Trois heures plus tôt…

« Insomnie… Insomnie… » Alexy faisait tirait sur le curseur de sa page internet, faisant défiler celles-ci les unes après les autres. « Ah ! "L’insomnie passagère : les symptômes sont reliés à une situation ponctuelle souvent facilement identifiable (une période plus stressante au bureau, un divorce, etc.) » Il poussa un soupire de soulagement. Avec le nombre de dossier qu’il avait à ouvrir, à boucler, à étudier… Cela pouvait lui couter sa carrière, et il laisserait filer son poste à quelqu’un d’autre pour rien au monde. Il avait trouvé du travail dans un domaine qu’il adorait, et avait une très bonne place dans l’entreprise. Pourquoi changer ? "Ce type d’insomnie peut néanmoins durer plusieurs semaines." « Ah. C’est embêtant. » songea-t-il. Car il aurait besoin d’être au top ces jours suivants, il avait pas mal de travail. Et les insomnies, comme il venait de le lire, entraînaient de la fatigue, de la somnolence, de l’irritabilité, des pertes de mémoire et de la difficulté à se concentrer durant le jour. Pas très bon pour le jeune homme, en résumé.
La lumière irradiante qui émanait de son écran d’ordinateur lui agressait violemment les yeux. Bon sang, c’que c’était trop blanc ! Il ferma les paupières quelques secondes, secondes qui lui parurent minutes. Il était temps de dormir, la fatigue l’enveloppait soudainement, et dangereusement. Il éteignit sa machine. Déboutonnant son jean et retirant son tee-shirt, il alla rapidement se blottir sous la couette épaisse de son lit double qu’il comblait seul.



« Bip bip bip bip bip bip bip bip… » Alexy ne s’étira que vaguement. Il était épuisé, et à croire que Morphée ne voulait pas le laisser quitter le doux berceau de ses bras. Il appuya sur le bouton d’accueil de son iPhone, réflexe matinal pour voir si on lui avait laissé quelconque message. A la place de cela, il découvrit l’heure. 6h30. Il referma les yeux. Quoi ? 6h30 ?! Dans une demi-heure seulement, il devait être assis devant son bureau, son pc allumé, et opérationnel. C’était une blague. Pas à lui. Pas maintenant. Pas ce matin. Non, ce n’était pas possible, pas à lui, bordel ! Il se tira du lit et se passa un coup d’eau fraiche sur le visage, s’habilla en quatrième vitesse, se fit un café et mis un croissant à chauffer le temps de rassembler et ranger ses affaires dans sa besace noire. Il enfila ses Converses avec hâte, et mis sa veste tout aussi vite. 6h45. Merde. Merde, merde, merde. Foutue insomnie ! Il boirait son café dans la voiture, pas grave. Il mangerait son croissant aussi dans la voiture, pas grave non plus. Raaah ! Il prit son téléphone portable, ses clés, attrapa au passage son sac et fila.
Mais ce qu’il découvrit avec horreur ce matin là, c’est un énorme camion qui bloquait son entrée de garage, et donc il ne pouvait pas sortir son véhicule. Punaise, mauvaise journée bonjour ! pensa-t-il avec un sarcasme comme il savait bien le faire. Des hommes en combinaisons allaient et venaient, faisant de grands gestes avec leurs bras en tous sens. Il se dirigea à grands pas vers un d’eux.

- Bon sang, qu’est-ce qu’il se passe ici ? Il y en qui bossent je vous ferais dire, et votre foutu camion condamne mon entrée de garage ! Comment je fais pour aller travailler si je n’ai pas la possibilité de sortir ma voiture ?!

Certes, il avait sûrement était un peu dur. Ce n’était pas son genre, mais ce n’était pas son jour non plus. Il voulait savoir qui était à l’origine de tout ça, et pourquoi autant de choses de si bonne heure dans une rue pourtant tranquille à la base. Il respira à fond et se calma légèrement.

- S’il vous plait.

Depuis deux semaines, Lindell se réveillait à l'hôtel. Presque sur un coup de tête, il avait quitté la côte ouest pour rejoindre New York, sans rien avoir préparé. Il n'avait pas cherché d'appartement, il n'avait pas organisé son déménagement, il n'avait même pas pensé à réserver un hôtel. Par chance, à New York ce n'étaient pas ça qui manquait. Il n'avait emporté qu'une valise avec lui, laissant le reste de ses affaires à San Diego jusqu'à ce qu'il trouve un endroit où s'installer. Il passe la première journée à se promener tranquillement dans New York, content de retrouver enfin l'endroit qu'il connaissait le mieux sur Terre. C'est à cette occasion qu'il constata qu'il n'était toujours pas redevenu un inconnu, même après un an d'absence de la ville et des médias - excepté par la volonté de quelques paparazzis. En une journée, seules une trentaine d'anciennes fans se sont manifestées à lui, sans trop attirer l'attention et en étant correctes. C'était bien loin de ce qu'il avait vécu deux ans auparavant, quand il ne pouvait même plus faire quelques mètres sans une escorte. Il avait aimé cela à l'époque, et aujourd'hui, alors qu'il dit vouloir retomber dans l'anonymat, il est forcé d'admettre qu'il apprécie d'être parfois reconnu.

Ce n'est que le lendemain qu'il commença à recherche un appartement, sur des quartiers très ciblés. Il voulait être prêt de musées, non pas pour les découvrir - il les connaissait tous -, mais surtout pour pouvoir se retrouver au calme sans être obligé de s'enfermer chez lui. C'est ainsi qu'il concentra ses recherches sur la 5ème avenue, avec par exemple le Metropolitan Museum of Art et le Musée Guggenheim. Il visita une dizaine d’appartements en quatre jours et ne laissa une offre que pour deux d’entre-eux, le premier l’ayant rappelé le soir même pour dire que son offre n’était pas retenue. C’est trois jours plus tard qu’il reçu une réponse positive pour le deuxième, un loft au dernier étage d’un bâtiment classique. L’appartement a été totalement transformé, c’est pourquoi Lindell a du attendre une semaine que les derniers travaux se finissent avant de pouvoir emménagé, juste le temps d’organiser l’acheminement de ses affaires.

C’est ainsi qu’il se retrouva, quinze jours après son arrivée, à superviser son déménagement dès six heure du matin afin de gêner le moins possible la circulation. Le loft étant déjà en partie meublé, le déménagement ne nécessitait qu’un camion. Lui et l’équipe de déménagement avaient montés en premier lieu des cartons de vêtements et d’affaires personnelles, ce qui leur pris une demie heure en raison des dix étages à monter. Il y avait également quelques lampes et élément de décorations à installer, et une télévision à fixer au mur. La moitié de l’équipe resta à s’occuper de ça tandis que Lindell redescendit avec les autres pour organiser le transport de son piano, dernier élément dans le camion. Alors qu’il était dans le camion avec deux hommes pour trouver comment tourner le piano, il entendit quelqu’un hausser le ton dehors. Bien que pas très bien habillé - un teeshirt blanc légèrement moulant et un simple jean - et ayant un tout petit peu transpiré, il sorti voir ce qu’il se passait, ne voulant pas laisser les déménageurs porter le chapeau à sa place, et découvrir un jeune homme visiblement sur les nerfs et pressé. Il entendit sa plainte et se dirigea vers lui.

« Bonjour, excusez-moi... Je suis désolé, j’emménage et je pensais avoir le temps de finir avant que vous sortiez, j'avais insisté pour démarrer tôt pour cette raison. »

Il regarda les hommes présents autour de lui qui se dirigeaient vers l’arrière du camion puis s’arrêta devant son nouveau voisin et lui tendit la main.

« Je m’appelle Lindell Hoover. On va essayer de régler ça au plus vite, mais le chauffeur du camion est en haut en train d’installer des affaires, je ne pense pas qu’on va pouvoir déplacer le camion avant quelques minutes. Mais je crois que vous pourriez faire quelque chose pour que ça aille plus vite, si vous êtes d’accord...»

« Bonjour, excusez-moi... Je suis désolé, j’emménage et je pensais avoir le temps de finir avant que vous sortiez, j’avais insisté pour démarrer tôt pour cette raison. »

Le jeune homme qui s’était présenté à lui était vêtu d’un simple tee-shirt blanc et d’un jean tout aussi basique, ce qui tranchait complètement avec l’allure d’Alexy, qui portait sa tenue de bureau. Certes, sa chemise n’était pas fermée jusqu’en haut ; il avait laissé les deux premiers boutons de celle-ci ouverts, ce qui faisait plus décontracté, plus… sexy. Après tout, l’été arrivait à New York, et les couples commençaient déjà à se former plus ou moins vite, les amitiés à se lier avec plus d’aisance. C’était partout pareil, mais d’autant plus ici. Il avait du quitter sa petite-amie londonienne, mais ce n’était pas pour ça qu’il devait renoncer à toute autre relation : le passé était le passé, point. La main tendue vers lui de ce qui s’apparentait à être son nouveau voisin le tira de ses petites rêveries. Il baissa les yeux quelques instants pour la regarder, puis la saisit. La voix du garçon avait été douce, malgré la sécheresse de son locuteur, ce qui avait un peu fait redescendre l’énervement d’Alexy. Il ne pensait plus vraiment au travail, et il fallait avouer que parfois, ça lui faisait du bien.

« Je m’appelle Lindell Hoover. On va essayer de régler ça au plus vite, mais le chauffeur du camion est en haut en train d’installer des affaires, je ne pense pas qu’on va pouvoir déplacer le camion avant quelques minutes. Mais je crois que vous pourriez faire quelque chose pour que ça aille plus vite, si vous êtes d’accord...»

- Alexy Jordan Lewis. Mais appelez-moi Alexy. Régler sa au plus vite m’arrangerait beaucoup, je ne suis déjà pas fort en avance. Ceci faut dire, c’est en grande partie ma faute ; je me serais levé assez tôt, j’aurais eu le temps d’affronter l’heure de pointe des taxis new-yorkais. Mais j’ai bien peur qu’il ne soit trop tard. (Il regarda l’heure sur l’écran de veille de son téléphone.) Je devrais être prêt à travailler dans dix minutes, hélas, vous comme moi savons parfaitement que ce fait sera impossible. J’espère ne pas prendre énormément de retard, donc je vous écoute. Que puis-je faire ? Je ne vous promets pas que je sois complice de tout, mais je peux toujours essayer.

Il regarda ce Lindell avec attention, une pointe d’amusement dans la voix. On ne le mettait que rarement en suspense comme cela, d’habitude on jouait carte sur table avec lui. Cette situation le troublait un peu. Enfin… la situation, ou l’auteur de la situation ?...

Lindell était plutôt étonné de l’âge de son voisin. Il fallait plutôt avoir de bons revenus pour vivre ici, et il était rare de réussir dans un travail «classique» en étant si jeune. De plus, Lindell ne s’imaginait pas vraiment qu’il faille partir si tôt, avec une horaire de travail à respecter absolument et surtout habillé comme l’était le jeune homme si le jeune homme était une célébrité, comme il l’était - et l’est toujours un peu. Peut être vivait-il encore avec ses parents alors. Après tout, les appartement sont assez grands dans le quartier pour accueillir une famille, et ce ne serait sûrement pas le premier à rester chez ses parents plus que nécessaire. Ou alors ses parents lui offraient le loyer, ce qui ne serait pas non plus une première dans une famille fortunée. Le nom du jeune homme ne lui dit en tous cas rien.

Pour quelqu’un de pressé, le jeune homme prit bien le temps d’expliquer son retard. A cette idée, Lindell sourit en coin et fit un signe de la tête au jeune homme de le suivre. Tout en marchant vers l’arrière du camion, il lui expliqua son idée.

« Eh bien à vrai dire, il ne nous reste qu’une petite babiole à monter dans mon appartement. J’admet que petite babiole est peut être un peu en dessous de la réalité, car sinon je ne vous demanderais pas de vous y mettre avec nous. »

Lindell précédait son nouveau voisin de quelques pas, et il s’arrêta juste à côté du camion dans lequel quatre déménageurs discutaient autour de la fameuse babiole. Lindell fit signe à Alexy de regarder à l’intérieur avec un sourire grandissant et le regard malicieux, fier du petit effet de surprise qu’il avait ménagé à son voisin. Pendant que le jeune homme le contournait pour enfin découvrir ce qu’il restait à transporter, Lindell accompagna sa progression de quelques explications.

« En fait, comme le reste de l’équipe fini l’installation en haut, nous ne sommes finalement pas assez nombreux pour transporter... »

Il fit une courte pause le temps de se rapprocher d’Alexy pour voir sa réaction face au grand piano de Lindell qui n’avait pas bougé du fond du camion.

« ... Mon piano. Et on ne peut pas bouger le véhicule avant de l’avoir sorti, car il n’est plus sécurisé par quoi que ce soit. Sans votre aide il faudrait compter cinq à dix minutes de plus. »

Lindell monta dans le camion et tendit sa main à son jeune voisin pour l’aider à monter si il décidait de les aider. Il ajouta, toujours en souriant :

« Alors, monsieur Lewis. Prêt pour l’aventure de votre vie ? »

Alexy suivit le jeune homme jusqu’au bout. Lorsque Lindell l’invita à regarder ce que contenait le camion, il écarquilla les yeux. Bon sang !

« Eh bien à vrai dire, il ne nous reste qu’une petite babiole à monter dans mon appartement. J’admets que petite babiole est peut être un peu en dessous de la réalité, car sinon je ne vous demanderais pas de vous y mettre avec nous. En fait, comme le reste de l’équipe fini l’installation en haut, nous ne sommes finalement pas assez nombreux pour transporter mon piano. Et on ne peut pas bouger le véhicule avant de l’avoir sorti, car il n’est plus sécurisé par quoi que ce soit. Sans votre aide il faudrait compter cinq à dix minutes de plus. »


Il était sérieux ? Sérieusement sérieux ? Bon dieu, il aurait été moins en retard à prendre un taxi au final. La façon dont l’abordait cette nouvelle venue le désemparait. Il ne semblait pas gêné, aucunement confus de soudoyer son aide, alors qu’il ne le connaissait pas. Alexy leva les yeux sur la main tendue de son interlocuteur, l’esprit fortement hésitant. Il jeta un coup d’œil rapide mais pas très discret à l’écran de son iphone, puis soupira. Il était déjà en retard de cinq bonnes minutes.

« Alors, monsieur Lewis. Prêt pour l’aventure de votre vie ? »

Se mordillant légèrement la lèvre inférieure, il finit par saisir la paume tendue de l’emménageur.

- Allons-y ! Mais je vous préviens, vous n’avez pas vraiment eu de chance. Je ne suis pas l’homme le plus fort que vous auriez pu rencontrer dans cette rue. Dommage !

Sur une connotation plutôt joyeuse, déménageurs et voisins s’y mirent tous ensemble. Ils se débrouillèrent pour le monter, non sans peine bien entendu. Quinze minutes s’écoulèrent. Les déménageurs saluèrent Lindell pendant quelques minutes après plusieurs accolades et tape sur le bras ou dans le dos, alors qu’Alexy s’était un peu éloigné pour inspecter l’intérieur du loft. Il n’avait jamais eu l’occasion de visiter les différents types d’accommodation à New York, ce qui n’avait évidemment rien à voir avec Londres ou encore Romford. Il avait toujours adoré ces logements constitués d'espaces entièrement ouverts, réalisés dans un ancien atelier, entrepôt ou usine. Certes, celui-ci était complètement vide de décoration malgré le mobilier qui y avait été déposé ce matin là. Le probable musicien discutait toujours avec les autres hommes, alors Alexy s’éclipsa dans la salle où ils avaient installé ce fameux piano. Il était splendide. Il s’avança. L’examina. Il avança doucement sa main vers l’instrument et y glissa deux doigts. Il caressa le couvercle, puis laissa son instinct le guider. Son inconscient le fit continuer sur le meuble de bois. Il fit ensuite caresser les touches blanches de ses doigts fins. La porte de la pièce était presque close à présent, mais il ne s’en rendit pas compte. Il ferma les yeux, et inspira doucement. Il perdit alors toute notion du temps, de l’espace. Cette connexion qu’il avait avec la musique refit surface. Cette sensation qu’il aimait tant traversa tout son corps, jusqu’à l’en faire frémir. Il ne voyait plus, ne sentait plus, ne bougeait plus… n’entendait plus.

L’avertissement d’Alexy amusa Lindell. S’il y en avait bien un qui n’avait pas de chance, ce n’était pas lui mais son voisin, justement. Non seulement sa journée avait, d’après ce qu’il a dit, mal commencé, mais il était contraint d’aider un inconnu à monter quelques centaines de kilos sur dix étages. La force du jeune homme n’importait néanmoins que peu. Ils auraient pu se passer de son aide pour transporter le piano, ça aurait juste été un peu plus long et moins facile. Un soutien de plus permettrait au moins de mieux tenir le piano et de mieux le diriger.

Et c’est dans le quart d’heure qui suivit que Lindell remarqua à plusieurs reprises combien l’aide de son nouveau voisin était précieuse. A plusieurs reprises, lorsqu’il fallut changer la position du piano ou le surélever pour passer un obstacle, le jeune homme fit preuve d’un peu plus de force que ce qu’il n’en avait annoncé. Une fois devant l’appartement, une partie des déménageurs qui étaient restés en haut se joignirent à la tâche ce qui permis de libérer Lindell et Alexy de leur charge. Lindell rentra directement dans l’appartement (PHOTO) pour indiquer le chemin aux déménageurs puis alla rejoindre le chauffeur du camion, qui était également le chef d’équipe, pour régler la facture et signer les derniers papiers.

Il aperçu alors Alexy rentrer dans une pièce. Il vérifia en vitesse les installations faites en son absence avec lui, puis salua les déménageurs. Une fois tous parti, il referma la porte et remplit un verre d’eau pour Alexy. Il se dirigea donc vers la pièce dans laquelle il l’avait vu entrer et en ouvrant la porte, il le vit presque immobile, près du piano. Il semblait avoir totalement oublié l’heure qu’il était - près de 7h10 - et même qu’il avait un travail, ou qu’il n’était pas chez lui. Lindell le regarda quelques secondes - et remarqua enfin qu’il était plutôt mignon - avant de rentrer et de fermer la porte pour le «réveiller».

« Attention au syndrome de Stockholm, Alexy. »

Le jeune homme ne semblait pas comprendre ce qu’il voulait dire par là, alors Lindell s’approcha de lui et lui tendit le verre d’eau, qu’il avait bien mérité.

« Tenez... Je parle du syndrome de Stockholm parce que vous avez du supporter ce piano, qui vous a retardé et contraint à m’aider. Lui et moi vous avons pris en otage en quelque sorte. Et vous voilà sous le charme... du piano, bien entendu. »

Une nouvelle fois, Lindell sourit. Il avait se piano depuis près de quatre ans, c’était la première chose qu’il avait acheté quand le succès lui permis de toucher son premier - et confortable - salaire. En allant à la fenêtre, Lindell vit le camion s’en aller.

« Mais vous avez perdu encore vingt minutes par ma faute. Peut-être que vous devriez y aller ? Ils sont tous partis, j’ai essayé de faire ça vite. »

« Tenez... » Alexis prit le verre que lui tendait Lindell. « Je parle du syndrome de Stockholm parce que vous avez du supporter ce piano, qui vous a retardé et contraint à m’aider. Lui et moi vous avons pris en otage en quelque sorte. Et vous voilà sous le charme... du piano, bien entendu. » Alexis regarda Lindell se diriger vers la fenêtre en souriant sur sa fin de phrase ambigüe. « Mais vous avez perdu encore vingt minutes par ma faute. Peut-être que vous devriez y aller ? Ils sont tous partis, j’ai essayé de faire ça vite. » D’un signe de tête, il acquiesça. Il sortit son iPhone de sa poche, déverrouilla l’écran, et regarda l’heure sur celui-ci. Il affichait 7h17. Le jeune homme soupira.

- Oh vous savez, pour maintenant, il ne vaut mieux pas que j’y aille carrément. Je fais partie de la société dans laquelle il vaut mieux être absent qu’en en retard, ne serait-ce que de quelques minutes.

Il sourit quelque peu, sans réelle envie. Il n’aimait pas vraiment cette exigence que demandait New York. A Londres, c’était bien différent. Sa vie d’avant lui manquait. Terriblement. Mais c’était ainsi. Il espérait qu’il finirait par se plaire à nouveau aux Etats-Unis.

- Je vais donc rester chez moi. J’irai voir un médecin, j’essayerai de faire croire que j’ai été malade, ce qui a causé mon absence ou n’importe quoi d’autre qui pourrait sauver ma place au sein de l’entreprise.

Lindell le regardait bizarrement. Alexy soupira.

- Oh non. Je suis trop sérieux hein ? Oui, excusez-moi… Je suis désolé. J’ai vraiment rien d’autre à penser que le travail, j’ai moi aussi emménagé récemment. Je viens de Londres à vrai dire. Après avoir passé deux années là-bas. Je suis un peu… dépaysé. Ce n’est pas comme si je ne connaissais pas ce pays, mais ça faisait bien trop longtemps que je n’avais pas touché le sol pollué de cette ville. En fait, ça ne m’avait pas du tout manqué. La grosse pomme ressasse trop de souvenirs dans mon esprit, qui ne sont pas vraiment géniaux. Mais bref, ça, ça relève de ma vie, et je ne vais pas vous ennuyer à vous la conter ici.

Il vida son verre d’eau mérité, et sortit de la pièce où se trouvait le piano, se dirigea vers la cuisine équipée et déposa son récipient dans l’évier. Lindell, qui l’avait suivi, se tenait devant lorsqu’Alexy se retourna.

- Eh bien, monsieur Hoover, ravi d’avoir pu vous aider. J’ai besoin de dormir, je crois. Ma vision devient trouble… Ah là là, la joie des insomnies ! J’espère que vous ne vivez pas ça. Et que vous n’aurez jamais à vivre ça ! Ca dérègle toute mon horloge intérieure... Non je rigole, sans réveil je ne me lèverais sans doute jamais pour sortir de chez moi ! Hélas, je dois payer les factures, et donc faire rentrer un peu d’argent de quelque manière quelle soit. Au passage, ce loft est magnifique.

Il adressa un sourire sincère au jeune homme face à lui. Il ne savait pas dans quel domaine professionnel il travaillait, mais il remarqua qu’il pourrait très bien faire carrière dans le mannequinat. C’était le genre d’homme à faire chavirer le cœur de toutes les demoiselles en fleur – et sûrement même ceux des garçons. Il continua à le regarder, presque les yeux dans les yeux, les lèvres tirées en un rictus amusé suite à ses pensées.