Sayuri aimait danser. Elle aimait se laisser porter par la musique et oublier un instant le monde qui l'entourait. Mais dans ce bar c'était difficile d'oublier les hommes aux sourires gras qui la dévisageaient comme si elle était le dernier morceau de viande sur terre... Elle venait de finir le premier tour et alla retrouva ses collègues dans les coulisses. Elle était en train de boire à sa bouteille quand une des danseuses l'attrapa par le bras. « Hey fais attention, s'exclama-t-elle en vérifiant qu'elle n'avait pas mouillé sa tenue. » « Désolée Bobo, accompagne-moi dehors, je dois fumer. » La jeune femme leva les yeux au plafond avant d'enfiler un gilet s'abstenant de faire remarquer à son amie une nouvelle fois qu'elle se pourrissait la santé et gaspillait de l'argent pour rien. L'air était vraiment frais dehors et Sayuri se frotta les bras pour tenter de se réchauffer un peu. Quelle idée franchement de porter des tenues aussi légères... « Mademoiselle Kitahara ? » Elle se retourna avec vivacité, surprise que quelqu'un connaisse son nom dans ce lieu. Elle eut un véritable instant de surprise en découvrant l'un de ses professeurs ici. Et pas n'importe lequel... Il avait la fâcheuse habitude de sous-noter la jeune femme (elle était persuadée qu'il avait quelque chose contre elle). La japonaise allait souvent se plaindre à lui, clairement révoltée par son système de notes qu'elle jugeait subjectif et injuste. Elle s'approcha juste un peu, faisant signe à son amie qu'elle n'avait pas à s'inquiéter. « Ce bar est le dernier endroit où j’aurais pensé vous croiser. » Elle afficha un sourire composé de toute pièce. Le monde était bien trop petit à son goût... « Quand à moi, je ne suis pas tellement surprise, prétendit-elle en le dévisageant de haut en bas, j'imagine que ça correspond au reste du personnage... » Terminant sa phrase avec un sourire mesquin. Elle avait toujours été poli avec tous ses professeurs. En même temps ils étaient généralement tous en admiration face à son intelligence et sa réussite, ce qu'elle trouvait plutôt affligeant de son côté. Mais cet homme... Elle n'arrivait juste pas à garder son sang froid et elle se fichait bien d'être insolente. « Ca faisait un moment que vous n’étiez pas venue me parler, je commençais à m’inquiéter. » Elle pencha la tête sur le côté en prenant un air faussement désolé. « Je n'aurais pas à vous parler si vous n'étiez pas un piètre professeur. Je prouverais un jour que votre diplôme est une mascarade. » Elle ne cherchait pas réellement s'il avait effectivement son diplôme (même si elle en doutait la plupart du temps) mais elle aimait bien le mettre en doute à chaque fois qu'elle allait se plaindre à lui. « A mon dernier devoir encore, je pense que vous ne saviez plus quoi inventer. Maintenant que je vois quel genre de lieu vous fréquenter je comprends un peu. » La jeune femme n'avait jusque là plus pensé à la tenue dans laquelle était. Puis elle se rappela qu'elle était en petite tenue en train de se plaindre à un de ses professeurs. Elle croisa les bras sur sa poitrine comme si ça pouvait cacher aussi son ventre et ses jambes nus. Elle lui reprochait ses lieux de fréquentation quand elle travaillait dans l'un de ces lieux... Ce n'était peut-être pas la meilleure attaque mais Sayuri était généralement trop énervée en sa présence pour réfléchir avec clarté.

c'est parfait

New York n'était visiblement pas une ville assez grande pour l'empêcher de croiser des gens qu'elle aurait préféré éviter, aux endroits pourtant les plus reculés. Ce n'était pas comme si c'était un bar particulièrement connu. Il était fréquenté, ce qui était parfaitement compréhensible quand des jeunes filles en tenues légères se déhanchaient – avec l'alcool c'était le parfait mélange pour tous les dépravés de la ville. Sayuri n'aurait jamais pensé croiser son professeur ici cependant. Mais après tout c'était un homme... Alors elle n'y avait pas de quoi être si surprise au final. « Au reste du personnage ? Je serais ravi d’entendre l’analyse que vous faites de moi. Peut-être que vous aurez moins de mal qu’avec ceux des livres que je vous fais lire dans mon cours. » Elle leva les yeux au ciel. Voilà ils se parlaient depuis même pas trente secondes et il l'irritait déjà. « Je ne voudrais pas blesser votre égo. Répliqua-t-elle, toujours avec le même sourire hypocrite et ajouta en prenant un air faussement compatissant : Ça doit être un peu rageant pour vous qu'une simple élève vous corrige. » C'était la conclusion à laquelle elle arrivait généralement. Elle ne comprenait tout simplement pas les notes qu'il lui mettait. Elle rageait d'autant plus qu'elle travaillait encore plus pour rendre un devoir parfait et le résultat demeurait toujours le même. Elle s'était déjà demandée si elle ne devrait tout simplement ne pas lire le livre comme faisait la plupart des élèves et rendre une analyse inventée de toute pièce. Sauf qu'imiter ces ignorants la répugnait. Elle aimait bien croire aussi que le diplôme de ce professeur était bidon. Elle le maudissait d'à peu près tout dans son esprit en fait. Elle doutait déjà bien assez et elle ne supportait pas que cet homme la fasse cogiter encore plus. « Si vous avez du temps à perdre, allez-y. Mais vous ne risquez pas d’avoir beaucoup de succès là-dedans non plus. » Elle haussa les épaules d'un air indifférent. « Ce n'est pas grave, je trouverais un autre moyen de prouver votre incompétence. » Elle en était persuadée. Encore à son dernier devoir elle n'avait pas compris la note qu'il lui avait mise. C'était juste incompréhensible et pourtant il y avait très peu de choses qu'elle ne comprenait pas. Elle décida donc de s'en plaindre maintenant, autant en profiter tant qu'il était à portée. « Vous êtes sure d’avoir envie de parler de ça maintenant ? Ici ? Pas que ça ne me ferait pas plaisir mais well, il y a un temps pour tout vous ne croyez pas ? » Elle haussa un sourcil et demanda d'un air innocent : « Quoi ? Vous préférez continuer à regarder des jeunes filles danser en petite tenue peut-être ? » Petite tenue qu'elle portait elle aussi. Elle tentait tant bien que mal de le cacher en croisant les bras sur sa poitrine mais elle avait beau faire comme si elle était à l'aise, ce n'était pas vraiment le cas. « Tenez, ça devrait être un peu plus efficace. » Elle le regarda avec surprise, puis plissa les yeux avec suspicion. « Merci. Dit-elle malgré tout en attrapant la veste qu'elle enfila. » Elle aurait aimé refuser mais il fallait avouer qu'elle se sentait un petit mieux comme ça. Elle avait moins froid aussi. « Mais ça ne pardonne pas la note que vous m'avez mise. Répliqua-t-elle sur un ton plus boudeur qu'elle ne l'aurait voulu, alors elle ajouta sur un ton plus mesquin : Il faut lire le livre avant de corriger. »

On aurait pu penser que comme c'était son professeur, Sayuri lui aurait parler avec respect. Mais la jeune femme n'avait jamais été du genre à se laisser faire. Elle savait amadouer ses professeurs mais elle n'y parvenait pas avec lui. Elle ne comprenait pas ce qui n'allait pas. Et elle avait depuis longtemps perdu patience. Peut-être était-il frustré parce qu'elle était meilleure que lui. Même si elle doutait plutôt dans le fond que ce soit elle qui n'était pas aussi bonne qu'elle voulait bien le penser. Mais elle ne voulait pas montrer ses doutes, surtout pas à lui, alors elle préférait faire comme si elle était sûre de ce qu'elle faisait. « Ça pourrait l’être s’il s’avérait que cette simple élève avait raison. » « Peut-être que vous ne voulez juste pas vous l'avouer. Je comprends, répondit-elle avec le même sourire compatissant. » Elle lui aurait presque tapoté l'épaule mais vu la tenue qu'elle portait, elle préférait éviter. Ça se passait d'explications. Elle finirait bien par lui prouver qu'il n'était pas si doué qu'elle le pensait de toute manière. « Ou vous pourriez arrêter de perdre votre temps avec vos caprices et vous mettre à réellement travailler. » Elle leva les yeux au ciel. « Don't patronize me, I already have my parents for this. » Même s'ils étaient à quelques milliers de kilomètres... Elle ne faisait que ça travailler. Quand elle ne bossait pas ses cours, elle venait travailler ici pour gagner de l'argent. Elle voyait mal comment elle pourrait faire plus. Et elle n'appréciait pas qu'un professeur lui fasse cette remarque. Il s'étonna ensuite qu'elle veuille parler de ses notes ici. C'est vrai que le lieu était peut-être étrange. Mais elle voyait mal de quoi elle pourrait lui parler d'autres. Peut-être qu'il préférait retourner à l'intérieur pour voir ses collègues se déhancher en petites tenues. Après tout elle était bien placée pour savoir pour quoi les gens venaient dans ce bar...  « Non. Je préférerais rentrer chez moi à choisir. » Elle esquissa un sourire, puis haussa les sourcils en demandant : « Alors vous avez si peu de volonté que vous n'êtes pas capable de faire ce que vous avez envie de faire ? » Elle y allait peut-être un peu fort. Peut-être était-ce parce qu'elle n'était pas à l'université et que le cadre lui donnait un excès de confiance. Même si elle n'était peut-être pas dans la tenue idéale pour parler à un de ses professeurs. Se rendant sûrement compte de son air gêné, il lui tendit sa veste, qu'elle accepta en le remerciant, non sans un air suspicieux dans son regard. Cela ne pardonnait pas la note qu'il avait pu lui mettre dans tous les cas. « Vous n’avez pas l’habitude qu’on vous dise non hein ? » Elle fit mine de réfléchir. « Pas vraiment non. Répondit-elle avec un petit air arrogant. » Elle croisa même les bras pour s'en donner l'air. « J’ai un conseil à vous donner, libre à vous de le suivre ou non, mais vous devriez vous laisser un peu plus aller, vous essayez un peu trop de rendre le devoir parfait. » Elle tira la moue. Se laisser aller ? Elle se demandait bien ce que cela voulait dire, concrètement. « Alors vous préférez qu'il ne soit pas parfait ? Que je fasse des erreurs ? Demanda-t-elle, masquant mal son scepticisme. » Elle n'avait pas pour habitude de faire semblant de rendre des choses à moitié terminé. « Est ce que vous avez peur de la perfection parce que vous vous en savez si éloigné ? Ajouta-t-elle avec innocence. » Elle se lâchait vraiment et elle trouvait ça plutôt amusant.

Finalement, elle n'était pas mécontente d'avoir croisé son professeur à son lieu de travail. Il égayait la soirée, plutôt calme jusque là. Elle avait conscience d'abuser mais cela ne l'empêchait pas de continuer. « Je ne sais pas qui de nous deux se voile le plus la face mais j’aurais tendance à parier que c’est vous. » Elle lui adressa un clin d’œil. « Si ça peut vous faire plaisir, dit-elle d'un ton clairement condescendant. » Il pouvait croire ce qu'il voulait si ça l'aidait à dormir la nuit... Cela ne l'aidait pas à comprendre pourquoi elle n'arrivait à réussir son cours en revanche. Elle s'était remise en question, vraiment, mais ils ne devaient juste pas être sur la même longueur d'onde. Inutile d'être un génie pour le deviner. Quand il exprima le fait qu'il préférait être chez lui, elle en profita pour enfoncer le clou une nouvelle fois. S'il lui tendait des perches, il ne fallait pas se plaindre vraiment. « On a qu’à dire ça comme ça » Elle fit une petite grimace compatissante. Avant de dire sur un ton plutôt déçu : « Vous ne vous défendez pas beaucoup... » Cela confirmait peut-être ce qu'elle avait dit auparavant, ou juste qu'il ne voulait pas entrer à son jeu. Mais il ne se doutait pas qu'en faisant ça il donnait d'autant plus envie à la jeune femme de l'enquiquiner. Après tout il ne se gênait pas de le faire avec ses notes incompréhensibles, alors elle pouvait se venger à sa manière. C'était peut-être puéril mais elle avait le droit de s'amuser elle aussi de temps en temps. Comme elle venait de lui répondre, elle n'avait pas l'habitude qu'on lui réponde non. Elle arrivait généralement à comprendre les personnes rapidement, et à partir de là ce n'était pas difficile de faire en sorte qu'ils soient d'accord avec elle... Comme des énigmes à résoudre. C'était facile avec les trois quarts des gens, mais on tombait parfois sur des plus compliquées... Comme lui. Mais elle ne doutait pas qu'elle trouverait la réponse un jour ou l'autre. D'ici là elle continuerait de se plaindre à lui. « Ceci explique cela » Elle haussa les épaules avec un sourire amusé. Sayuri avait du mal à comprendre sa logique. Était-ce mal de vouloir rendre un devoir parfait ? Peut-être qu'il préférait le travail à moitié fait... Qui sait on trouvait des tordus partout.  « La perfection n’existe pas vous savez. » Elle était d'avis que c'était une parfaite utopie. Mais elle pensait aussi qu'il était possible de l'approcher. Elle pencha la tête d'un air espiègle. « Vous n'y avez juste jamais goûté c'est tout. » Elle adorait le contre-dire. Sayuri prit ensuite un air plus innocent pour demander s'il n'avait pas juste peur de la perfection parce qu'il s'en savait si éloigné. « Vous ne savez faire qu’attaquer ? Vous n’êtes pas capable d’avoir une discussion sérieuse et posée avec quelqu’un ? » Amusée par ses questions, elle le dissimula pourtant derrière un masque de parfaite innocence. « Est ce que ça vous dérange ? » Parce qu'elle ne comptait pas vraiment arrêter. « En même temps je vois mal de quoi on pourrait parler d'autres, dit-elle en haussant les épaules, sauf si vous voulez expliquer une nouvelle fois ce qu'un professeur soit disant respectable vient faire dans ce lieu. » Ce n'était pas comme si c'était le lieu le plus recommandable de New York. Suffisait de voir les tenues des employée, heureusement ici dissimulée en partie par la veste qu'il lui avait prêté. « Je ne sais pas ce que vous cherchez à faire mais je ne me mettrai certainement pas en colère, et surtout, je ne me mettrai pas à vous donner de bonnes notes juste parce que c’est ce que vous voulez et que c’est la seule manière pour moi d’être tranquille. » Elle fit une moue boudeuse comme une petite enfant, bras croisés sous sa poitrine. « Je devrais abandonner alors... » Elle décroisa ses bras et s'approcha de son professeur pour dire à voix plus basse. « Mais le défi est trop excitant. Ajouta-t-elle avant d'échapper un rire. »

« Vous ne vous défendez pas beaucoup... » Leo haussa les épaules. Il avait tout bonnement essayé d’arrêter vu que ça ne menait pas à grand-chose. Il n’aimait pas se faire attaquer comme ça sans rien dire mais il avait l’impression de parler pour rien et ça l’agaçait tout autant. Donc autant économiser ses forces pour… il ne savait trop quoi encore. Puis s’il n’entrait pas dans son jeu, elle allait bien finir par se lasser non ? Non ? … Il voulait quand même essayer. « J’ai espoir que vous finissiez par vous lasser. » Mais elle semblait déterminée à continuer de l’embêter pour un bon moment. Et bien sûr, elle choisit son sujet préféré : les mauvaises notes que Leo lui mettait sans arrêt. Elle ne lâchait pas l’affaire et le brun trouvait ça très redondant. Il ne faisait pas ça juste pour le plaisir de lui mettre des mauvaises notes, il estimait qu’elle ne les méritait pas, voilà tout. Elle cherchait beaucoup trop la perfection et elle passait à côté de choses très importants. Ce qu’elle ne comprenait pas, et Leo avait beau essayer de le lui faire comprendre, elle restait bornée. Elle reconnut d’ailleurs chercher la perfection à tout prix et Leo fut désolé pour elle parce que c’était une quête vaine. Ça n’arriverait jamais comme cela n’existait pas. « Vous n'y avez juste jamais goûté c'est tout. » Leo ne put s’empêcher d’échapper un rire un peu blasé. Sayuri était tellement prévisible, il s’était attendu à celle-là. « Je gagne des points si je devine ce que vous allez dire à l’avance ? Parce que c’était le cas, là. » Elle voulait jouer, alors… Il espérait juste être bien récompensé s’il gagnait. Qu’elle le laisse tranquille serait parfait. Ou au moins qu’elle soit capable de lui parler calmement… Elle ne semblait pas être très friande des conversations posées qui étaient pourtant bien plus agréables. « Est ce que ça vous dérange ? » Le jeune homme fronça les sourcils. « Oh bien sûr que non, j’aime ça qu’on me manque de respect. » Surtout elle en fait. Ah ah. Ce qu’elle ne lui faisait pas dire quand même. « En même temps je vois mal de quoi on pourrait parler d'autres, sauf si vous voulez expliquer une nouvelle fois ce qu'un professeur soit disant respectable vient faire dans ce lieu. » Leo soupira mais se décida quand même à lui répondre, même s’il doutait que cela joue en sa faveur et la fasse arrêter de le juger là-dessus. « Un de mes collègues se marie bientôt, c’est son enterrement de vie de garçon. Je ne pouvais pas dire non, j’attendais juste le bon moment pour me sauver sans que cela paraisse trop impoli. Puis je suis tombé sur vous. » Il avait prononcé cette dernière phrase avec un sourire forcé, il ne la dupait pas de toute façon, il s’était assez plaint d’elle. Il lui fit ensuite savoir qu’elle aurait beau lui parler et essayer de le faire changer d’avis, cela ne jouerait jamais en sa faveur. Il n’allait pas lui mettre des bonnes notes simplement pour être tranquille. « Je devrais abandonner alors... » Oui, elle devrait vraiment. Mais quelque chose lui disait qu’il ne devait pas crier victoire trop vite. Il ne s’était pas reculé comme il s’approchait et il la regardait avec un peu d’appréhension mais aussi de curiosité. « Mais le défi est trop excitant. » Evidemment. Leo secoua la tête et se mit à rire légèrement, un peu moqueur. « Quel est l’intérêt vu que vous savez que vous allez perdre ? J’ai toutes les cartes en mains et j’aurais toujours le dernier mot. » Elle perdait du temps et de l’énergie pour rien à son avis.

S'il y a bien une chose qu'il était difficile de faire, c'était de détourner Sayuri d'un objectif qu'elle s'était fixé. En l’occurrence, elle voulait comprendre pourquoi elle n'arrivait pas à avoir de bonnes notes avec ce professeur là. Alors qu'elle n'avait aucun mal dans toutes les autres matières. C'était juste incompréhensible. Et plus elle en venait à lui parler, et plus elle se disait que peut-être il n'était pas aussi simplet qu'il en avait l'air. Juste un petit peu plus compliqué à comprendre que la moyenne, mais elle ne doutait pas de résoudre l'énigme à un moment ou à un autre. « J’ai espoir que vous finissiez par vous lasser. » La jeune femme fit une petite moue compatissante. « L'espoir fait vivre. Dit-elle laconique. » Elle n'était pas connue pour lâcher l'affaire si facilement. Elle était peut-être un peu trop têtue, elle-même le reconnaissait. Mais la situation l'amusait tant qu'elle la frustrait, alors elle comptait bien l'embêter encore un moment. Jusqu'à ce qu'elle ait le dernier mot. Surtout que pour le moment elle ne comprenait pas ce qu'il voulait. « Je gagne des points si je devine ce que vous allez dire à l’avance ? Parce que c’était le cas, là. » Elle échappa un petit rire avant de le regarder curieusement, sourcils haussés. « Parce que vous croyez me connaître si bien que ça ? » Elle n'était peut-être pas toujours très subtile, mais elle ne pensait pas être aussi facile à déchiffrée. Il n'était pas difficile de comprendre qu'elle prenait un malin plaisir à se moquer de lui dès qu'elle le pouvait. Pas besoin d'être un génie pour le comprendre. En dehors de ça, Sayuri n'était pas comme ça avec tout le monde. Il avait le privilège de son sarcasme ce soir, il pouvait être heureux. Il lui demanda d'ailleurs si elle était capable d'avoir une discussion posée et elle lui répondit elle-même avec une question. Est ce que ça le dérangerait par hasard ? « Oh bien sûr que non, j’aime ça qu’on me manque de respect. » « C'est bien ce que je me disais. Répondit-elle avec un petit sourire malicieux. » Elle enchaîna en ajoutant de toute manière qu'elle voyait mal de quoi ils pouvaient parler d'autres. Il pouvait toujours essayer d'expliquer sa présence dans un bar aussi « classe ». « Un de mes collègues se marie bientôt, c’est son enterrement de vie de garçon. Je ne pouvais pas dire non, j’attendais juste le bon moment pour me sauver sans que cela paraisse trop impoli. Puis je suis tombé sur vous. » « Surprise, dit-elle d'un air faussement enjoué. » Il avait une bonne excuse, c'était déjà ça. « Ne cachez pas votre joie, dit-elle ensuite en lui donnant un petit coup de coude. » Elle était un peu plus à l'aise dans la conversation, sûrement grâce à la veste qui recouvrait en partie son corps. Elle n'avait aucun problème avec son corps à moitié dénudé mais discuter à un professeur dans cette tenue c'était plutôt... gênant. Difficile d'être prise au sérieux comme ça. Il tenta d'ailleurs une nouvelle fois de l'encourager à abandonner en prétendant qu'il ne changerait pas d'avis. Mais cela était d'autant plus excitant pour la jeune femme. Elle aimait beaucoup les défis. « Quel est l’intérêt vu que vous savez que vous allez perdre ? J’ai toutes les cartes en mains et j’aurais toujours le dernier mot. » Elle pencha la tête sur le côté, le regardant une nouvelle fois comme si c'était un être curieux. Elle haussa ensuite les épaules avant de répondre : « Et le jour où je vous prouverai le contraire, j'espère que la chute ne sera pas trop douloureuse... Même si ça peut être mignon un homme qui pleure. » Mais pas trop, sinon ça devenait pathétique.