Un séjour dans une contrée qui lui était tout bonnement inconnu, c’était bien sa vaine. Qui plus est gagné à une fameuse loterie. Elle se rappelait avoir acheté un billet, avec les quelques pièces qui trainaient au fond de sa poche trouée. Elle n’avait pas joué pour gagner, ni quoique ce soit. Elle ne savait même plus pourquoi elle avait fait cela. Alors voilà, c’était donc comme cela qu’elle avait gagné ce séjour sur ces terres mystérieuses et mystiques. Et il fallait croire qu’elle n’était pas la seule à avoir gagné ce lot là. Ils étaient trois. Une autre jeune fille, asiatique du nom de Billy et un jeune homme prénommé Chris… ou quelque chose comme cela. Ils étaient donc trois. Trois dans cette aventure. Le voyage s’était plutôt bien commencé, même si Hafsa se demandait bien dans quelle galère elle venait de s’aventurer. Sûrement aurait-elle mieux fait de donner cela à un ami ou une connaissance à elle à qui cela aurait fait plaisir, très plaisir. Oui, mais voilà, elle n’avait pas eu cette idée là. Idiote. Mais il était trop tard pour reculer. Rangers au bout des pieds, cela faisait bien trois jours. Trois jours qu’ils marchèrent à travers cette forêt vivante, trois jours qu’ils étaient en compagnie de se dénommé Rodrigo. Rodrigo était en quelque sorte leur guide, celui qui leur faisait découvrir le paysage, celui qui se la jouait pédant à fond. Hafsa ne comprenait pas vraiment ce qu’il racontait souvent. Des noms en latin, sûrement de plantes, dont elle ne saisissait pas le sens. Malgré cela, elle se montrait curieuse. Très curieuse même.

Pour ce troisième jour, le programme était donc très clair : ils allaient vivre une soirée complète dans une tribu. L’idée enchanta la Palestinienne. Les rencontres éphémères des plantes la lassées beaucoup, alors rencontrer des hommes et des femmes vivant quotidiennement dans un tel cadre idyllique, cela la passionnait. Avec une certaine hâte, elle suivait leur guide. Billy et l’autre gadjo étaient juste derrière eux. Jusqu’à ce qu’elle perdit du regard Rodrigo. RODRIGO ! IL AVAIT DISPARU. Comme par enchantement, non, ce n’était pas possible. Il ne pouvait pas s’être envolé comme cela. Les avait-il abandonnés ? Les trois jeunes newyorkais hurlèrent le prénom de Rodrigo, vainement. Le dénommé Rodrigo ne répondait pas. Après plusieurs minutes d’appels au secours, Hafsa se tut. Jugeant du regard ses deux compagnons de fortune. « Ca sert à rien de beugler… j’crois bien qu’il nous répondra pas. » lâcha Hafsa. Puis elle se mit à regarder tout autour d’elle. Des plantes, des arbres… la chaleur. Il n’y avait rien d’autre là où il se trouvait, excepté si on y ajoutait les bruits d’animaux. « Il a dû nous abandonner… ».

Une excursion dans la forêt amazonienne. Voilà un des nombreux lots qui étaient mis en jeu lors d'une loterie organisée par le New York Times. Pour quitter tous ses problèmes, quoi de mieux que de partir loin de la ville où l'on vit ? C'est ce que Billy avait pensé lorsqu'elle avait lu cet article dans ce célèbre journal, qu'elle avait acheté en raison d'un article sur la pâtisserie française. Durant ce mois d'août, son pays lui manquait. Il faut dire que depuis son départ, elle n'y était jamais retournée. Elle ne se sentait pas forcément bien en ce moment à New York, mais elle n'avait pas pensé qu'à Marseille, ce serait pire, bien pire. Chaque endroit lui rappellerait la période où on l'appelait Billy Kazuka. Elle avait donc acheté un billet, tout en sachant que vu le nombre de gens espérant être tirés au sort, il y avait peu de chance pour que le New York Times l'autorise à quitter ses problèmes, ne serait-ce que pour une semaine. Et pourtant. Un beau matin, en allant chercher son courrier, elle découvrit un courrier contenant une lettre à l'allure bien officielle, et un programme illustrée de la semaine.
Ils étaient trois à avoir gagné ce lot: un Christoph, et une Ava. Hafsa, en réalité, mais Billy avait comprit qu'elle s'appelait Ava. Elle trouvait que leur guide, Rodriguo, était bien sympathique. Il leur disait le nom savant des différents insectes et plantes qu'ils avaient l'occasion de croiser. Enfin une utilité au fait que ses parents lui ai fait commencer le latin en cinquième, au collège. Cela faisait trois jours qu'ils marchaient au milieu de ce grand espace verdoyant. Il était prévu qu'ils dorment dans une tribu le troisième soir. Billy avait hâte d'arriver, et pour cause: au collège, elle avait un professeur de français qui avait passé l'année à leur parler des tribus amazoniennes. Elle se demandait si elle allait le voir. Enfin, plus sérieusement, c'est vrai que les cours - certes n'ayant rien à voir avec des cours de français - de ce professeur intéressait la française. Billy avait du mal à suivre leur guide. Il marchait bien trop vite à son avis, sûrement parce qu'il connaissait la forêt comme sa poche. Elle regarda devant elle, quittant un instant ces magnifiques fleurs colorés. Devant elle il n'y avait qu'Hafsa. Rodriguo et son t-shirt des Rolling Stones avaient disparus. DISPARUS. Il les avait laissés au beau milieu de l'Amazonie. Quand elle s'en rendit compte, elle commença à crier le nom de leur guide, dans l'espoir qu'il réponde.

« Ca sert à rien de beugler… j’crois bien qu’il nous répondra pas. Il a dû nous abandonner… »

Billy la regarda un long moment, le temps de digérer la nouvelle.

« Hein ?? Comment ça il nous a abandonnés ? Tu rigoles j'espères ? RODRIGUO REVIENS ICI TOUT DE SUITE !!! »

Rodrigo, Rodrigo… ce prénom sonnait en écho dans la faune et flore sauvage de cette forêt. Hafsa fut la première à arrêter d’appeler vainement leur guide. Ce fumier s’était tiré, elle en était presque sûre. Elle en mettrait presque sa main à couper, si elle le pouvait… Elle fut donc la première à faire part de sa réflexion à ses deux camarades. Soudainement, ils se turent. Jugeant du regard Hafsa, cette dernière haussa les épaules. Ca ne servait plus à rien de s’égosiller la voix à présent, il ne leur répondra pas. Rodrigo ne leur répondra pas, il les avait lâchement abandonnés. « Hein ? Comment ça il nous a abandonnés ? Tu rigoles, j'espère ? » lâcha alors la seconde jeune fille qui était de la partie. Une dénommée Billy. Hafsa secoua la tête. Non, elle ne rigolait pas, malheureusement. Il les avait abandonnés… Elle fronça les sourcils, avant d’entrouvrir la bouche. « J’ai une tête à rire là, sérieux ? » lâcha-t-elle un brin agacée par la situation. Et cette Billy qui continuait à appeler leur guide, en croyant qu’il allait revenir. Elle était un peu naïve sur le coup cette fille. Reviens ici tout de suite, lâcha l’asiatique. « Il va pas revenir ! » continua Hafsa dans sa lancée. « Il est parti, il nous a abandonné comme un gros lâche ! Il faut que je vous le dise en quelle langue là ? Et arrêtez de crier, ordonna-t-elle. Vous allez éveiller les bêtes méchantes… Et sincèrement, je n’ai pas envie de finir mon séjour dans le ventre de je-ne-sais-quelle-créature ! ». Elle se tut, regardant autour d’elle encore une fois. Il n’y avait rien à part des plantes, des plantes et encore des plantes… tiens d’ailleurs, Rodrigo ne leur avait donné le nom de celle-ci, songea Hafsa à la vue d’une grande fleur. Tant pis, elle ne le saura jamais ! Elle secoua la tête, tentant de revenir à l’évidence. « On va devoir camper ici… juste pour la nuit… Et puis, demain… on tentera de trouver un village… » déglutit-elle. « Vous êtes d’accord ? » demanda-t-elle.

« J’ai une tête à rire là, sérieux ? »

Non, pas vraiment, pensa Billy, mais en ne répondant pas. De toute façon, que répondre à ça ?Ils étaient au beau milieu de la jungle amazonienne, au beau milieu de plantes et d’insectes dont la majorité était sûrement loin d'être inoffensifs. Comme cette grande fleur coloré, au dessus d'Hafsa. En cours de SVT, Billy avait appris que cette plante était carnivore. Ils avaient intérêt à ne pas s'en approcher. Surtout qu'apparemment, elle était la seule à avoir connaissance de cette information assez utile.

« Il est parti, il nous a abandonné comme un gros lâche ! Il faut que je vous le dise en quelle langue là ? Et arrêtez de crier, vous allez éveiller les bêtes méchantes… Et sincèrement, je n’ai pas envie de finir mon séjour dans le ventre de je-ne-sais-quelle-créature !
- Je pense qu'aucun de nous en a envie, Ava ! »

Elle n'y avait pas vraiment pensé aux animaux sauvages. Et pourtant, dans une telle forêt, ça ne pouvait qu'être évidant qu'il y en avait. Billy avait acheté ce billet pour quitter ses malheurs, et bien pour le coup, elle était servie. Mais même si c'était peu probable, elle osait espérer que Rodriguo allait réapparaître. Il allait bien finir par s'apercevoir qu'il lui manquait du monde, quand même ?!Après, il faut dire qu'il était bizarre, et que si ça se trouve il continuait à parler. Parler tout seul, parler aux insectes.

« On va devoir camper ici… juste pour la nuit… Et puis, demain… on tentera de trouver un village… Vous êtes d’accord ?
- Je crains que l'on aie pas vraiment le choix, mais... où comptes-tu trouver un village dans cette forêt ? Car ce n'est pas une petite forêt ! »

Non, l'Amazonie, c'est loin d'être une petite forêt. N'es-ce pas la plus grande forêt d'Amérique du Sud ?De toute façon, quand on se perd, la meilleure chose est de rester là où on est. Et, en général, il y a toujours quelqu'un qui vous trouve et qui vous ramène là où vous êtes sensé vous rendre. Sauf que l'Amazonie, contrairement à Paris ou aux autres villes dans lesquelles Billy a déjà eu l'occasion de se perdre, c'est très grand, et le nombre d'habitants au mètre carré n'atteint sûrement pas un...

« Je pense qu'aucun de nous en a envie, Ava ! » lâcha l’asiatique. Hafsa secoua la tête. C’était certain. Aucun de ces trois aventuriers en herbe n’avait envie de finir leurs jours de la sorte. Après quelques minutes de contemplation et surtout de réflexion, elle corrigea son interlocutrice. « C’est Hafsa. » et pas Ava comme elle l’avait prononcé. Les gens avaient cette fâcheuse manie d’écorcher son prénom, à force, elle en était habituée… Hafsa, le temps de cette conversation allait devoir s’appeler Ava. Pauvre d’elle. Enfin, il y avait des choses bien plus graves que cette stupide histoire de prénom à cet instant précis. Comme par exemple… ce qu’ils allaient devenir pendant cette nuit, comment on allait les retrouver, comment survivre dans cette nature qui leur était tout simplement étrangère. Hafsa émit alors l’hypothèse qu’elle allait devoir dormir là. Ces deux compagnons de fortunes éprouvèrent, même si cela ne devait enchanter aucun d’entre eux. « mais... où comptes-tu trouver un village dans cette forêt ? Car ce n'est pas une petite forêt ! » finit-elle par lancer Billy. Hafsa fronça les sourcils, avant de lâcher un « j’en ai foutre rien ! ». Puis elle se gratta la nuque, avant de poser un regard sur Cristoph puis Billy. « Il ne doit pas être si loin que cela, si ce bon Rodrigo avait voulu nous y amener… » émit-elle l’hypothèse. « Enfin… hum… avant de chercher une quelconque présence de vie sociale… on va devoir faire notre campement… Elle marqua une brève pause, avant de reprendre. Il vous reste de la nourriture sur vous ? ». Hafsa tâta ses poches en vain, avant d’ôter son sac à dos de ses épaules. Elle l’ouvrit et n’y sortit que sa gourde qui était presque vide. Elle lança un furtif regard, espérant qu’eux aient au moins un peu de manger… histoire de s’alimenter un peu.