réellement le cas. Elle n’était pas la seule dans cette situation. Elle n’était pas le seul agent à être parent et l’agence pour laquelle elle travaillait déjà depuis plusieurs années veillait toujours à mettre en sécurité les familles de leurs employés et pourtant ce n’était pas toujours ce qui suffisait à la jeune femme pour se sentir rassurée lorsqu’elle s’éloignait de son fils. Pourtant, l’idée même de démissionner ne lui avait jamais traversé l’esprit. Elle aimait son emploi.

Elle aimait le fait d’avoir la sensation de faire un tant soit peu régner la justice dans ce monde et la russo-australienne savait que si elle parvenait enfin à faire tomber l’agence russe contre laquelle sa famille et elle-même en avaient depuis plusieurs années elle pourrait se sentir plus en sécurité et peut-être même qu’elle envisagerait cette fois de démissionner, cependant ce n’était pas demain la veille. Orchideus était une vraie plaie et peu étaient ceux qui savaient comment faire tomber cette organisation si bien que ses supérieurs en étaient venus à désirer que des agents de l’ennemis soient ramenés de leur côté, ce que Maxime s’efforçait de faire comme son frère jumeau. Chris était sa cible et Nahla celle de Cameron et la jeune femme refusait de baisser les bras, elle refusait de faire machine arrière quand bien même elle avait son fils à protéger. Elle avait conscience d’être parfois contradictoire dans sa façon de penser, mais elle n’avait jamais été parfaite … loin de là et c’était probablement parce qu’elle ne voulait pas que son fils vive dans un environnement d’autant plus instable qu’elle avait eu besoin de réellement s’assurer que le père de son petit garçon se sente véritablement prêt à assumer son rôle. Avery n’avait pas encore conscience du danger qui pouvait parfois planer au-dessus de sa tête, bien trop petit pour ça et Maxime s’efforçait toujours de veiller à son bien-être, passant un maximum de temps avec l’enfant lorsqu’elle n’était pas en mission. En apparences elle était une jeune mère célibataire comme bien d’autres, mais sous la surface elle seule était capable de voir combien les apparences pouvaient être trompeuses.

En réalité, bien des choses trottaient dans sa petite tête et ce uniquement parce qu’elle avait peur de ce qui pouvait arriver à son petit garçon. Cependant, elle connaissait Ellyot. Elle ne pouvait pas prétendre le connaître par cœur malgré la période où ils avaient été en couple, mais Maxime le connaissait tout de même assez pour savoir qu’elle pouvait lui faire confiance si jamais il éprouvait véritablement l’envie de faire partie de la vie de leur fils. « Je… Je veux être le père d’Avery… Enfin je veux prendre mes responsabilités, t’aider… Je veux tout ça… Ce n’est pas une obligation du tout pour moi c’est juste que c’est réellement ce dont j’ai envie… Cette paternité je ne m’y attendais pas du tout, mais maintenant qu’elle est là, enfin elle me rend juste heureux… J’ai envie d’élever ce bout de chou avec toi ! Tu l’as tellement bien fait toute seule depuis plusieurs mois que je veux être avec toi ... Puis je suis déjà accroché à sa petite bouille et son joli prénom… Enfin… C’est toi qui dois me dire si tu veux bien aussi que j’aie cette place… » La russo-australienne l’écouta en silence. Elle trouvait touchant le fait qu’il ressente déjà le besoin de s’impliquer dans la vie d’Avery, c’était tout de ce dont l’enfant avait besoin. Puis, rapidement, un sourire étira le coin de ses lèvres. Entendre l’américain lui avouer être déjà accro à la bouille d’ange du petit garçon ne pouvait que lui faire plaisir. Après tout, il s’agissait de leur enfant, de leur petit garçon, Maxime ne pouvait qu’être heureuse du fait qu’il l’aime déjà sans même le connaître.

Avery avait besoin d’un père, c’était ce que ses parents – parfois même son frère – n’avaient cessé de lui répéter, mais elle n’avait pas voulu imposer cette responsabilité au père de son fils, toutefois elle était heureuse qu’il l’accepte désormais. « Je sais que tu doutes de moi, c’est normal après la manière dont ça s’est terminé entre nous et ma sœur… Mais aujourd’hui elle va bien et avoir un enfant ce n’est pas rien, même si elle replongeait je ne ferais pas n’importe quoi, je me rends compte maintenant du mal que j’ai pu faire à cause de ma propre souffrance et de ce que j’ai loupé… Je ne suis pas prêt à recommencer… » Le visage enfoui dans la chevelure pour l’instant encore blonde d’Avery, Maxime ne quittait pas le jeune homme du regard. Elle berçait doucement le garçon contre elle – une habitude qu’elle avait depuis sa naissance – et écoutait attentivement le père du bout de chou. « Je ne doute pas de toi Ellyot, je ne l’ai jamais fais. » Commença-t-elle en redressant la tête tout en lui adressant un sourire qu’elle voulait sincère. « Ma vie est beaucoup plus compliquée que ce que tu peux imaginer – pas à cause d’Avery – et la seule crainte que je peux avoir c’est qu’elle le devienne pour lui. Je suis prête à te faire confiance, à te laisser entrer dans sa vie puisque de toute manière tu es son père … J’avais seulement besoin de t’entendre dire que tu le voulais et que tu étais prêt pour ça. » C’était un engagement sans retour pour la russo-australienne et elle souhaitait qu’Ellyot en ait pleinement conscience et qu’il ne regrette pas son choix dans quelques mois ou quelques années, ce qu’elle ne saurait lui pardonner.