Finalement, le pire était arrivé : Quinn avait perdu son travail. La brunette ne savait pas au juste comment Andrew s’était démerdé pour obtenir satisfaction, mais elle n’avait même pas pu retourner à son travail le lendemain. Sur le moment, cela ne lui était pas apparut comme catastrophique : son cœur se languissait de ce dîner qu’allait lui offrir Léo et elle se sentait plus impatiente à chaque heure qui passait. Mais hélas, il décommanda rapidement pour mieux reporter, reporter et reporter encore. Le palpitant de Quinn se serait à chaque nouveau report, et comme si ce n’était pas suffisant, son propriétaire ne manqua pas de la flanquer à la porte pour non paiement de loyer. A force de jongler entre factures d’hôpital et règlement de son loyer, la jeune femme s’était rapidement trouvée étranglée et sans le sou. Par chance, ce soir là, elle avait pu obtenir un asile chez Lynn, après avoir déposé son petit bout chez Caine en bénissant le fait que son coéquipier en soit complètement gaga. Quinn n’avait pas le choix… il lui fallait une importante somme d’argent pour se remettre à flot et retrouver un appartement qui ne serait pas insalubre, et le seul moyen d’y arriver sans travail… c’était de faire cette chose qui avait provoqué une telle colère chez Léo lorsqu’elle l’avait évoquée. Par chance, Lynn accepta de lui prêter une robe extrêmement fendue sur le côté, qui moulait très agréablement ses magnifiques attributs tandis qu’elle lui avait fait une coiffure et un maquillage ne faisant que l’embellir. La jeune femme était plus provocatrice qu’elle ne l’avait jamais été, certes, mais en attendant, à peine eut-elle mis un pied à ce gala où Lynn l’avait fait rentrer que de nombreux regards se tournaient vers elle. Une bonne partie de la soirée durant, la brunette papillonna d’homme fortuné en homme fortuné, dansant avec souplesse et grâce, attirant l’attention sans être collante… jusqu’à ferrer LE poisson. Celui-ci lui offrit une coupe de champagne et dès lors, bien qu’elle se dégoûtait déjà de renier ses principes ainsi que ses sentiments pour le capitaine de son cœur, elle sut que ce serait l’homme capable de la sortir de la merde… « Une belle plante comme vous ne devrait pas être seule… ni boire seule. Champagne ? » « Mais je ne suis point seule puisque vous venez d’être le chevalier servant me sauvant de ma solitude… » Quinn esquissa un léger clin d’œil tandis que son interlocuteur l’embarquait, une main sur son fessier musclé, vers la sortie de la soirée. La brunette avait l’impression que sa nausée allait tout gâcher, mais elle était à des lieues d’imaginer la suite de cette détestable soirée…

Quinn était dans la merde. C’était un fait endémique mais croiser le regard du capitaine de son cœur alors qu’elle s’apprêtait à partir en « galante compagnie » tout en se dégoûtant au passage manqua de lui provoquer un haut le cœur d’anthologie. La brunette se racla violemment la gorge alors qu’elle était pétrifiée face à Léo, d’un charisme à couper le souffle dans un smoking dont le prix devait très nettement dépasser son salaire mensuel. Sans doute le fait de lire tant de déception dans le fond de son regard, en plus de la froideur qu’il était en train de lui offrir, acheva de la mettre dans ses petits souliers… mais Quinn n’avait pas le choix. Avec la meilleure volonté du monde, il lui fallait une importante somme d’argent très vite ou elle serait condamnée à la banqueroute… et à vivre à la rue avec son petit garçon de trois mois à peine. « Sans vouloir vous offenser Monsieur vous n’avez aucun ordre à me donner puisque je ne suis plus votre subordonnée ! » rétorqua-t-elle avec autant de self control qu’elle put afin de ne surtout pas se donner en spectacle en prime. Non, Quinn avait parlé à voix basse, afin qu’il soit le seul à pouvoir l’entendre… sans doute par respect, mais aussi par honte. « Je fais ce que je veux de ma vie désormais et puisque vous n’avez de cesse de décommander le dîner que VOUS m’avez proposé il serait peut-être charitable de votre part que vous me laissiez faire ce qu’il faut pour me sortir de la panade. Vous ne me devez rien mais je ne vous doit rien non plus, Capitaine Weatherfield ! » Quinn tourna les talons, feignant une quelconque colère qu’elle ne ressentait pas le moins du monde pour cacher sa disgrâce. Après tout, s’il la détestait, il arrêterait sûrement de vouloir l’aider non ?

La culpabilité fut telle que Quinn sentit sa nausée prendre un nouvel envol des plus virulents. Pourquoi n’était-elle pas venue lui expliquer ses difficultés ? Parce qu’il n’était pas responsable d’elle, pardi ! Ce n’était même plus une question d’orgueil, mais bien un désir de se prouver à elle-même qu’elle pouvait s’en sortir. Du moins avait-elle tenté de s’en persuader pour finir par un échec plus cuisant encore que tout ce qu’elle avait imaginé jusqu’à lors. Les paroles de Léo enserraient son cœur de puissantes lianes tandis qu’elle se lançait à sa poursuite, refusant de clore cette discussion de cette manière. Elle se saisit de son bras sans violence, bénissant le fait qu’il ne daigne pas encore la regarder dans les yeux pour prendre son courage à deux mains et vider son sac. « Je n’ai jamais dit que vous m’aviez laissée dans la panade… je pensais juste que ce serait plus juste pour vous que vous ne veilliez pas constamment sur moi comme vous le faites. Je ne veux pas être un boulet à votre cheville. Je n’ai expliqué mes problèmes à personne, pas même à Caine alors que ce soir je lui ai confié mon fils ! Mais pour tout dire j’ai dû aller plusieurs fois à l’hôpital et je croule sous les factures, si bien que je n’ai pas pu payer mon loyer à temps et que l’on m’a mise à la porte. J’étais désespérée, sans solution ! Croyez bien que je me dégoûte moi-même de faire ça mais j’ai besoin d’argent et je refuse de risquer la vie de mon petit garçon parce que je n’aurais pas été prête à faire un simple sacrifice ! » Quinn lâcha progressivement le bras du capitaine, sentant ses yeux la brûler face aux larmes qu’elle refusait de laisser couler. Foutue sensibilité exacerbée ! « J’ai confiance en vous. Et ça me tue que votre estime ait baissée à mon sujet et je vous demande pardon mais… je ne suis pas aussi forte que vous et je vous admire pour ça. S’il vous plaît Leonard ne me détestez pas… » Puisqu’ils n’étaient pas en service et qu’elle venait de se livrer à lui, il n’y avait aucune honte à l’appeler par son prénom, n’est-ce pas ?

L’étreinte que lui offrit le capitaine de son cœur fut aussitôt un baume qui calma considérablement sa culpabilité. Quinn s’estimait presque trop chanceuse à cet instant précis car elle savait qu’il n’était pas ainsi avec quelqu’un d’autre, à moins qu’elle n’ait clairement manqué un épisode… autant dire que la jeune femme lui rendit chaque seconde de son étreinte en lui offrant toute la chaleur et la tendresse étant la sienne, comme s’il en avait besoin également de son côté. Pourquoi serait-il le seul à donner dans ce cas là ? « Vous vous rendez compte de tout ce que vous faites pour moi ? Je ne pourrais jamais vous rendre la pareille et ça me désole… » La jeune femme ne le quittait pas des yeux, refusant de se reculer alors que sa chaleur si réconfortante irradiait encore l’intégralité de son corps magnifiquement habillé. Comment voulait-il qu’elle cesse de ressentir d’aussi forts sentiments à son égard ? C’était impossible. Il lui montrait toujours le meilleur de sa personne… « Je vais tâcher de me montrer sous mon meilleur jour devant votre père, je ne vous ferais pas honte vous avez ma parole. Et vous savez que lorsque ma parole est donnée, elle est donnée. Mais vous êtes une merveilleuse personne, Leonard Weatherfield… et pour tout ce que vous faites pour moi je vous promets de ne plus jamais vouloir faire cette bêtise. » Quinn esquissa un faible sourire, se sentant subitement toute chose alors que leur proximité n’était que plus véridique de seconde en seconde. Si elle ne se retenait pas aussi bien, sans doute aurait-elle tenté de l’embrasser… mais elle le respectait bien trop pour le mettre mal à l’aise. « Je ne suis pas mauvaise cuisinière… si notre dîner a été reporté, peut-être pourrais-je cuisiner pour vous ? Ce sera une manière de vous remercier, même si ce n’est pas grand-chose. »

« Vous savez, mon fils est tout pour moi… s’il a tout ce qu’il lui faut je ne peux qu’être heureuse. » Quinn esquissa un sourire plus franc alors qu’elle se surprit à hocher la tête pour lui promettre de venir lui dire la vérité si d’aventure son père se montrait dur avec sa personne. « Vous savez, je connais la solitude mieux que personne et j’ai la tête dure… mais vous avez à nouveau ma parole. » La jeune femme se racla légèrement la gorge avant de ne reculer en même temps que le capitaine de son cœur, cachant habilement sa déception de ne pas pouvoir poursuivre cette étreinte qui aurait pu durer des siècles que cela ne l’aurait pas dérangée. « J’ai confié mon fils à Caine jusqu’à demain après-midi et j’ai une valise dans ma voiture donc non, techniquement parlant je n’ai pas vraiment d’affaires à récupérer. » Il était presque douloureux pour Quinn de ne plus avoir du tout de foyer. C’était comme si ses parents avaient un deuxième accident de voiture et qu’elle en était toujours rescapée, inlassablement. Aussi demeura-t-elle relativement silencieuse jusqu’à parvenir à la maison de Léo, où elle demanda à aller se changer rapidement pour ôter rapidement cette robe qu’elle rendrait à Lyanna demain à la première heure. La brunette voulait oublier toute cette soirée rapidement et ne plus jamais y repenser. Ce n’est qu’une dizaine de minutes plus tard qu’elle réapparut avec un débardeur et un petit short, toujours coiffée avec le goût de sa nouvelle amie ainsi que maquillée mais cela n’avait pas beaucoup d’importance. « Où souhaitez-vous que je m’installe ? Je vais me faire toute petite ne vous inquiétez pas, vous ne me verrez même pas. » Sauf qu’à cet instant précis, un énorme gargouillement sonore se fit entendre et lui arracha un petit rire amusé alors qu’il n’y avait rien de drôle. « Je crois que si vous avez faim je peux nous préparer quelque chose pour deux… ça fait deux jours que je n’ai rien avalé. Heureusement que je n’allaite plus… »

« Votre fils s’appelle Quinn ? » s’étonna la jeune femme en écarquillant deux grands yeux surpris et flattés à la fois. Oh bien sûr, le prénom de son fils n’avait aucun rapport avec le sien mais elle ne pouvait pas s’empêcher d’y voir un signe. C’était affreusement guimauve et elle s’en voulait de penser ainsi alors que si cela se trouvait, Léo ne la supporterait pas plus d’une journée ! « Il a un très joli prénom » s’amusa-t-elle alors qu’elle se dirigeait vers la cuisine, son chef sur les talons. En un rien de temps, elle trouva largement son bonheur en dénichant une planche à découper, un couteau qu’elle aiguisa sur un manche prévu pour avec un coup de main parfaitement manifeste avant de ne sortir une batterie de légumes et crudités en vue de faire une frittata, ou omelettes avec tout ce qu’il y a dans son frigo. Elle commençait son émincé, guidée par sa faim tandis qu’elle repensait à ce petit garçon qu’elle allait souvent voir à l’hôpital et qui la touchait bien au-delà des mots. « Vous savez, lorsque je suis de repos, je vais souvent voir un petit garçon handicapé au Lennox Hill Hospital… en général je le kidnappe de sa chambre et nous rendons ensemble, lui sur mon dos, dans une grande salle où il y a un piano. Il est adorable. Ce qui me désole, c’est qu’il me dise souvent que sa mère ne lui offre jamais de câlins. Du coup, je viens toujours avec des macarons, qui sont ses pâtisseries préférées, je lui offre autant d’étreintes que je peux et je lui apprends le piano. Il est très doué ! Je crois que je me retrouve énormément en lui. » Quinn laissa un air à la fois attendri et triste peupler ses traits durant quelques secondes avant qu’elle ne secoue subitement la tête et ne reprenne une expression plus souriante. « Je devrais pouvoir faire ma frittata toute seule, ne vous inquiétez pas. Je suis habituée à veiller sur mes arrières, vous vous souvenez ? Vous n’arrêtez pas de me le reprocher ! »

« Possible que nous nous emmêlions les pinceaux, même si… si je dois être totalement honnête, je devrais admettre que ce n’est pas une coïncidence si mon fils s’appelle Léo. » Quinn se mordit légèrement la lèvre inférieure sans lever son nez de sa préparation, elle ne souhaitait pas se couper la main parce qu’elle aurait été négligente ou trop distraite pour se concentrer sur l’essentiel. « C’est votre fils ? » s’étrangla-t-elle-même si ça tombait ô combien sous le sens. Et dire que la brunette s’était longuement épanchée sur son amour complexe pour son patron, édulcorant les faits pour que le petit garçon comprenne sans être choqué de ce qu’elle pourrait bien lui dire… « Il me présente comme son amoureuse ? C’est trop mignon ! » s’exclama-t-elle, un sourire éclatant sur les lèvres. Vraiment, Quinn junior l’émouvait bien au-delà de tout ce qu’elle pourrait décrire. « Vous savez, je n’ai pas fait grand-chose. Nous étions à l’hôpital ensemble quand je l’ai rencontré pour la première fois, sa maman venait de le laisser et il était triste alors… j’ai fais l’andouille pour le faire rire. Vous avez un fils extraordinaire, vous savez. Je ne pensais pas que le héros qu’il décrivait comme son papa était vous mais j’aurais dû faire le rapprochement… on se confie beaucoup l’un à l’autre et je sais à quel point ce qui lui est arrivé est tragique. Vous savez qu’il a déjà engueulé un infirmier parce qu’il m’avait mal piquée pour une prise de sang ? En tout cas vous devriez lui faire prendre de vrais cours de piano parce qu’il est vraiment, vraiment doué. » Quinn n’avait pas honte de dire que le petit garçon et elle s’étaient beaucoup confiés l’un à l’autre et beaucoup soutenus. Cela lui semblait… naturel même. « Si vous souhaitez que je ne voie plus votre fils parce que c’est… étrange, dites-le moi. Je n’avais pas l’intention d’être inconvenante. Mais je veux bien du vin pour me remettre de mes émotions, volontiers ! »

« Mais c’est réciproque » avoua Quinn car de toute évidence, elle ne se serait pas rendue aussi souvent à l’hôpital afin de soulager son quotidien si elle ne tenait pas au petit garçon. Il lui rappelait beaucoup de l’enfant qu’elle avait été, à la fois pleine de vie et renfermée à de très nombreux égards. Il lui donnait l’impression de ne pas avoir totalement tout raté au même titre que son propre fils, et ne pas lui offrir tout le bonheur qu’il pouvait bien mériter serait diablement criminel. « Si vous êtes d’accord, je peux en toucher deux mots à mon ancien professeur au conservatoire. Je suis sûre qu’il serait ravi de lui donner des cours plus sérieusement… et de mon côté, je me fais forte d’en toucher deux mots à Quinn. Vous savez, je dois également beaucoup à votre fils. Ce serait mentir que de ne pas le dire. Il m’a offert beaucoup de joie, même quand j’étais triste. Et je suis sûre que le jour de votre anniversaire, il vous a offert un gros câlin, je me trompe ? C’est moi qui lui avais dit de le faire. Mais si vous voulez l’entendre jouer… pourquoi ne le kidnappez-vous pas de sa chambre et ne l’emmenez-vous pas dans la pièce où nous jouons lui et moi ? » Quinn se tourna temporairement pour mettre l’intégralité de ses ingrédients, à savoir les œufs ainsi que son émincé dans la poêle, agitant le tout avec un coup de main plutôt habile. Etrange, pour quelqu’un d’aussi maladroit que Quinn ! « Je ne sais pas, je n’ai jamais été fortunée vous savez. Je n’ai pas eu la vie pour je suppose mais je n’envie aucunement les gens qui ont de l’argent… j’ai plus d’amour à donner que bien des personnes fortunées ! » A la fin de sa cuisson, la jeune femme eut un geste maladroit et un peu d’huile bouillante lui sauta sur le bras. Elle ne poussa pas de hurlement mais arrêta le feu pour éviter toute catastrophe supplémentaire et entoura la blessure d’un torchon propre à proximité. « Vous pouvez me reprocher beaucoup de choses Monsieur mais ne m’insultez pas. J’adore votre fils parce qu’il est délicat, adorable et qu’il me rappelle énormément l’enfant que j’étais… je ne suis pas quelqu’un de sans cœur et encore moins de manipulateur. Je ne risquerais pas de le blesser pour quelque stupide orgueil. » Sans doute avait-elle été piquée au vif par ses paroles… mais Quinn n’était pas comme ça, elle était même tout l’inverse.

Sur le coup, Quinn n’avait pas eu du tout envie de rire et même plutôt envie de hurler tant l’huile bouillante lui sciait littéralement le bras. Cela lui montrait une fois encore qu’elle pouvait être facilement troublée et que sa maladresse se réveillait extrêmement facilement dans ce genre de moment. Effectivement, elle avait mal interprété ses paroles, le prenant personnellement alors qu’il voulait simplement protéger la sensibilité de son fils… sensibilité qu’elle connaissait d’ailleurs suffisamment pour savoir qu’il ne fallait pas jouer avec. « Je suis désolée, c’était stupide de ma part et en plus quand je m’enflamme comme ça, j’en deviens bien trop maladroite, pardonnez-moi » avoua-t-elle non sans grimacer très discrètement pour éviter de ne passer pour quelqu’un de douillet alors que ce n’était pas le cas en général. « Je sais tout à fait ce que vous ressentez pour votre famille puisque je suis mue de la même surprotection envers mon fils. Mais je ne ferais jamais rien qui puisse lui faire du mal, vous pouvez me croire sur parole. Je crois que je préfèrerais me taillader les veines. » Quinn finit par émettre un léger gémissement de douleur mais au lieu de le laisser continuer son massage, elle s’empara de ses mains dans les siennes tandis qu’elle le regardait droit dans les yeux avec un sérieux qui se transforma en un petit rire mutin en l’espace de quelques secondes à peine. « Vous avez eu un gros câlin alors ? Je suis fière de Quinn, il a suivi mon conseil. Mais vous ne me devez rien du tout… je l’ai fais volontiers et j’adore sincèrement votre fils. » Mais cela n’empêcha pas la jeune femme d’oser à son tour une étreinte. Léo n’était peut-être pas l’homme le plus expansif qui soit, mais Quinn avait de l’amour à revendre et elle n’hésita pas à serrer fortement pour lui prodiguer toute sa chaleur. Pourquoi faisait-elle cela ? Mystère et balle de golf… parce qu’elle l’aimait, tout simplement.

« Je sais je suis très tactile, on m’a déjà dit que ça traduisait un manque d’affection… » avoua Quinn car depuis la mort de ses parents on l’avait surtout traitée avec mépris, désintérêt et méchanceté. Elle était en manque cruel d’affection puisqu’elle n’avait personne pour lui en donner et quelque chose lui sifflait que cela n’allait pas s’arranger alors qu’elle sentit le capitaine de son cœur s’écarter d’elle pour faire face à une beauté fatale. Une blonde aux jambes ultra longues, au tailleur manifestement sur mesure et profondément décolleté, sans oublier une coiffure au top et un maquillage ne l’étant pas moins. Quinn se sentit aussitôt inférieure et le regard que lui lança celle qui se présentait comme la femme de Leonard ne fut pas pour la rassurer à ce sujet d’ailleurs. « Bonsoir mademoiselle, vous n’avez pas encore perdu votre langue au point d’en devenir impolie sous mon propre toit, pas vrai ? Je suppose que vous êtes la fliquette qui cherchez à baiser avec mon mari ? Mais je vous détrompe tout de suite, la place est déjà prise et je ne laisse pas ma place à une autre. » La jeune femme manqua de s’étrangler en avalant sa salive tandis qu’elle avait l’impression d’être littéralement nue et vulnérable face à cette plante fatale qui la descendait en flamme. « Quant à toi Leonard, sans vouloir t’offenser tu as annulé toi-même notre divorce alors si, je suis bel et bien ta femme. » Quinn en avait assez entendu. Elle attrapa son sac sans attendre, bien qu’elle en oublia totalement ses chaussures à talons et, alors qu’elle avait la poignée de la porte d’entrée entre les mains, elle ne put s’empêcher une dernière pointe de culot : « Sauf votre respect Madame, je ne cherchais pas à « baiser » avec votre mari, il vaut beaucoup mieux que cela et « faire l’amour » m’aurait suffit. » La brunette quitta immédiatement la maison, se mettant à marcher dans le noir, pieds nus, des larmes coulant sur ses joues même si elle les essuyait au fur et à mesure. Quelle conne. Comment avait-elle pu imaginer rien qu’une seconde qu’il aurait vraiment pu divorcer et qu’ils auraient pu, de leur côté, être heureux ensemble ?

Au départ, Quinn avait eu dans l’idée de trouver un hôtel pour éviter de dormir dans la rue mais avec quel argent aurait-elle payé la note le lendemain ? Elle valait mieux que le fait de partir en catimini avant l’arrivée de la femme de ménage également, du reste… et dieu sait qu’elle avait faim en prime, ce fut sans doute la raison pour laquelle la fatigue pris le dessus sur tous ses principes et autres craintes pour la pousser à s’allonger sur un banc, dans un parc complètement désert, trouvant rapidement un sommeil agité et peuplé de nombreux cauchemars. A vrai dire, la seule chose apaisante qu’elle ressentit fut cette caresse contre sa joue, lui donnant la sensation de rêver alors que cette fois, c’était bien réel. Quinn se releva brusquement après avoir rouvert les yeux, découvrant avec stupeur qu’il s’agissait de Léo et qu’il l’avait donc sûrement cherché dans toute la ville pour mieux lui présenter ses excuses. « C’est ma faute pas la vôtre. Je suis une indécrottable midinette j’en ai peur » avoua-t-elle avec honte tandis que ses pleurs reprenaient, inlassablement, refusant de la laisser en paix. Mais la vérité, c’est qu’elle souffrait… et c’était d’autant plus insupportable en ayant l’impression qu’il ne l’aimerait jamais, que ce ne serait jamais possible entre eux. Cette simple idée la fit entourer ses genoux de ses bras, comme si elle se protégeait de tout ce qui la blessait actuellement. « J’en oublie tout de même que vous êtes un homme marié et un père de famille… vous avez des responsabilités et ils ont besoin d’eux, surtout Quinn. Je ne veux pas devenir une personne injuste et profiteuse… ce n’est pas moi ! Je tiendrais ma promesse et j’irai aider votre père cette semaine mais c’est une torture de rester près de vous en sachant que… tout cet amour que j’ai en moi ne sera jamais réciproque. Je pensais pouvoir être suffisamment forte pour passer outre mais ce n’est pas le cas. Arrêtez de vous préoccuper de mon existence… vous avez déjà fait suffisamment et je sais que je ne pourrai jamais vous rendre la pareille, c’est pourquoi je vais demander mon transfert de service une fois revenue la semaine prochaine. Vous aurez le formulaire adéquat sur votre bureau vous avez ma parole. »

Quinn n’avait jamais été quelqu’un capable de se mettre en avant. C’était au dessus de ses forces et le discours de la femme du capitaine de son cœur n’avait fait que raviver un cruel manque de confiance. Elle hocha négativement la tête sans pouvoir répondre quoi que ce soit, sa voix demeurant étranglée au fond de sa voix. Sa peine était plus forte que jamais et le pire, c’est qu’elle se maudissait au passage juste pour y avoir cru. Ils étaient pourtant bien, tous les deux… si Eloïse n’était pas arrivée pour tout gâcher, sûrement auraient-ils passé une très agréable soirée, à se confier l’un à l’autre de petites choses pour chercher à se connaître, à s’apprivoiser. Quinn n’avait pas senti son patron en croisant le regard de Leonard et en l’écoutant s’exprimer. Elle avait vu un père de famille inquiet pour ses enfants, un homme en peine d’exprimer ses sentiments mais pas un patron… et ce n’était pas non plus un patron qui venait de lui refuser son transfert, lui arrachant de fait un regard surpris et paniqué, parce qu’elle ne comprenait pas la raison d’un tel refus. Quinn allait devoir répliquer quelque chose lorsqu’elle sentit une vague impressionnante de chaleur s’emparer d’elle lorsqu’il caressa doucement sa joue… et qu’il s’empara de ses lèvres. C’était plus intense encore que dans ses rêves les plus audacieux, la jeune femme étant presque tentée de se pincer pour savoir si elle ne rêvait pas. Sans doute eut-elle l’impression d’y aller trop fort en ajoutant une pointe de passion à ce baiser si plein de tendresse… « Je dors encore, c’est ça ? » tenta-t-elle piteusement tandis qu’un petit sourire attendri et touché pointait peu à peu le bout de son nez. « Je… je… je ne veux pas que vous me preniez en pitié, Capitaine. Je suis plus forte que j’en ai l’air et je sais m’occuper de moi vous savez. Mais si c’était sincère… vous êtes marié et je ne fais quand même pas le poids alors que c’est votre épouse. Je ne me déprécie pas en disant ça je suis lucide. Si vous saviez à quel point j’ai rêvé qu’un jour vous m’embrasseriez avec cette tendresse… et j’ai du mal à respirer tellement j’ai envie que ça recommence mais… je ne veux pas vous causer d’ennui, j’en ai déjà bien assez fait je suppose. Pourquoi refuser mon transfert ? Si vous êtes sincère… je vous en supplie, ne jouez pas avec moi. »

Laisser tomber le capitaine… Quinn allait tâcher de se faire violence même si à ses yeux il restait le capitaine de son cœur et qu’il n’y avait pas le moindre sous entendu patronal derrière. Elle esquissa d’ailleurs un faible sourire avant que sa surprise n’aille en augmentant contre ses traits au fur et à mesure des secondes. « Vous me trouvez jolie ? » osa-t-elle demander, extrêmement sensible à son discours sans pour autant rougir d’une quelconque façon. Il faut dire qu’elle était bien trop discrète pour cela et que son teint était extrêmement pâle du fait de sa mal nutrition. C’était d’ailleurs étonnant qu’elle tienne encore debout avec autant de morgue… « Mais je ne serais jamais partie loin Leonard, jamais… je crois que mon cœur n’y aurait pas survécu et que je me serais réellement détestée si j’avais par exemple quitté la ville ou fait quoi que ce soit d’autre du genre pour éviter de souffrir. Si vous me voulez près de vous alors je reste… parce que je ne peux pas refuser, c’est au dessus de mes forces. » Elle lui avait déjà dit à quel point elle n’était pas forte par rapport à lui, bien au contraire. Ses sentiments la dominaient littéralement et ce fut ce qui la poussa à se mordre la lèvre inférieure avant de ne se mettre debout, non sans mal. Certes, elle s’apprêtait sûrement à faire une bêtise mais puisqu’il lui avait prouvé sa sincérité à son égard, alors Quinn voulait faire de même. Dans un élan de passion pure, elle entoura son cou de ses bras pour mieux capturer ses lèvres, sans s’imposer de façon trop prononcée et non sans faire preuve d’une extraordinaire tendresse, mais elle voulait lui rendre la pareille et lui faire comprendre qu’il ne s’agissait pas que d’un simple béguin. Quinn l’aimait vraiment, de tout son cœur, de toute son âme. Elle ne s’écarta d’ailleurs de lui qu’une fois à bout de souffle, le serrant subitement contre elle afin de ne se remettre de ses émotions… il fallait que son cœur malmené tienne le choc. « Je te promets de ne jamais rien faire qui puisse te blesser ou heurter ta droiture mais je vais espérer qu’un jour, tu reviennes vers moi… j’attendrai toute ma vie s’il le faut. Je sais qu’en théorie je n’aurais pas dû te donner un autre baiser mais je voulais qu’à ton tour tu puisses t’accrocher à une chose : ma sincérité. »