« Mademoiselle, serait-il possible de changer les serviettes s'il vous plaît? Celles-ci sont sales et ne semblent pas avoir été changées depuis des lustres? » Carmen détailla son interlocutrice, une femme dans la quarantaine d'une élégance incomparable. Tenant les serviettes entre ses doigts comme si elles étaient la chose la plus répugnante qu'elle ait jamais vu, elle lança un regard hautain à la femme de ménage. « Bien sûr, donnez-les moi. » La brésilienne s'approcha de la cliente et prit les essuies qu'elle lui tendait. De nature visiblement maniaque, elle s'essuya les mains sur son tailleur. Carmen observa la scène avec une pointe d'amusement qu'elle tentai néanmoins de cacher. « Un hôtel quatre étoiles à qui il faut rappeler de changer les serviettes? Mais où va le monde? » Offusquée, Carmen toisa cette personne de la haute société. Bien que cette scène faisait partie de son quotidien, elle ne s'était jamais réellement habituée -et ne s'habituerait certainement jamais- à cette manière dont ces personnes osaient vous rabaisser sans vergogne et vous rappeler à quel point ils sont supérieurs à vous. Lors de ses premiers jours dans cet hôtel, elle fut plusieurs réprimandée pour avoir eut le toupet de répondre aux critiques des clients. Une femme de ménage n'est pas là pour se plaindre ou pour répondre aux clients. Elle est là pour faire le ménage et subir les innombrables plaintes de ces personnes sans bruit. Serrant les dents et priant pour qu'aucun son ne sorte de sa bouche, Carmen sortit de la chambre. Déposant ces foutues serviettes dans le bac à sale linge qu'elle trimballait pendant toute la journée, cette dernière poussa un long soupir de lassitude. « Un merci aurait suffi. » Elle remit une mèche derrière son oreille et reprit son chemin dans ce couloir du premier étage. La journée allait être longue, trop longue.

Carmen s'affala sur le canapé dans un long soupir. Huit heures de travail. Huit heures passées à nettoyer ces chambres de luxe. Huit heures à mordre sur sa chique pour ne pas envoyer balader ces clients hautains. Oui, ça faisait du bien de rentrer chez soi. Et qui plus est, un chez soi désert. En rentrant à l'appartement, elle fut étonnée de ne pas trouver l'habituel agitation qui le caractérisait tant. Vivre avec six autres personnes en colocations, ce n'était pas toujours de tout repos. Avoir du temps pour souffler un peu était rare ici. Carmen fut donc contente de constater qu'elle avait la maison pour elle seule. Enfin, pour un temps certain. A cette pensée, elle se rua littéralement dans la salle de bain et se fit couler un bain, bien chaud usant de savon pour le rendre aussi agréable que possible. Profitant de cet instant, elle y resta pendant ce qui lui sembla être une éternité. Elle en ressortit, la peau toute fripée par la chaleur de l'eau. Enroulant une serviette autour de sa poitrine, elle se dirigea dans sa chambre et enfila des sous-vêtements qui se voulaient confortables. Personne n'était là, autant en profiter et se mettre à l'aise. Elle se rendit par la suite dans le salon où elle mit la musique. Sur un air d'Avicii, la brésilienne se mit à remuer des hanches. Les yeux fermés, un sourire béat aux lèvres, Carment Mendes offrait certainement le spectacle le plus hilarant de tous les temps.