Derek sortit de son appartement, son pot de glace chocolat-cookie à la main et une boule au ventre. Il fallait qu’il pense à passer dans une épicerie en rentrant, Sutton n’appréciait pas qu’on touche à ses glaces. Mais il avait une bonne excuse, c’était pour la bonne cause. Il était en route pour voir Cléa. Enfin. Après six longues années à penser à elle et à leurs retrouvailles il allait la revoir. Il se souvenait encore du soir où il lui avait annoncé qu’il partait pour une durée indéterminée et qu’il ne pourrait certainement pas lui donner de nouvelles avant un bon moment. La jeune femme avait pleuré et lui en avait voulu. Bien sûr il ne s’était pas attendu à de la joie de sa part en entendant qu’il allait s’engager dans l’armée mais il ne pensait pas qu’elle réagisse aussi mal. Il s’attendait à ce qu’elle lui en veuille beaucoup. Pourquoi pas qu’elle lui claque la porte au nez aussi. C’était tout à fait possible et il s’était préparé à cette éventualité plus qu’à n’importe quelle autre. Et c’était bien ce qu’il mériterait. S’il n’avait pas pu donner de nouvelles pendant qu’il était en Afrique, il avait eu bien d’autres occasions de lui en donner en six ans. Il n’avait tenu qu’un an dans l’armée. Après quoi, il était rentré aux Etats-Unis, s’était installé à Paris pendant trois ans, puis avait fait quelques passages un peu partout dans le monde avant de revenir définitivement à New York. Il aurait pu appeler, il aurait pu envoyer un email ou tout simplement lui rendre une courte visite lors de ses passages éclairs sur le sol américain. Mais il ne l’avait jamais fait. Il n’était pas lâche pourtant, il était très courageux. Mais il ne voulait pas voir la rancœur de sa sœur, la déception dans ses yeux, ou tout autre sentiment négatif à son égard. Il avait vraiment peur de sa réaction et pourtant, ce matin en se levant, il avait su que c’était le bon moment.

Au fur et à mesure qu’il se rapprochait de chez sa sœur, au fur et à mesure qu’il se rapprocher de Little Italy, il hésitait de plus en plus. Il avait toujours cette boule au ventre. Il tenait son pot de glace avec fermeté, le carton avait plié sous sa force. La glace était en train de fondre aussi, mais ça, ce n’était pas vraiment de sa faute. Une glace fondue était toujours une glace après tout. Il arriva sans encombres jusqu’à l’appartement de la jeune femme. Il réussit à entrer dans l’immeuble grâce à une voisine qui sortait. Suspicieuse au début, elle l’avait laissé passer après quelques sourires de la part du jeune homme. Peu de monde résistait à son sourire. Il grimpa les escaliers quatre à quatre, soudainement pressé de la revoir. Elle avait seize ans quand il l’avait quittée. A présent, elle en avait vingt-deux. Elle devait être devenue une femme et elle devait avoir sacrément changé. Tout comme Jilian d’ailleurs. Il frappa. La porte s’ouvrit au bout de quelques secondes qui lui parurent une éternité, sur une magnifique jeune femme blonde. Cléa. Derek resta interdit quelques instants, ne sachant quoi dire. Il se sentait tellement stupide ! Au bout d’un moment, il se reprit. « Tiens. » dit-il tout en tendant le pot de glace. « Je me suis dit que ça te ferait plaisir. » Il tenta un sourire. Il y avait quand même mieux à dire à sa sœur quand on ne l’avait pas vue depuis six ans, mais rien n’était venu.

« Vous devriez vous méfier d’un homme roux à lunettes. » déclara Cléa après avoir vu un petit bonhomme roux s’agiter devant la télé. Elle était en train de travailler et chercher bien l’inspiration où elle pouvait. On n’aurait pas dit comme ça mais être voyante/arnaqueuse professionnelle requérait beaucoup d’imagination. Heureusement que Cléa n’en manquait pas vraiment. La preuve, aujourd’hui, elle n’avait pas encore sorti le journal pour s’aider. La femme au bout du fil spéculait maintenant sur son banquier qui était roux à lunettes et dont elle était sûre qu’il n’avait pas de bonnes intentions envers elle. Mais son problème c’était qu’elle ne savait pas si c’était juste par rapport à son argent ou s’il n’avait pas aussi des vues sur elle. Cléa la laissa parler un moment, elle faisait la conversation toute seule, le jeune femme avait juste à lâcher des oui au moment opportun et c’était bon. Quelle gourde ! Payer aussi cher pour parler seule, elle ferait sûrement bien mieux d’acheter un miroir et de parler devant lui, ça ferait le même effet. Au bout d’un moment, la femme raccrocha enfin et, en l’absence d’autre coup de téléphone, Cléa put aller rejoindre son fils devant la télé. Il était passionné par son dessin animé, tellement qu’il la remarqua à peine. Elle le prit dans ses bras et l’embrassa sur le front et il leva la tête vers elle avec un sourire. Elle l’aimait tellement.

Elle était elle aussi en train de se passionner pour le dessin animé quand on sonna à la porte. Super. Cléa se leva avec un soupir. « Il faudra que tu me racontes la fin.» dit-elle en ébouriffant les cheveux de Mattéo. Elle ne mit pas longtemps avant d’atteindre la porte et ouvrit se rentrant alors face à Derek. Derek… La jeune femme cligna des yeux histoire de s’assurer qu’elle n’avait pas une illusion d’optique devant elle. Mais apparemment non, il avait l’air bien réel. Après six années, sans avoir donné signe de vie, il était bien devant sa porte. La jeune femme hésita à lui claquer la porte au nez, c’était tout ce qu’il méritait après tout. Il s’était enfui à l’autre de bout du monde et puis… plus rien. Elle avait pleuré son absence, elle avait longtemps espéré qu’il revienne et puis elle s’était lassée et avait renoncé. Elle avait cessé d’avoir envie de le revoir un jour de toute manière. Il avait beau être son frère, il avait clairement manqué à ses devoirs ces dernières années et elle avait décidé d’avancer en faisant comme s’il n’existait pas. Pourtant, il existait bien et il était là, devant elle. « Tiens. » Cléa fronça les sourcils et saisit, sans trop réfléchir, le pot de glace qu’il lui tendait. « Je me suis dit que ça te ferait plaisir. » Bah oui, bien sûr, il suffisait qu’il arrive comme une fleur comme ça avec un pot de glace pour que Cléa soit ravie. Est-ce qu’il croyait vraiment à ça. La jeune femme se renfrogna et secoua la tête. « Je ne sais pas ce que tu fais là mais je pense que tu devrais partir tout de suite. Enfin, merci pour la glace quand même. » finit-elle par dire.

C’était le moment. Le moment tant attendu et redouté à la fois. Presque chaque jour pendant les six années qui s’étaient écoulées depuis qu’il avait quitté Savannah et avait pris l’avion pour l’armée, il avait pensé à comment se dérouleraient ces retrouvailles. Plus le temps passait plus il savait que ce serait difficile et que Cléa lui en voudrait de plus en plus. Elle lui en avait déjà beaucoup voulu le soir où il lui avait annoncé qu’il partait alors il ne préférait même pas imaginer ce que serait après toutes ces années… Lui qui était si courageux et sans peur n’arrivait pas à se convaincre que ça irait, il n’arrivait pas à se résoudra à elle voir Cléa. Il savait que plus il attendrait plus ce serait dur et pourtant ce n’était pas un argument qui semblait peser dans sa décision. Il s’était fait l’effet d’un lâche jusqu’à ce qu’il ne se décide enfin à aller la voir. Il avait été nerveux tout le long du chemin. Il n’avait pas prêté attention aux gens qu’il avait croisés se concentrant sur ce qu’il dirait à sa petite sœur. Il s’excuserait, la supplierait de ne pas ou plus lui en vouloir et essayerait la convaincre de le laisser parler. Il voulait tenter de tout lui expliquer au mieux. Ils avaient beaucoup de choses à rattraper aussi et il voulait vraiment tout savoir sur ce qui s’était passé dans sa vie pendant tout ce temps où il était parti. Il retint sa respiration au moment où il frappa à la porte. Elle s’ouvrit sur cette magnifique jeune femme qu’était devenue sa sœur. Il ne trouva rien à dire. Rien, absolument rien ! Tout ce à quoi il avait pensé durant ces six ans et tout le long du chemin de son appartement à ici s’était envolé. Il avait la gorge sèche, le souffle coupé. Il voulait partir, faire demi-tour. Il sentait le regard accusateur de Cléa peser sur lui. Et à chaque secondes qui passait, il se sentait s’enfoncer dans le sol. En ultime recours, il jeta sa seule carte sur le tapis. Cléa s’empara aussi du pot de glace. « Je ne sais pas ce que tu fais là mais je pense que tu devrais partir tout de suite. Enfin, merci pour la glace quand même. » C’était sans appel. Exactement ce qu’il s’était imaginé. Il avait naïvement cru que leurs liens pouvaient résister à ça et qu’il se faisait des idées, qu’elle lui pardonnerait sans trop de problèmes. Ah, ah, ah. Comme si c’était aussi simple. Six ans, ce n’était quand même pas rien. Puis qu’avait-il cru ? Que de la glace pourrait tout arranger ? Il baissa la tête. Ça faisait mal, quand même. Il se retrouvait dans la même situation qu’il y a six ans. Jamais il n’aurait voulu revivre ça. « Cléa, s’il te plait. » commença-t-il en relevant doucement la tête. Son ton et son regard étaient suppliants. Elle ne pouvait quand même pas le rejeter comme ça ! « Je suis désolé, d’accord. Laisse-moi essayer d’arranger les choses. »Il la fixa un instant, espérant qu’elle cède. Il ne lui laissa pas le temps de répliquer. « J’aurais dû appeler, j’aurais dû passer. Et je sais que tu m’en veux à un point inimaginable mais il n’y a pas une petite chance pour que tu puisses me pardonner ? »

Cléa était rancunière. Oui, elle le reconnaissait très bien. Elle n’avait jamais su pardonner à leur mère ses écarts de conduite et son absence, il y avait peu de chance qu’il en soit autrement avec Derek. Parce que si elle accordait facilement sa confiance aux gens, une fois qu’elle était déçu par les personnes en question, il était très difficile pour elle de les accepter à nouveau. Et Derek l’avait énormément, elle l’avait toujours vu comme un modèle, comme quelqu’un sur qui elle pourrait toujours compter. Si le temps aurait pu lui faire accepter que Dereek était partie, avec des intentions tout à afit louable, elle n’acceptait pas le fait qu’il ne se soit pas donné la peine de donner signe de vie durant les six dernières années. « Cléa, s’il te plait. » Il lui lança un regard suppliant, tellement que la blonde ne put s’empêcher de le comparer à un petit chien malheureux. C’était quand même insuffisant pour attendrir un peu Cléa. « Je suis désolé, d’accord. Laisse-moi essayer d’arranger les choses. » Il était désolé… C’était bien oui mais bon. Il y avait des moments dans la vie où de simples excuses ne suffisaient plus et là, il se trouvait exactement dans un de ses moments. « J’aurais dû appeler, j’aurais dû passer. Et je sais que tu m’en veux à un point inimaginable mais il n’y a pas une petite chance pour que tu puisses me pardonner ? » La jeune femme secoua la tête. Elle avait envie de dire que non il n’y en avait pas mais si elle disait ça, elle allait encore passer pour la méchante. Elle était réaliste, si Derek était là c’était qu’il avait déjà vu ou avait en projet de voir Jillian et il arriverait bien un moment où ils en viendraient à évoquer tous deux son attitude. C’était le moyen assuré pour qu’elle reçoive encore un sermon de sa sœur comme quoi elle était trop dure avec les autres et blablabla.

La blonde s’écarta de l’embrasure de la porte pour le laisser passer. « Que ce soit bien clair, ça ne veut pas dire que je te pardonne ou que je te laisse une chance ou quoique ce soit dans ce genre. Parce que oui t’aurais du passer et t’aurais encore plus du appeler. Je n’avais pas pensé qu’en partant tu cherchais à carrément couper les ponts avec nous. » Parce que c’était ni plus ni moins ce qui s’était passé. Cléa s’était longtemps demandé ce qu’elle avait fait de mal avant d’admettre que le problème ne venait pas d’elle mais de Derek. Ils arrivèrent alors au niveau du salon et Cléa jeta un rapide coup d’œil à l’intérieur où Mattéo regarder toujours la télé. « On va a la cuisine. » dit-elle en lui faisant signe de le suivre. Arrivée là-bas, elle s’accouda la table et soupira. « Alors quoi de neuf ? » dit-elle alors d’un ton moquer. Comme si ça pouvait l’intéresser.

Cléa venait de s’écarter du chemin pour le laisser passer. Il ne savait pas ce que ça voulait dire, si par exemple ça signifiait qu’elle était en voie pour lui pardonner, mais il apprécia le geste. C’était beaucoup mieux que ça qu’il avait espéré, beaucoup mieux qu’une porte claquée au nez et beaucoup mieux que l’indifférence. « Que ce soit bien clair, ça ne veut pas dire que je te pardonne ou que je te laisse une chance ou quoique ce soit dans ce genre. Parce que oui t’aurais dû passer et t’aurais encore plus du appeler. Je n’avais pas pensé qu’en partant tu cherchais à carrément couper les ponts avec nous. » Voilà ses doutes confirmés, ça ne voulait rien dire visiblement. Il ne bougea pas avant qu’elle ait fini de parler. Il accusa le coup et ne cessa pas de la fixer tandis qu’elle prononçait ces mots. C’était au moins ça de plus qu’il y a six ans, malgré tout, il était capable de la regarder dans les yeux. Il assumait pleinement ses erreurs, il assumait tout ce qu’elle lui reprochait, parce qu’elle avait entièrement raison. Il aurait pu passer et appeler. Ça n’aurait rien couté. Ça aurait été même bien. Cléa lui en aurait beaucoup moins voulu et tout aurait été plus facile. Il n’aurait pas eu à douter et peut-être même qu’ils auraient fini par discuter de tout et de rien tout en partageant le pot de glace chocolat-cookie que Derek avait apporté. Il se sentait tellement, mais tellement stupide ! Stupide d’avoir eu si peur. Il aurait dû faire l’effort, même s’il n’en avait pas le temps, les moyens, ou l’énergie pour aller les voir. C’était la moindre des choses, il aurait pu faire ça pour elle. « Je n’ai pas voulu couper les ponts avec vous. Jamais je n’aurais voulu ça. Je ne veux pas ça. » Pourtant, c’était ce qu’il avait fait. Il aurait beau dire ce qu’il voulait, Cléa avait encore une fois totalement raison. Mais il refusait de penser qu’elle ne lui pardonnerait jamais. Il l’aimait tellement…Tellement qu’il ne voulait pas n’être qu’un étranger pour elle. Il ne supportait pas son indifférence. « Alors tu ne vas jamais me pardonner, c’est ça ? » Derek la suivit lorsqu’elle avança dans l’appartement. Quand ils arrivèrent à ce qui semblait être le salon, il aperçut un petit garçon en train de regarder la télé. Il se demanda immédiatement qui cela pouvait bien être. « On va à la cuisine. » Il la suivit donc encore jusqu’à la cuisine, faisant taire ses interrogations. Une fois arrivés, Cléa s’installa à la table tandis qu’il resta dans l’entrée de la pièce. Il observa l’environnement autour de lui jusqu’à ce que la jeune femme ne brise le silence. « Alors quoi de neuf ? » Il ne prêta pas attention à sa question purement ironique. « Tu fais du babysitting ? » lui demanda-t-il, intrigué. Il ne pourrait pas parler sérieusement tant que sa curiosité ne serait pas assouvie. Il fixa Cléa un instant puis se mit à réfléchir encore plus. Non, ce n’était quand même pas… « Ton fils ? Tu as un fils ? » Bon sang, il en avait loupé des choses, en six ans. Immédiatement, il s’en voulut encore plus qu’avant.

Cléa avait fait un effort, on ne pourrait pas venir prétendre le contraire. Elle avait accepté de le laisser entrer chez elle, elle voulait même bien l’écouter, un peu mais pas trop. Mais il ne fallait pas lui en demander beaucoup plus. Parce que se montrer aimable et sympathique avec lui était maintenant au dessus de ses forces. Il ne méritait pas sa sympathie. « Je n’ai pas voulu couper les ponts avec vous. Jamais je n’aurais voulu ça. Je ne veux pas ça. » La jeune femme arqua un sourcil. Peut-être qu’il ne l’avait pas voulu mais c’était en tout cas ce qu’il avait fait et il ne pouvait pas prétendre le contraire. Et il n’allait pas lui faire croire qu’on l’avait forcé à faire ça, il avait choisit de ne plus les appeler ni leur rendre visite et rien de tout ce qu’il pourrait dire ne changerait quelque chose à ça. « Alors pourquoi tu l’as fait ? » demanda-t-elle d’un ton sec. « Hein, si tu ne voulais pas couper les ponts, pourquoi t’as cessé de nous donner signe de vie ? » C’était en effet bien la question qu’elle se posait depuis déjà longtemps. Elle avait eu beau imaginé toutes sortes d’explications à ça, elle n’en avait jamais trouvé une seule qui lui convenait. « Alors tu ne vas jamais me pardonner, c’est ça ? » La blonde haussa les épaules, elle aurait voulu dire non mais après tout, elle n’en savait rien. On ne décidait pas d’un coup comme ça si on n’allait jamais pardonner quelqu’un tout ça. « Tout dépend si tu prévois de disparaître encore dans la nature ou non. » répondit-elle simplement. Et s’il savait regagner sa confiance aussi. Il devait la connaître assez pour savoir que ce n’était pas une tâche facile.

Ils avancèrent ensuite dans l’appartement et Cléa décida qu’ils allaient s dans la cuisine. Mattéo était bien tranquille au salon, passionné par son dessin animé et il n’était pas question de le déranger comme ça pour Derek. Elle lui demanda alors d’un ton tout à fait ironique ce qu’il s’était passé de neuf dans sa vie. Elle n’éprouvait pas un grand intérêt pour ça mais bon, autant éviter de laisser s’installer des silences pesants et monstrueusement long. « Tu fais du babysitting ? » Ce n’était pas exactement la réponse à la question qu’elle avait posé mais bon. Cléa comprit qu’il avait du apercevoir Mattéo au salon et que c’était pour ça qu’il posait la question. Elle ne répondit pas tout de suite et elle vit que de toute manière il était en train de réfléchir. « Ton fils ? Tu as un fils ? » Cléa hocha la tête. « Oui. C’est Mattéo. » Elle observa quelques secondes de silence avant de reprendre. « Il a trois ans. » Trois ans, c’était bien la preuve qu’il avait manqué beaucoup en partant.

« Hein, si tu ne voulais pas couper les ponts, pourquoi t’as cessé de nous donner signe de vie ? » Oui, Derek, pourquoi tu l’as fait si tu ne le voulais pas ? Pourquoi tu n’as pas fait ce petit, ce minuscule effort d’aller les voir ou de leur passer un coup de fil ? Tu n’as aucune excuse. Il n’avait clairement aucune excuse. Il n’avait rien à dire à Cléa en fait, rien ne pourrait la satisfaire parce que rien ne le satisfaisait lui. Il n’avait même pas de réponse à cette question, il ne savait pas ce qui s’était passé et ce qui lui était passé par la tête. Il regarda sa sœur avec impuissance. Il chercha quoi dire sans rien trouver. Heureusement, elle reprit la parole, répondant à sa question de savoir si elle comptait lui pardonner un jour ou non. Son pardon était la chose qu’il voulait le plus au monde en ce moment et il comptait bien l’obtenir peu importe ce qu’il aurait à faire. « Tout dépend si tu prévois de disparaître encore dans la nature ou non. » Ca, il en était hors de question. Il n’allait pas faire la même erreur deux fois. Il secoua donc la tête vigoureusement et se stoppa quand elle l’invita à le suivre à l’intérieur de son appartement. Il la suivit alors jusqu’à la cuisine et aperçut au passage un petit garçon assis dans le salon, sagement en train de regarder la télé. Il se mit à se poser tout un tas de questions et à faire des hypothèses sur son identité.

Derek resta assez loin de Cléa (des fois qu’elle veuille lui planter un couteau dans le corps). Il ne savait pas s’il avait le droit de s’asseoir avec elle ou non, il ne savait pas ce qu’il pouvait se permettre des gestes trop familier avec elle. Il se contenta donc de faire ce qu’un étranger aurait fait. Elle n’était clairement pas contente de le voir là alors il en déduit qu’elle avait simplement eu pitié de lui. C’était assez douloureux pour lui de se dire que leur relation en était rendue à ça. « Oui. C’est Mattéo. » Elle avait donc bien un fils. Mattéo. « Il a trois ans. » Trois ans c’était beaucoup. C’était la moitié du temps qu’il était partit. Sa sœur avait connu une grossesse à peine adulte et elle avait dû avoir du mal à traverser cette épreuve. Il aurait dû être là pour elle. Il aurait dû l’aider et il ne l’avait pas fait. Ça le mettait hors de lui mais il ne pouvait s’en prendre qu’à lui. « Tu as un fils de trois ans. » réalisa-t-il enfin. Il avait un neveu qu’il avait envie de connaitre du coup. Il fallait qu’il trouve le moyen de réparer ses erreurs. Il s’approcha d’elle, lentement. « Je suis un idiot. Je ne sais pas quoi te dire tu sais, je ne sais pas ce qui s’est passé durant ces six années pour qu’on en vienne à ce point-là et je pourrais trouver tout un tas d’excuses mais la vérité c’est que je n’en ai pas vraiment. L’argent qui me manquait, la distance, le manque de temps, ce sont des conneries. Ça ne devrait pas être des excuses. Donc voilà, je pense que je peux juste te dire que je suis désolé, faire tout ce qu’il faut pour regagner ta confiance et être patient. » Il soupira. « Je veux juste qu'on retrouve ce qu'on avait avant, et le connaitre. » dit-il en pointant la direction du salon.

Cléa attendait une réponse à sa question. Elle voulait vraiment savoir, comprendre ce qui avait pu pousser son frère à ne plus donner signe de vie pendant six longues années. Si elle comprenait, elle serait sûrement bien plus disposé à lui accorder la pardon qu’il voulait tant et qu’elle n’était pas en mesure de lui promettre. Oui, elle voulait comprendre. S’il avait eu une raison, une bonne raison, ça aurait été suffisant. Parce que parfois, il y avait des raisons. Elle lui reprochait sa fuite, mais elle aussi elle avait déjà fuit. Elle avait fuit James quand elle avait appris pour sa grossesse, elle l’avait fuit pour ne pas avoir l’affronter et surtout pour ne pas avoir à le mêler à ça. Mais elle savait pourquoi elle avait fait ça, c’était parce qu’elle pensait que c’était le mieux pour son futur enfant à venir. Elle avait peut-être eu tord mais au moins, elle avait une raison. Derek lui, semblait ne pas en avoir. La preuve, il était bien incapable de répondre à sa question. Cléa soupira, dans ces cas-là, elle n’était vraiment pas sûre de pouvoir lui accorder son pardon.

Ils arrivèrent ensuite à la cuisine où Derek ne savait visiblement pas où se mettre. Cléa aurait pu l’inviter à s’assoir mais c’était amusant de le voir gêner comme ça. Alors elle pouvait bien attendre un petit peu. Ils évoquèrent alors Mattéo que Derek avait vu au salon et Cléa lui confirma que c’était bien son fil et finit par lui dire qu’il avait trois ans. Trois ans. Elle espérait qu’avec ça il se faisait une idée de ce pourquoi elle lui en voulait autant. Il avait tellement manqué de choses. Il avait été absent durant la période la plus difficile de sa vie. Elle s’en était sortie certes, avec l’aide de Jillian et c’était à ce moment-là qu’elle avait comprit qu’elle pouvait réussir à se passer de lui. « Tu as un fils de trois ans. » Cléa hocha la tête, c’était effectivement bien ce qu’elle venait dire. Il comprenait vite les choses dis donc. Derek s’approcha ensuite d’elle. « Je suis un idiot. Je ne sais pas quoi te dire tu sais, je ne sais pas ce qui s’est passé durant ces six années pour qu’on en vienne à ce point-là et je pourrais trouver tout un tas d’excuses mais la vérité c’est que je n’en ai pas vraiment. L’argent qui me manquait, la distance, le manque de temps, ce sont des conneries. Ça ne devrait pas être des excuses. Donc voilà, je pense que je peux juste te dire que je suis désolé, faire tout ce qu’il faut pour regagner ta confiance et être patient. Je veux juste qu'on retrouve ce qu'on avait avant, et le connaitre.» Cléa garda le silence un moment de répondre. Elle le regarda attentivement, elle était furieuse, vraiment. Mais en même temps, elle aurait tellement voulu ne pas l’être, elle aurait tellement aimé qu’il n’y ait pas eu les six dernières années d’absence. Elle aimait Derek, c’était son frère et il avait toujours été là pour elle, toujours jusqu’à ce moment-là. La jeune femme soupira avant de prendre la parole. « Tu veux savoir ce qui s’est passé pendant ces six dernières années pour qu’on en arrive là ? Je vais te le dire moi parce que je le sais. Tu es parti et je t’en ai voulu, beaucoup mais ce n’était pas si dramatique parce que les téléphones existaient. Et puis, les années ont passées, j’attendais ton coup de fil qui n’arrivait toujours pas. Et je suis tombée enceinte et tu n’étais toujours pas là. Et puis, comme si je n’avais pas déjà assez de choses à gérer, j’ai du déménager à New-York parce que Jillian ne s’en sortait plus avec les caprices de notre mère qui se comporte comme une adolescente. Inutile de dire que tu n’étais toujours pas là. Alors comprends-moi Derek, j’aimerais vraiment te pardonner comme ça, être heureuse de te revoir et tout oublier d’un coup mais ce n’est pas possible. » Elle était sincère quand elle disait ça, si elle avait pu lui pardonner comme ça, elle l’aurait fait. Elle secoua la tête. « Tu peux t’assoir si tu veux tu sais, je ne vais rien te faire de mal si tu le fais. » ajouta-t-elle alors. On ne savait jamais s’il avait peur qu’elle tente de lui faire du mal. « Je ne peux rien te promettre en ce qui me concerne tu sais mais je pense… » Cléa hésita quelques secondes avant de dire ce qui suivit. « Je pense que si tu n’as pas l’intention de repartir comme un voleur, Mattéo pourrait être contente de connaître son oncle. Je l’appellerais peut-être tout à l’heure Il manque un peu de figure masculine dans son entourage. » La jeune femme haussa les épaules avant de poser sur lui un regard menaçant. « Je te préviens par contre, que si je fais ça et que tu disparais à nouveau, je me chargerais personnellement de te retrouver et cette fois par contre, je n’hésiterais pas à te faire du mal. »

« Tu veux savoir ce qui s’est passé pendant ces six dernières années pour qu’on en arrive là ? Je vais te le dire moi parce que je le sais. Tu es parti et je t’en ai voulu, beaucoup mais ce n’était pas si dramatique parce que les téléphones existaient. Et puis, les années ont passées, j’attendais ton coup de fil qui n’arrivait toujours pas. Et je suis tombée enceinte et tu n’étais toujours pas là. Et puis, comme si je n’avais pas déjà assez de choses à gérer, j’ai du déménager à New-York parce que Jillian ne s’en sortait plus avec les caprices de notre mère qui se comporte comme une adolescente. Inutile de dire que tu n’étais toujours pas là. Alors comprends-moi Derek, j’aimerais vraiment te pardonner comme ça, être heureuse de te revoir et tout oublier d’un coup mais ce n’est pas possible. » Derek l’écouta en la regardant sans ciller, sans tourner la tête une seule fois. Il encaissa tout, enregistrant et comprenant ce qu’elle lui disait. Il hocha la tête plusieurs fois. Elle avait entièrement, totalement raison. Tout ce qu’elle disait était vrai et à présent plus que jamais il s’en voulait énormément. Il n’avait aucune excuse en fait, aucune valable. Du coup, il n’avait rien à dire. Il ne pouvait pas la supplier, il ne pouvait pas lui répéter sans cesse qu’il ne savait pas ce qui lui avait pris. Ça ne servirait à rien. Elle était déjà gentille de l’avoir fait entrer et de ne pas l’avoir rejeté. Il lui était reconnaissant qu’elle ne l’ait pas assommé aussi, ou qu’elle ne lui encore lancé aucun couteau à la figure. Derek savait qu’elle pensait ce qu’elle disait, qu’elle ne lui disait pas tout ça pour lui faire de faux espoirs. Parce qu’il savait que tout n’était pas perdu, qu’elle allait lui laisser une chance. « Je vais tout faire pour mériter ta confiance à nouveau. » répéta-t-il. C’était tout ce qu’il pouvait dire à présent, ça ne servirait à rien de répéter tout ce qu’il lui avait déjà dit. Mais lui aussi était sincère. « Tu peux t’assoir si tu veux tu sais, je ne vais rien te faire de mal si tu le fais. » Ca aussi c’était stupide. Il s’était un peu trop monté la tête pour rien en fait. Il hocha la tête et s’approcha donc de la table prudemment. Il prit ensuite place en face de Cléa. Elle continua à parler et il décida de ne pas l’interrompre. « Je ne peux rien te promettre en ce qui me concerne tu sais mais je pense… » Elle marqua une pause où il retint sa respiration, attendant ce qu’elle allait dire. « Je pense que si tu n’as pas l’intention de repartir comme un voleur, Mattéo pourrait être contente de connaître son oncle. Je l’appellerais peut-être tout à l’heure Il manque un peu de figure masculine dans son entourage. » Service de figure masculine pour Mattéo, apprendre à connaitre son neveu… Peu de choses pourraient le rendre plus heureux en fait. Il avait envie de connaitre ce petit, d’être là pour lui comme il n’avait pas pu l’être pendant les trois dernières années. D’aider Cléa aussi. Il n’allait plus fuir. « Ce serait bien, oui… J’aimerais vraiment le connaitre et rattraper le temps perdu. » Sa petite sœur n’avait apparemment pas fini, il se tut donc pour l’écouter. « Je te préviens par contre, que si je fais ça et que tu disparais à nouveau, je me chargerais personnellement de te retrouver et cette fois par contre, je n’hésiterais pas à te faire du mal. » Il secoua vivement la tête. « Je ne partirai plus. Je ne ferai pas la même erreur une deuxième fois. Je t’ai dit que je ferai tout pour me faire pardonner et faire partie de ta vie et de la sienne à nouveau. Je ne vois rien de plus important. Donc il faudrait te faire à ma présence parce que je ne compte pas vous lâcher de sitôt. Et la menace est enregistrée, mais tu n’auras pas besoin d’en arriver là. » Peut-être que finalement elle aurait été capable de lui planter un couteau dans le bras.

Pour Derek, Cléa voulait bien faire quelques efforts. Elle lui en voulait, énormément. Il avait fait une erreur, une grosse erreur même. Mais ce n’était qu’une erreur, une erreur de six ans certes mais ça restait la seule chose qu’elle pouvait lui reprocher. Avant ça, il avait toujours été là pour elle. Et puis, il était revenu. Il était là, devant elle et ça ne devait pas être si facile pour lui. Alors oui, pour lui elle voulait bien faire des efforts même si elle savait que ça ne se ferait pas tout seul. Elle essaya de lui faire comprendre tout ça, en se laissant un peu emporter par ses paroles certes, mais soit, elle espérait juste qu’il avait compris là où elle voulait en venir. « Je vais tout faire pour mériter ta confiance à nouveau. » La jeune femme hocha la tête, ça prendrait du temps, mais elle ne doutait pas vraiment d’y arriver un nouveau un jour. Enfin, s’il ne la décevait pas à nouveau entre temps, parce qu’elle n’excluait pas que ça pourrait arrivait. « D’accord. » répondit-elle simplement après un moment. Il n’y avait rien d’autres à ajouter là-dessus à ce moment-là.

Histoire de le mettre un peu plus à l’aise ou juste parce qu’elle en avait assez de le voir debout comme un con au milieu de sa cuisine (elle ne savait pas quelle raison dominait), Cléa déclara qu’il pouvait s’assoir et qu’elle ne comptait pas le tuer. Il fallait bien qu’elle le rassure là-dessus un peu apparemment. Encore, vu l’air prudent qu’il prenait, il ne devait pas être tout à fait convaincu. La jeune femme se retint de lever les yeux au ciel, qu’est-ce que ça pouvait être agaçant ça. En tout cas, la jeune femme finit par reprendre la parole et déclara après y avoir réfléchit qu’elle pouvait bien faire à la limite l’effort de lui présenter son fils. Elle était sûre que Mattéo serait parfaitement heureux de rencontrer son oncle. Même si elle essayait de lui apporter tout ce dont il pouvait avoir besoin, elle savait qu’il y avait des choses qu’elle ne pourrait jamais lui donner. Elle avait choisit de le priver de son père, choix qu’elle ne regrettait pas tellement il aurait été désastreux pour lui de mêler James à sa vie mais si elle pouvait lui présenter au moins son oncle, elle devait faire ça pour lui. « Ce serait bien, oui… J’aimerais vraiment le connaitre et rattraper le temps perdu. » La jeune femme hocha la tête et puis, elle reprit la parole. Elle devait le prévenir d’une chose au moins avant de laisser faire ça. Elle ne tolérerait pas qu’il fasse de mal à son fil. « Je ne partirai plus. Je ne ferai pas la même erreur une deuxième fois. Je t’ai dit que je ferai tout pour me faire pardonner et faire partie de ta vie et de la sienne à nouveau. Je ne vois rien de plus important. Donc il faudrait te faire à ma présence parce que je ne compte pas vous lâcher de sitôt. Et la menace est enregistrée, mais tu n’auras pas besoin d’en arriver là. » S’il le disait alors. Elle pensait qu’elle mettrait un moment à croire ça en fait. Elle serait souvent tentée de le toucher histoire de vérifier qu’il était bien là. D’ailleurs, elle devait le faire là. C’est pour ça qu’elle le pinça. « Désolé, je voulais vérifier, si t’étais bien là. » dit-elle en fronçant les sourcils. Elle se leva et se dirigea vers le placard pour en sortir deux coupes. Elle avait presque oublié la glace jusque là. « Enfin, je suis contente si ma menace n’a pas besoin d’arriver un jour, j’ai pas vraiment envie de me transformer en criminelle pour toi quoi. » Elle se tut quelques minutes avant de réaliser que ce qu’elle venait de dire pouvait être mal interpréter. « Enfin parce que si je dois aller jusque là c’est que tu n’en vaux pas la peinei. » Ouais, pas sûre qu’elle ait été beaucoup plus claire. Elle sortit deux cuillères et revint s’assoir. « Menfin, je suis gentille tu vois, j’accepte de partager ma glace avec toi. » Enfin techniquement c’était la sienne mais soit. « Alors dis-moi, qu'as-tu fais pendant six ans? ... » Elle allait appeler Mattéo, vraiment, mais elle cherchait encore à le faire parler un peu, histoire de voir si elle pouvait vraiment prendre ce risque ou pas.

Cléa commençait à accepter sa présence. Elle avait accepté de l’écouter et également de le laisser voir Mattéo. A certaines conditions bien sûr, mais il était évident que Derek n’allait pas s’amuser à aller à l’encontre de ce qu’elle lui imposait. Il n’était pas stupide, il n’allait pas se tirer une balle dans le pied alors qu’il faisait tout pour se racheter. Enfin, il était sur une voie engageante et c’était tout ce qui comptait. Il venait de déballer tout un speech qui se voulait convaincant. Il fallait vraiment qu’elle croie à ses excuses, qu’elle croie à tout ce qu’il lui disait. Il voulait regagner sa confiance et ne plus avoir à se demander si elle allait le croire ou non à chaque fois qu’il lui ferait une promesse. Pour toute réponse, Cléa le pinça. Il sursauta et émit un hoquet de surprise. Il l’interrogea du regard, se demandant pourquoi elle avait fait ça. « Désolé, je voulais vérifier, si t’étais bien là. » Il secoua doucement la tête. C’était Cléa tout craché en fait, il ne savait pas pourquoi il était surpris. « Mieux vaut prévenir que guérir hein. » Il s’autorisa à lui sourire, se demandant tout de même si ce n’était pas trop tôt pour ça. Elle n’avait pas encore tout à fait pardonné, à ce qu’il en savait, après tout. Il l’observa se lever et sortir deux coupes. Ah oui, c’est vrai, il avait amené un gros pot de glace en guise de drapeau blanc. « Enfin, je suis contente si ma menace n’a pas besoin d’arriver un jour, j’ai pas vraiment envie de me transformer en criminelle pour toi quoi. » Derek était à présent assez déconcerté. Il ne savait pas comment interpréter ce que sa sœur venait de dire. Celle-ci sembla se rendre compte que ses paroles pouvaient prêter à confusion puisqu’elle ajouta quelque chose immédiatement après. « Enfin parce que si je dois aller jusque-là c’est que tu n’en vaut pas la peine. » Ah oui tout de suite c’était… Toujours aussi peu clair en fait. Mais il pensait quand même avoir compris l’idée générale. « Hum d’accord… Mais comme je te l’ai dit tu n’auras pas à en arriver là. Sauf si vraiment tu prends plaisir à tuer des gens, dans ce cas ce ne sera pas de ma faute. » Là encore, il s’autorisa un peu de sarcasme et là encore il ne savait pas s’il en avait le droit. Ma foi, il le saurait bien assez tôt en voyant si elle allait se servir des petites cuillères qu’elle venait de sortir pour lui arracher les yeux. La jeune femme revint s’assoir près de lui. « Menfin, je suis gentille tu vois, j’accepte de partager ma glace avec toi. » Il hocha la tête en souriant et tira un bol et une cuillère vers lui. « La gentillesse incarnée. Merci. » Derek savait à quel point sa sœur pouvait aimer la glace et à quel point cela lui coutait de devoir partager. Ça aussi c’était bon signe. « Alors dis-moi, qu'as-tu fais pendant six ans? ... » Il s’y attendait à celle-là C’était normal après tout, elle voulait des explications, savoir ce qui l’avait tenu éloigné sans pouvoir donner de nouvelles pendant si longtemps. Il se racla la gorge et commença à parler, un peu hésitant. « Alors, hum… J’ai, je suis parti pour l’armée comme tu le sais. » Jusque-là, ça ne devait pas être trop compliqué pour elle. « Je suis resté un an en Afrique, à peu près. Puis j’ai été blessé : une balle dans le genou. J’ai dû me faire opérer et on m’a rapatrié à New York. Après j’étais un peu perdu quelques temps parce que l’armée c’était tout ce que j’ai toujours voulu faire et je ne pouvais plus le faire justement. Je me suis posé beaucoup de questions puis j’ai rencontré une fille, une hôtesse de l’air, française. » Son visage se ferma quelque peu lorsqu’il pensa à Victoria. C’était toujours assez douloureux d’en parler. « Victoria. » Il se racla une nouvelle fois la gorge. « Donc je l’ai suivi à Paris et j’ai commencé des études pour devenir kiné. Et j’ai réussi d’ailleurs. » Il marqua une pause, laissant à Cléa le temps d’assimiler toutes ces informations. « J’ai rompu avec Victoria juste après avoir obtenu mon diplôme et là je suis rentré aux Etats-Unis. A New York. Papa m’avait dit que vous y étiez avec Jilian et j’ai même frappé à ta porte une fois mais tu n’étais pas là. Dans un sens ça m’a rassuré parce que ça faisait quand même quatre ans que je n’avais pas donné de nouvelles et j’avais déjà peur de votre réaction. Alors j’ai attendu avant de revenir et entre temps j’ai trouvé un travail qui m’a fait parcourir un peu le monde. J’ai voulu me poser il y a quelques semaines et j’ai décidé de revenir vous voir, pour de bon. Et me voilà. » Voilà, maintenant la balle était dans le camp de Cléa.

Cléa n’avait rien trouvé de mieux que de pincer Derek histoire de vérifier qu’il était bien là. Parce que maintenant qu’elle y pensait, c’était étrange de le voir là comme ça, arrivant avec de la glace comme dans un rêve. Ca pouvait tout à fait être un rêve oui, elle s’était peut-être endormie devant les dessins-animés de Mattéo et puis voilà. Mais Derek était bien là et elle ne rêvait pas, elle le constata bien vite et elle s’excusa alors pour l’avoir pincé comme ça. Elle espérait qu’il n’allait pas trop lui en tenir rigueur. Quoique, au pire, elle s’en moquait, il avait plus à se reprocher qu’elle. « Mieux vaut prévenir que guérir hein. » Derek lui sourit alors et Cléa hocha la tête. Il avait sûrement raison oui même si elle ne voyait pas trop pourquoi il disait ça là. Enfin soit, elle pouvait faire semblant de comprendre. Il fut ensuite question du fait que Cléa tuerait Derek si jamais il s’en allait à nouveau et la jeune femme s’emmêla un peu les pinceaux en déclarant qu’elle espérait ne jamais devenir une criminelle surtout pour lui. Cela pouvait être très mal interpréter et elle tenta par la suite de se rattraper du mieux qu’elle pouvait. Elle ne voulait pas vraiment être méchante avec lui en disant ça, ni le blesser. « Hum d’accord… Mais comme je te l’ai dit tu n’auras pas à en arriver là. Sauf si vraiment tu prends plaisir à tuer des gens, dans ce cas ce ne sera pas de ma faute. » Ouais… Elle était contente qu’il n’est pas mal pris ce qu’elle est dit. C’était déjà ça. Quant au reste… « Ne m’en veux pas si j’ai besoin de l’entendre répéter plus d’une fois. » dit-elle alors. Il fallait bien ça pour qu’elle le croie. « Et je ne prendrais jamais aucun plaisir à tuer des gens ! Je ne ferais pas de mal à une mouche ! » protesta-t-elle ensuite. Elle espérait que la mouche qu’elle avait tuée la veille ne lui tienne pas trop rigueur de son mensonge si elle entendait ça.

Cléa prenait vraiment sur elle, elle faisait des efforts pour essayer de montrer aimable avec Derek. Ce n’était pas si simple mais elle y arrivait presque bien. La preuve, elle consentit même à partager SA glace (qui était en fait celle de Derek mais comme il lui avait donné hein) avec le jeune homme. Elle lança alors la conversation sur un sujet pas si anodin que ça, lui demandant ce qu’il avait fait pendant ces six dernières années. Elle voulait des réponses maintenant. Elle voulait savoir pour quelle super bonne raison il avait cru de ne pas réapparaître. Elle l’écouta alors parler de l’armée, de sa blessure, de son rapatriement à New-York et de son départ pour la France. Puis, il mentionna ensuite une fille (évidemment, il fallait bien qu’une fille arrive quelque part dans l’histoire), ses études de kiné et les reste. Tout ce qu’elle retint au final c’est qu’il avait juste mené sa vue, loin d’elle et qu’aujourd’hui il avait soudainement eut envie de revenir chez elle, elle ne savait pas trop pourquoi d’ailleurs. « Quelle histoire. » dit-elle alors d’un ton un peu moqueur. Elle prit ensuite quelques bouchées de glace. « Qu’est-ce qui s’est passé avec la fille… Victoria ? » demanda-t-elle d’un coup curieuse. Elle avait deux questions et elle avait choisit de lui poser celle-ci en première, il n’allait peut-être pas l’aimer mais Cléa était certaine qu’il aimerait encore moins sa deuxième question. C’était bien pour ça qu’elle allait la garder pour plus tard même si au final, il n’y échapperait pas vraiment.