Bonnie en était à présent à la moitié de sa grossesse, à peu près. Son médecin lui avait dit que son terme arriverait courant septembre. Il lui restait donc quelques mois encore pour se préparer psychologiquement à l’accouchement. Elle avait eu l’occasion de rencontrer d’autres femmes enceintes, des « récidivistes » si on pouvait dire, qui lui avaient raconté leurs expériences en détail. Elle préférait savoir ce qui l’attendait, plutôt que d’être prise sur le fait. De toute façon, elle ne pouvait pas y échapper. Elle avait peur d’avoir mal, elle avait peur que quelque chose tourne mal aussi. Mais ce qui la réconfortait était qu’elle ne serait pas seule. Pablo lui avait promis qu’il serait là à chaque fois qu’elle aurait besoin de lui, et elle comptait bien lui demander d’être là pour l’accouchement. Il fallait qu’elle broie une main, et à choisir, ce serait celle du jeune homme. C’était de sa faute en partie si elle allait se retrouver dans une telle situation de douleur après tout. C’était un juste retour de cause. C’était d’ailleurs l’une des dernières choses qu’elle lui demanderait. L’enfant serait adopté, elle l’avait décidé et Pablo ne s’y était pas opposé. Elle avait fait toutes les démarches, il ne lui restait plus qu’à faire un choix sur les parents qui accueilleront son enfant, enfin, l’enfant qu’elle portait. Elle voulait que Pablo l’aide à choisir. Après, elle ne l’avait pas trop dérangé pour le moment. C’était pour le ménager avant le « grand final » dirons-nous.

En fait, là, elle venait tout juste de l’appeler. Elle avait une échographie, une des plus importantes puisque c’était là qu’ils allaient lui révéler le sexe de l’enfant, et il allait de soi que Pablo devait être présent. La première échographie, elle y était allée avec son amie Sweva parce qu’il n’avait pas réussi à se libérer. Bonnie se sentait quand même toute drôle. Elle avançait de plus en plus dans sa grossesse, les choses prenaient un peu plus d’ampleur, cet enfant devenait de plus en plus réel. Elle avait pris un peu de ventre, en toute logique, et elle ne pouvait plus nier qu’elle était enceinte. Son entourage commençait d’ailleurs à s’en rendre compte, elle n’avait pas eu à l’annoncer à beaucoup de monde. Son frère ne s’en était pas encore rendu compte, à son grand bonheur. Elle ne le voyait plus beaucoup en ce moment – bon en même temps elle se tenait volontairement écartée de son travail, qui commençait à lui sortir par les yeux. Mais elle craignait sa réaction lorsqu’elle le lui annoncerait. Ses parents, eux, seraient très certainement aux anges. Il valait donc mieux qu’ils ne sachent rien, parce qu’ils auraient tout fait pour qu’elle le garde, et elle ne voulait pas affronter leurs regards désapprobateurs et les longues discussions finement argumentées lui disant pourquoi elle devait garder son enfant auprès d’elle. A croire qu’ils ne la connaissaient pas. Ses propres parents !

La jeune femme avait été installée dans une salle de consultation, on l’avait fait se déshabiller et mettre une blouse, puis à présent, on la faisait attendre. Le médecin qui s’occupait d’elle était avec une autre patiente. Elle devait donc faire preuve de patience. Elle était assise sur le « lit » ses pieds se balançant dans le vide, d’avant en arrière. Pablo était à côté d’elle. Elle ne put s’empêcher d’attraper une des mains du jeune homme, puis de la serrer. Elle n’était pas stressée… plutôt, excitée. Comme la première fois. De voir ce que ce petit-être était devenu depuis tout ce temps. Elle était toujours aussi fascinée par le fait qu’à l’intérieur d’elle, il y avait de la vie, un bébé qui grandissait. « J’ai hate de savoir et de le voir, mine de rien. » dit-elle les yeux légèrement brillants, et le sourire aux lèvres. C’était surprenant de voir que toute panique l’avait quittée. Qui aurait pu le croire en voyant l’état dans lequel elle était quand elle l’a appris ?

Depuis que Bonnie avait mis au courant Pablo de la date de sa prochaine échographie, ce dernier n’avait eut de cesse d’y penser. D’abord, il avait du faire des pieds et des mains pour se libérer mais cette fois, il n’avait laissé le choix à personne. A cause de son boulot, il avait déjà loupé la toute première échographie de Bonnie, et il ne voulait sous aucun prétexte réitérer l’opération. De plus, c’est à la suite de CETTE échographie qu’ils allaient connaître le sexe du bébé, de leur bébé. Le jeune homme s’était sentit tellement coupable et mal à l’aise la première fois… Lui qui avait promis à Bonnie d’être là quoi qu’il arrive, il avait plutôt mal commencé. Mais ce manquement avait pour le moment été sa seule bavure. Aussi incroyable que cela puisse paraître, Pablo s’évertuait à s’occuper de la jeune femme et à combler ses moindres désirs. Les responsabilités qu’engendrait ce bébé lui faisaient de moins en moins peur, et il était de toute façon bien obligé de faire avec. Alors tant qu’à faire, il avait décidé d’être irréprochable dans son rôle de « presque père ».

Comme s’il se préparait pour un rendez-vous galant, il avait prit soin de prendre une douche et de s’habiller assez classe pour cette échographie. Enfin, classe pour Pablo, ça signifiait le plus souvent un jean et une chemise blanche, mais soit. En réalité, il ne savait pas trop à quoi s’attendre, et il se surprit même à avoir les mains moites à l’idée de partager ce moment avec Bonnie. Pour la première fois il allait voir leur « enfant », et ça lui faisait tout drôle. Bien sûr, il avait mainte et mainte fois posé sa main sur le ventre de son ex-petite amie pour essayer de sentir le bébé, mais le fait de le voir dans un écran le perturbait. Comme si tout ça prenait réellement forme, et se concrétisait lentement. Le latino était arrivé chez Bonnie avec une bonne dizaine de minutes d’avance, juste au cas où. Il l’avait récupérée et avait conduit jusqu’au cabinet du médecin plus prudemment qu’il ne l’avait jamais fait. Oubliés ses concours de vitesse dans les rues de New-York, avec une femme enceinte assise à côté de lui, il ne pouvait plus se permettre ce genre de petits plaisirs.

Désormais, les deux jeunes gens patientaient dans la salle de consultation. Bonnie était assise sur le lit, vêtue d’une blouse, alors que Pablo lui, ne pouvait s’empêcher de faire les cent pas dans la pièce. Il ne savait même pas si c’était à cause de l’anxiété, de la peur, de l’excitation… tout un tas de sentiments se mélangeaient en lui et il n’avait qu’une envie, que ce fichu médecin arrive. Lorsqu’il passa près de Bonnie, celle-ci attrapa sa main et Pablo s’arrêta instantanément, levant les yeux vers elle. « J’ai hâte de savoir et de le voir, mine de rien. » Un sourire se dessina alors sur le visage du latino qui s’installa sur le lit, sans lâcher la main de la jeune femme. « Moi aussi, j’ai tellement hâte ! Mais… je me demande comment tu fais pour ne pas être plus stressée ! » ajouta-t-il en laissant échapper un petit rire nerveux. « Enfin… tant mieux, c’est bien ! Ca ne serait pas bon pour vous si tu stressais… » Avant de s’emporter et de raconter n’importe quoi sans y réfléchir, Pablo décida d’arrêter de parler, et déposa à la place un baiser sur le front de Bonnie. Puis, sans pouvoir se calmer, il se releva du lit et lâcha sa main pour recommencer à faire les cents pas à travers la pièce. « Mais il fait quoi le médecin là ?! Pourquoi il vient pas ? Je vais aller le chercher ! »

Pablo avait vraiment été aux petits soins avec Bonnie. Il était venu la chercher, il n’avait pas conduit comme un fou, comme le pilote qu’il était, en la conduisant à l’hôpital, il avait été plus prudent que jamais, et peut-être même un peu trop. Ca la touchait de voir que le jeune homme s’investissait à ce point pour un enfant qui ne saurait surement jamais tous les efforts que son père a fournis pour que tout se passe bien alors qu’il était encore dans le ventre de sa mère. Le fait était que la jeune femme n’avait jamais vu son ex comme ça. Cette grossesse l’avait changé. Elle les avait changés tous les deux, en bien. Elle se sentait toujours extrêmement coupable d’avoir fait subir à Pablo tout ce qu’elle lui avait fait subir. Même si ils avaient plus ou moins tiré un trait dessus et qu’elle s’était excusée, plus d’une fois, il y avait toujours ce sentiment qui ne la quittait pas. Et elle était toujours vraiment reconnaissante. Elle comprenait chaque jour un peu plus que Pablo tiendrait sa promesse. Il ferait un excellent père, elle arrivait à le voir dans ce rôle, qu’il assumerait à la perfection. Il n’y avait qu’à voir son implication et son état d’excitation. Peut-être que s’ils étaient restés ensemble, que si Bonnie avait été sure de pouvoir fonder une réelle famille avec le latino, elle aurait pu garder le bébé. Après tout, elle aurait certainement fini par aimer son enfant suffisamment. Comme toutes les mères en somme. Puis Pablo aurait été là pour rattraper toutes ces erreurs. Mais tout ceci était bien trop incertain pour qu’elle décide de changer d’avis et qu’elle stoppe toutes les démarches d’adoption. Et si elle était dans le faux ? Elle ne voulait pas se lancer dans une telle « aventure » sans être certaine qu’elle y arriverait. Toutes ces pensées furent chassées de son esprit quand elle sentit Pablo passer près d’elle, juste avant qu’elle n’attrape sa main, le forçant à prendre place à côté d’elle. C’était sans doute mieux comme ça, elle devait se concentrer sur ce moment, qui était censé être un moment de bonheur, plutôt que de se perdre dans les méandres de l’avenir, hasardeux, incertain, qui la rendrait plus triste et plus confuse.

L’attitude de Pablo était très surprenante. Il ne resta pas très longtemps en place. « Tu sais, tu peux respirer ! Et tu n’as aucune raison de stresser. Enfin ça tu le saurais si tu étais venu la première fois ! » lui lança-t-elle sans que cela ne sonne comme un reproche. Il s’agissait plus d’une petite boutade. « Je plaisante ! Mais sérieusement, il n’y a aucune raison de paniquer, bien au contraire. » Elle posa son autre main sur l’épaule du jeune homme. « Tu sais que normalement ça devrait être à toi de me rassurer, et non le contraire ? » Elle échappa un léger rire. « Allez ressaisis-toi ! » Il déposa un baiser sur son front avant de se lever à nouveau et de recommencer à faire les cents pas dans la pièce. Ce qui fit rire Bonnie. Son attitude n’était pas seulement surprenante, elle était amusante. Tellement que ça en devint adorable de voir à quel point il pouvait être stressé, chose dont il ne faisait pas vraiment preuve en temps normal. « Veux-tu arrêter de tourner deux minutes et revenir t’asseoir ? Tu me donnes presque le tournis. Puis le médecin va surement arriver bientôt. Je ne dois pas être la seule femme enceinte de New York. » dit-elle toujours aussi amusée. Puis voyant qu’il ne s’arrêtait pas, la jeune femme se leva dans le but de ramener Pablo vers elle. Mais elle n’en eut pas le temps puisque la porte s’ouvrit sur le tant attendu médecin, le messie en quelque sorte. Coupée dans son élan, elle oublia un instant ce qu’elle voulait faire. Le médecin s’approcha de l’appareil qui leur permettrait de voir le bébé, puis attrapa le dossier posé à côté. « Mademoiselle Fitzgerald, c’est bien ça ? Allongez-vous s’il vous plait. » Bonnie hocha la tête puis s’exécuta. Après ça, il appliqua un gel froid sur son ventre, ce qui la fit légèrement sursauter, puis posa la manette dessus. Les battements de son cœur s’accélérèrent puis elle tourna la tête vers l’écran, où elle put voir une petite tête, des petits pieds, des petites mains. Son bébé quoi. Ça lui paraissait encore plus intense que la première fois. Peut-être parce que Pablo était là. Le médecin pointa un doigt vers l’écran, s’adressant au jeune homme. « Vous voyez, ici c’est son cœur. Il bat un peu rapidement parce qu’il sent que le rythme cardiaque de sa mère s’est accéléré. » Bonnie se mordit la lèvre. « Désolée ! » L’homme à la blouse blanche, sourit puis reporta son attention sur l’écran. « Tout va bien ! Le bébé est en parfaite santé. Mais essayez de contrôler un peu mieux vos émotions pour ne pas trop l’affoler. Vous n’êtes pas sans savoir que c’est mauvais pour un bébé. Voulez-vous connaitre le sexe maintenant ? » Bonnie hocha vivement la tête. C’était ce qu’elle attendait depuis le début.

Le jeune pilote ne tenait littéralement pas en place. L’idée d’enfin pouvoir voir ce bébé, de se rendre compte qu’il existait réellement et que c’était le leur le mettait dans tous ses états. A vrai dire, il se serait cru plus fort que ça, ou plus détaché peut-être… En tous cas, il n’aurait certainement jamais cru se sentir aussi concerné par ce qui arrivait. Bonnie avait beau lui dire qu’il n’avait aucune raison de stresser, c’était plus fort que lui, il avait l’impression de totalement perdre le contrôle alors que ça ne lui arrivait jamais. La jeune femme ironisa même plusieurs fois, sans qu’elle ne parvienne à faire rire Pablo sincèrement. « Allez ressaisis-toi ! » C’était facile à dire ça ! Bonnie savait parfaitement ce qui allait arriver, ce qu’on allait lui faire alors que Pablo, lui, n’en savait rien. Elle avait déjà vécu la même situation alors qu’il n’avait jamais mis les pieds dans un tel endroit. Dans ces conditions, il lui paraissait tout à fait normal qu’il ne soit pas à l’aise, et qu’il attende de voir la suite des évènements avant d’être rassuré. Et en attendant justement, le jeune pilote reprit sa marche sans fin à travers la salle.

« Veux-tu arrêter de tourner deux minutes et revenir t’asseoir ? Tu me donnes presque le tournis. Puis le médecin va surement arriver bientôt. Je ne dois pas être la seule femme enceinte de New York. » Mais rien qu’elle ne puisse dire semblait suffire pour calmer Pablo. Alors elle décida finalement de se lever, mais c’est ce moment que choisit le docteur pour ENFIN faire son entrée. Aussitôt, le jeune homme sentit les battements de son cœur s’accélérer un peu plus, et au moment où il croisa les yeux de Bonnie avant que celle-ci n’aille s’allonger, il ne put masquer son inquiétude et son appréhension. Mais tout en restant silencieux, il se précipita sur le fauteuil placé à côté du lit et donc à côté de la jeune femme. Son regard se braqua alors sur le médecin, comme s’il était méfiant et qu’il voulait garder un œil sur lui en toute circonstance, juste au cas où. Il les avait déjà fait attendre au moins dix minutes, si ça se trouve, ce n’était pas un bon médecin ! L’air suspicieux de Pablo se transforma cependant bien vite en mine intriguée. Il suivait tous les gestes du médecin, aussi bien sur le ventre de Bonnie que sur son clavier d’ordinateur. Puis, en voyant le cœur du bébé s’agiter sur l’écran, la bouche du latino s’entrouvrit. C’était donc ça… Leur bébé était là juste sous leur nez, il pouvait le voir parfaitement mais ne savait pas trop comment réagir.

Ce n’est que lorsque le docteur reprit la parole que Pablo sembla de réveiller, et détacha ses yeux de l’écran pour les porter vers Bonnie. Il grimaça à son tour, quasiment persuadé que si son cœur s’était accéléré, c’est parce qu’IL faisait les cent pas dans la pièce quelques minutes plus tôt. Mais bien vite, le médecin posa LA question qu’ils attendaient probablement tous les deux. L’homme à la blouse blanche, sourit puis reporta son attention sur l’écran. « Voulez-vous connaitre le sexe maintenant ? » Le jeune pilote entrouvrit la bouche mais absolument aucun son ne fut assez audacieux pour en sortir. Du coin de l’œil, il vit Bonnie hocher vigoureusement la tête, et il opta donc pour la même solution. Pablo était terrifié, et il ne savait même pas pourquoi. Il était littéralement pendu aux lèvres de ce fichu docteur, guettant le moindre de ses mouvements. Et comme par réflexe, il attrapa la main de Bonnie sans même la regarder, juste pour sentir sa présence au moment fatidique.

Le médecin avait bien demandé à Bonnie de se calmer pour ne pas « affoler » le bébé. Mais si au départ elle avait essayé de se détendre, les battements de son cœur avaient recommencé à accélérer à l’approche du moment tant attendu. C’était excitant d’enfin savoir si on attendait une fille ou un garçon… Au fond ça n’aurait plus trop d’importance puisqu’ils ne l’élèveraient pas, mais elle tenait quand même à savoir si elle aurait une petite Bonnie ou un petit Pablo. L’un comme l’autre lui plairait, même si elle serait quand même fière qu’il y ait une mini elle sur terre. Cela dit elle espérait ne pas lui transmettre tous ses défauts – ils étaient nombreux – mais au moins sa force de caractère, son tempérament assez difficile à ne pas se laisser marcher sur les pieds. De toute façon, c’était son enfant, il serait forcément parfait. Elle croisa le regard quelque peu « désapprobateur » du médecin qui semblait vouloir dire « calmez-vous vraiment ». La jeune femme se mordit la lèvre puis jeta un œil à Pablo. Il n’avait pas l’air très calme lui non plus. Bon en même temps il n’avait aucune expérience dans ce domaine, il n’était pas venu à la première échographie donc il ne savait pas à quoi s’attendre, puis il devait avoir peur/hâte lui aussi. L’un comme l’autre devaient passer par tout un tas de sentiments contradictoires. En tout cas le regarder n’était peut-être pas une bonne idée pour se calmer s’il était encore plus nerveux qu’elle.

Le médecin leur proposa enfin de connaitre le sexe du bébé. Le moment tant attendu. Bonnie se contenta d’hocher la tête, assez vivement toutefois pour montrer son impatience. En fait elle avait lutté pour ne pas le demander sitôt le médecin installé. Pablo hocha la tête à son tour. La jeune femme était touchée par son engagement. Il avait accepté d’assumer totalement sa responsabilité, et il le faisait plus que totalement. Il était investi à cent pourcent et de le voir déjà aussi nerveux ne faisait que conforter Bonnie dans le fait que le latino ferait un bon père et qu’il aimait déjà, peut-être, surement, l’enfant. Le médecin hocha la tête en guise d’approbation, se tourna un bref instant vers l’écran, bougea légèrement sa manette sur le ventre de la jeune femme puis se tourna vers l’ancien couple. L’américaine était suspendue à ses lèvres, et heureusement, il ne fit pas trop monter le suspense. « Une fille. C’est une fille. » Aussitôt, un immense sourire naquit sur les lèvres de Bonnie. Elle serra la main de Pablo qu’elle tenait – elle ne s’en était pas rendue-compte avant tant elle était nerveuse – puis finit par se tourner vers lui, son sourire toujours sur les lèvres. « Une fille ! » La jeune femme ne trouva rien d’autre à dire. Elle était contente, c’était certain. Elle aurait été contente dans les deux cas. Elle était contente, fière, un peu bouleversée aussi parce qu’ils venaient de passer à une étape supérieure, tout cela prenait un autre sens, était encore plus réel. « C’est vraiment… Vraiment… Bien. » Elle passa rapidemment sa main sur ses yeux pour essuyer des « débuts » de larmes qui menaçaient de tomber. Elle avait le droit d’être émotive après tout. Puis les hormones y étaient sans doute pour beaucoup.

D’aussi loin qu’il se souvienne, Pablo ne s’était jamais sentit aussi fébrile. Même la veille d’une course de grande importance, il n’avait jamais ressenti un tel mélange d’impatience et d’anxiété à la fois. Et ce n’était pas peu dire ! Il fixait ce foutu médecin qui semblait vouloir mettre une éternité avant de leur annoncer le sexe du bébé, et plus la pression montait plus il serrait la main de Bonnie dans la sienne. Pablo regarda avec méfiance l’instrument du médecin se balader sur le ventre de la jeune femme, puis remonta ses yeux vers lui lorsque son mouvement s’arrêta. Le latino retenait son souffle. Il savait que le moment était venu, et au moment où le médecin se tourna, le jeune homme crut que son cœur s’était tout nettement arrêté. « Une fille. C’est une fille. » Une expression à la fois stupéfaite et euphorique prit alors place sur le visage de Pablo qui entrouvrit la bouche pour dire quelque chose, sans succès. Il sentit alors la pression des doigts de Bonnie, et baissa finalement les yeux vers elle. La jeune femme affichait un large sourire qui ravit le latino. Après tout, elle aurait pu préférer avoir un garçon, et le tenir responsable de ça ! Mais visiblement, le fait d’avoir une fille li convenait très bien. Et à Pablo aussi ! Il s’imagina d’ailleurs en train de la bercer, mais très vite son sourire s’effaça. Il ne fallait pas qu’il oublie que cette fille ne serait jamais la sienne… Il ne la croiserait que pendant quelques minutes dans sa vie, avant de la laisser partir vers d’autres parents qui seraient meilleurs qu’eux. D’une manière mélancolique, le jeune homme se mit alors à caresser la main de Bonnie, au même moment où il s’aperçut qu’elle essuyait des larmes au coin de ses yeux.

[b] « Bien, je vous laisse vous rhabiller. Vous connaissez le chemin. Pensez à passer par l’accueil avant de partir. »[/color] C’est sans plus de cérémonie que ce stupide médecin quitta la pièce et les laissa plantés tous les deux. Pablo en conclut qu’il devait être overbooké, mais ne lui pardonna pas son manque de sympathie pour autant. Ses yeux se reportèrent alors sur Bonnie et lorsqu’il croisa son regard, sa gorge se serra. Il la laissa s’asseoir au bord du lit, comme elle l’était au tout début puis s’installa à côté d’elle. « On va avoir une fille… » dit-il presque pour lui-même, plus pour s’en persuader qu’autre chose. Les yeux de la jeune femme étaient toujours embués de larmes et le latino laissa glisser son bras dans son dos, pour poser la main sur son épaule et l’attirer vers lui. Il ne trouvait pas vraiment les mots pour la consoler, et ne savait d’ailleurs même pas pourquoi elle pleurait exactement. Mais le fait de savoir que sa fille grandirait sous un autre toit le tuait. Maintenant que tout commençait à se concrétiser, il allait falloir faire une croix sur le bonheur qu’ils auraient pu avoir avec cet enfant. Et c’était bien plus dur que ce que Pablo n’avait pu imaginer. « Ca va aller » murmura-t-il à l’attention de Bonnie en caressant son épaule sans vraiment s’en rendre compte.

Bonnie ne savait pas vraiment pourquoi elle pleurait. Elle n’avait pas pu s’en empêcher, ses mains n’avaient pas pu contenir ses larmes bien longtemps, et on put vite apercevoir le chemin qu’elles avaient parcouru sur ses joues. Elle allait avoir une fille. Une petite fille. La jeune femme avait encore du mal à le réaliser. Mais c’était un fait maintenant, le médecin le leur avait annoncé, après avoir mis un peu de suspense la stressant plus qu’autre chose au passage, Pablo et elle auraient une mini Bonnie. Une mini Bonnie qu’ils ne verraient pas grandir et évoluer. Cette pensée lui fit un coup au cœur. Elle était la seule à blâmer pour ça. C’était elle qui avait décidé qu’elle ferait adopter le bébé, au tout début de sa grossesse parce qu’elle pensait que c’était la seule solution raisonnable et souhaitable pour le bien-être de l’enfant. Pablo n’avait pas vraiment eu son mot à dire, il avait juste promis de respecter peu importe la décision qu’elle prendrait. Mais c’était avant qu’elle ne puisse se rendre de ce qu’était une grossesse, de le vivre de l’intérieur si on peut dire, et ce que cela impliquait au niveau émotionnel. Le fait était qu’elle avait commencé à s’attacher à ce bébé, elle faisait attention à tout pour qu’il aille bien sans se forcer comme elle le faisait au début. C’était devenu automatique. Voir Pablo être aussi heureux lui réchauffa un instant le cœur. Il semblait aussi heureux qu’elle, aussi ému, et elle le sentait plus proche d’elle que jamais. Elle refusait même de lâcher la main du latino, de peur de rompre cette proximité. Après tout ce qu’ils avaient vécu, par sa faute à elle principalement, Bonnie ne pensait pas qu’ils se retrouveraient là. La jeune femme passa sa main sur ses joues pour essuyer les trainées de larmes qui étaient apparues sur ses joues juste avant que le médecin ne lui dise de se rhabiller et s’en aille. Il les laissait là, tous les deux, sans leur en dire plus sur le bébé. Cela voulait surement dire que tout allait à merveille, mais elle avait le souvenir d’un médecin plus prévenant lors de sa première échographie.

Bonnie reprit place au bord du lit, comme elle l’avait été avant l’arrivée du médecin, ses pieds pendant dans le vide. Pablo était assis à côté d’elle, de la même façon. Encore une fois, elle lui était tellement reconnaissante… Il aurait très bien pu ne pas venir, couper les ponts avec elle dg ne pas assumer ses responsabilités. Mais non, il était là, solide comme un roc, à satisfaire tous ses caprices de femme enceinte, à la suivre dans toutes les obligations qu’impliquaient une grossesse, à être présent quand elle avait une petite baisse de moral ou quand elle s’inquiétait à cause d’un des « symptômes » allant avec une grossesse. Elle ne savait pas comment le remercier. Bien sûr, à chaque fois qu’il volait à son secours, elle n’était pas avare en mercis. Mais elle savait que ce n’était pas suffisant. Surtout qu’il faisait tout ça pour elle et un bébé qu’il ne pourrait pas élever, à qui il ne pourrait pas donner tout l’amour qu’il éprouvait. Parce que c’était évident, au vu de sa réaction après coup, qu’il aimait ne serait qu’un tout petit peu le bébé. « Une mini Bonnie… Mon Dieu je plains déjà ses parents. » dit-elle en voulant détendre l’atmosphère. Très vite, la jeune femme se rendit compte que ce n’était peut-être pas une si bonne idée que ça, de s’essayer à l’humour dans un tel moment. Elle baissa donc la tête. Si la petite s’avérait être comme sa mère, elle les plaignait vraiment cela dit. Bébé Bonnie n’avait pas été tendre avec ses parents et ses frères et sœurs, les menant tous par le bout du nez et leur en faisant voir de toutes les couleurs quand elle n’obtenait pas ce qu’elle voulait. Le fait d’être la petite dernière n’avait rien arrangé. Mais soit, elle venait en quelque de sorte de gaffer, et quand elle s’en rendit compte, elle se mordit la lèvre. Cette vaine tentative n’était pas non plus forcément arrivée spontanément. Elle avait juste eu besoin de se détendre et de sortir de son esprit le fait qu’elle avait pris la décision de faire adopter son bébé et que justement elle ne saurait jamais si cette mini Bonnie aurait été son portrait craché. Pas totalement remise de ses émotions, ses yeux s’embuèrent de larmes à nouveau, et elle sentit le bras de Pablo dans son dos. Quand il l’attira vers lui, elle se laissa faire, posant sa tête sur son épaule. Elle ferma ensuite les yeux. « Ca va aller. » finit-elle par répéter, pour s’en convaincre. C’était tellement plus dur que ce qu’elle avait imaginé. Rien que d’y penser était dur, alors pourquoi avait-elle pris cette décision-là ? Comment avait-elle pu penser qu’elle pourrait donner sa fille à de parfaits inconnus sans rien éprouver, ni peine, ni souffrance, ni regret ? A cet instant cela lui paraissait tout bonnement impossible. Peut-être à cause de l’intensité du moment, de l’émotion. Mais c’était un fait. Et Pablo semblait tout aussi mal qu’elle à présent. La culpabilité la gagna. Elle finit par s’écarter un peu du jeune homme, puis chercha son regard. « Je suis désolée. Pour tout ça. Pour t’avoir imposé le bébé, puis l’adoption. »

Malgré le fait qu’il ait l’habitude de cacher ses sentiments et à peu près tout ce qu’il ressentait, cette fois Pablo avait bien du mal à ne rien montrer. Pour sa défense, il vivait des évènements un peu inattendus ces derniers temps. Et, comme pour ajouter un peu plus d’importance à tout ça, tous les évènements en question avaient un rapport avec Bonnie. La première chose avait été d’apprendre qu’il l’avait mise enceinte, et surtout de l’accepter. Puis, le latino avait du faire tout un travail sur lui-même pour trouver la force d’être à ses côtés quoi qu’il arrive, et pour lui promettre qu’il serait toujours là. Mais quelque part, tous ces efforts avaient servi à quelque chose. Sans ça, les deux jeunes gens ne se parleraient certainement plus. Ils feraient peut-être même tout pour ne plus jamais se croiser, et auraient tous les deux un gout de regret indélébile. Mais désormais, Pablo se sentait plus proche que jamais de Bonnie. Ils n’étaient plus en couple, mais ils partageaient quand même chaque moment de cette grossesse. Et c’est précisément parce que tout se passait si bien que Pablo redoutait le moment où ils devraient abandonner l’enfant. Leur enfant. Il ne l’avait encore pas vu en vrai, et déjà il s’y était attaché plus qu’il ne l’aurait cru possible. Bref, l’ambiance dans la pièce était lourde, et l’émotion palpable. Et lorsque la jeune femme tenta de détendre l’atmosphère, Pablo se montra bon public. Même s’il n’en avait pas vraiment envie à ce moment-là, il sourit, et laissa même échapper un petit rire avant de tendre le bras pour attirer Bonnie contre lui.

Après plusieurs minutes de cette proximité à la fois rassurante et effrayante tant le silence était pesant, le jeune homme sentit Bonnie s’éloigner. Il tourna la tête pour planter son regard dans le sien et soupira en l’entendant s’excuser une nouvelle fois. « Non… Bonnie, arrête. Tu sais déjà ce que j’en pense, je te l’ai dit et je ne changerai jamais d’avis, d’accord ? Tu ne m’imposes rien du tout, si je n’avais pas voulu être là pour toi, je serai parti il y a longtemps. Je t’ai promis… » Sans la quitter des yeux, il laissa glisser sa main sur sa joue, et essuya un passage une de ses larmes. Puis il se leva pour se poster juste devant elle, et lui adressa un mince sourire. Sa main qui n’avait pas quitté sa joue glissa alors jusqu’à son épaule, et en faisant de même de l’autre côté il la saisit comme pour obliger Bonnie à le regarder et à l’écouter. Une nouvelle fois, son regard plongea dans celui de la jeune femme et il reprit : « Ce sont tes choix et je les partage. On n’a pas vraiment d’autre solution de toute façon… Et même si c’est dur, on est tous les deux. » Et tous les arguments qu’il utilisait pour rassurer Bonnie lui servaient à lui aussi. Même s’il voulait se montrer fort, et lui faire croire qu’il avait le contrôle de a situation, ce n’était pas du tout le cas. Il était aussi terrorisé qu’elle à l’idée de devenir père, la différence c’est qu’il n’avait pas le droit de le montrer.

Finalement, Pablo se rapprocha de nouveau de la jeune femme pour la prendre dans ses bras. « Il est temps d’y aller maintenant… Viens, on va boire un chocolat chaud, ou manger une glace, ou tout ce que tu veux… »

A ce stade-là, Bonnie ne savait plus vraiment comme elle se sentait. Joyeuse au départ, de plus en plus excitée jusqu’à ce que le verdict tombe puis triste à l’idée d’être séparée de cet enfant auquel elle commençait à s’attacher, elle était passée par toute une palette d’émotions. Elle ne saisissait pas encore très bien ses réactions, sans doute dues aux hormones. Ah ces hormones, elles faisaient faire tout un tas de choses. Mais heureusement qu’elles étaient là du coup, comme ça la jeune femme avait une excuse toute trouvée pour ses agissements et elle n’avait pas à se fatiguer à réfléchir au pourquoi du comment de chaque chose qu’elle faisait ou disait. C’était beaucoup plus simple ainsi. Si Pablo n’avait pas été avec elle, elle serait surement restée à l’étape tristesse profonde. Même s’ils n’étaient plus ensemble et si leur relation avait toujours été très compliquée, et ce depuis le départ, elle avait de lui, de sa présence et de ses mots réconfortants. Il était avec elle là-dedans, il lui avait fait la promesse de ne pas l’y laisser seule et ne le remercierait jamais assez pour ça. Elle avait l’impression de pas le mériter, de ne pas le mériter lui et tout ce qu’il faisait pour elle. Elle lui en avait fait tellement voir qu’il aurait très bien pu lui rendre la pareille et se délecter de son malheur. Mais non, il avait été parfait avec elle, attentionné, gentil. Comme il l’avait toujours été en fait.

Bonnie n’arrêtait pas de penser à cette petite fille qui grandissait en elle et qui verrait le jour dans quelques mois à peine. Elle n’arrivait pas encore à réaliser qu’elle était enceinte. Enfin, bien sûr, elle avait la preuve physique et tous les désagréments qui allaient avec, mais elle avait le sentiment que tout était allé trop vite et elle en était toujours au stade où elle apprenait la nouvelle et où elle devait s’y faire. C’est qu’elle était longue à la détente parfois. Soit. Elle allait être maman, pour cinq minutes seulement certes, mais ça la travaillait quand même, et elle s’attachait à son enfant, ce qui était normal. Pourtant, elle savait qu’elle faisait la bonne chose en la mettant à l’adoption, et elle savait qu’elle ne devait pas s’y attacher. C’était une mauvaise idée qui ne ferait que la faire souffrir, comme si elle n’en avait pas déjà eu assez. Là, elle était en train de culpabiliser et de s’excuser pour la énième fois, remuant un peu plus le couteau dans la plaie. Pablo, fidèle à lui-même, faisait tout son possible pour la rassurer et la réconforter. « Non… Bonnie, arrête. Tu sais déjà ce que j’en pense, je te l’ai dit et je ne changerai jamais d’avis, d’accord ? Tu ne m’imposes rien du tout, si je n’avais pas voulu être là pour toi, je serai parti il y a longtemps. Je t’ai promis… » La jeune femme se força à lui sourire à son tour. Qu’avait-elle fait pour mériter ça ? « Ce sont tes choix et je les partage. On n’a pas vraiment d’autre solution de toute façon… Et même si c’est dur, on est tous les deux. » continua-t-il tout la maintenant par les épaules. De cette façon, elle n’avait d’autre choix que de le regarder dans les yeux elle aussi. Elle put voir qu’il était sincère. La jeune femme ne trouva rien à répondre, elle se répéta simplement les paroles du jeune homme pour se forcer à se rassurer. Elle se convint que c’était le cas, même si ce n’était qu’en surface.

Pablo la prit ensuite dans ses bras. Là encore, Bonnie fit durer le moment et ferma les yeux. C’était plus facile de ne pas bouger et de fermer les yeux, de faire comme si rien n’existait le temps d’un court instant. « Il est temps d’y aller maintenant… Viens, on va boire un chocolat chaud, ou manger une glace, ou tout ce que tu veux… » Il interrompit leur étreinte en lui proposant de partir d’ici. Cela vaudrait mieux. Elle s’écarta de lui, et acquiesça d’un signe de tête. « Tu lis dans mes pensées ou quoi ? » répondit-elle avant d’aller s’habiller et quitter enfin cette blouse informe qui ne la mettait absolument pas en valeur, même si ce n’était pas le but. Elle revint ensuite vers le jeune, coinça son bras avec le sien, et l’entraina vers la cafétéria. Là-bas, elle prit un bon chocolat chaud, et ils s’installèrent à une table, face à face, tranquillement. L’atmosphère était un peu moins lourde que précédemment. Peut-être était-ce le fait qu’ils ne soient plus dans leur ‘bulle’. C’était plus agréable en tout cas. Elle n’arrêtait pas de regarder Pablo en souriant. Elle ne savait pas quoi lui dire, mais elle se sentait déjà mieux, et c’était grâce à lui. « Je sais que je ne fais que dire ça depuis quelques temps mais… » Elle posa sa main sur celle du jeune homme, le regardant dans les yeux. « Merci encore, pour tout. Je ne sais pas ce que je ferais sans toi, j’aurais déjà craqué plus d’une fois je pense. » Son ton était léger, pas du tout dramatique. Il ne fallait absolument pas qu’ils retombent là où ils étaient précédemment : dans leur bulle étouffante pleine de larmes et d’émotion. « Enfin, tu avais raison, j’avais vraiment besoin de ce chocolat. Il est vraiment bon. » C’était bateau, mais elle ne trouva rien de mieux pour apporter encore plus de légèreté à la situation.

L’ambiance était bien trop pesante dans la salle pour que Pablo puisse y rester ne serait-ce que dix minutes de plus. Sa seule envie était de fuir tout ça, fuir cette lourdeur et la tristesse de Bonnie. Sa tristesse à lui aussi, car même s’il s’efforçait de ne rien montrer, la nouvelle qu’il venait d’apprendre l’avait tout autant retourné qu’elle. Il allait être papa d’une petite fille, mais il ne tiendrait ce rôle magique que durant quelques minutes. Ensuite, on lui enlèverait sa fille pour l’emmener vers d’autres parents, des parents qui ne la connaitraient même pas, et qui ne l’auraient vue « grandir ». Lui, il suivait tous les moindres détails de la grossesse de Bonnie, et il s’impressionnait même d’être aussi attentionné et concerné. Mais la jeune femme avait décidé de se séparer de l’enfant, et même si c’était douloureux, Pablo ne pouvait pas la contredire. Ils n’étaient même plus ensemble, et n’avaient pas vraiment le profil des parents modèles. Alors pour le bien de la petite, Bonnie avait certainement prit la meilleure décision. En sentant une certaine fébrilité l’envahir lorsqu’il prit la jeune femme dans ses bras, le latino préféra l’inviter à sortir d’ici, histoire de changer d’air et de se changer les idées après cette nouvelle épreuve qu’ils avaient à surmonter.

Bonnie accueillit visiblement sa proposition avec un certain soulagement, et ne tarda pas à entrainer le jeune pilote vers la cafétéria. Un simple café à la main, Pablo suivit Bonnie jusqu’à une table où ils s’installèrent en tête-à-tête. Bizarrement, l’attitude et le visage de la jeune femme avaient littéralement changés, mais ça ne déplaisait pas particulièrement au latino. La voir sourire était pour lui un bon signe, presque une satisfaction. Tout ce qu’il voulait finalement, c’était la voir heureuse, quels que soient les évènements extérieurs et les décisions qu’ils avaient à prendre. Elle ne le lâchait plus des yeux, et Pablo commençait tout juste à se demander ce qui lui prenait lorsqu’elle posa tout à coup sa main sur la sienne. Instinctivement et sans même savoir ce qu’elle allait lui dire, le jeune homme s’en saisit tendrement, comme il aurait pu le faire il y a encore quelques mois. « Merci encore, pour tout. Je ne sais pas ce que je ferais sans toi, j’aurais déjà craqué plus d’une fois je pense. » Avec un léger sourire, Pablo haussa les épaules. « Tu sais, t’as le droit de craquer hein… J’imagine que c’est normal. Mais quand ça t’arrive, tu sais où me trouver… à n’importe quelle heure et n’importe où. » Et il était sincère. Même en plein entrainement, lorsqu’il était dans un de ses bolides sur un circuit, elle pouvait venir et il aurait tout lâché pour elle. Parfois, quand il était seul, Pablo s’imaginait encore en couple avec elle, élevant leur enfant dans une belle maison qu’ils auraient pu s’offrir… Mais au fond, il savait qu’ils ne pouvaient pas avoir tout ça, le destin avait du en décider autrement pour eux. Alors, comme pour compenser, le latino avait décidé d’être là quoi qu’il arrive, et de ne plus jamais s’éloigner de Bonnie. Elle avait beaucoup changé, et lui aussi, probablement. Bien plus proches que de simples amis, bien moins intimes qu’un couple, même si leur relation pouvait paraitre ambigüe, elle convenait parfaitement au jeune pilote. Bonnie était la seule fille qu’il avait vraiment aimée et avec qui il avait eu une véritable relation. Et rien que pour ça, il ne pourrait tout simplement jamais l’effacer de sa vie.

En soulignant que son idée avait été bonne, Bonnie sortit le latino de ses pensées et lui arracha un sourire. « Ca m’étonne que tu n’y ais pas pensé avant moi ! » plaisanta-t-il pour la taquiner. Toutefois, le jeune homme ne perdait pas de vue qu’ils venaient d’apprendre une nouvelle de taille, et il n’était pas décidé à la laisser seule après ça. « Ca te dit d’aller voir un film après ? Ou alors on pourrait aller se balader, ou… je sais pas, t’as d’autres idées toi ? J’ai annulé tous mes entrainements aujourd’hui alors on peut faire ce que tu veux. » Pablo marqua une pause, et se mit à sourire en repensant au feuilleton à l’eau de rose qu’ils étaient censés regarder ensemble quelques jours plus tôt, et devant lequel ils s’étaient finalement endormis tous les deux. « Et si tu veux juste faire la sieste, ça me convient aussi… » ajouta-t-il finalement d’un ton faussement provocateur.

Pablo et Bonnie avaient passé une bonne demi-heure dans cette salle de consultations, entre l’attente de la visite du médecin, la visite en elle-même, l’annonce tant attendue, le temps pour digérer la nouvelle, pour réaliser un peu plus l’ampleur de ce qu’il leur arrivait, Ils allaient vraiment être parents et ils allaient avoir une fille. Une petite Bonnie, brune aux yeux bleus très certainement, elle allait faire chavirer les cœurs plus tard et sans aucun doute marquer les esprits. A cette pensée, la jeune femme en avait perdu en assurance. Elle qui avait rassuré Pablo jusqu’ici avait eu besoin d’être rassurée. Ça lui faisait un peu mal, encore et toujours, de se dire qu’elle allait devoir abandonner une partie d’elle-même, elle n’arrivait plus à se sortir cette pensée de sa tête à présent, et elle n’arrivait toujours pas à réaliser à quel point elle évolué durant cette grossesse. Elle s’était découvert un cœur, une sensibilité qu’elle ne s’était pas connu jusqu’ici. Et bien évidemment cela lui avait fait peur. Les deux jeunes gens s’étaient encore plus rapprochés lors de cette visite. Il n’avait pas failli, il avait été là pour elle comme il le lui avait promis et cela n’a fait que resserrer leur lien. Enfin, c’était ce qu’elle avait ressenti. Toute cette histoire les avait inévitablement rapprochés de toute façon. Ils avaient été déjà très proches en sortant ensemble, il avait été sa première vraie, le premier dont elle soit vraiment tombée amoureuse un jour. Malgré tout ce qu’elle lui avait fait subir, elle n’avait pas joué avec lui, elle ne lui avait jamais menti sur ses sentiments contrairement à ce qu’elle avait fait jusque-là. C’était peut-être pour ça qu’elle avait été particulièrement horrible avec lui. Parce que ce sentiment tout nouveau pour elle lui avait fait peur et qu’il avait par conséquent un semblant de pouvoir sur elle. Avec tous ces souvenirs, toutes ces réalisations, il y avait eu comme un trop-plein d’émotions dans la salle, émotions qui leur faisaient du mal.


Pablo avait donc proposé à la jeune femme de sortir et d’aller manger quelque chose à la cafétéria. Elle avait accepté sa proposition avec grand soulagement et ne s’était pas fait prier pour quitter la salle de consultations en hâte. Elle avait pris le jeune homme par le bras et l’avait emmené dans la grande salle pleine de vie. Cela lui réchauffa le cœur et réussit à lui faire oublier, ou du moins à cacher toutes ses pensées néfastes. Elle s’était tout de suite sentie tellement mieux ! La jeune femme avait ensuite remercié, pour la énième fois, son ex petit-ami qui faisait preuve d’une force et d’un courage incroyable. Elle n’aurait pas pensé qu’il puisse être capable de faire tout ça pour elle justement parce qu’elle était elle. « Tu sais, t’as le droit de craquer hein… J’imagine que c’est normal. Mais quand ça t’arrive, tu sais où me trouver… à n’importe quelle heure et n’importe où. » Quand il prononça ses mots, elle lui offrit un sourire radieux. « Je pourrais te prendre au mot… » Bien sûr, elle lui épargnerait les appels en plein milieux de la nuit, mais elle savait désormais qu’elle pourrait compter sur lui, maintenant plus que jamais. Après ça, ils continuèrent à plaisanter et à grignoter, l’atmosphère était vraiment plus détendue et c’était très agréable. Quand Bonnie finit son chocolat chaud, elle alla chercher cette fois-ci une mousse au chocolat. C’était vraiment la chose qu’elle préférait au monde. Pablo enchaina et lui fit quelques propositions qu’elle jugea assez séduisantes. « Ça te dit d’aller voir un film après ? Ou alors on pourrait aller se balader, ou… je sais pas, t’as d’autres idées toi ? J’ai annulé tous mes entrainements aujourd’hui alors on peut faire ce que tu veux. » Elle hocha la tête. Elle avait vraiment besoin de se vider l’esprit, ils en avaient tous les deux grandement besoin. « Aller voir un film me conviendrait très bien. On peut faire n’importe quoi en fait, peu importe. Ça sera quand même bénéfique. » Puis, il lui lança une petite pique. « Et si tu veux juste faire la sieste, ça me convient aussi… » Il faisait référence à la série des Feux de l’amour, que Bonnie aimait regarder. Vu qu’elle ne faisait plus rien de ses journées elle les passait à regarder la télévision et avait trouvé un grand intérêt en ce feuilleton. Elle avait invité le jeune homme à venir le regarder avec elle un jour et ils s’étaient tous les deux endormis. Connaissant Pablo, il s’était endormi par ennui, parce que c’était loin d’être son genre de truc. « Hey ! Ne critique pas mon feuilleton ! C’est très passionnant ! » Puis comme pour le punir, mais surtout pour détendre encore plus l’atmosphère, elle trempa son doigt dans sa mousse au chocolat et en étala sur la joue du jeune homme. « Je ne t’inviterai plus pour la « sieste » tiens, ça se mérite ce genre de chose ! » ajouta-t-elle en prenant un air faussement vexé.

Loin de cette maudite salle de consultation, l’atmosphère semblait bien plus légère, bien plus encline à la plaisanterie. Et pour avaler cette nouvelle que le médecin venait de leur annoncer, il leur fallait bien ça. Et avec l’aide d’un peu de chocolat, Pablo eut la satisfaction de revoir un sourire se dessiner sur les lèvres de son ex-petite amie. Une fois de plus, il jugea utile de lui répéter qu’il était là, quoi qu’il arrive et à n’importe quel moment. Le fait d’apprendre que l’enfant que Bonnie portait était une petite fille semblait avoir décuplé le sens des responsabilités du jeune homme. Jusque là, il avait déjà été très présent, et avait tenu la promesse qu’il lui avait faite peu après qu’elle lui ait avoué être enceinte. Mais désormais, tout devenait plus concret, et Pablo avait comprit qu’elle aurait de plus en plus besoin de lui. Ou plutôt, il l’avait supposé… Et si tel était le cas, elle pourrait compter sur lui, sans aucun doute. « Je pourrais te prendre au mot… » Le latino accueillit cette réaction avec un large sourire, et renchérit sans attendre en pointant son index vers elle: « J’espère bien ! Tu as intérêt de me prendre au mot ! »

A la plus grande satisfaction du jeune pilote, Bonnie accueillit avec un certain enthousiasme sa proposition de sortie. Mais l’expression de la jeune femme changea bien rapidement, lorsque Pablo ne put s’empêcher de plaisanter au sujet de sa fameuse série bidon dont elle semblait ne plus pouvoir se passer depuis quelques temps. « Hey ! Ne critique pas mon feuilleton ! C’est très passionnant ! » « Passionnant » n’était pas spécialement l’adjectif que Pablo aurait utilisé en parlant des Feux de l’Amour mais venant de Bonnie, plus rien ne l’étonnait. Le jeune homme baissa la tête afin de camoufler pendant un temps son sourire, mais n’y tenant plus, il finit par éclater de rire juste sous le nez de Bonnie qui paraissait pourtant faussement sérieuse. Mais pour se venger, la jeune femme était pleine de ressources. Sans qu’il n’ait le temps de faire ni de dire quoi que ce soit, elle avait trempé un de ses doigts dans son bol de mousse au chocolat, et lui en avait badigeonné la joue en faisant semblant d’être vexé. Dans un premier temps, Pablo resta bouche bée. En réalité, elle l’avait vraiment surpris sur ce coup-là, mais c’était plutôt agréable. La voir s’amuser de la sorte était bon signe, et cela confirmait bien au latino qu’il était parvenu à lui changer les idées à grand coup de chocolat et de gentilles provocations. « Je ne t’inviterai plus pour la « sieste » tiens, ça se mérite ce genre de chose ! » Les yeux de Pablo s’écarquillèrent immédiatement à l’entente de cette dernière phrase. Le priver de sa sieste avec elle ? Pas question ! Même si elle ne voulait plus de lui, il saurait s’incruster. Et en ce qui concernait son feuilleton à l’eau de rose, il n’en supportait de toute façon que quelques minutes, et finissait à chaque fois par sombrer dans un profond sommeil.

D’un geste vif, le jeune pilote trempa à son tour un doigt dans le dessert de Bonnie, et lui déposa à son tour un trait de chocolat sur le bout du nez. Puis il porta ce même doigt jusqu’à sa bouche et put ainsi gouter à cette mousse tant désirée. Et en effet, la jeune femme avait bon goût ! En esquissant un sourire, il trempa une nouvelle fois son doigt dans le chocolat mais cette fois, il avala la mousse d’une traite, sans la barbouiller sur le visage de sa voisine. « Je ferai ma sieste tout seul ! Comme ça j’aurai pas à subir ton feuilleton ! » ajouta-t-il avant de lui tirer la langue. « Et comme tu te prépareras ton chocolat chaud toute seule ! »

« J’espère bien ! Tu as intérêt de me prendre au mot ! » Pablo venait de lui rappeler qu’elle pouvait compter sur lui quand elle avait besoin de quelque chose, n’importe quoi, et qu’il serait pour elle à toute heure du jour ou de la nuit. Elle le savait déjà, il le lui avait prouvé durant ces quelques mois, mais elle ne voulait pas abuser. La jeune femme avait encore et toujours cette sensation parasite qu’elle ne le méritait pas. Elle n’en abuserait pas, elle n’abuserait pas de sa bonté et de sa volonté de bien faire. Elle se voyait très mal l’appeler en plein milieu de la nuit, même pour elle, ce n’était pas humain. Elle aurait pu le faire à une époque, mais là elle avait décidé de se racheter une conduite parce qu’elle commençait à croire à toutes ces histoires de karma. C’était surement pour cela que toutes les « mauvaises » choses qui lui étaient arrivées ces derniers temps lui étaient arrivées. Bon, elle trouvait quand même des bon côtés à certaines de ces choses. Mais elle le prendrait au mot quand elle aurait besoin de quelque chose en journée par contre. Comme elle rechignait de plus en plus à sortir de chez elle et faire de trop longs trajets, il pourrait aller lui faire quelques choses, ou promener Walter, le chien qu’il lui avait offert par exemple. Bonnie hocha la tête avec un large sourire pour lui affirmer que ce serait le cas, qu’elle le prendrait au mot.
Ce large sourire était signe que la tension était retombée et que l’atmosphère s’était détendue. C’était vraiment plus agréable d’être entouré de tout un tas d’autres personnes, de manger du chocolat et de pouvoir plaisanter. Une véritable bouffée d’air frais. Ils en avaient tous les deux eu besoin et Bonnie se demandait pourquoi ils n’étaient pas venus ici plus tôt. Tandis que la jeune femme dégustait ses délicieux mets en chocolat, Pablo lui proposa de partir pour de bon l’hôpital pour qu’ils aillent faire quelque chose d’autre. Se changer les idées quoi. Tous les deux. Cette idée la séduit tout de suite, parce que si elle se sentait mieux qu’un peu plus tôt, elle se sentirait encore mieux quand elle serait loin d’ici. Elle détestait les hôpitaux. Le jeune homme lui proposa d’aller voir un film, ou d’aller faire une sieste bien méritée. Ils partageaient souvent des siestes tous les deux, et presque à chaque fois, ils s’endormaient devant les Feux de l’Amour. Bonnie reconnut tout de suite la moquerie de la part du jeune homme. Pour le punir, elle décida d’enclencher une bataille de nourriture en étalant une partie de sa mousse au chocolat sur le visage du latino. C’était de bonne guerre, il l’avait mérité.
L’instant d’après, en réponse tout à fait justifiée à sa déclaration de guerre, Pablo mit une touche de mousse sur le bout de son nez. Elle décida de ne pas risposter, refusant de gâcher quelque chose d’aussi bon. « Je ferai ma sieste tout seul ! Comme ça j’aurai pas à subir ton feuilleton ! » ajouta-t-il avant de lui tirer la langue. « Et comme tu te prépareras ton chocolat chaud toute seule ! » Bonnie ouvrit la bouche, voulant se donner un air choqué. Elle l’avait cherché ! « Très bien ! Je me trouverai un meilleur partenaire de sieste, quelqu’un qui saura apprécier les bonnes choses comme mon feuilleton ! Et qui ne se plaindra pas à tout bout de champ quand je lui demande m’apporter quelque chose. » Elle lui tira la langue à son tour. « Et ce quelqu’un fera des meilleurs chocolats chauds que toi ! » Après cette pique, elle se mit à sourire puis finit sa mousse au chocolat en vitesse. Là, elle se leva d’un bond, entrainant Pablo avec elle vers la sortie. Elle ne savait pas encore ce qu’ils allaient faire mais qu’importe, ce qui comptait à présent était qu’ils sortent d’ici.

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