Depuis un mois que j'étais enfin sorti de cet enfer, je devais apprendre à vivre. Pas "réapprendre" puisque je n'avais jamais connu de vie à l'extérieur. Mais bien apprendre. Et ce n'était pas aussi simple que ce que l'on pourrait le penser. Si on m'avait dit que ce serait aussi difficile, j'y aurais sans doute pensé à deux fois avant de me tirer comme un voleur. D'autant plus que, depuis quelques jours, il me semblait que les choses se dégradaient pas mal. Est-ce que je rêvais ou est-ce que j'étais  vraiment suivis ? C'était l'impression qui était en train de se prendre une place bien sérieuse et toujours plus grande, dans mon esprit. Et qui m'inquiétait plus que de raison, bien sûr. Je ne voulais pas être rattrapé et ramené de force, de là où je venais. Et pire encore, je ne voulais pas être tué. Parce que par peur que je ne divulgue quelques petites choses au sujet de ces activités illicites, il était fort probable que l'on veuille me faire taire à tout jamais. Je ne tenais pourtant pas à révéler quoi que ce soit à la police. Tout ce que je souhaitais désormais, c'était mener une vie la plus simple et la plus normale qui soit. Même si ça risquait d'être assez compliqué vu que je n'étais pas habitué à ça et que je ne réagissais pas bien souvent comme une personne normale. Mais essayer c'était déjà bien me semblait-il ... Alors je continuais d'essayer ! Même si ce jour là encore, j'étais sur le point de faire une véritable crise de panique. Enfin tant que je ne m'en prenais à personne, il me semblait que c'était l'essentiel ! Mais alors que je marchais dans la rue, j'aperçu à deux reprises une personne, le regard fixé sur moi. Finalement persuadé qu'elle était à ma poursuite, je poussai la première porte que j'aperçu et m'engouffrai dans la boutique, sans même chercher à savoir où je venais de mettre les pieds.

realised by morphine.

Je n’aurais peut-être pas dû venir au refuge aujourd’hui. Je m’étais dit qu’il fallait que je m’occupe l’esprit, que je fasse quelque chose plutôt que de rester dans les couloirs de l’hôpital à attendre qu’une greffe puisse se faire pour Madison. L’idée de le revoir dans cet état me terrifiait littéralement, me tordant l’estomac et m’oppressant la poitrine. Mais alors que j’étais ici, à l’accueil du refuge, après avoir nourri et joué avec tous les animaux, mon esprit s’évadait de nouveau. Je revoyais son petit corps frêle allongé sur le sol, le visage à la limite du bleu, sa poitrine ne se soulevant pas, indiquant qu’il ne respirait plus. Je cognais un poids sur la table basse, de tristesse, d’angoisse, de colère aussi. Je détestais Jessica d’avoir gardé le secret sur la naissance de Madison toutes ses années, m’empêchant de profiter de lui, et aussi de me l’avoir dit seulement maintenant, ce qui faisait que je venais tout juste de m’attacher à lui, d’apprendre à le connaître et à lui faire confiance. J’aurais préféré ne pas le connaître, ne jamais savoir qu’il existait et qu’il était mon fils. Deux fois, en peu de temps, j’avais risqué de le perdre. Ce n’était tout simplement pas possible. Rencontrer quelqu’un, l’aimer, pour ensuite le perdre presqu’immédiatement. Non, ce n’était pas possible. Ce n’était pas juste. Je laissais quelques larmes s’échapper pour rouler sur mes joues, et les balayais rapidement en entendant quelqu’un arriver et refermer rapidement la porte derrière lui. Je fronçais des sourcils, avant de me lever. « Bonjour. Je peux vous aider ? » demandais-je à l’homme, avant de le regarder plus en détail. Il était stressé. Pourquoi était-il stressé ? Qu’est-ce qu’il venait faire ici ? Il allait me braquer ? Oui, c’était ça, il avait une arme et allait me braquer. Putain, ils pouvaient pas juste me foutre la paix avec mon argent, je n’étais pas une banque, merde.

J'étais en sueur, essoufflé, échevelé et j'avais le coeur au bord des lèvres. Si la tension qui m'habitait ne redescendait pas très rapidement, je risquais de rendre mon petit déjeuner. Ou de faire un malaise. Ca restait encore à voir. Mais pour sûr, je n'allais pas pouvoir demeurer dans cet état de nerfs, bien longtemps, sans que mon corps ne s'en plaigne franchement. Il fallait que je fasse une pause. Que je puisse m'asseoir quelque part le temps de retrouver mes esprits. Peut-être que ce n'était que pure paranoïa de ma part, que de croire que quelqu'un était à ma poursuite et sur le point d'attenter à ma vie. Sans doute que tout allait très bien en réalité et que je pouvais retourner au dehors sans plus m'inquiéter à propos de choses et d'autres. Cette douloureuse impression d'être poursuivis, n'était peut-être qu'une chimère. Tout allait pour le mieux, dans le meilleur des mondes. Pourquoi en douter ? Ah oui, parce que je n'avais pas le passé le plus simple et le plus clair qu'il soit. Parce que des hommes en voulaient réellement à ma vie, là bas au dehors, quelque part. Parce que tout n'était pas merveilleusement rose et parfait pour moi. Est-ce que ça pourrait un jour s'arranger ? Malheureusement, j'avais quelques doutes à ce sujet. Ma vie ne serait jamais la vie normale et simple d'un new-yorkais sans problème. Il y aurait toujours une épée de Damoclès au dessus de ma tête, toujours prête à me tomber dessus et à foutre en l'air le peu de vie que j'étais en train de me construire. Et ce, avec l'aide incroyable d'Esperanza. Tiens, Esperanza. Si je ne rentrais pas, est-ce qu'elle partirait à ma recherche ? Pourvu que oui. Avant que je ne me fasse tuer, ce serait bien ... Mais en me réfugiant ici, je n'avais pas pensé au fait qu'il pourrait y avoir quelqu'un. Raison pour laquelle je fis un bond au son d'une voix. Je me redressai vivement et posai un regard effrayé sur le type qui me regardait. « Je ... Suis poursuivis. Quelqu'un veut me tuer. » Lâchai-je brutalement, sans me demander si oui ou non c'était la chose à dire ...

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Il fallait vraiment que je me change l’esprit. Si je n’étais pas auprès de mon fils qui attendait une greffe, ce n’était pas pour penser à lui et me faire des flashbacks de lorsque ses poumons l’avaient lâchés. Si c’était pour repenser à ça, le jeu n’en valait pas la chandelle, et autant retourner dans sa chambre d’hôpital. Mais malheureusement, après avoir fait tout ce que j’avais à faire au refuge, je ne pouvais qu’attendre que quelqu’un arrive. Et l’attente … c’était long, il n’y avait pas à dire. Et lorsque le temps était long, les pensées dérivaient. Et malheureusement, mes pensées ne dérivaient pas vers ma magnifique rouquine de petite amie, mais bien vers mon fils, dont je ne connaissais pas encore le sort. Est-ce qu’il allait s’en sortir ? Est-ce qu’il allait avoir une greffe à temps ? Je me moquais maintenant bien éperdument le fait que je souhaitais qu’un autre enfant meure. Oui, peut-être que c’était horrible, mais je m’en moquais. Je voulais que le mien vive, que le mien me revienne. Et si pour cela, il fallait que je souhaite qu’un autre enfant meure pour que le mien puisse avoir ses poumons, qu’il en soit ainsi. Mais mes pensées dérivèrent de nouveau bien rapidement, alors qu’un homme rentrait dans le refuge. Il stressait, il suait, et clairement, je le rejoignais bientôt dans ses états. Il allait me braquer, vider ma caisse, me prendre pour une banque, c’était certain. Et après, il allait me tuer, parce que j’avais vu son visage. Et je ne pourrais jamais retrouver mon fils ! Stressé, je lui demandais si je pouvais l’aider, déglutissant longuement. Et sa réponse ne me rassura finalement pas. Non, il ne voulait pas me tuer. Mais quelqu’un voulait le tuer. Et donc il me tuerait aussi ! Mais qu’est-ce qu’il foutait ici ?! Pourquoi est-ce qu’il me ramenait ses emmerdes ? ! « Okay, on va barricader la porte. » répondais-je d’une voix tremblante, joignant les gestes à mes paroles.

Je ne savais pas ce que je devais faire. Vers qui je devais me tourner. Et ce que je devais dire. Tout ce que je savais, c'était qu'il me fallait fuir au plus vite. M'échapper avant que ces types ne m'attrapent et ne me tue. Bon sang. Je ne m'étais pas enfuis pour être rattrapé aujourd'hui et tué. Si c'était pour ça que j'étais sorti, le jeu n'en valait pas la chandelle ! Peut-être que je devrais juste gentiment me rendre ? Ouais, non, mauvaise idée. J'avais un peu de mal à croire qu'ils seraient assez "sympas" pour me laisser les rejoindre de nouveau, sans me faire payer ma désertion. Bref, tant pis. Je ne comptais pas prendre ce risque. Je culpabilisais juste de mettre Esperanza dans mes histoires et de risquer sa vie également, en plus de la mienne. Et ce jour là, j'étais en train de risquer celle d'un parfait inconnu. Le pauvre, je venais de débarquer comme une furie. Et il semblait effrayé. Ce qui était tout à fait normal compte tenu de mon arrivée vraiment brutale. Il y avait de quoi avoir peur ! Et comme si ce n'était pas encore assez, je lui indiquai la raison de ma présence. A savoir, que j'étais poursuivis par quelqu'un qui souhaitait ma mort. Au moins eut-il un bon réflexe, en décidant de barricader la porte. Moi, beaucoup trop sonné pour réagir tout à fait, je me contentai de m'éloigner de quelques pas pour lui laisser le champ libre jusqu'à la porte. J'étais livide de peur et toujours en sueur. Pas dans mon assiette en clair. Je savais pourtant bien me défendre. Mais s'ils se ramenaient armés et à plusieurs, je ne pouvais évidemment pas faire le poids ! « Oui, bonne idée ... » Parvins-je tout de même à marmonner, tant bien que mal.

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Lorsque l’homme qui venait d’entrer dans le refuge me donna la raison de sa présence, à savoir que des personnes voulaient le tuer, j’étais à deux doigts de suffoquer. Mais pour ma propre survie, il fallait que je l’aide. Parce que s’il se faisait tuer, alors que je serais témoin de ce crime. Et ils me tueraient aussi. Et c’était hors de question ! Il fallait que je revoie mon fils. Et ma Gaya aussi. Je ne pouvais pas les abandonner. Alors que j’étais tout de même à deux doigts d’envoyer un long sms d’adieu à ma petite amie, lui disant à quel point je l’aimais et à quel point j’étais heureux d’avoir partagé ma vie avec elle, j’eus l’idée de barricader la porte. C’était déjà une première chose pour empêcher les tueurs de pénétrer dans le lieu. Et puis, et s’ils étaient des psychopathes qui aimaient tuer les animaux ? Je ne pouvais pas prendre le risque et d’être tué, et qu’ils tuent des animaux sans défense. Ça non, c’était hors de question ! « Vous pourriez m’aider à barricader la porte, peut-être ? » m’agaçais-je auprès de l’homme qui semblait ne rien vouloir faire. C’était lui qui m’avait mis dans cette terrible situation, et en plus il ne faisait rien ! Incroyable ! Je voulais rejoindre mon fils et ma petite amie. J’avais une vie à laquelle je tenais, moi ! Et s’il était suicidaire et ne voulait rien faire pour sa sécurité, grand bien lui fasse. Mais qu’il le fasse ailleurs alors, et ne m’implique pas dans son suicide ! En repensant à Gaya, le cœur battant à l’idée de ne plus la revoir, je me rappelais que sa famille appartenait à la mafia. Peut-être que sa famille pourrait nous aider ? Oui, ce serait une bonne idée. « Et si vous me racontiez ce qui se passe exactement, que je sache à qui on a à faire ? » demandais-je à l’homme.

Si j'étais à bout de souffle, ce n'était pas tout à fait à cause du fait que je venais de courir sur une bonne longueur. Mais bien parce que la panique était en train de me faire suffoquer à moitié. Je n'étais pourtant pas du genre à me laisser déborder par mes émotions. Et certainement pas la peur ! J'étais quand même courageux en toute logique. Puisque, de toute évidence, j'étais habitué à la violence, à la mort et tout ça. Donc forcément, la peur ne faisait plus partie de moi depuis bien longtemps. Enfin, si, ça revenait un minimum depuis que justement j'avais tout arrêté. Parce que j'avais peur d'être retrouvé. Et d'être tué, éventuellement. J'étais par contre bien inconscient du fait que j'étais en train de mettre une autre personne en danger. Un homme qui s'occupait à barricader les lieux. Et pendant qu'il opérait, moi je le regardais faire. Enfin j'étais trop sonné pour réagir tout à fait en réalité. Et il ne se garda pas de me faire une remarque à ce sujet. Je finis donc enfin par réagir et l'aidai à bloquer la porte du mieux possible. J'espérais que ça suffirait. Il le fallait ! Une fois la porte bien fermée, je soupirai doucement en m'adossant au mur, paupières closes. « C'est une longue histoire. Je ne suis pas certain que vous ayez envie de savoir ça ... » Marmonnai-je doucement. Et de toute façon, ça ne serait bein pour personne que ce type apprenne quoi que ce soit de toute cette histoire. Ca risquait surtout de poser énormément de problèmes, à tout le monde. A commencer par lui dans le fond. « Disons simplement qu'ils n'auront aucune pitié à vous tuer également et auront les moyens de faire disparaître toutes les preuves. » Lâchai-je sans une once d'émotion dans la voix.

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Je sentais une peur panique pénétrer tous mes organes, et j’étais bien incapable de trier mes pensées. Pourquoi est-ce que l’homme avait eu l’idée de venir ici ? Pourquoi n’avait-il pas choisi un autre lieu, plutôt que de m’embarquer dans ses problèmes personnels ? Et en plus, il ne faisait rien pour m’aider à barricader la porte ! Je ressemblais à Superman ou quoi ? Je n’étais pas un surhomme, et j’avais besoin d’aider pour nous barricader à l’intérieur du refuge. Il n’y avait pas que sa vie qui était en jeu, est-ce qu’il s’en rendait compte ? Parce que si ces hommes le tuaient, je serais alors témoin d’un meurtre, et ils n’hésiteraient pas à me tuer aussi ! Et au mon Dieu, mes animaux ! S’ils étaient des psychopathes, ils n’auraient aucun problème à tuer des pauvres animaux sans défense ! Après une remarque, l’homme finit enfin par m’aider à barricader la porte. Je lui demandais ensuite de me raconter ce qui se passait exactement, histoire que j’ai une idée précise de ce qui nous attendait. Et sa réponse ne me convint pas du tout. Qu’est-ce qu’il pouvait bien en savoir, d’abord ? Et puis lorsqu’il reprit, disant qu’ils n’auraient aucune pitié à me tuer également, mon sang se figea. Pour une fois que j’aimais la vie que j’avais, que j’étais enfin heureux, il fallait forcément que quelque chose comme ça arrive ! Je m’adossais contre le mur, pas trop loin de lui, avant de reprendre. « Sérieusement, dites-moi ce qui se passe. Je connais des gens … Ils pourront nous aider. Mais il faut que je sache de quoi il s’agit exactement. » reprenais-je en pensant à la famille de Gaya. Surtout qu’ils n’étaient pas des tendres, eux non plus. Je me rappelais de ma réaction en apprenant qu’ils avaient tué, sans aucune hésitation, le kidnappeur de mon fils …