J'ignorais total ment la raison de sa venue ici, surtout sans animal et dans cet état et évidemment, ça ne me donnait aucun bon pressentiment. J'avais beau réfléchir à ces nuits passés à ses côtés, il n'y avait vraiment rien qui puisse l'amener à moi aujourd'hui. Nous nous étions quitter en bon terme, je ne lui avais jamais rien promis et quand bien même, réagir après 8 ans était un peu tard. Par chance, Xinthia suivait au moins mon conseil et s'installait sur la chaise d'Inès, il ne manquait plus que celle-ci débarque - pourquoi pas accompagnée de Nahla - pour que cette journée soit un échec total. La jeune femme me signalais que je ne pouvais pas l'aider, mentionnant une Savy dont j'ignorais tout, ce qui me rendait d'autant plus perplexe. Je ne pensais pas connaître une seule personne prénommée ainsi, elle s'était trompée de porte, ce qui me donnait bien envie de l'inciter à partir puisque comme elle le disait si bien : je ne pouvais rien faire pour elle. J'avais mine de rien assez de coeur - de compassion peut-être? - pour ne pas la mettre à la porte aussi radicalement dans l'état dans lequel elle se trouvait. Je m'apprêtais déjà à me placer à nouveau derrière mon bureau jusqu'à ce qu'elle me dise enfin ce qui l'amenait ici mais ses paroles finissaient par me déstabiliser. Un deuxième bébé? De quoi elle parlait? Je l'observais sans ne rien y comprendre, elle avait maintenant tout intérêt à venir au fond de sa pensée, car elle ne quitterait pas ce bureau sans une explication plausible. Et celle qu'elle me fournissait ne l'était pas, pas à mes yeux, même si elle suffisait à me faire perdre pieds. C'était impossible, ce n'était pas le genre de révélation qui tombait après sept ans. « Tu délires complètement, t'as bu combien de bouteilles? » Je ne comprenais pas et ne voulait surtout pas le faire, pas si ce qu'elle disait était vrai. Je voulais qu'elle se relève et éclate de rire, qu'elle se moque de la tête que je devais avoir à présent en admettant qu'il s'agissait d'une vaste blague. Malheureusement ce rire n'arrivait pas, ni même un mot de plu de sa part. Je finissais par me poser à côté d'elle, assis sur le bord du bureau, incapable de réagir plus. J'aurais voulu la relever, la consoler, essaye de comprendre, mais j'étais paralysé, tétanisé à l'idée qu'elle puisse me balancer la vérité. Après un moment de silence, quelques secondes, des minutes peut-être, je finissais par reprendre mes esprits, laissant place à la colère. Pour qui elle se prenait pour débarquer sans prévenir, pour me balancer toutes ces conneries? « Regarde moi et dis-moi qu'il n'y a pas un seul mot de vrai dans tout ça... » Je parlais entre mes dents, tentant de garder mon calme, mais c'était plus fort que moi. « Regarde moi et admets le! Si c'est un de tes petits jeux, arrêtes ça tout de suite... ça fait 8 ans, tu n'as pas le droit de débarquer ici pour me balancer tes conneries. T'as trouvé personne à qui les raconter, tu t'es dit que je ferais une bonne poire? » Je l'observais, dégouté qu'elle puisse en arriver là. Pourquoi moi? Au fond de moi, je savais pourtant parfaitement qu'elle ne mentait pas. Je ne la connaissais pas par coeur, je ne pouvais même pas dire que je la connaissais bien, j'ignorais tout d'elle, de sa vie actuelle mais de je-ne-sais quelle manière, je savais qu'elle ne mentait pas, alors que j'aurais tout donné pour que ce soit le cas. Il y a moins d'une semaine, j'avais une vie parfaite mais chaque jour qui passait arrivait avec une nouvelle prête à ruiner celle-ci un peu plus, qu'est ce qui arriverait demain? Qu'est ce qui pouvait être pire que ça? Je lui en voulais terriblement, je la maudissais pour m'avoir caché cette vérité. Cette envie de lui hurler dessus, de comprendre pourquoi elle avait choisi de ne rien me dire me démangeait, mais ce n'était pas pour ça qu'elle était là. Xinthia avait peut-être juste besoin de mon soutient, mais je ne voyais pas comment je pouvais le lui apporter après cette révélation, concernant une histoire dont j'ignorais tout. « Qu'est ce que t'es venue faire ici? Pourquoi me balancer tout ça maintenant? Maintenant que je ne peux plus rien faire pour elle ou pour toi ! C'est une envie passagère de ruiner ma vie? Ou tu réalises soudainement que c'est le genre de truc qu'on ne garde pas pour soit? » Je ne cherchais pas à m’apitoyer sur mon sort, pas si comme elle le prétendait une petite fille, la mienne, était décédée. J'essayais juste d'assimiler la nouvelle, de comprendre mais c'était beaucoup trop à la fois.

« Tu délires complètement, t'as bu combien de bouteilles? » Arquant un sourcil, je secoua légèrement la tête de droite à gauche. Juste une demi bouteille. Cinquante centilitres d'alcool m'avait suffit pour être fin morte, pour divaguer totalement et c'était là qu'on voyait que je n'avais pas eu le même train de vie que tous les jeunes de mon âge. À vingt quatre ans, les trois quart de mes confrères faisaient la fête tous les soirs, buvaient jusqu'à pas d'heure alors que moi, je me couchais plus ou moins tôt, avec Savannah – par le passé – ou avec un film. Je n'avais rien connu de la vie estudiantine, des soirées jusque pas d'heure puisque j'avais accouché lors de ma première année d'étude. Je ne regrettais pas ma grossesse – je n'avais d'ailleurs pas été au courant de cette dernière – mais je devais avouer que j'avais un goût amer en bouche lorsque je voyais mes amis revenir de fêtes démentiels. Avec le temps, l'envie de sortir s'était estompée et ma fille prenait tout mon temps. Ma princesse, mon bijou avait occupé mes nuits et mes journées. Qu'est-ce qu'elle me manquait et venir tout balancer à la figure du jeune homme était la seule solution que j'avais trouvé. Je ne voulais pas lui faire du mal ni ruiner sa vie – comme il venait de le dire – mais je voulais qu'il sache. Qu'il sache qu'il avait eu une petite fille, une petite princesse qui avait été heureuse, tellement heureuse mais que je n'avais pas su protéger de sa famille, malgré un changement d'identité à sa naissance. Savannah ne s'était jamais appelée Tchekov-Sgarsgard mais Doe. C'était un nom commun et j'avais du changer de nom sous la contrainte paternelle. Il avait essayé de nous protéger mais n'y était pas parvenu. Je regardais devant moi, attrapant mes genoux entre mes bras, assise sur le sol. J'avais l'air d'un zombie, d'un fantôme et la colère de Roméo en m'atteignait pas. J'étais mal pour deux, pour dix et rien de ce qu'il pouvait dire ne m'atteignait, absolument rien. Il voulait me faire du mal, il pouvait toujours tenter mais ses chances de réussite était proche de zéro. Perdre un enfant était la pire des souffrances et il ne pouvait pas me faire sentir plus mal, c'était impossible. Lui annoncer tout cela lui faisait un sacré choc et je pouvais le concevoir mais je ne pouvais plus porter ce secret bien longtemps. Sans compter qu'il y avait une chance sur deux pour que l'une de mes amie au courant de l'histoire – enfin que Roméo était le père – gaffe lors d'une discussion. Peu de monde connaissait l'identité du père de Savannah et j'avais essayé de nous protéger en ne disant rien. Je ne voulais pas d'un homme qui était là par obligations, c'était la pire des choses. Levant les yeux vers le jeune homme, je commença légèrement à me balancer, comme si on me berçait. « Tu sais, il y a une chose qui na pas changé en sept ans, la colère et la haine, ça ne marche pas avec moi. Je peux avoir de l'eau s'il te plait ? » Je le regardais avec un léger sourire et les yeux plein de larmes. Ma bouche était sèche, j'avais envie de vomir et ce n'était pas en restant assise sur le sol à fixer le poster du chien devant moi que tout allait s'arranger. Il voulait des explications, il allait en avoir mais après une bonne gorgée d'eau. Étrangement, ce que j'avais bu d'alcool avait rapidement eu un effet sur mon cerveau mais j'avais l'impression de décuver à vitesse grand V. Bien entendu, si je me levais, il y avait une chance sur deux pour que je tombe mais tout de même.. Attrapant la bouteille d'eau qu'il me tendit, je l'ouvris et bu quelques gorgées – soit la moitié de la bouteille – et continua de me balancer légèrement d'avant en arrière tout en regardant devant moi ; je ne voulais pas croiser son regard, en aucun cas. Soufflant légèrement, je commença « Ta vie n'est pas gâchée et ne pourra jamais l'être comme l'est la mienne à ce moment précis. Tu pourras rencontrer des problèmes sentimentaux, des problèmes financiers mais tu ne ressentiras jamais ce que je ressens Roméo, jamais » Je posais les bases, j'étais claire et nette là dessus. Ce que j'étais entrain de ressentir, le fait que mon cœur se tordait de douleur à chaque fois que je pensais à Savannah, il ne pourrait jamais le ressentir. « Il y a sept ans de cela, quand je suis entrée en première année de médecine, j'ai accouché d'une petite fille, ta fille. J'ai coupé les ponts directement parce que je ne voulais pas d'un homme qui ne m'aimait pas. Il faut dire ce qui est, on s'entendait bien mais c'est tout. Un jour, j'ai eu mal au ventre et Savannah est arrivée en deux heures. Déni de grossesse, j'ai pas pris un gramme. Bref, elle est morte en juin, elle a été assassinée » Une larme coula le long de ma joue. J'avais retrouvé ma fille, morte et presque vidée de son sang dans les bois après avoir reçu un message étrange. J'en étais encore traumatisée. Levant les yeux vers le beau brun, je dis « Je ne veux rien de toi Roméo, absolument rien. J'arrive sept ans trop tard mais tu as le droit de savoir. Ça ne t'enchante pas, je m'en doute mais je ne pouvais pas garder ce secret plus longtemps. Ça me ronge de l'intérieur, surtout depuis sa mort » Je quittais le jeune brun du regard et regarda droit en face de moi. Nous avions une fille ensemble, une vraie petite merveille qui était partie bien trop tôt.

Avant Nahla, Roméo avait forcément enchainé plusieurs petites amies, certaines filles qu'il ne pouvait même pas qualifier comme telles. Il avait profiter de sa jeunesse et des joies d'être étudiants dans une ville comme New York tout naturellement mais jamais sans être inconscients. Le jeune homme se protégeait toujours et n'était pas un connard qui ne voyait en certaines femmes que la possibilité de les ramener dans son lit. C'est bien comme cela que ça se terminait, mais il essayait de rester respectueux au maximum, aussi respectueux qu'on puisse l'être dans ces moments, mais après tout, elles le désiraient autant que lui. Il avait du foirer quelque chose avec Xinthia, il ne lui avait du moins pas aspirer assez confiance pour qu'elle ne lui apprenne qu'il était père. C'était le genre de chose qui le révoltait, cette petite fille était à 50% sienne, avait son sang qui coulait dans ses veines et sous prétexte qu'elle l'avait portée, Xinthia s'était accordé le droit de la privée de son père et inversement. Ce n'était même pas la pire part dans ce qu'elle lui apprenait, ce qui lui interdisait complètement de s'énerver sur elle alors qu'il en mourrait d'envie. Lorsqu'elle lui dit dans un sourire que la colère ne marchait pas sur elle, celle-ci redoublait, son sang ne fit qu'un tour mais une nouvelle fois, il arrivait à conserver son calme pour lui tendre dans un silence de marbre l'eau qu'elle lui demandait. « Excuse moi d'être énervé, vraiment... » marmonnait-il malgré tout en levant les yeux au ciel. Elle lui annonçait après sept ans qu'il était papa, comment était-il censé réagir? Avec un large sourire comme si cette révélation n'avait aucune importance? C'était assez naïf de sa part de penser qu'il puisse bien le prendre. La situation faisait qu'il arrivait à garder son calme, parce qu'elle semblait au plus mal et qu'il ne voulait pas l'enfoncer plus, mais dans un autre cas, il n'aurait pas hésité. « Peut-être bien que je ne pourrai jamais comprendre Xinthia... J'aurais pu si tu avais jugé bon de me mettre au courant il y a 8 ans, mais effectivement là ça va être difficile... » Son temps était parfaitement naturel, il savait que s'énerver n'arrangerait rien. Elle avait raison sur un point, il ne ressentirait jamais ce qu'elle ressentait parce que quoi qu'elle fasse, jamais il ne pourrait connaître sa chair et son sang, sa petite fille. « Tu n'avais pas le droit de décider pour moi Xinthia... Tu te rends compte à quel point tu as pu être égoïste? Pas qu'envers moi mais envers elle aussi. J'aurais pu être dans sa vie sans forcément être dans la tienne, du moins pas à temps plein, je ne l'aurais pas laissée tomber... Je suis sure que tu le sais, c'est d'ailleurs pour ça que tu as évité de me le dire. » Forcément s'il avait choisi d'élever sa fille, Xinthia et lui auraient été en contact mais ça ne les obligeaient pas à se marier. Elle aurait eut un père qui ne vivait pas sous le même toit, c'était toujours mieux que pas de père du tout. Roméo avait toujours été quelqu'un de responsable, il ne fallait pas le connaître depuis des années pour le savoir, Xinthia savait parfaitement qu'il aurait tout fait pour être dans la vie de sa fille et c'est surement ce qui l'avait poussée à ne rien dire, ce qui l'agaçait deux fois plus. Le pire était qu'il aurait pu y être entièrement. Il ne pouvait pas dire aujourd'hui que ça aurait marché, il ne le saurait jamais, mais il était certain qu'il ne devait pas être bien difficile de tomber amoureux de la jeune femme. « Tu n'as pas jugé bon de me faire savoir que j'étais papa mais maintenant qu'elle n'est plus là, tu en ressens le besoin... tu te rends compte à quel point c'est contradictoire? Complètement illogique? Parce que crois-moi, c'est avant que j'aurais voulu le savoir... » Il aurait voulu être dans la vie de cette petite fille et non pas l'homme qui irait sur sa tombe sans même savoir ce que c'était de recevoir un sourire de sa part. Roméo finissait par pousser un long soupire avant de se laisser glisser à côté d'elle. Passant un bras autour de ses épaules pour l’amener contre lui, il caressait doucement son bras comme si ce geste pouvait l'apaiser, ce qui n'était surement pas le cas. Il ignorait complètement ce qu'elle ressentait actuellement, comme elle lui avait si bien fait remarqué, mais il ne pouvait pas la laisser dans cet état sans réagir. Après tout elle n'était plus une de ses ex conquêtes mais la mère de sa petite fille, qui demandait un peu de soutient alors qu'elle n'avait rien demandé en 8 ans. « Quand tu te sentiras prête, j'aimerais voir quelques photos d'elle... » soufflait-il, tout en la gardant contre lui. Il tenait à voir à quoi elle ressemblait, si elle tenait quelque chose de lui ou si au contraire elle était le portrait craché de sa mère, mais le jeune vétérinaire savait à quel point cela devait être douloureux pour elle. Il ne savait même pas comment il réagirait s'il arrivait quelque chose à Lucas alors qu'il n'était pas son fils, il ne voulait donc pas la brusquer.

Je ne pouvais pas en vouloir à Roméo d'être en colère, je ne pouvais pas lui en vouloir de me détester et de m'en vouloir. Tout cela était plus que normal mais c'était surtout vain. Je ne regrettais rien, je ne regrettais en aucun cas mes actes. Savannah n'avait jamais trop compris pourquoi elle n'avait pas de papa comme les autres mais elle avait toujours eu deux figures masculines dans sa vie qui avaient été là pour remplacer le père qu'elle n'avait jamais eu. Bien entendu, j'avais été égoïste mais il n'avait pas toutes les données de l'équation en main. Cela me faisait doucement rire de l'entendre me dire que j'étais égoïste. Il ne s'était donc jamais posé aucune question à cette époque ? Il ne s'était jamais demandé pourquoi, du jour au lendemain, j'avais renvoyé tous ses appels sur la messagerie, pourquoi je ne fréquentais plus les lieux où il y avait une chance de le croiser ? Roméo et moi n'avions pas eu une histoire digne de ce nom mais nous nous étions bien entendu aussi bien moralement que physiquement. Seulement à l'époque, je n'étais qu'une gamine de dix huit ans, qui couchais à droite à gauche pour tenter d'oublier le grand méchant loup qu'elle aimait plus que tout. Mon amour inconditionnel pour Ezra m'avait fait faire des choses dont je n'étais pas franchement fière. J'avais été jusque lui faire des menaces et pire encore, j'avais tenté de le faire chanter, du haut de mes dix huit ans. Je n'étais pas très fière de toute cette époque et Savannah avait été ma bouffée d'oxygène, la petite princesse qui m'avait sorti de ce merdier, de cette spirale infernale. Écoutant Roméo, je soufflais. Bien sûre que j'avais été égoïste, je l'avais gardé pour moi et alors ? Il y avait tellement qu'il ne savait pas et je lui avais peut être rendu service en ne l'incluant pas dans la vie de Savannah, dans notre vie. « Je peux t'assurer que même si tu me trouves égoïste et tout ce qui va avec, j'ai agis en connaissance de cause. Tu ne sais rien Roméo, tu ne sais pas ce que j'ai enduré les premières années de sa vie. Mes parents m'ont renié, ils ne m'ont plus adressé la parole à partir du moment où j'ai accouché. Pour eux, un enfant hors mariage c'était une abomination et mon père voulait te forcer à m'épouser. Je l'entends encore hurler 'tu te marieras avec ce malfrat, avec cet incompétent !'. Je ne voulais pas de ça, toi non plus, sans compter qu'il m'a forcé à changer de noms. Pendant huit ans, je ne me suis même pas appeler Tchekov-Skarsgard. T'en aurais voulu de cette vie toi ? Franchement, même moi j'en voulais pas » Je ne voulais pas de cette vie pourrie, de cette vie boiteuse et pourtant, je n'avais pas eu le choix. J'avais été lancée dans cette drôle de vie sans que l'on me demande mon avis. Du jour au lendemain, je m'étais retrouvée à la rue, devant habiter chez mon frère qui passait plus que temps à sortir qu'autre chose. J'avais eu une drôle de vie quand on y pensait et même si Roméo était plein de reproches, je savais qu'un jour ou l'autre, il finirait par comprendre que mon égoïsme était aussi bien pour la protéger que lui aussi. Quand je voyais ce qui c'était passé il y a quelques mois de cela avec Savannah, je me demandais bien ce que ces hommes auraient pu me faire ou aux personnes autour de moi. Savannah avait été la plus faible, la plus jeune et la plus naïve. Elle avait du se faire mener en bateau en moins de temps qu'il en faut pour dire ouf. Moi qui lui avait toujours appris à ne pas faire confiance aux inconnus, je me demandais si les personnes qui lui avaient fait du mal n'étaient pas des têtes connues... J'écoutais les paroles du jeune homme et ne savais plus quoi penser. Bien entendu que c'était avant que j'aurai du lui en parler mais nous étions si bien que rajouter une constante dans l'équation ne m'avait jamais réellement traversé l'esprit. « Elle a jamais demandé son père. Sa meilleure copine n'avait pas de papa non plus alors pour elle, c'était presque normal. Tu ne le vois pas comme ça et ne le verras jamais comme ça mais quand ta vie change du jour au lendemain, tu sais pas quoi faire. T'es perdues, tu patauges et tu repousses tout au lendemain. On était bien à deux » dis-je, dans un souffle qui puait la vodka. Me laissant faire, je me retrouva dans les bras du jeune homme et grimaça légèrement. Pourquoi avais-je réagi ainsi à l'époque ? J'avais cru bien faire, j'avais aimé ma vie comme elle avait été mais là, je commençais légèrement à douter. Attrapant rapidement mon sac à main, je sortis un petit carnet rose et lui tendis. « Il y en a là dedans mais ne compte pas sur moi pour les commenter. Il y en a une par mois depuis sa naissance jusqu'à ses deux ans et après, c'est les grandes occasions ; notre voyage à Paris, Disneyland, avec mon frère, son parrain et sa marraine etc. Je n'arrive pas à les regarder sans péter un plomb et je ne pense pas que tu ais envie de te retrouver avec un cabinet détruit du sol au plafond » J'étais plutôt nerveuse et destructrice quand j'allais mal. Il n'y avait qu'à voir où j'avais passé mon mois de juillet et d'août. Posant ma main tremblante sur le carnet, je le regarda droit dans les yeux et dis « Tu rentres dans mon intimité là et ne rigoles pas si tu me vois en pyjama hello kitty, je nous avais acheté les mêmes pour rire » Un sourire se dessina sur mes lèvres et, tout aussi rapidement, une douleur intime me fit grimacer. Qu'est-ce que j'avais mal au cœur de ne plus avoir aucun moment avec elle, absolument aucun... C'était horrible, je périssais à petit feu, comme neige au soleil.

Plus je l'écoutais, moins je comprenais sa réaction. J'avais l'impression que cette conversation n'avait pas lieu d'être, en tout cas qu'elle ne nous mènerait nul part puisque l'un comme l'autre allions rester sur nos positions. Quoi qu'elle dise pour justifier son choix, je savais que je ne comprendrais pas, je ne vouais pas le faire, parce qu'elle m'avait privé de ma fille pendant huit ans. Certes je ne la connaissais pas et quelqu'un qui vous est inconnu ne peut forcément pas vous manquer, mais c'était ma chair et je ne savais rien d'elle. J'imaginais ce qu'aurait été ma vie si elle me l'avait dit, mais c'était assez compliqué, puisque la venue d'un enfant changeait tout. Peut-être qu'elle m'avait simplifié les choses en me laissant l'opportunité de vivre ma jeunesse mais au fond je savais que j'aurais préféré me prive de tout ça et être dans sa vie. Je n'avais plus grand monde aujourd'hui, petit à petit Nahla me filait entre les doigts et Lucas prendrait évidemment le même chemin. Je l'avais aimé et élevé comme mon propre fils mais le fait est qu'il ne l'était pas, que son père était quelque part dans New York prêt à tout me faire perdre tout ce à quoi je tenais. Savannah n'était plus de son monde, mais les choses n'auraient peut-être pas pris ce tournant si j'avais été dans sa vie, chose que ni Xinthia ni moi ne pourrions prouver et savoir. « Tout ce que je peux te dire c'est que j'aurais tout fait pour être dans sa vie, même si ça voulait dire devoir t'épouser. Tu le dis toi même qu'ils t'ont reniée quand elle est née, tu m'aurais au moins eut moi ! » Si ses parents l'avait abandonnée, en quoi son père pouvait-il la forcer à se marier? « Cette conversation ne sert à rien, parce que quoi que tu dises, quoi que tu penses, j'aurais voulu savoir et être dans sa vie et toi comme moi, on ne peut pas retourner en arrière, autant arrêter d'argumenter tout de suite... » J'étais énervé, profondément en colère contre elle et le fait d'en discuter en faisait qu'accroitre ce sentiment, raison pour laquelle je préférais ne plus entendre une seule justification de sa part. Peu importe ce qui l'avait poussé à faire ce choix, le fait est qu'elle l'avait et que rien ni personne ne pourrait y changer quoi que ce soit. Mes reproches y compris, le silence était donc la solution. Ou presque. Je grimaçais lorsqu'elle concluait par "on était bien à deux". Le fait qu'elles soient bien ne lui donnait pas le droit de nous priver l'un de l'autre, je n'étais pas un enfoiré, ce n'est pas comme si je lui aurais pris son bébé... Mais à nouveau j'en revenais au même point, au fait que je n'acceptais pas ce choix. Je me contentais de pousser un long soupire, prenant sur moi pour ne rien ajouter. Le fait qu'elle me parle de tout ce qu'elles avaient pu faire ensembles était pire, je n'avais pas le moindre souvenir avec elle, pas même idée d'à quoi elle ressemblait, c'était égoïste. Impensable. « Je me promène avec une cape pour ressembler à un super héros, je ne vais pas me moquer de ton pyjama Hello Kitty... » Je grimaçais de plus belle, pensant à cette fille que je n'aurais jamais et ce petit garçon qui finirait par oublier tout ce qu'on avait vécut ensembles au profit des souvenirs qu'il allait se créer avec son père, biologique. Serrant la mâchoire, je finissais par ouvrir le carnet qu'elle venait de me tendre pour découvrir les premières photos de ma fille, si minuscule qu'on aurait peur de la casser. Je m'attardais sur chaque photo, essayant de lui trouver une quelconque ressemble avec moi mais elle ressemblait à un bébé, comme tous les bébés, quoi qu'en dise les gens " oh il te ressemble tellement " c'était faux. Ses traits se formaient au fur et à mesure que je tournais les pages, je me disais qu'elle avait exactement la même bouche que moi, mais c'était sans doute mon subconscient qui m'envoyait cette information tant je l’espérais. Glissant mon doigt sur une photo, je parvenais à avoir un léger sourire mais finissais par refermer le carnet, voyant bien que Xinthia n'avait pas envie de voir toutes ces photos pour l'instant. « C'est un double? Enfin je veux dire je peux le garder ou tu en as besoin? Si pas juste quelques jours, je regarderai ça seul si ça te va... » J'avais envie de dire que je me moquais complètement de son accord, elle m'avait privé d'elle des années, j'étais au moins en droit de voir quelques photos d'elle mais quoi qu'elle aie fait, mon but n'était pas de la blesser. « Tes soucis à toi se sont arrangés? Le changement de nom, ton père... » Je préférais changer complètement de sujet pour en revenir à son explication assez louche mais elle paraissait sincère et ma curiosité me poussait à vouloir en savoir plus.