Missandei avait l’impression de changer. Elle enchaînait les galas, prenait davantage de risques inconsidérés… elle ne se reconnaissait presque plus pour ainsi dire. Mais au lendemain de ses fêtes paraissant au départ sans fin, la réalité se rappelait toujours à son bon souvenir et le réveil n’en n’était que plus brutal. En l’occurrence, il le fut particulièrement aujourd’hui puisqu’elle s’éveilla en tombant ni plus ni moins de son lit. « RETAAAAARD !! » s’exclama-t-elle à la volée avant de ne faire valser ses couvertures, de filer à la salle de bain prendre une douche et se laver les dents pour mieux mettre quelque chose d’un tant soit peu seyant. « Kale t’es impossible, tu devais me réveiller !! » grogna-t-elle à l’encontre de son colocataire, dont elle n’entendit pas la réponse puisqu’elle fonça illico presto sur son vélo, pédalant à vive allure dans les grandes avenues de New York jusqu’à débarquer enfin à Columbia. Il ne lui fallut heureusement guère de temps avant d’atteindre le grand amphithéâtre dans lequel elle allait subir pas moins de trois heures de cours magistral de culture espagnole dans le cadre de son cursus en langues étrangères. Sauf que Miss était diablement en retard et que forcément, le fait qu’elle n’entre comme une furie en ouvrant la porte un peu trop violemment fut aussitôt remarquée. « Dé… désolée du retard » bafouilla-t-elle, au comble de l’essoufflement, ses bouquins en main et son sac en bandoulière prêt à déposer une plainte tant il était plein à craquer. Mais ce début de matinée n’aurait pas été si chaotique si elle n’avait pas reconnu aussi vite le visage de son professeur… un nouveau semble-t-il ! Merde, ce n’était tout de même pas… « Jav… » manqua-t-elle de se trahir avant de ne se raviser et d’opter pour la solution de chercher une place. Ou tout du moins le tenta-t-elle avant qu’on ne lui fasse un croche pied, qui lança ses livres en l’air et la fit faire un vol plané terrible à travers la pièce…

Il semblait l’avoir reconnue également vu le regard qu’il lui lança mais en attendant, Miss lui devait de ne s’être ni fait mal à la cheville, ni éclaté la face contre le sol. Elle ne s’attendait pas à ce que ses mains n’échouent contre sa poitrine et la donne lui arracha une expression horrifiée l’espace d’un instant avant qu’elle ne s’extirpe de son étreinte incongrue pour lui sourire de façon presque crispée. « C’est toujours dangereux de prendre place, faut pas croire ! Mais… merci, prof… » Oh dear que c’était dur de ne pas l’appeler Javier, comme lors de toutes leurs précédentes entrevues ! La brunette avait l’impression de se trahir et pourtant, elle ne pouvait décemment pas agir comme cette femme aux gestes assurés et à la démarche on ne peut plus chaloupée, c’était impossible. Ici, elle se trouvait à l’université, ce lieu d’enfer et de connaissance qui lui donnait envie de se pendre un peu plus chaque jour. « Snow a trop fait la bitch hier qu’elle sait même plus comment mettre un réveil ! » ricana l’un de ses bourreaux féminins sans aucune pitié alors qu’elle montait les marches de l’amphithéâtre en déglutissant de plus en plus difficilement. « Pourquoi tu ne vas pas dormir dans la porcherie, souillon, puisque tu fais tout ce que tu peux pour sentir le cochon ? » énonça une autre, figeant littéralement Miss dans sa trajectoire, la forçant à serrer fortement ses livres contre elle. Les moqueries continuèrent jusqu’à ce qu’elle ne cède et qu’elle ne quitte tout bonnement l’amphithéâtre. Tant pis, elle rattraperait avec un bouquin, sur une bonne poire des années supérieures qui n’aurait pas brûlé ses cours, que sais-je. Miss ne voulait pas supporter trois heures de moqueries, de mots insupportables et de nouvelles raisons de changer de faculté, de ville, de tout. Et dire qu’elle était en tête de la blacklist des hackers ! Miss finit par s’asseoir au beau milieu du couloir, contre son casier où elle avait rangé ses livres, jouant avec son PDA bidouillé par ses soins pour créer l’actionnement des douches anti-feu juste dans son couloir. De quoi la tremper jusqu’aux os et lui mettre un coup de pied au cul. « Il pleut, il pleut, bergèèèreuuuh » chantonna-t-elle avec amertume.

« Pourtant c’est dur d’attraper la mort ! Je n’ai jamais compris cette image… en fait, figurez-vous que j’aime bien l’eau et qu’en prime, j’ai peu de risques de noyades. » Missandei avait haussé les épaules en tentant un sourire mais en vérité elle aurait plutôt rêvé d’être loin, très loin. Elle ne comprenait même pas pourquoi Javier l’avait retrouvée, alors qu’au départ il était censé partir comme tous les autres professeurs avec leurs élèves dans le parc du campus. Au lieu de ça, il bavardait avec la brunette sous de grandes eaux, risquant d’un même temps d’attraper la mort à son tour. « Cela n’aurait pas été drôle si je vous avais dit le détail le plus insignifiant de ma personne dans les endroits que nous avons côtoyés vous et moi ! Mais lorsque l’on sait que même des gens d’une cinquantaine d’années font encore des études… quelqu’un de vingt-cinq ans, ce n’est pas choquant si ? Vous êtes choqué, Javier ? » Missandei se plut à se relever pour se rapprocher de lui, curieuse de savoir et pourquoi il l’avait rattrapée, et pourquoi il était tellement intrigué par ce qu’il venait d’apprendre sur elle. A sa place, elle n’aurait pas cherché à en savoir davantage… mais sa curiosité, bien qu’impressionnante, avait tout de même ses limites. « Et je ne vous savais pas prof… vous avez vos petits secrets et j’ai les miens, c’est bien ça qui est fun non ? Pour ma défense, vos mains ont quand même élu domicile quelques secondes sur ma poitrine, je ne crois pas que vous ayez à vous plaindre de ma maladresse… provoquée. Pourquoi n’êtes-vous pas avec vos charmantes élèves, professeur ? » Bon, d’accord, Miss prenait des risques rien qu’à poser la question mais rien ne l’empêcha de s’approcher plus encore de lui afin de le serrer contre elle. « Je suis une bouillotte personnifiée, autre chose que vous ne saviez pas mais cela vous empêchera vous d’attraper la mort. »

A vrai dire, Missandei avait un tempérament si complexe que la plupart des gens finissaient par la fuir et abandonner toute découverte approfondie avant même qu’elle ne puisse devenir intéressante. L’australienne recelait pourtant des trésors au sein de son âme mais non, elle n’était jamais assez bien pour la gente masculine semble-t-il. Voilà pourquoi elle séduisait des hommes mariés ! Impossible d’aller trop loin et de dévoiler ainsi le fait qu’elle soit vierge, mais aussi d’être réellement blessée… cela restait un jeu fondamentalement. Un jeu pour lui faire oublier tout ce qui déconnait dans sa vie et qui lui donnait envie de hurler sans qu’elle ne puisse jamais s’adonner à ce genre de réflexe. « Preux chevalier… cela vous va bien je dois le reconnaître ! Et je n’ai pas dit que votre réflexe m’avait choquée, d’autant plus qu’il m’a « sauvé la vie » pour ainsi dire mais vous n’aviez pas plus l’air choqué. » Ceci dit Miss n’avait aucune envie qu’il la considère comme une bête étudiante parmi tant d’autres, cela secouait ses plus vifs sentiments. Mais elle ne s’éloigna pas pour autant, lui offrant une étreinte aussi sincère et chaleureuse qu’elle en était capable… même trempée, la brunette restait une bouillotte personnifiée. « Cela n’a pas vraiment d’importance, non ? » tenta-t-elle de couper court à cette conversation qu’elle ne voulait pas avoir car cela reviendrait à admettre tout le reste. Cette pensée la fit se reculer, d’ailleurs, quittant brusquement les bras de Javier où elle se sentait pourtant tellement à sa place pour mieux prendre une grande inspiration. « Ce n’est ni très important ni de votre ressort. Et puis je suis une grande fille, non ? Disons que pour la première fois de ma vie, je vais très certainement passer par la case « école buissonnière ». Mais vous n’avez rien entendu, hein ? Chuuuuuuut… » Miss plaça un doigt contre les lèvres de Javier pour mieux esquisser un clin d’œil et ramasser son sac trempé. Fuir ? Oui et non. Disons qu’elle ne trouvait pas l’étudiante attirante… elle voulait rester cette femme pleine d’assurance avec qui il plaisait à converser, pas un pauvre petit pantin fragile.

« Je ne suis pas originaire de la planète Krypton vous savez et je ne suis pas Supergirl… oui parce que me dire que je suis Superman est un peu insultant, non ? » Surtout que dans l’univers du Comics, que Missandei ne connaissait que trop bien pour vivre avec un nerd fini, il existait effectivement une extension où Supergirl était la sœur jumelle de Superman, dotée des mêmes pouvoirs et de sensiblement la même histoire. Mais Miss n’allait pas lui faire un cours de Comics alors que cela n’avait aucun rapport avec leur discussion. Elle se contenta de se retourner, un petit sourire aux lèvres, hochant positivement la tête car passer un moment en sa compagnie n’était pas pour lui déplaire tant elle le trouvait mystérieusement séduisant. « Je veux bien que vous soyez mon alibi pour sécher les cours, surtout autour d’un verre de vin. Si vous avez de la musique jazzy, vous serez mon héros du jour ! » lança-t-elle avec enthousiasme avant de ne rebrousser donc chemin pour commencer à le suivre vers son bureau. Immense, blindé de livres, à l’image de celui de tout professeur d’université à vrai dire. Miss n’était même pas intimidée, bien au contraire, elle était fascinée et en oubliait presque le fait d’être complètement trempée. Ce n’était pas sa faute, elle avait continuellement chaud et ne tombait que rarement malade. « Vous avez d’autant plus l’allure d’un preux chevalier avec autant de bouquins ! Même si votre ordinateur n’a pas l’air mauvais non plus. Vous pourriez sûrement le booster davantage vu l’allure même si vous avez l’air d’être attaché à la propreté. Grande qualité chez un homme. » Miss avait faillit se trahir et se rattrapa de justesse, non sans accompagner ses paroles d’un grand sourire histoire de noyer définitivement le poisson. Il la troublait trop pour son propre bien, il fallait qu’elle se reprenne, surtout qu’ils se trouvaient tous deux dans son antre. « Vous emmenez souvent des étudiantes ici, dans votre caverne d’Ali Baba ? »

Par chance, Javier ne semblait pas avoir noté sa réflexion sur l’ordinateur et intérieurement, elle poussa un « ouf » de soulagement. Elle ne répondit donc pas immédiatement à ses répliques, se contentant d’accepter les vêtements propres et secs qu’il lui offrait en un sourire avant d’aller se changer. Effectivement, ils n’avaient pas du tout la même carrure et Missandei ne se trouvait ni désirable ni sexy dans ces oripeaux. Ceci étant, le t-shirt se trouvait être si grand qu’elle le porta tout seul, bien qu’il tombait de son épaule, en dénudant une par la même occasion. « Ne hurlez pas, à ma décharge, le jogging est beaucoup, beaucoup trop grand, il me tombe sur les chevilles même en serrant au maximum à la taille » s’excusa-t-elle en le lui rendant, n’ayant cure que ses jambes galbées soient visibles. Après tout, il les avait déjà vues ! « Et pour vous répondre à mon tour, je suis saxophoniste à mes heures. C’est pour ça que j’ai un double cursus en musique ici, d’ailleurs. » Miss trinqua avec le verre ballon qu’elle trouva déposé sur le bureau de Javier rien qu’en le levant pour mieux le remuer très légèrement et le sentir longuement avant de n’y tremper les lèvres. « Il a de la cuisse, vous ne buvez pas n’importe quoi… oh et pour la remarque sur les étudiantes, c’était une plaisanterie bien sûr. Cela ne me regarde pas du tout ! » Miss se mit à scruter la bibliothèque en long, en large et en travers, marchant nus pieds sans même éprouver la plus petite gêne, tout en cherchant quel ouvrage pouvait parler mécanique ou ordinateur sans trouver un heureux élu. Cela parlait surtout de langues et de littérature… « Je suis ravie que Madame Nossiu ne vous ait pas finalement dévoré vivant au dernier gala. Elle ne vous laissait presque pas respirer tant son mari la délaissait ! Bon techniquement parlant son mari était affreusement ennuyeux et j’ai eu bien du mal à m’en dépêtrer… »

Vision enchanteresse ? Missandei lui lança un regard qui voulait fortement dire « à d’autres vil charmeur » mais elle se retint, se contentant de sourire face à ce qui ressemblait à un compliment en bonne et due forme. Il est toujours agréable de se faire caresser dans le sens du poil, après tout. « J’y penserai ! N’hésitez pas également, mes cours sont le mercredi, le jeudi et le vendredi à partir de quatorze heures en général, salle de TD du cinquième étage de ce même bâtiment » l’informa-t-elle car la musicienne qu’elle était ne pouvait qu’être intéressée par le duo qu’ils pourraient former. Mais la donne se gâta dès lors qu’elle le vit se déshabiller, son manque d’expérience revenant au galop pour la pousser à boire une gorgée de vin avant même que de ne décider à poser son verre et de lui donner une chemise sèche. Autant dire qu’elle lui offrit le vêtement et se retourna aussitôt, prétextant le plus haut respect de la pudeur qui soit. « Il me semblait bien que vous n’étiez pas homme à laisser une damoiselle en détresse » plaisanta-t-elle tout en reluquant une fois encore de nombreuses étagères de sa bibliothèque particulièrement impressionnante. « Vous avez deviné mon emploi du temps de samedi, seriez-vous devin ? » plaisanta-t-elle en reprenant un instant ses manies de femme séductrice particulièrement douée et fine d’esprit. Miss avait une sorte de génie des mots inné, lui offrant la possibilité d’harponner les hommes mariés qu’elle ne convoitait pourtant que pour quelques secondes à peine. « Je cherche toujours de quoi me faire frissonner et je pense que cette soirée sera mon apothéose ! Dommage que les galas ne s’espacent de beaucoup après celui de samedi. »

« Ah, une femme ne livre pas si aisément ses secrets voyons ! » rétorqua-t-elle avec une sorte d’assurance qu’elle ne feignait pas réellement. Missandei savait être aussi sûre d’elle que discrète, à la limite de la réserve. Néanmoins, alors qu’elle attendait que Javier ne revienne changé et en tenue nettement plus décente pour ses yeux chastes, la brunette ne pouvait s’empêcher de se demander ce qu’il avait bien pu sous entendre avec sa phrase sur la catégorie masculine qu’elle chassait sans relâche lors de galas. De plus, il avait aisément compris qu’elle falsifiait ses cartons d’invitation, bien que ce ne soit pas exactement ce qui se passait : disons qu’elle pénétrait au sein même de la liste des invités, y ajoutait son nom au sein même du programme informatique et feignait d’avoir perdu ledit carton une fois sur place. Risqué mais non moins infaillible ! « J’ai choisi un classique, où est votre chaîne que je puisse le mettre ? » reprit-elle une fois qu’il l’eut à nouveau honorée de sa présence. Son choix avait été fait quasiment les yeux fermés, comme si elle savait ce qui se trouvait dans cette fameuse collection, bien que ce ne soit absolument pas le cas. Miss s’approcha pourtant de Javier, ne s’arrêtant qu’à quelques millimètres de lui, brandissant la pochette qu’elle avait en main en haussant un sourcil. « Je suis curieuse à propos de deux choses… la première, c’est le fait que vous trouviez dommage que je chasse surtout les hommes mariés, et la deuxième, que vous pensiez que je falsifie mes cartons d’invitation. Vous avez des preuves de ce que vous avancez, Sherlock ? »

Missandei avait rapidement compris qu’elle n’avait pas à faire à un idiot, mais Javier ne fit que renforcer cette impression en la perçant presque à jour dans son jeu de séduction… il ne pouvait pas savoir comment elle faisait au juste pour se faire inviter, certes, mais il n’empêche que Miss ne repartait jamais accompagnée en sortant de ce genre de soirée, non jamais. Elle craignait par-dessus tout de devenir intime avec quelqu’un et que celui-ci ne finisse par la connaître avec tant de précision que cela en deviendrait implacablement dangereux pour elle. Mais stoïquement, Miss partit mettre le disque dans la chaîne du bureau, ne répondant pas encore au discours de son interlocuteur : du moins pas avant que le jazz ne peuple délicieusement le fond sonore de la pièce et qu’elle n’ait pu à nouveau tremper ses lèvres dans son verre. « Je sais, ma curiosité aura probablement ma perte un jour » commença-t-elle avec amusement, tout en sachant qu’une large part de vrai se cachait derrière cette première phrase. « J’aime jouer, je ne m’en cache pas. Mais ma seule règle de jeu est que je ne dois pas sortir accompagnée. Quoi de plus normal dès lors que de prendre pour cible des hommes mariés ? Certains semblent tellement s’ennuyer que je me fais âme charitable histoire d’égayer un peu leur quotidien… suffisamment pour marquer les esprits, mais pas assez pour être envahissante. C’est assez… subtil. Mais je n’ai pas croisé d’homme qui puisse vouloir ma compagnie et ne soit pas marié à vrai dire » avoua-t-elle finalement en toute honnêteté. D’accord, elle n’avait pas prêté la moindre attention à la chose, mais tout de même… « Je ne sais pas si vous n’aimez voir que le verre à moitié plein ou si c’est une technique de séduction que d’insulter une femme avec qui vous converser… j’aime jouer c’est un fait, mais de là à m’accuser de falsification… un peu extrême, vous ne trouvez pas ? » Miss n’avait pas envie de céder tout de suite, ni même certaine de vouloir céder tout court. Ce n’était qu’un professeur, pas vrai ?

Missandei haussa les épaules en toute sincérité. « C’est la vie ! » lâcha-t-elle non sans un brin de regret quand même dans le fond de la voix. Contrairement à son colocataire, Kale, qui ne jurait que par la Physique et ses multiples mystères, la brunette était en mal d’amour perpétuel. Elle avait un vide affectif considérable à combler et les rares fois où Kale consentait à lui faire un câlin de quelques secondes, c’est parce qu’il la croyait presque au bord du suicide et qu’il voulait éviter de tacher ses tapis préférés… et de devoir les shampouiner des heures durant. Mais Miss perdit cette idée de vue très, très rapidement. « Oh non, non, non !! Je n’ai jamais cru que vous vouliez me séduire et je ne tenais pas à provoquer de situation gênante, loin de moi cette idée » avoua-t-elle non sans que sa voix ne se teinte d’une légère panique qu’elle ne camoufla qu’au bout de quelques secondes en éclatant ni plus ni moins de rire. Il valait mieux… c’était ça ou prendre la poudre d’escampette, c’était donc plus poli et confortable pour Javier. « Je ne voulais pas plus d’excuses de votre part, je n’ai pas été froissée voyons ! Je plaisantais juste… mais je suis sûre que vous jouez les idiots parce qu’on vous trouve irrésistible comme ça, non ? Ou alors, c’est parce que vous laissez parfois la gente féminine gagner des joutes verbales que vous affectionnez… ou encore, c’est vous qui prêchez le faux pour savoir le vrai. Je vais être une tombe Javier, comptez sur moi ! » conclut-elle non sans lui offrir un sourire franc et parfaitement sincère. Outre une très légère panique de départ, elle appréciait ce jeu… un peu trop à son goût, d’ailleurs.

« C’est intéressant les hypothèses, il ne faut pas croire ! Il y a toujours un fond de vérité à travers elles… » reprit Missandei non sans reprendre un petit rire alors que Javier se clamait capable de pouvoir la faire parler. Oh sans doute en avait-il les moyens, mais la brunette n’était pas la dernière à savoir faire preuve de résistance. « Je ne parlerais qu’en présence de ma vodka Javier ! Et comme vous n’en n’avez pas dans votre charmant bureau, cela vous fait un avantage en moins… je sais résister à la pire des tortures et résisterai ! » Miss lui avait effectivement promis une danse et si elle n’avait pas mauvaise mémoire, même pour ce genre de choses, elle ne s’attendait pas à ce qu’il ne lui propose maintenant, dans ce bureau, sous fond sonore de musique jazzy. « Imaginez que je sois mieux vêtue surtout… » se permit-elle de noter avant de n’attraper l’une de ses mains pour la placer sur sa hanche, s’emparant ensuite de l’autre pour la serrer contre la sienne. Ils firent quelques pas au rythme de la musique, l’un et l’autre semblant non seulement attirés comme deux aimants sans que leurs regards ne se séparent jamais, mais aussi faisant preuve d’une souplesse et d’une grâce dont Miss ne se savait même pas dotée. « Je n’avais pas oublié ma proposition de danse, je ne pensais simplement pas que vous me la rappelleriez ici… vous aimez créer des effets de surprise, n’est-ce pas ? Ah, ne répondez pas. Vous ne répondez pas aux questions de toute manière et ça ne fait rien » conclut-elle en pensant chaque mot, les accompagnant d’un franc sourire, avant de ne se concentrer davantage sur leur danse et la musique…

« Je suis coincée » énonça-t-elle dans un russe parfait juste pour la beauté de la chose. « En vérité, je ne bois que rarement de l’alcool, et tout spécifiquement de la vodka. L’alcool fait faire n’importe quoi et désinhibe un peu trop à mon goût. Mais vous devez avoir l’habitude de tenir la distance, surtout si vous avez un ami russe ! » déclara-t-elle en anglais cette fois-ci, sans trace de racisme ou de moquerie. Missandei adorait la Russie et la culture qu’elle dévoilait aux yeux du reste du monde. Si elle avait pu, sûrement serait-elle allée y vivre mais c’était un rêve en lequel elle ne croyait pas du tout. Une fois que l’on a rejoint Anonymous, impossible que de s’en échapper. « Je ne vous ai pas donné de raisons de me torturer j’espère ? » s’inquiéta-t-elle quelques secondes avant de ne laisser à nouveau échapper un petit rire. « Je suis curieuse de savoir à quel type de question vous aimez répondre ! Pas les trop personnelles, j’imagine… celles qui ne vous dévoilent pas trop et qui ne permette donc pas ni de vous connaître, ni de vous faire du mal. Ca doit être difficile pour votre compagne de choisir un cadeau d’anniversaire ! Et puis… rien ne dit que vous ne soyez pas pro ès mensonge non plus » s’amusa-t-elle à rétorquer avec malice mais sans insolence. Miss n’était pas du genre à jeter la pierre au premier venu, bien au contraire : en théorie, elle ne portait pas de jugement avant de ne connaître effectivement la personne mais là, la donne risquait d’être serrée. « Je vous retourne le compliment, Javier… j’ose espérer que vous ne m’aviez pas jaugée comme une gourde sans talent ? »

« Je veux bien le croire ! » s’exclama-t-elle avec enthousiasme avant de ne se mordre la lèvre inférieure rien qu’à l’idée d’avoir séché un jour. Ce n’était pas usuel, surtout lorsque l’on connaissait suffisamment l’acharnement mis par Missandei dans ses études. Mais une chose était sûre, la présence de Javier dans l’amphithéâtre l’avait troublée et être attaquée à visage découvert également l’avait mise terriblement mal à l’aise… il n’était donc guère étonnant qu’elle ait pris la route en sens inverse. « Je n’avais jamais séché un cours de ma vie avant aujourd’hui. Ce n’est pas du tout habituel chez moi mais il y a eu un peu trop d’inconnues dans l’équation qui ont fait que c’était sûrement mieux pour tout le monde » répondit-elle avec un extraordinaire sérieux avant que celui-ci ne se transforme purement et simplement en désolation. Elle cessa d’ailleurs brutalement de danser, sentant qu’elle avait mis les pieds dans le plat sans même le vouloir ou le savoir, et qu’il lui renvoyait cette fois une bien piètre image de son discours stupide… « Ce n’était qu’une façon de parler je n’avais pas l’intention de vous blesser et vous demande humblement pardon… » Miss n’était pas habituée à ce genre de conversation personnelle non plus et de faire, elle crut bien plus intelligent que de faire un pas en arrière. « Je ne me mésestime pas ! Enfin pas trop… disons que l’on est toujours très mauvais juge de soi-même. Soit on devient trop dur, soit on manque cruellement de modestie et je ne sais pas faire dans le juste milieu j’en ai peur. Mais ça n’a pas vraiment grande importance croyez-moi. » Sans doute la conversation prenait-elle un degré personnel un peu trop poussé à son goût également…