EZRA & ARIZONA

Le plafond de sa chambre, toute une histoire … ou pas. Pourtant, elle le fixait depuis plus d’une heure sans même détourner son regard ne serait-ce qu’une seule seconde. Elle savait que le temps s’écoulait de plus en plus lentement au fur et à mesure qu’elle s’impatientait. Ce jour précis l’angoissait comme jamais. C’était encore pire que la veille ou le jour d’un examen qui lui permettrait ou non de passer à l’année supérieure. Son estomac se nouait sans cesse et elle pouvait nettement sentir dans sa poitrine son cœur battre à toute vitesse. L’angoisse refusait de la quitter depuis qu’elle avait ouvert les yeux le matin même et la jeune femme avait bien eu du mal à trouver la force de quitter sa couette ou son lit tout simplement. Elle devenait lourde, du moins dans le bon sens puisqu’il s’agissait de son poids et non pas de son tempérament. Son ventre était de plus en plus rebondit et très vite les vêtements à sa taille avait commencé à manquer. La balance était devenue, en quelques jours, sa pire ennemie et chaque matin pourtant elle montait dessus pour s’assurer que tout allait bien et elle se mettait à déprimer en voyant les chiffres augmenter. C’était une bonne chose, parfaitement bonne, mais ça signifiait également que les douleurs au bas de ses reins allaient s’amplifier de jour en jour.

Cependant, même si elle se traînait plus qu’elle ne marchait – avant tout par fainéantise pour l’instant – Arizona gardait le moral et ne laissait rien paraître. Elle continuait d’être en période d’essai et rien, pas même sa grossesse, n’allait l’obliger à baisser les bras et prendre des congés. La jeune femme ne supportait pas le fait qu’on la prenne en pitié ou qu’on s’inquiète un peu trop pour elle si bien qu’elle ne comptait pas se plaindre de quoi que ce soit et elle allait faire son travail comme n’importe quelle personne en s’énervant sur celui ou celle qui serait un peu trop prévenant avec elle à son goût. Finalement, peut-être était-elle un peu lourde au niveau de son caractère aussi. Arizona n’était pas d’une humeur exécrable, mais ça n’était jamais loin et ce sans doute parce qu’elle avait dû mal à dormir la nuit ne parvenant pas à trouver une position convenable pour se laisser aller dans les bras de Morphée. Ses heures au Lenox Hill ne l’aidaient pas plus, mais une fois de plus la jeune résidente ne disait rien et évitait de se plaindre, bien trop heureuse de pouvoir à nouveau exercer même si elle avait sans cesse quelqu’un sur le dos pour s’assurer qu’elle ne ferait aucune erreur à cause de son amnésie partielle. Un soupire lui échappa, mais ses yeux restèrent posés sur le plafond de sa chambre. Arizona ne voulait pas risquer de croiser le cadran de son réveil et ainsi voir que le temps passait lentement et que jamais ce rendez-vous n’allait arriver et surtout se terminer.

Une de ses mains alla se poser sur son ventre déjà bien rebondi qu’elle caressa avec son pouce par un pur réflexe qui eut tout de même le don de la calmer elle-même. N’ayant pas réellement pris le temps d’aller faire les magasins pour refaire sa garde de robes, Arizona avait eu bien du mal à trouver des vêtements assez amples pour pouvoir les mettre et au vue de la chaleur qui régnait en ce mois d’août sur New York, elle était bien heureuse d’avoir tout de même mis la main sur une petite robe qui cachait ses rondeurs et qui était assez légère pour la supporter avec cette chaleur. Spartiates aux pieds, elle se trouvait depuis une heure allongée sur son lit de la sorte et une nouvelle bonne heure s’écoula avant que son portable se mette à sonner, signal pour lui annoncer qu’elle pouvait d’ores et déjà quitter l’appartement pour se rendre à l’hôpital pour son rendez-vous. Pourtant, elle n’aurait peut-être pas dû angoisser autant pour une simple visite de formalité – même si c’était bien plus à ses yeux. Elle n’y allait pas seule puisqu’Ezra avait accepté de l’accompagner pour cette échographie, mais c’était tout de même un moment qu’elle appréhendait, craignant d’entendre le médecin lui annoncer que quelque chose n’allait pas avec son bébé voire même avec elle.

Doucement, la jeune femme se redressa sur son lit et prit le temps de s’étirer avant de se lever lentement pour éviter de se donner le tournis. Sac à main sur l’épaule, portable et clés à la main, Arizona quitta les lieux plus stressée que jamais et se rendit au Lenox Hill pour cet examen qui l’angoissait tellement. Profitant du fait d’être une employée de l’hôpital, elle n’eut pas à tourner en rond sur le parking public de l’hôpital et se gara à sa place habituelle avant d’être prise d’un moment d’hésitation au cours duquel elle pensa à faire demi-tour aussi vite que possible, mais la jeune résidente n’en fit rien et sortit de l’habitacle de son véhicule de façon déterminée. A l’extérieur le soleil tapait et laissait une chaleur pensante envahir la ville. Sa peau, déjà bien halée, lui donnait par moment l’impression de brûler lorsque les rayons venaient la frapper et ce fut pour cette raison qu’arrivée devant l’entrée de l’hôpital, elle chercha un coin à l’ombre pour attendre Ezra sans que son angoisse ne diminue pour autant. Pourtant, ce n’était rien de bien méchant et surtout elle allait apprendre le sexe de l’enfant qu’elle allait mettre au monde, mais elle ne pouvait pas s’empêcher d’angoisser au point de faire les cents pas devant les portes automatiques qui s’ouvrirent à chacun de ses passages tandis qu’elle soupirait à plusieurs reprises en jouant nerveusement avec son téléphone.

Elle continuait de faire les cents pas devant l’entrée de l’hôpital plus stressée que jamais. Pourtant ce lieu était celui qu’elle connaissait sans doute le mieux à New York. C’était ici qu’elle se rendait pratiquement tous les jours pour travailler. Elle connaissait chacun des couloirs de chaque étage par cœur pour les avoir parcouru plusieurs fois au cours de ses années d’études afin de trouver un titulaire ou un résident pour une raison x ou y. Aujourd’hui, c’était elle que certains internes venaient chercher, mais le plus souvent elle se trouvait à l’étage de pédiatrie, là où se trouvait le titulaire de la spécialité qu’elle avait choisi. Le choix n’avait pas été tellement difficile pour elle. Elle avait toujours été proche des enfants et avait toujours eu un don avec eux. Elle les adorait et ces petits bouts le lui rendaient plutôt bien. Même s’il était parfois difficile de devoir voir des êtres aussi fragiles partir si précipitamment, elle aimait ce qu’elle faisait, elle aimait le fait de savoir qu’elle pouvait sauver certains de ces enfants et apaiser les souffrances des autres. Elle pouvait rassurer ou consoler les parents de ses patients et aux yeux de la jeune femme ça n’avait pas de prix. Pourtant, pendant un long moment elle avait hésité entre la pédiatrie et à la cardiologie, l’une comme l’autre de ces deux spécialités lui ouvraient de grandes portes, mais elle avait fait son choix et elle ne le regrettait toujours pas. Ainsi, même si l’hôpital était de loin l’endroit qu’elle connaissait le mieux et le lieu où elle se sentait le plus en sécurité, aujourd’hui la jeune femme n’arrivait pas à le voir comme tel. Ce n’était pas pour un patient qu’elle était ici, mais bien pour elle ce qui changeait toute la donne. Elle avait beau travailler en ces lieux, elle n’aimait pas passer des examens même si elle savait qu’elle n’avait rien à craindre, c’était ainsi. Arizona savait d’où lui venait ce blocage, elle savait que c’était le fait d’avoir été au chevet de sa mère jusqu’à la fin qui la poussait à ne pas aimer le fait de se rendre ici pour elle.

Seulement, la jeune femme n’avait pas le choix, les échographies allaient être de plus en plus régulières et elle allait devoir se retrouver ici à de nombreuses reprises pour s’assurer que le bébé allait bien. Néanmoins, Arizona était incapable de parvenir à se calmer, aucun des encourages qu’elle se donna par la pensée ne parvenaient à la calmer, vraiment aucun et son estomac ne cessait de se nouer douloureusement. Finalement, la jeune femme cessa de faire les cents pas après s’être rendu compte que les allers et retours en plein soleil lui donnaient plus chaud que ça ne pouvait déjà être le cas et Arizona alla s’adosser à un mur à l’ombre toujours près de l’entrée dans l’attente de l’arrivée d’Ezra. Leur relation prenait une tournure inattendue depuis qu’elle était sortie du coma. Elle ne parvenait pas à les qualifier de couple puisque ce n’était pas le cas, mais le fait qu’ils prennent leur temps pour parvenir à une relation stable lui plaisait. Elle avait encore bien du mal à passer à autre chose même si ses proches l’y aidaient au mieux, mais ce n’était pas facile pas après ce qu’elle avait traversé. Toutefois, Ezra avait toujours été là pour elle et ce malgré le fait qu’il eut été marié. Il était l’un de ses plus proches amis, une personne en qui elle avait toute confiance et c’était le plus naturellement du monde qu’elle avait pensé à lui pour l’accompagner à cette échographie, un peu comme si elle souhaitait souder un peu plus leur lien. Seulement, il était en retard et parti comme ça, Arizona sentait qu’elle allait finir par la passer toute seule et elle ne put s’empêcher de soupirer lorsque son regard se posa sur sa montre et qu’elle remarqua à quel point le temps s’écoulait rapidement. « Ari ! Je … Je suis désolé ! J’ai été de garde toute la nuit, je me suis effondré dès que j’ai eu un moment ! Tu vas bien ? ». La jeune femme ne se tourna non pas vers le parking du Lenox Hill, mais bien vers l’entrée de l’hôpital, sourcils froncés pour démontrer sa surprise jusqu’à ce que le jeune homme en vienne à lui donner une explication.

« Je meurs de chaud, mais ça va … au moins j’ai pas une tête de zombie contrairement à certain. ». Un petit sourire amusé étira les lèvres de la jeune femme qui croisa les bras contre sa poitrine sans le quitter des yeux, sourire qui redoubla lorsqu’il déposa un baiser juste au coin de ses lèvres. « On y va ? On va être en retard pas ma faute et tu vas finir par louper ton rendez-vous ! ». Arizona acquiesça d’un bref mouvement de la tête et passa devant le jeune homme pour entrer dans le hall de l’hôpital et se sentit sur un petit nuage en sentant l’air frai l’envelopper, un sacré contraste avec l’extérieur qui allait probablement le rendre malade, mais tant pis c’était bien trop agréable. « T’inquiète pas pour ça, Hazel sait que quand il s’agit d’un rendez-vous pour ma petite personne je ne suis jamais à l’heure. ». Sur ces mots elle s’engouffra dans l’ascenseur et attendit qu’il soit monté dedans pour appuyer sur le bouton le menant à l’étage de pédiatrie. Le couloir était quasiment désert et les quelques têtes que la jeune femme put croiser elle les salua d’un large sourire sans pour autant trop tarder, tous les deux étaient déjà assez en retard même si, comme elle s’en doutait, Hazel les attendait patiemment dans son bureau. « Je vais faire sorte qu’on intègre un réveil à ton biper si tu continues … Salut Ezra ! Maintenant toi, tu t’assois-là et tu bouges plus. ». C’était Hazel ou la pile électrique du service de pédiatrie. Toutefois, Arizona ne chercha même pas à prononcer le moindre mot et elle se contenta d’exécuter les ordres de la jeune femme et prit place sur le sofa de consultation tandis que son amie et collègue s’empressait de la rejoindre, de soulever son haut et d’y mettre du gel qui provoqua un frisson chez Arizona. « T’es prête à voir ce qui loge sous ton nombril ? ». La jeune femme leva les yeux vers Hazel et lui répondit simplement en bougeant la tête. Prête, elle ignorait si elle l’était, mais en tout cas elle était impatiente et effrayée, c’était certain.

Ses parents avaient eu toute une petite tribu qui se portait plutôt bien et elle n’avait jamais pensé une seule seconde que son bonheur pourrait lui filer entre les doigts. Pourtant, ce fut le cas et Arizona se souvenait parfaitement de la dépression qui l’avait rongé par la suite. Cette fausse couche l’avait assommé et elle avait tellement craint de passer à nouveau par-là que l’idée même d’avoir des enfants l’avait effrayé lorsqu’elle s’était stabilisée avec Wyatt. Néanmoins, aujourd’hui tout semblait se passer pour le mieux même si elle avait passé trois mois dans le coma et que l’hôpital avait eu tout le temps et les moyens de s’assurer de la bonne santé du bébé et de la mère, seulement l’angoisse ne disparaissait pas elle. Cet enfant qu’elle portait, elle s’était demandé si elle serait capable de le garder, de l’élever alors que son père n’était plus de ce monde. Arizona s’était pendant longtemps posée la question de ce qu’elle voulait faire ou non et aujourd’hui elle en était venue à la conclusion que cet enfant elle devait le garder. Il n’avait pas demandé à naître sans père, il n’avait rien demandé à la vie et c’était déjà son rôle de s’assurer que tout se passerait bien pour lui … ou pour elle. Cette échographie allait enfin la fixer sur le sexe de l’enfant qu’elle portait car impatiente comme elle pouvait l’être, elle se savait incapable d’attendre la naissance du bébé pour savoir si elle allait élever un petit garçon ou une petite fille.

Ce fut d’ailleurs cette impatience combinée à l’attente de l’arrivée d’Ezra qui l’avait poussé à faire les cents pas puis à trouver n’importe quel moyen de s’occuper jusqu’à ce que le jeune homme arrive. « Tu n’as pas une tête de déterrée ? La blague oui ma belle, tu as la tête d’une maman qui va voir son bébé et qui appréhende, alors laisse-moi te dire que si tu as une tête pas très fraiche ! Mais tu es belle quand même ! ». Arizona leva les yeux au ciel sans pour autant parvenir à faire disparaitre le petit sourire de satisfaction qui étirait le coin de ses lèvres. Elle voulait bien le croire qu’elle devait faire peur à voir. Plus temps passait et moins elle parvenait à dormir la nuit et pourtant la fatigue elle la sentait dans chaque parcelle de son corps sans pour autant parvenir à trouver le sommeil. Son compliment lui fit chaud au cœur. Ils avaient toujours été proches, c’était indéniable mais depuis qu’ils s’étaient ouverts l’un à l’autre, ils l’étaient d’autant plus sans pour autant se qualifier de couple. Silencieux, ils prirent tous les deux l’ascenseur tandis que l’angoisse de la demoiselle ne cessait de se multiplier. « Détends toi Ari, profites de voir ton bébé, après il faudra qu’on parle. ». Aussitôt, Arizona se tourna vers lui, sourcils froncés et légèrement inquiète. S’il voulait qu’elle se détende ce genre de phrase n’était pas vraiment celle à prononcer. « Rien de grave ne t’inquiètes pas, mais trop long pour t’en parler maintenant, on serait beaucoup trop en retard si je le faisais même si Hazel à l’habitude avec toi. ».

Ses yeux se plissèrent, démontrant qu’elle était d’autant plus intriguée, mais alors qu’elle s’apprêtait à ouvrir la bouche, la porte de l’ascenseur s’ouvrit sur l’étage où ils devaient se rendre et elle n’eut d’autre choix que de se rendre à son rendez-vous sans parvenir à en savoir plus sur ce qu’Ezra semblait vouloir lui faire part. « A la vue de ta tête, tu n’as pas l’air d’avoir beaucoup dormi depuis la grosse intervention de cette nuit toi ! Mais c’est bien que tu sois là, une future maman a toujours besoin du soutien d’un ami dans ce moment-là ! ». Un ami … à l’évocation de ce mot, Arizona ne put s’empêcher de sourire sans même se préoccuper de l’intervention qui semblait avoir demandé pas mal de temps la veille. De toute manière, depuis son réveil du coma et sa période d’essai, elle avait l’habitude de ne plus être appelée la nuit et de faire moins de gardes de nuit … si ce n’était pas aucune d’ailleurs. L’excitation d’Ezra vis-à-vis de l’échographie la fit d’autant plus sourire même si elle-même ne parvenait pas à faire taire son angoisse. Incapable de voir quoi que ce soit à cause d’Ezra qui se trouvait devant l’écran, Arizona tenta tant bien que mal de se pencher sur le côté, mais remarquant que c’était peine perdue, elle se contenta de reprendre place tranquillement sur le fauteuil. « Je ne vais pas te gêner plus longtemps ne t’inquiètes pas je retourne m’asseoir auprès de la maman ! ». Sentant sa main dans celle d’Ezra, Arizona ne put s’empêcher de la serrer avec un minimum de force en se mordant la lèvre inférieure.

L’impatience s’emparait de plus en plus d’elle au point qu’elle fut surprise de ne pas se mettre à taper du pied. Toutefois, voir Ezra à ses côtés fermer les yeux fut loin de la rassurer et elle serra d’autant plus sa main pour faire taire son angoisse. « Et bien ma belle tout va pour le mieux ! Mais… Mais rien de grave, enfin un petit imprévu… Il n’y a pas un bébé mais deux et deux dans la même poche ! ». Arizona resta bouche bée tandis que son regard se posait immédiatement sur l’écran qu’Hazel venait de tourner vers elle. Etant résidente en pédiatrie et à quatre mois de grossesse, elle n’eut aucune difficulté à voir ce dont sa collègue venait de lui parler et eut beaucoup de mal à y croire malgré tout. « Sérieux ? Des jumeaux ? ». Hazel acquiesça tandis qu’un sourire ravi étirait ses lèvres et rapprocha un peu plus l’écran afin de montrer un détail en particulier à la future mère. « Et comme tu peux le voir ce sont deux petits garçons. ». Arizona n’en croyait pas ses yeux et sa bouche refusait de se refermer. Son regard, elle n’arrivait pas à le décrocher de l’écran tandis que sa vision se brouillait à cause de larmes qui la gagnaient. Tout allait bien … cette fois-ci elle ne courait aucun risque et ses bébés étaient en parfaite santé …. Ses bébés, elle avait encore bien du mal à réaliser. Un sanglot de joie secoua la jeune femme qui usa de sa main valide pour effacer ses larmes aussi vite que possible sans lâcher la main d’Ezra.

« Hazel t'es vraiment sûr de toi ? Il y a bien deux bébés ? Des jumeaux, des vrais ? ». Arizona ne put s’empêcher de détourner son regard de ses deux bébés pour le poser sur Ezra, les sourcils quelque peu froncés. L’entendre parler ainsi et voir son visage blêmir lui donnait la sensation qu’il n’était pas plus heureux que ça à l’idée qu’elle ait des jumeau tandis qu’elle … et bien elle était plus heureuse que jamais. Pourtant, dès son réveil du coma ça n’avait pas été gagné puisqu’elle avait eu bien du mal à accepter sa grossesse de trois mois. Elle n’avait pas pu profiter de la joie de l’apprendre et de voir son ventre prendre des formes petit à petit – même si elle se réjouissait de ne pas avoir eu énormément de nausées matinales. La jeune femme avait dû se faire à l’idée qu’elle allait avoir ce bébé qu’elle le veuille ou non et il avait été très difficile pour elle de se faire à cette idée alors qu’elle avait appris dans la foulée la mort du père. Cependant, avec le temps et plusieurs évènements, Arizona avait fini par se convaincre qu’en plus de vouloir aller au terme de cette grossesse, cet enfant elle allait l’élever même si elle devait être seule ce qui ne serait jamais le cas, pas avec une famille comme la sienne et pas avec ses proches. Néanmoins, aujourd’hui elle apprenait que ce n’était non pas un bébé, mais bien deux qu’elle allait devoir élever et pour l’instant la jeune femme était bien trop heureuse de cette nouvelle pour se mettre à paniquer, ce qu’Ezra semblait déjà faire pour elle.

« Et ben dis donc t'es un ami rassurant toi ! Tu paniques plus que la future maman elle-même ! C'est pas toi qui va les élever ces deux petits bouts alors reste calme Ez', t'es aussi blanc qu'un cachet d'aspirine ! ». Les deux jeunes femmes échangèrent un sourire entendu lorsqu’Arizona détourna son regard vers Hazel puis vers l’image de ses deux petits garçons qui continuaient de grandir paisiblement sous son nombril et qui, même aussi petits, éveillaient en elle une énorme bouffée d’amour. « Tu paniques pas toi ? Ça ne te fait pas peur de voir arriver deux minis toi en même temps ? ». Son regard se posa à nouveau sur Ezra et un large sourire étira ses lèvres, un sourire à la fois joyeux et que la jeune femme voulait rassurant. Arizona effectua une légère pression sur la main du jeune homme pour tenter de le calmer avant de lui répondre. « Je te rappelle que des jumeaux ce n’est pas ce qui manque dans ma famille. Je ne serais jamais vraiment toute seule, j’ai toute une tribu derrière moi. ». Et c’était peu dire, d’autant plus qu’elle n’était pas la première qui allait mettre au monde non pas un, mais deux enfants. Charlotte avait eu deux petits garçons sept ans plus tôt et elle s’en sortait plutôt bien et ce malgré la mort de son mari. « J'ai bientôt fini Ari ne t'inquiètes pas, je prends juste les dernières mesures... Voilà qui est fait ! Tes deux bébés vont très bien, ils grossissent bien, tout est parfait, continue ainsi et surtout attention, maintenant que tu as repris le boulot, il faut y aller doucement ! ». Arizona ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel. C’était le genre de chose qu’elle n’aimait pas entendre depuis qu’elle avait repris le travail.

Personne n’avait à s’inquiéter pour elle selon la jeune femme d’autant plus que le chef de l’hôpital avait catégoriquement refusé qu’elle fasse ne serait-ce qu’une garde de nuit si bien que même pour les urgences en pleine nuit la jeune femme ne voyait pas son biper s’allumer et restait chez elle bien incapable de dormir. Toutefois, Arizona ne fit aucune remarque et se contenta d’acquiescer sachant pertinemment que maintenant il n’y avait plus qu’elle mais bien deux autres petites vies qui avaient besoin qu’elle soit sérieuse et qu’elle fasse attention. « Bon allez moi je passe à côté, je vous laisse, vous connaissez la sortie hein, je suis désolée mais avec votre retard je n'ai pas beaucoup de temps pour papoter avec vous j'ai une autre consultation juste à côté dans deux minutes et moi j'ai la réputation d'être ponctuelle ! ». La jeune femme adressa un sourire à Hazel pour lui faire comprendre qu’elle pouvait filer et termina d’essuyer son ventre avant de se mettre debout dans la salle posant son regard sur Ezra bien qu’elle ne prononça aucun mot lorsqu’elle se souvint qu’il avait quelque chose d’important à lui dire. Ce fut donc en silence qu’elle quitta la salle et rejoignit l’ascenseur pour finir en quelques minutes à l’extérieur de l’hôpital. Arizona s’arrêta à quelques pas de l’entrée et se tourna pour faire face au jeune homme, bras croisés contre la poitrine et le regard sérieux. « Je t’écoute … tu voulais me dire quelque chose tout à l’heure, non ? ». Elle ne parvenait pas à faire taire l’angoisse qui l’avait envahi dans l’ascenseur lorsqu’il lui avait annoncé avec sérieux le fait qu’ils devaient parler tous les deux. Ayant parfois tendance à voir le mal partout, Arizona ne pouvait pas s’empêcher d’avoir l’impression que ce qu’Ezra avait à lui dire n’allait pas lui faire plaisir, mais vraiment pas.

Être froide avec lui était la dernière chose qu’elle souhaitait. Depuis des années il faisait partie de ces personnes qui l’aidaient à tenir, de ces personnes en qui elle avait toute confiance et qu’elle aurait aimé être capable de protéger de tout. Toutefois, elle avait un mauvais pressentiment qui lui retournait l’estomac et même si elle n’avait rien dit, sa réaction que très peu joyeuse à l’annonce de la présence de jumeaux en elle l’avait quelque peu blessée. Mais, aussi fière qu’elle pouvait être, l’australienne ne lui en tenait pas rigueur et elle parvenait parfaitement à comprendre ce qui avait pu pousser l’américain à être aussi perturbé par cette nouvelle. Il avait perdu sa femme et surtout il avait perdu sa fille, s’attacher à nouveau à quelqu’un sans être sûr de ne pas perdre cette ou ces personnes n’était pas une chose aisée et c’était bien la raison pour laquelle Arizona avait préféré ne rien dire malgré le fait qu’elle soit devenue plus distante une fois dans l’ascenseur. Néanmoins, lorsqu’Ezra s’approcha doucement d’elle, la jeune femme ne fit pas le moindre mouvement. Elle leva la tête vers lui et ancra son regard dans celui du jeune homme en silence et le laissa approcher d’elle bénissant le fait qu’ils ne soient que tous les deux dans l’ascenseur.

Ses mains posées sur son visage, Arizona lui adressa un petit sourire sans ouvrir la bouche, sans prononcer le moindre mot et elle ferma les yeux en sentant les lèvres du jeune homme se poser sur son front, un geste affectueux qui parvenait bien souvent à la détendre et à l’aider à ne plus autant angoisser. « Je suis désolé pour ma réaction déjà. Tu sais que je suis là pour te soutenir, mais là il me faut un peu de temps pour réussir à me calmer, un bébé c’est déjà beaucoup à s’occuper alors deux… En plus… ». Arizona lui adressa un deuxième sourire pour lui faire comprendre qu’elle ne lui en voulait pas pour sa réaction, mais à l’entendre arrêter sa phrase au beau milieu de celle-ci, ses sourcils se froncèrent. Elle n’aimait jamais quand ce genre de situation se produisait, c’était bien trop souvent le signe que ce qui allait suivre n’allait que très peu lui plaire. Cependant, l’australienne se passa de faire le moindre commentaire et resta attentive aux paroles du jeune homme, son regard toujours accroché à celui d’Ezra. Malheureusement, les mots restèrent en suspend lorsque l’ascenseur arriva au rez-de-chaussée et que les deux jeunes gens – en plus d’être forcés de se séparer – durent quitter les lieux et gagner l’extérieur de l’hôpital en se comportant comme deux amis, manège auquel ils étaient forcés de jouer pour l’instant.

Une fois dehors, la jeune femme se tourna à nouveau vers l’américain et le regarda de sorte à lui faire comprendre qu’il pouvait désormais continuer sur sa lancée, ce qu’il ne tarda pas à faire. « Ce que j’ai à te dire c’est que les jumeaux me font d’autant plus peur que si on parvient à se mettre vraiment ensemble, on ne sera pas quatre mais cinq… Pas d’enfant caché, pas de mauvaises blagues, pas de chien, chat ou poisson rouge juste Zara-Lynn… ». Les mots restèrent coincés dans la gorge de l’australienne. Ses sourcils se froncèrent et Arizona tenta de deviner par elle-même où il voulait en venir. Aux dernières nouvelles, Ezra n’avait aucune idée de l’endroit où se trouvait sa fille puisque Liana avait pris la fuite avec cette dernière tout en faisant en sorte que le père de l’enfant ne parvienne pas à les retrouver malgré tous ses efforts. « Liana est de retour, je l’ai croisé l’autre jour, je ne compte pas la laisser repartir de sitôt, je passerais avec elle tout le temps qu’il faut pour qu’elle me dise où est ma fille, pour que je la vois mais surtout pour que je la récupère… ». Voilà … à présent elle avait sa réponse et Arizona ne savait pas réellement comment prendre la nouvelle du retour de Liana.

Évidemment, elle voyait en elle une rivale, surtout dernièrement, mais d’un autre côté c’était une grande opportunité pour Ezra. Le jeune homme tenait à retrouver sa fille plus que tout, ce qu’elle comprenait parfaitement mais même si elle était heureuse qu’il ait enfin une chance de retrouver Zara-Lynn, l’angoisse à l’idée qu’il passe du temps avec la mère de cette dernière ne voulait pas diminuer. « Je ne retournerais pas avec elle sache le, même si il n’y a rien de concret entre nous je tiens vraiment à toi et je te le montrerais bien plus si j’en avais l’occasion ce que je n’ai pas encore eu pour le moment puisqu’on a le don de se retrouver que dans des endroits publics… ». C’était à croire qu’Ezra lisait dans ses pensées. Un faible sourire étira légèrement le coin de ses lèvres sans qu’elle ne puisse contenir le soupire qui lui échappa bien vite. Arizona pinça nerveusement ses lèvres et dévia son regard quelques instants afin de tenter de ne pas paniquer pour rien. Finalement, la jeune femme passa une main sur son visage et croisa de nouveau le regard de l’américain. Son silence n’allait en rien l’aider à savoir ce qu’elle pensait si bien qu’elle soupira, prête à prendre la parole.

« C’est une bonne chose qu’elle soit revenue si ça te permets de retrouver ta fille. Je sais que j’angoisse pour rien, je suis désolée mais je n’aime pas tellement le fait de la savoir en ville malgré tout. ». Arizona grimaça. Autant aller sur la voie de la franchise, mentir ne lui servirait à rien et surtout elle était persuadée qu’Ezra le devinerait rien que par les manies que l’australienne pouvait avoir et qui la trahissaient sans cesse. Néanmoins, elle lui adressa un nouveau sourire et attrapa discrètement sa main, tant pis si quelqu’un les voyait. « Mais je te fais confiance c’est juste en elle que je n’ai pas confiance … en elle et en ses intentions. ». Arizona baissa les yeux peu fière de son aveu. Au départ elle n’avait rien eu contre Liana, mais plus les années étaient passées, plus elle s’était rapprochée d’Ezra et moins elle avait pu supporter l’ex-femme du jeune homme. Son regard dévia rapidement sur la montre à son poignet et voyant l’heure affichée sur cette dernière, les sourcils de la jeune femme se froncèrent tandis qu’elle se rappelait subitement du rendez-vous qu’elle avait avec sa sœur Charlotte. « Écoute … on en parlera plus tard, ce n’est pas que je ne considère pas ça comme important, mais ma sœur m’attend depuis une demi-heure. Mais dès que j’ai un moment de libre je passerais chez toi, promis. » affirma-t-elle en lui adressant un dernier sourire juste avant de se mettre sur la pointe des pieds et de déposer un baiser au coin de ses lèvres. Un dernier regard vers celui du jeune homme, un dernier sourire et Arizona se précipita en direction de sa voiture – non sans encore un regard vers Ezra qu’elle salua de la main – et une fois au volant de son véhicule elle quitta l’enceinte du Lenox Hill en espérant que sa sœur n’aurait pas remarqué son retard … elle pouvait toujours rêver.