SAMUEL & JAE-LYN

Le sauveur non désiré.

Entendant faiblement l’eau tomber sur le toit de ma caravane, j’ouvris faiblement un œil avant de voir la lumière traverser un peu les rideaux. Soupirant, je déglutis en roulant de l’autre côté du lit avant de bailler et fermer les yeux. Je voulais dormir. Encore. Frissonnant, je soupirais en essayant de ne pas penser au fait que je me gelais les miches et pas qu’un peu. Reniflant longuement, je me levais gardant la couette sur moi avant de regarder autour de moi. Il pleuvait un peu en ce jour de pâques. D’ailleurs, pourquoi ce n’était pas férié ? En France c’était férié. Fronçant les sourcils, je regardais l’heure avant de soupirer encore plus. Il était tôt… Même pas neuf heures du matin. J’avais bossé tard en plus hier au bar. Mais soit, au moins ça me permettait d’avoir des sous en plus de côté. Peut-être qu’un jour je pourrais quitter ce foutu terrain immonde et cette caravane. Enfin, au moins j’avais un « toit » ou dormir. C’était mieux que rien. Je pouvais remercier ma chère et tendre sœur de ne pas avoir vendu ce tas de ferraille… Me levant, je jetais la couverture avant de filer dans la petite cabine de douche. En deux trois mouvements, je me retrouvais nue, prenant alors ma douche à la vitesse éclair. L’eau était tout juste tiède. C’était toujours mieux que froide. Me séchant je regardais mes cheveux rose. Les racines commençaient à se voir, mais ce n’était pas grave. Je n’avais pas de quoi m’acheter une autre couleur de toute façon. Me brossant les dents, je me mis à vagabonder dans mon « luxueux » foyer cherchant des fringues potables à mettre, mais surtout propre. Un collant violet à motif et un t-shirt long ferait l’affaire. Les enfilant tout en me brossant les dents, je finis de faire ma toilette avant de chercher mes chaussures. Trop de vêtements, trop de chaussures pour m’y retrouver. J’avais toujours eu le gout du luxe pour ça. Et même si à présent je manquais d’argent, dès que j’en avais un peu, je claquais tous dans les vêtements de luxe. Un jour, il faudrait sérieusement que je change de mode de vie si je voulais espérer sortir de ce trou à rat. Trouvant mes paires de talons aiguilles, je souris avant de me pencher pour les attraper. Eww. Après trois reprises, je réussis à les attraper sans les faire tomber. Fallait peut-être que je me nourrisse mieux… Je tombais de plus en plus de chose. Bref. Une fois prête je quittais ma « demeure » en direction du centre de Manhattan. Non seulement j’avais faim, mais en plus je devais m’occuper, puisque le lundi je n’avais pas de boulot. Clope allumée, je marchais dans les grandes rues avant de me stopper devant une supérette. Entrant, je pris quelques conneries les mettant dans mon sac l’air de rien avant de filer à la caisse et demander simplement un paquet de cigarette. Payant mon dû l’air de rien, je parti sans souci, ni vu ni connu. Contente de moi, je filais dans les rues New-Yorkaise avant de me stopper devant une boutique de fringue. Wow. Bavant devant la vitrine, il ne me fallut même pas cinq secondes pour être dans la dite boutique. Fouinant dans les allées, je pris plusieurs affaires avant d’aller dans la cabine d’essayage. Enlevant les antivols sans aucun souci, ayant la technique à force. J’enfilais deux collants sous mon propre collant, et mis le reste dans mon sac, ou plus précisément sous la doublure du sac, comme ça, on ne pourrait pas voir que j’avais volé. Gardant tout de même des fringues à ranger, histoire de passer inaperçu, je sorti de la cabine avant de tout ranger et faire le tour encore une fois. Après plusieurs minutes, je marmonnais un faible au revoir et poussa la porte de la boutique pour en sortir, mais à peine sorti dans la rue, le vigile m’attrapa le poignet en me demandant d’ouvrir mon sac. Surprise, j’ouvris mon sac l’air de rien avant qu’il ne me l’arrache des mains  et déchire la doublure pour en sortir les vêtements. Essayant de me défaire de son emprise, je lui donnais des coups de pieds dans les tibias mais rien à faire il ne me lâchait pas, me tirant même vers l’intérieur de la boutique. C’était quoi cette situation à la mords-moi le nœud là ? Fallait que je me dépêtre de ça. Hors de question d’atterrir chez les flics encore une fois. M’agrippant au poteau d’une main, j’allais lutter comme je le pouvais, non sans l’insulter et lui hurler dessus.

Le sauveur non désiré.

Vautré comme un pacha dans le grand canapé de ma luxueuse demeure – comprenez bien l'ironie de mes propos étant donné que je vis dans un appartement à l'isolation douteuse, en plein milieu du Bronx - je m'instruis involontairement devant un documentaire animalier sur la reproduction de l'hippocampe. Pas franchement intéressant comme truc mais il n'y a rien d'autre de bien intéressant à cette heure là. D'ailleurs je ne sais même plus l'heure qu'il est puisque j'ai foutu mon téléphone portable je ne sais où. Si quelqu'un vient à me téléphoner, je devrai arriver à mettre la main sur ce dernier. Bref, un bras derrière la nuque, jambe croisées et télécommande dans l'autre main, je me décide à changer de chaine. C'est un coup à faire des cauchemars avec leur connerie d'hippocampe là. J'appuie sur un bouton totalement au hasard de la télécommande et affiche une mine complètement affligée. L'émission Chasse et Pêche, accompagné de son générique pourri qui est presque aussi chiant que la musique de la Maison des Poupées à Disney Land. Great. A ce rythme là, demain je suis bon pour m'acheter un magnifique ciré jaune et partir à l'aventure sur un bateau en haute mer. Trèves de plaisanteries. Je m'attendais à trouver quoi de mieux qu'un documentaire animalier franchement ? C'est à se demander pourquoi je paye le cable sans déconner. Agacé, je coupe la télévision et sort une cigarette de mon paquet de clope posé sur la table basse. Que faire de cette journée qui s'annonce plus que chiante ? Excellente question. Je n'avais pas spécialement envie de bricoler ma moto au garage de Shelley et je n'avais pas spécialement envie d'aller m'ensevelir sous une montagne de papier à remplir au bar.  A vrai dire j'étais complètement lessivé et pourtant je n'arrivai pas à fermer l'oeil. Putain d'insomnies à la con. Cela faisait deja un petit moment que je subissais ca. Il serait peut-être temps que j'aille consulter. Mon cerveau doit être complètement déréglé à cause de toutes les merdes que j'ai pu fumer. Tirant une nouvelle fois sur ma cigarette, je manque de m'étouffer avec la fumée au moment où mon chat Patapouf me grimpe sur le ventre afin de s'installer confortablement. « Bah vas-y prends tes aises mon gros. » Dis-je avec un sourire en coin avant de secouer légèrement la tête. Soudain mon téléphone portable se met à sonner. Merde, ce con est sous les oreillers, qui eux même se trouvent dans mon dos. Après quelques secondes de recherches, je retrouve enfin l'appareil électronique et fixe l'écran pixelisé. Jackson mon meilleur pote me propose de le rejoindre chez lui afin d'aller ensuite faire un tour de moto. Je ne pouvais pas rêver mieux comme proposition. Levant ma carcasse du canapé, je me dirige vers le frigidère car mon estomac commence sérieusement à crier famine. Manque de pot je n'ai pas fait les courses et je n'ai plus rien à me mettre sous la dent. M'avouant vaincu, je décide alors d'aller prendre une douche afin de me remettre d'aplomb. Comme à mon habitude j'enfile un jean & un t-shirt noir ainsi que ma veste en cuir, puis quitte mon appartement. […] L'avantage de rouler en moto, c'est que l'on se fait moins chier dans les rue de New York. Moi qui suis l'impatience incarnée, je ne perds pas mon temps en attendant bêtement que la voiture de devant avance. Non, je les double tout simplement. Etant à Manhattan, je décide de m'arrêter au Starbucks du coin afin d'aller m'acheter un petit déjeuné. Autant je peux rester sans dormir, mais sans manger certainement pas. Une fois mon estomac remplit, je me dirige vers ma moto qui est garée près du trottoir. C'est alors que je remarque un attroupement de personne près d'une boutique. Etant quelqu'un d'assez curieux, je me rapproche de la foule et constate qu'il y a une sorte d'engueulade. Je me rends rapidement compte que la jeune femme qui hurle comme une échappée d'asile n'est autre que Jae-Lyn, mon employée au bar. Au moins j'étais rassuré : elle n'était pas hystérique qu'avec moi. Elle était tout simplement folle. Je reste bien quelques minutes à observer la scène digne d'une série télévisée avant d'entrer à mon tour dans le magasin. Le vigile affirme que la demoiselle a volé plusieurs vêtements appartenant à la boutique. Encore une qui se croyait dans Gossip Girl ou je ne sais trop quelle série à la con pour adolescente en manque d'attention. J'ai presque envie de rigoler en voyant la tête de Jae-lyn. Les vendeuses paniquées, affirment qu'elles vont téléphoner à la police afin de régler la situation. « Je la connais. » M'exclamais-je. Le personnel me fixa comme si je sortais de la quatrième dimension. « Puisque vous la connaissez vous allez venir avec nous dans le bureau de la direction, nous allons discuter. » M'informe la directrice de la boutique en hochant la tête pour que je les suive. Je lance un regard de coin à Jae-Lyn qui affiche toujours cet air de gamine à qui l'on aurait volé sa poupée Stacy. Bordel j'aurai du fermer ma gueule et rester chez moi en fait.

SAMUEL & JAE-LYN

Le sauveur non désiré.

Il y avait combien de chance pour que ça m’arrive ? Dans les probabilités je dirais une chance sur dix ? Il fallait que cette soit disant chance soit pour moi. Foutu vigile, foutu monde. En France ils étaient tellement moins vigilent, enfin, j’avais rarement volé d’ailleurs en France… Mais ici, c’était tout de même trop règlementaire. Ruminant, j’essayais à tout prix de ne pas paniquer et de gérer la situation. Il fallait tout simplement que je me casse de là. Simplement et purement. Je ne pouvais pas avoir à faire avec la police. Certes j’étais mineur, je ne risquais pas grand-chose, mais j’avais déjà assez de chose dans mon casier judiciaire… J’allais encore me faire engueuler par l’autre gros porc dont j’ai oublié son nom. Tout ce qu’il fait, c’est manger des beignets dégoulinant de chocolat en remplissant son rapport et me donner des coups de dictionnaire dans la tête quand je parlais mal. Maltraitance envers les femmes. Je devrais porter plainte. Mais pour le moment, il ne fallait pas penser à ça, mais plutôt à savoir comment fuir. Un attroupement d’animaux c’était fait autour de nous. Oui animaux. L’espèce humaine n’avait donc que ça à faire que de regarder une jeune fille en train d’essayer d’échapper à un vigile ? L’aide n’existait pas ? Non, pas une seule âme charitable pour m’aider à me sortir de là. M’agrippant un peu plus au fameux poteau, je donnais des coups de pieds, en lui demandant de me lâcher, sinon j’allais porter plainte contre attouchement sexuel, après tout j’étais mineur, alors ça pouvait très bien marcher. Mais bon, les rêves c’est bien beau cinq minutes, pas plus. Voyant des pieds s’approcher de nous, je les fixais alors que le vigile cessa de me tirer comme si j’étais un élastique. « Je la connais. » Cette voix… Manquant de m’étrangler, je manque aussi de tomber alors que l’autre me lâche enfin. Me relevant, je regardais longuement Samuel avant de froncer les sourcils. Il foutait quoi lui ici ? Je voyais assez sa tronche le soir au bar, fallait en plus que je le vois en journée ? Ah… La clarté sur son visage me faisait presque bizarre. « Puisque vous la connaissez, vous allez venir avec nous dans le bureau de la direction, nous allons discuter. » Une seule phrase traversa mon esprit. Je vais le tuer. En boucle, oui, elle se répétait en boucle. Inspirant longuement, je sentis le vigile me pousser pour que je les suive. J’avais réellement des envies de meurtre. Il aurait pu m’attraper par le bras et nous faire courir dans le sens opposé pour fuir. C’était une bonne idée, mais apparemment dans la tête d’un vieux, ça n’a pas fait tilt. Il n’avait surement jamais commis de petit délit dans sa vie. Croisant son regard je le fusillais du regard avant de lui foutre un coup de pied dans le tibia l’air de rien. « Avada Kedavra. » soufflai-je en le regardant longuement. « Je l’aurai vraiment fait si on était dans Harry Potter. » ajoutai-je à voix basse. Entrant dans le bureau de la direction, je soupirais longuement alors qu’elle s’installa tranquillement derrière son bureau. « Installez-vous. » lâcha-t-elle d’un ton sec. Ne bougeant pas d’un pouce je la regardais avec toute la haine du monde dans mes yeux. Mais je voyais bien que si je ne bougeais pas elle allait faire durer le moment. Me décidant j’allais m’assoir sur une chaise en face de son bureau avant de croiser les jambes et les bras l’air de rien, en fixant alors Samuel, que je rêvais d’étrangler ou bien même d’éventrer. Sur tous les êtres humains de la ville, pourquoi lui hein ? « Je pense que vous vous rendez compte de votre acte. Le vol est un délit, et nous devons le rapporter à la police. » souffla-t-elle en me regardant longuement. Parle toujours. « Bah, allez-y. Je suis mineur, ça ajoutera juste un dossier de plus dans mon casier. » soupirai-je en roulant des yeux. « Si ça peut vous faire plaisir, allez-y, prenez votre pied en appelant la police hein. » ajoutai-je en souriant en coin.