«La mémoire rend les êtres et les lieux impalpables.»
Columbia University ; dimanche ; 21h
Columbia University. Que dire de cette université ? Une des plus prestigieuses des États-Unis, un endroit reconnu par le monde entier. Mais c'était surtout l'endroit où Guilde avait décroché son diplôme de commerce international et là où il avait vécu de très bons moments. Après une enfance difficile, une adolescence pitoyable, l'entrée à l'université avait fait de lui un vrai homme. Il était assez nostalgique de cette époque...Quand j'pense que je suis marié maintenant ! Toutes ces années me paraissent si lointaines...les cours, les copines, les soirées plus ou moins réussies...il faut bien l'avouer...ça me manque tout ça. Petit moment nostalgique pour le jeune homme. Il s'était senti tellement bien dans cette université, c'était un peu sa seconde maison ; c'était une vraie bouffée d'air frais après ces années d'horreur auprès de sa mère. Il était maintenant 21h15. Sa femme devait l'attendre à la maison mais il n'avait aucune envie de rentrer.
Le dimanche était un jour plutôt calme pour Guilde. Il n'ouvrait généralement pas le bar ; ou alors juste une heure ou deux, quand il nettoyait l'endroit après les soirées arrosées du samedi soir. Aujourd'hui était un peu différent : la veille avait été une soirée très animée, comme tous les samedi soir, et Guilde était retourné au bar vers 16h pour finir de ranger et redémarrer la semaine avec un bar en parfait état. Oui mais voilà, lorsque vers 18h il ferma le cadenas de son lieu de travail, il fut violemment poussé vers Columbia. Ses pieds le guidaient sans qu'il s'en rende compte. Il n'avait absolument pas prévu d'aller là. Puis à 21h un dimanche soir, l'université était fermé aux visiteurs. Il essayait de venir le moins souvent possible ici ; il fallait qu'il arrête de regretter cette époque et profite de sa nouvelle vie ! Pour tout vous dire, Guilde était un peu jaloux, il avait du mal à se défaire de cette époque de sa vie : Ah ! Tous ces étudiants...je les envie ! Ils ne savent pas la chance qu'ils ont d'être là ! Ils pensent que c'est juste un superbe endroit pour faire ses études et décrocher un bon métier au bout, mais honnêtement, c'est beaucoup plus que ça.
Guilde n'avait jamais osé retourné voir ses professeurs ; généralement les anciens élèves venaient pour raconter leur parcours, dire à l'université quel prestigieux job ils avaient obtenus. Oui mais voilà, étant barman Guilde se voyait mal aller se vanter et remercier ses professeurs. Après tout, s'il manquait d'ambition, c'était son problème ! Bref, toujours est-il qu'on était dimanche soir, 21h, et pendant que des familles, des couples, des amis, dinaient joyeusement ensemble, Guilde trainait devant son ancienne université, une cigarette à la main.
Trainant des pieds dans les ruelles mal éclairées de Morningside Heights, Càllypso en vint à se demander ce qu'elle fichait ici. Il n'y avait rien à voir dans cet endroit, ou en tout cas, rien d'intéressant à cette heure de la nuit. En réalité, ce soir, Càlly avait quitté son appart' du Bronx pour aller marcher un peu dans un endroit plus recommandable. Le dimanche était en effet son jour de congé et elle se sentait bien seule à la maison, lorsque John n'était pas là. Elle était toujours un peu triste lorsqu'elle se retrouvait seule le soir. Triste et effrayée aussi. Parce que tout le monde sait qu'elle n'habitait pas vraiment dans un quartier très réputé. Du coup, elle préférait encore quitter son domicile l'espace d'une soirée, et aller se détendre ailleurs. Aujourd'hui, elle s'était rendue à Manhattant, comme à son habitude, mais avait choisi l'Uptown, alors que d'ordinaire, elle préférait fouler les trottoirs du centre de Manhattan. Quoi qu'il en soit, à force de marcher sans vraiment prêter attention à l'endroit où elle se trouvait, Càllypso avait finit par se perdre au milieu d'une petite ruelle. Elle aurait sans doute du paniquer, et chercher à retrouver les avenues bien éclairées, mais en fait, elle se souvenait de cet endroit. C'était la ruelle qu'elle empruntait, chaque matin, pour se rendre à l'Université. Tout cela, quelque années en arrière bien entendu.
La Columbia University. Une université parmi les plus riches et réputées des USA. Des formations bétons pour un avenir brillant. Des études complètes dans chacun des domaine - médecine, psychologie, droit, ...- Càllypso laissa échapper un long soupir. Droit. Combien d'années avait-elle finalement étudié ici ? Deux seulement. Elle avait finit par rencontrer John et avait tout quitté pour lui. Elle ne s'était jamais vraiment demandé si c'était un bon choix ou non. Pour être sincère, c'était une des seules fois de sa vie où elle n'avait pas hésité. Pour une fois, elle ne s'était pas posé les quarante milles questions qui lui venaient toujours en tête lorsqu'elle se devait de faire un choix important. John, elle ressentait quelque chose de tellement fort pour lui, qu'elle avait préféré tout abandonné plutôt que continuer ses études et prendre le risque de le perdre.
Et aujourd'hui elle se revoyait dans les salles de classes. Elle avait du en accumuler des petits boulots pour réussir à entrer à l'Université. Mais Càllypso était tellement passionnée et ambitieuse qu'elle avait finalement réussi. Réussir pour tout lâcher. Elle était bien partie, elle aurait pu devenir une avocate brillante. Si seulement ...
- Guilde ?! Guilde, c'est bien toi ?
Malgré la pénombre - il devait être plus de 21 heures -, Càllypso avait réussi à percevoir les traits d'un jeune homme qu'elle connaissait. Ils s'étaient rencontrés quelques fois, à des stages. Ils travaillaient tout deux dans un bar, et au fond, ça les avait quelque peu rapprochés. Désormais, Càllypso pouvait nettement constater que c'était bien lui. Soulagée, elle s'approcha du jeune homme.
- Et bien, je ne pensais pas te trouver là ? Qu'est-ce que tu faisais ? Ca ne te dérange pas si je te tiens un peu compagnie ?
Soudain Guilde entendu une voix qui l'appelait. Il se retourna et reconnut la jeune femme brune qui s'était approché : Càllypso D. Sullivan. Il lui fit un grand sourire avant de lui répondre :
-Non, ça ne me dérange pas du tout que tu restes, au contraire, ça me fait plaisir de te voir.
Il approcha sa cigarette à ses lèvres et tira une bouffée. Qu'est-ce qu'il faisait ici ? Il se rendait nostalgique. Hé oui, comme quoi, même à 25ans on peut regretter les années passées malgré le fait que l'avenir nous sourit. Tout en marchant et en se dirigeant vers les marches de l'université accompagné de la jolie jeune femme il lui répondit :
- Je traine...je ne sais pas si je te l'avais dis, mais j'ai fais mes études à Columbia. Je suis diplômé de commerce international...oui, oui ne fais pas cette tête ! Je te comprends : un peu étonnant pour un barman.
Guilde connaissait Cally depuis maintenant plusieurs mois et il s'était rapidement senti à l'aise avec elle. Les deux jeunes gens s'entendaient bien et se rendaient fréquemment des services dans leur bar respectif. Pour être plus précis, il l'avait rencontré lors d'un stage à la journée pour apprendre à faire de nouveaux cocktails : c'était la dur loi des bars. Car oui, la concurrence était rude à New-York. Guilde avait tout de suite réussi à se faire une clientèle grâce à l'emplacement stratégique de son bar à Brooklyn et surtout grâce aux bouches à oreilles de ses amis et autres connaissances. Son bar ne respirait pas le luxe, mais ce n'était pas miteux non plus. Il y avait une vrai ambiance new-yorkaise : une déco original, un jukebox, et un barman absolument magnifique chaleureux et accueillant. Bref, une fois près des marches, Guilde proposa à Cally de s'assoir. Certes, ce n'était pas très confortable mais il n'y avait pas de banc à l'horizon. Puis, Guilde avait la fâcheuse habitude de s'assoir sur les marches, se faisant souvent virer par les vigiles ou les concierges. Après avoir un peu fumé, il demanda :
- Et toi ? Qu'est-ce que tu fais là ?
Après tout, il ne connaissait pas si bien cette fille. Certes, il la considérait comme une amie, une toute nouvelle amie dirons-nous. Mais ils n'avaient jamais eu l'occasion de discuter de leur passé, de leur vie "d'avant". Ne voulant pas se montrer impoli, il sortit son paquet de cigarette de sa poche et le tendit vers Càllypso :
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