Une nouvelle journée de test à l’hôpital en vue de ma prochaine opération plus le boulot qui s’était greffé dessus et vous obtenez un Javier pour le moins de mauvaise humeur. Cela m’arrivait que peu d’ordinaire étant un homme pleinement conscient de ses émotions et les contrôlant mais aujourd’hui, ce n’était tout simplement pas ma journée et rien de pire pourrait m’arriver. Du moins, c’est ce que je pensais avant que je ne constate le message sur mon répondeur. A tous les coups, cela venait de mes mères qui devaient s’inquiéter comme pas deux. D’un geste machinal, j’appuyais sur le bouton de la machine, m’attendant à ce que résonne les voix de mes mères quand je me figeais sur place. « Salut, c’est... c’est... Summer. Salut. ça va ? Enfin j’demande mais tu ne répondras pas puisque c’est le répondeur. Je t’appelais parce que... il faut qu’on se voie. J’ai besoin de te parler d’un truc important. Rendez-vous ce dimanche à l’Otto Pizzeria, dans Greenwich village à 14h. J’espère que tu seras là. Salut. » Summer. Je ne m’attendais pas à un coup de fil de sa part et encore moins à ce qu’elle veuille me revoir après qu’elle ait pris la fuite. D’un geste rageur, je coupais court à la voix robotique m’annonçant la fin des messages. Je ne savais pas quoi faire. D’un côté, j’étais poussé par ma curiosité de savoir ce qu’elle voulait me dire mais aussi l’envie d’aller lui dire mes quatre vérités. J’étais pourtant sympathique comme gars mais fallait pas me pousser dans les orties. Mais aussi, l’envie de ne pas la revoir, de rester loin d’elle était tentante. Bref, je passais le reste de la semaine à réfléchir pour savoir quoi faire, quelle décision prendre avant de tout simplement accepter le rendez-vous. Je n’étais ni un lâche ni un fuyard et qu’importe ce qu’elle avait à me dire, elle avait intérêt à le faire vite car je n’allais pas lui faciliter les choses. D’ailleurs, à peine la repérais-je que j’allais à son encontre. « Bonjour. Tu as cinq minutes pour me dire ce que tu voulais me dire après quoi, je ne veux plus jamais entendre parler de toi. Estime-toi déjà heureuse que je ne t’ai pas dénoncé à la police depuis l’heure » déclarais-je froidement sans un regard, restant bien debout sur mes jambes. Oui, Summer pouvait s’estimer heureuse que je ne l’aie pas dénoncé à la police quand elle m’avait avoué être la voleuse tant recherchée. Et puis merde, je n’avais aucun compte à lui rendre pensais-je avec amertume. Oh le Javier tout gentil tout con, il pouvait se rhabiller car quand on me blessait, il ne fallait pas s’attendre à ce que je tende l’autre joue.

Durant tout le chemin me menant au rendez-vous, je m’étais demandé quel effet cela me ferait de la revoir et le moins qu’on puisse dire, c’était que j’étais partagé entre la colère et l’envie de faire demi-tour. Merde, elle m’avait quand même abandonné quand j’en avais eu le plus besoin, ce qui notait à quel point, je pouvais m’en remettre à elle. Mes mères disaient toujours qu’une bonne épouse était une amie, une confidente, un soutien mais aussi une amante. Zéro pointé concernant le soutien car si à la moindre difficulté madame prenait la poudre d’escampette, je n’étais pas prêt de l’épouser. En fait, Summer avait tué tout amour dans l’œuf car oui, j’étais très long à la détente. J’avais connu la meilleure des femmes en la personne de Grace et la remplacer m’était très difficile alors peut-être étais-je tout simplement trop exigent ou alors trop con. Quoiqu’il en soit, Summer m’avait blessé à la fois dans mes sentiments mais aussi dans ma confiance et je n’étais pas un homme à donner des secondes chances aussi facilement. Je pourrais l’accepter à nouveau dans mon entourage proche si vraiment j’en ressentais le besoin mais regagner ma confiance tenait presque de l’impossible. « Arrête de pleurer Summer » soupirais-je tout en lui tendant un mouchoir. Je n’aimais pas voir les femmes pleurer. « Ecoute, si tu ne te sens pas apte à discuter, nous pouvons remettre cette entrevue mais je t’avoue ne pas comprendre ton retour. Ah oui, si tu penses que je suis soigné, je risque de te décevoir mais je n’ai pas encore été opéré donc je présume que tu vas reprendre la clé des champs ? » Assénais-je d’une voix plus lasse que colérique. En réalité, je n’étais même pas fâché, je crois que je devenais fataliste vis-à-vis des femmes. « S’il te plait, arrête de pleurer » repris-je plus doucement comprenant que passer mes nerfs sur elle ne ferait que la faire pleurer que davantage. « Je veux juste savoir ce que tu me veux et après, j’apprécierai que nous nous en tenions-là » ajoutais-je tout en l’observant sérieusement. Elle ne s’attendait peut-être pas à ces retrouvailles surtout que j’étais plutôt du genre gentil et avenant en temps normal mais voilà, je n’étais ni trop bon, ni trop con et lorsqu’on me blessait, j’avais tendance à ne pas tendre l’autre joue. Il faut croire que mon caractère était bien planqué sous mes allures de gendre idéal.