Sujet: You're a stranger. [PV~Will] Sam 24 Juil - 14:10
Wanna be your freedom .
Je m'éveille enfin. Sors d'un monde parallèle et étrange. Paupières qui clignent. Lumière aveuglante. D'une main, je me protège les yeux, et me redresse avec lenteur. J'ai mal au crâne. Je suis allongée sur le tapis du salon, face à la mince baie vitrée qui donne sur le balcon. Je ne sais ni pourquoi, ni comment j'ai réussi à m'assoupir ici, mais il est clair que quelque chose ne tourne pas rond chez moi. Des débris de verre. Je devine les restes d'une bouteille. Ca y est, ça me revient. Enfin je crois. J'ai souvenir de fumée. Hier, j'ai pris une décision. Profiter de ma vie à New-York. Une vie temporaire, j'entends. C'est comme ça que j'en suis venue à entamer une bouteille d'alcool à moi toute seule, et à la terminer avec...deux...ou...plusieus cigarettes. Ouais. Y a pas à dire. Je fais n'importe quoi. J'ai jamais aimé les clopes en plus. Probablement ai-je du fracasser la bouteille contre le mur. J'ai la paume de la main écorchée. Mon Dieu. Rastakouet, tu peux m'applaudir !
Je lève les yeux de l'entaille, et l'aperçois derrière la vitre, assis, attendant patiemment que je vienne lui ouvrir. Il a du errer sur les toits de New-York. Rastakouet est là, ses grands yeux sages posés sur moi. Tout va bien. Je crois...
Je ne sais pas l'heure qu'il est et je m'en fiche. Je suis à présent assise sur le rebord de la baignoire. Rastakouet se prélasse dans le lavabo. Je fixe mon reflet dans le miroir d'un air morne. J'ai des noeuds dans les cheveux, des cernes violettes sous les yeux. Je déteste mon reflet. Depuis quand ai-je cette mine défaite ? Ce n'est pas moi. Alaska a le teint halé par le soleil d'Arizona, des yeux pétillants et pas de cernes. Non, cette vie ne me réussit pas.
Trois semaines ont passé depuis le départ précipité d'Elweard. Et j'en garde une profonde rancoeur. Comment a-t-il pu me faire ça ? Après m'avoir supplié de rester ici ? Et pourquoi l'ai-je écouté pour des paroles si futiles, si idiotes et sans aucun fond ? Pourquoi ne suis-je donc toujours pas partie ? Rien ne me retient. Certainement pas lui. Je lui en veux. Je lui en veux d'être parti avec des excuses qui n'ont pas de valeur. Je lui en veux pour m'avoir fait garder espoir, pendant trois semaines entières, jour après jour, qu'il allait revenir s'excuser dignement et regretter ces paroles qui m'ont bouleversées. Je ne veux plus entendre parler de lui, ni de qui que ce soit d'ailleurs.
Il faut que je sorte. Maintenant. Je ne supporte plus mon air décomposé. Rastakouet est là. C'est ce qui compte. Il me fait cet air que j'aime tant quand ça va pas. Un sourire compréhensif sous ses longues moustaches. Il est si beau avec ses longs poils siamois. J'ai les yeux qui piquent. <>. Je tapote mes genoux. Il s'empresse de venir dans un ronron joyeux et je le prends dans mes bras. Je fourre mes doigts dans son pelage tout doux, et l'embrasse sur le bout du nez. Quand j'étais petite, je voulais me marier avec un chat. Aujourd'hui j'ai mieux : un amoureux.
Je relève d'un geste habile mes cheveux en un chignon. C'est plus facile que les démêler. Ouais. Vivre comme une New-Yorkaise. Jouer le jeu quelques temps. C'est l'été. Presque la fin. Envie d'automne. J'enfile mon jean troué au genou, mes vieilles Doc Martens, et un tee-shirt marin un peu grand. Je sais que je n'ai l'air de rien, mais à N-Y, personne n'est ridicule. Je promets à Rastakouet de rentrer pour ce soir, d'allumer sa bougie favorite, et laisse la lucarne entre-ouverte, au cas où il voudrait s'aérer lui aussi.
Me voilà libre. Dans le vent. Les rues sont animées. Mais ça, c'est commun à la ville. Du monde partout. Je ne m'y ferais jamais. Les mains dans les poches, je lève le menton, les yeux presque clos, je marche sans savoir où je vais. C'est bien aussi. J'irais bien à la bibliothèque. Quoique boire un café me tente aussi. Ca m'aiderait à passer l'alcool d'hier. Je traverse un carrefour et rejoins central manhattan. Je erre entres boutiques et grandes places, m'arrête devant quelques vitrines, observe les gens et leurs habitudes. Je perçois au loin les accords d'une guitare et mon coeur se serre. L'image d'Elweard dans mon esprit refait surface. Notre silence, interrompu par le vibreur de son portable, son air soudainement paniqué au téléphone. Et alors que je m'interrogeais sur l'étrange faculté qu'ont ses yeux à changer de couleur, le voilà qui bredouille et disparaît dans le couloir. Je me revois l'appeler, dans un couinement pathétique, avant de me jeter sur le balcon et reconnaître sa silhouette qui disparaît à l'angle du quartier voisin.
Une boule se forme dans ma gorge. J'avance toujours, progresse à travers une foule d'êtres humains que j'ignore totalement. Le regard rivé sur le sol, je lève la tête, et aperçois une terrasse d'ouverte. La musique bourdonne plus fort dans mes oreilles. Je n'en cherche pas la source. Je ne veux pas savoir. Je m'arrête, me cherche une place lorsque mes yeux tombent sur sa silhouette assise plus loin. Les battements de mon coeur cesse un instant. Pourquoi diable fallait-il que je tombe sur lui ? Je fais marche arrière en vitesse, et lui tourne le dos. Je tente de me résonner. La rue appartient à tout le monde après tout. Oh non ! J'ai comme une envie de me mettre à pleurer. Je n'ai plus de larmes. Tant mieux. J'essaie de me calmer. Si ça se trouve, il ne me remarquera même pas, même si je passe devant lui. Ou...Je peux faire en sorte qu'il me remarque.
Je suis une idiote. Je me retourne. Fixe son profil parfait, un peu vouté. Je marche d'un pas maladroit vers lui. Une envie dingue de lui passer sous le nez et de faire l'imbécile heureuse en me disant que cette fois-ci, c'est moi qui lui passe sous le nez. Je me rapproche à pas imperceptible, feutré. Je lui fais presque face. Je fixe le sol. Laisse échapper une pièce de monnaie de ma poche. Elle roule, vient s'écraser à ses pieds dans un bruit cristallin. Le visage tordu par une douleur incertaine, je le dépasse, et fais comme si je marchais vers un monde meilleur.
Je renifle, pense à Rastakouet, et me dis qu'aujourd'hui, je suis prête à commencer ce que je voulais déjà faire il y a trois semaines...
Cela faisait trois semaines aujourd'hui. Trois semaines qu'Elweard avait quitté Alaska en ce début d'après midi de Juillet. Un Jeudi. Un Jeudi pas comme les autres. Trois semaines qu'il était à la rue, son portable déchargé, son sac et sa guitare sur le dos. Et son bébé chien sous le bras. Il allait sur ses deux mois, mine de rien. Il était bien plus vif que trois semaines auparavant. Il dormait moins, gigotait plus, braillait plus, aussi. Il ne se nourrissait plus qu'au biberon. Ses repas étaient composés le plus souvent du reste de la baguette qu'achetait son maitre tous les matins. Elweard laissait les morceaux tremper dans du lait quelques temps, avant de donner le tout à l'affamé. C'est qu'il mangeait comme deux ! Et il était adorable.
Spoiler:
Pas comme son maitre. Nan, ça c'était une autre histoire. Comment dire. La rue ne l'avait pas seulement aidé à grandir. Elle l'avait aussi éreinté, fatigué. En trois semaines Elweard avait beaucoup changé. Son teint parfait était désormais cireux, ses yeux fatigués, sa mine terne. Il n'avait pour autant pas perdu sa fierté, et paraissait tout aussi imposant qu'avant sa mise à la rue. Il était assis là, face à la terrasse de ce bar bien connu. L'ilot. Le seul refuge pour un naufragé de la vie comme Will'.
C'est fou comme l'être humain a une capacité de survie surdéveloppée. Prenons William comme exemple. Il est né dans une famille complètement décomposée. Sa mère était soumise à l'autorité du père, et ce dernier buvait à flots et frappait son fils dès qu'il en avait l'occasion. Puis il est parti, laissant Will' seul, avec une mère devenue folle. Enfin, le jour du suicide de celle ci, il avait quitté sa ville natale pour s'installer à New York. Il avait été renvoyé de ses nombreux petits boulots. Avait été mis à la porte de son appartement. Avait été racketté par deux voyous dans une petite ruelle(il en a gardé les séquelles, une longue et fine estafilade tout le long du torse), avait failli perdre son chien qui avait avalé de la viande avariée dans une poubelle, avait survécu à l'orage et à la pluie torrentielle qui s'en est suivi, pendant une semaine entière. Il avait tenu le coup, à toutes les épreuves de la vie. Tout ça grace a son instinct de survie. Et le voila assis face à son Ilot, sa clope au bec, sa guitare sur ses cuisses jointes, les yeux mi clos, la tete dans les mains. Assis sur le trottoir, il sent la présence gigoter sous ses genoux. Le chiot couine un peu, il le calme d'une caresse tendre. La vie ne tient qu'à un fil. Qu'à quelques secondes bien placées, il parait. L'homme redresse la tete. Tire la dernière latte de sa clope, la savourant. Il recrache de gros volutes de fumée, les regarde pensivement, jette du bout des doigts le mégot dans le caniveau.
C'est parti. En quelques gestes habiles, l'homme fatigué a empoigné son arme. Sa vieille guitare qui ne l'a jamais abandonné. Candy. Il la caresse du bout de l'index, effleure les cordes. Un sourire triste apparait sur sa mine fatiguée. Il commence à gratter. Ses lèvres frémissent, sa voix douce enveloppe l'air autour de lui. Les gens au bar se sont arretés de parler. Certains osent encore chuchoter, mais mis à part ça le silence est roi autour de William. "People always say Will', this has gone too far But I'm not afraid to chase my dreams Just me and my guitar"
Il fixe sa chère Candy, et il sent les regards se poser sur lui, curieux.
"And no one may ever know The feelings inside my mind Cause all of the lines I ever write are Running out of time"
La sueur perle à son front, il sent le chiot se coucher sous ses jambes, bercé par la musique.
"So maybe I should get a nine to five But I don't wanna let it go There's so much more to life"
Il chante surement pour la derniere fois face à ce bar, face à ce public, il chante surement sa fin, parce qu'il la sait toute proche. Cela fait longtemps qu'il y pense. A comment mourir. Il voulait une mort digne. Pas pendu comme sa mère, ou porté disparu comme son père. Non. Quelque chose de beau. De triste mais beau. Sa voix s'éraille.
"Tell me that I got it wrong Tell me everything will be okay Before I fall And tell me they will play my songs Tell me they will sing the words I'll say When darkness falls Then all of the stars will see Just me and my guitar"
Le second couplet ne lui vient pas, il n'a pas la force. Il repose lentement la guitare sur ses cuisses, la range dans son étui. Les gens cessent de l'observer. Pas un applaudissement. Pas un compliment. Il a l'habitude.
Une pièce de monnaie roule vers lui alors qu'il terminait de zipper son étui. Il fronce des sourcils, redresse la tête. La voit. Son coeur rate un battement. Il déglutit avec peine, soupire. Pas elle, pas elle. Pourquoi elle maintenant ? C'est un cauchemar. On veut le voir souffrir apparemment. William se lève. Sa guitare sur une épaule, son sac à dos sur l'autre. Le chiot dans ses bras, lové, endormi. Il fixe la jeune femme, qui le dépasse alors sans un mot. Il la suit du regard, hébété, outré. Il lance d'un ton sec
"Vas te faire foutre. Tu peux la récupérer, je la laisse là de toute façon."
La pièce. La pièce de monnaie qui l'avait sidéré. Synonyme de pitié, de charité forcée, de .. William écumait. Il enrageait à l'idée qu'elle ait pu oser l'enfoncer à ce point. Ne voir en lui à présent qu'un sale sans abri. Les dés étaient jetés. Lui aussi allait la traiter comme toutes les autres. Elle l'avait bien cherché. Le sourire d'Elweard est jaune, et forcé, un sourire méprisant et déçu. Il lui tourne le dos, et marmonne alors "J'en ai pas besoin là où j'vais."
Les gens en terrasse observaient le spectacle d'un oeil attentif. Elweard leur envoie un doigt d'honneur, sourcils froncés, avant de tourner les talons et s'éloigner. C'en était trop. Il avait perdu dans sa déception son instinct de survie. Il ne voulait plus lutter. Il ne pouvait plus. Fallait en finir, et vite.
Sujet: Re: You're a stranger. [PV~Will] Dim 1 Aoû - 19:44
I love you as much as I hate you.
Quand j'étais petite, je ne me mettais jamais en colère. L'oppression de ma mère m'en empêchant formellement. Je la redoutais trop suite à l'accident qui était survenu. C'était elle, qui se mettait tout le temps en colère. Elle disait que j'avais détruit sa vie. Aujourd'hui, j'aimerais lui dire que c'est elle qui a détruit la mienne.
A l'école, je me rappelle de certains professeurs qui s'étaient posés des questions sur mon manque d'expression et mon habitude à rester stoïque. Quelques mois plus tard, j'intégrais le pensionnat. Mon aptitude à me fâcher envers de petits riens a donc surgit à cette époque. Je ressentais le besoin de me faire comprendre par mes émotions que je devais impérativement exorcisées. J'appris à devenir plus sûre de moi, vive, et farouche. J'étais encore jeune, et faisais souvent des caprices. Par la suite, je me suis nettement calmée. Grâce aux livres qui sont devenus une véritable passion, et puis à Nathan. Ce cher Nathan qui a si bien su me comprendre, et m'apprivoiser avec le temps. Notre amitié évoluait au fil des jours, et en adolescente naïve, j'étais prête à jurer qu'elle le serait pour toujours.
Non. Je ne pourrais regretter ma décision. Car je sais que, quoi qu'il arrive, quoi qu'il se passe, la fuite me sera toujours l'ultime échappatoire.
Aujourd'hui j'ai 19 ans. Et mon aptitude à me mettre en colère est digne de mon enfance. Vive, sulfureuse, incendiaire. C'est tellement paradoxal quand j'y pense ! Petite, je cachais mes émotions, et me voilà à l'heure actuelle incapable de les gérer comme une jeune adulte normale et responsable. Je me mets en colère lorsque je marche et qu'une personne trop lente se trouve devant moi, quand j'entre acheter des livres et qu'on me dit qu'il faut que je me dépêche car la boutique va fermer, quand je relis les lettres de Nathan, quand je repense à la fois où Maman est partie noyer mon chat, lorsque les cerises tachent mon tee-shirt, quand je commande une limonade et qu'on me ramène un Perrier. Oui, c'est vrai. La colère me plaît. Et la Colère m'aime bien aussi. Parce que je peux être incontrôlable lorsqu'elle m'habite. Les gens qui doublent dans la file, ceux qui vous regardent de haut parce qu'ils pensent être mieux placés, ceux qui croient tout connaître de la vie alors qu'il n'en ait rien, les gens parfaits, égocentriques, hypocrites, angoissés, idiots, incompétents, maladroits, riches, pervers...Ils m'agacent trop facilement et déclenche mon mécontentement.
Et si je vous dis tout ça, c'est parce qu'en ce moment même, Elweard Evensen ignore ce dont je suis capable lorsque je suis dans un tel état.
Je l'ai dépassé. Un pas après l'autre, tête inclinée, j'avance le coeur lourd. Je revois ses vêtements sales, son teint pâle, ses cernes, ses joues creuses, ses cheveux mal peignés, sa barbe mal rasée, son expression vide et éteinte. Il m'est trop facile de reconnaître les gens à la rue. Sans compter ce chiot pelotonner sur ses genoux. Et si j'avais volontairement fait tomber cette pièce de ma poche, ce n'était en aucun cas par pitié. C'était pour attirer son attention. Je m'attendais à tout, mais pas à cela.
"Vas te faire foutre. Tu peux la récupérer, je la laisse là de toute façon."
Sa voix avait le même effet qu'une balle de fusil traçant le ciel. Les gens qui ont assisté à la scène se sont arrêtés de parler. Je sens leurs regards posés sur ma silhouette. Je ne distingue même pas les sons de la circulation toujours aussi dense dans cette ville.
Je tressaille et m'arrête instantanément. Immobile, bras ballant, mâchoire crispée. Peut-être est-ce l'effet de l'alcool ingurgitée la veille, ou peut-être simplement le fait que cela vienne de lui, mais ma colère se décuple en un rien de temps. "Vas te faire foutre." Ca résonne violemment dans ma tête. Est-ce le même homme ? Me suis-je trompée en le confondant avec quelqu'un d'autre ? Et si ce n'était pas le cas, en quoi se permettait-il de m'humilier de la sorte ? Mes mains se ferment en deux poings distincts, je sens cette chaleur submerger tout mon corps, elle m'enserre dans ses griffes et fait de moi sa prisonnière favorite. Je me retourne, bouche entre-ouverte, offusquée encore de penser que cet homme, il y a trois semaines de cela, avait supplié ma présence. Je l'aperçois encore une fois de dos, qui s'éloigne comme si de rien n'était, sa guitare sur le dos, son chiot sous le bras. Je fulmine et le rattrape en quelques foulées. Je n'ai pas conscience de ma force dans ces moments là, tout ce que je sais, c'est que d'ordinaire, l'avantage physique que possède Elweard sur ma personne m'aurait dissuadé de tous gestes coléreux. Néanmoins, c'est d'une seule main que je le fis faire volte face, me retrouvant nez à nez avec ses yeux incendiaires. J'oublie tous ces gens qui ont les yeux tournés vers nous. Ma main part toute seule. Un claquement sonore. Une gifle...
Je viens de signer mon arrêt de mort. Tant pis. Je n'en ai que faire.
Je me rapproche encore, ma poitrine secouer par des soubresauts, plante mes yeux dans les siens.
- J'espère que ça t'a remis les idées en place. Maintenant écoute-moi bien, Evensen. Je me contre fiche de cette pièce, tu entends ? Tu crois que ça ne crève pas les yeux ? Tu crois que j'ignore ce que ça fait, hein ? Se retrouver à la rue à plus savoir quoi faire, se sentir totalement perdu, désorienté, seul au monde, incompris et rejeté, à crever la dalle et à attendre, toujours attendre, qu'un connard se fiche éperduement de votre situation pour vous tendre un dollar le sourire aux lèvres. Il y a bien longtemps que je n'ai plus de pitié. Alors tu peux m'insulter autant que tu veux si ça peut te faire plaisir, mais tu pourrais au moins avoir le cran de venir me le cracher en face.
Je m'arrête un instant, toute tremblante, et reprend mon souffle.
- Maintenant je vais te dire une chose. Tu me prends peut-être pour une idiote, mais vois-tu, même un idiot verrais clairement que ta guitare et cet animal que tu tiens fermement sous ton bras, c'est tout ce qu'il te reste. Ta guitare, et ce chien. C'est tout. Rien d'autre. Cependant, moi je sais ce qu'ils représentent à tes yeux. Un espoir. Et tu veux que j'te dise comment je le sais ? Parce que jusqu'il y a trois semaines, j'avais enfin un espoir, avant que tu ne disparaisses avec lui. Sans jamais réapparaître.
Je me tais enfin, essoufflée et surprise par la haine qui avait fait de moi son esclave. Je constate qu'un homme s'est arrêté pour admirer la scène. Je le fixe, ouvre la bouche, mais n'ai même pas le besoin d'en faire sortir un son qu'il reprend son chemin en vitesse. Je reporte mon attention sur Elweard, le coeur battant à tout rompre, et prend conscience avec bien du retard que tout ce qu'il vient de se passer, je risquais de le payer cher. Mes sourcils s'affaissent, mon regard devient plus hésitant. Je termine enfin dans un souffle rauque.