28 avril, 21h12 Encore une soirée de libre. Merveilleux. J'avais l'impression d'avoir beaucoup de temps libre en ce moment... Enfin, je ferais mieux de ne pas me réjouir trop vite. Une fois qu'on aurait fini de préparer ce qu'il y avait à préparer, je n'allais plus avoir le temps de me poser. Je n'aurais plus le temps d'aller boire... quel dommage. Quoique, il y avait de bon côtés tout de même aux périodes d'activités comme celle qui se préparait. Par exemple, après, c'était période de repos et je pourrai passer mes journées avec ma bouteille de tequila, et avec Alexander. Rien que d'y penser, j'avais hâte. Afin de pouvoir profiter le plus possible de ma soirée, je décidai de me rendre au bar où travaillait Jae-Lyn, me disant que si je n'étais pas seul comme l'autre soir, je ne commencerais pas à boire en ne pensant qu'à essayer d'oublier le mal que savoir qu'il était impossible qu'un jour mon amour soit réciproque me faisait. Je faisais tout ce que je pouvais pour le rendre heureux, pour essayer d'un jour voir un sourire sur son visage. J'avais même exécuté des tas de gens pour ça. C'était aussi car je n'osais pas désobéir, mais bon. Tout ça pour dire qu'en ce lundi soir, j'avais décidé d'aller boire ! J'avais déjà pris un verre de tequila ce midi, mais comme l'occasion de boire encore se présentait, la laisser filer serait idiot ! Je ne disais pas que j'étais un modèle d'intelligence car bon, pour ne pas réussir à sortir d'une commode fermée à clé par soi-même, faut vraiment être pas doué... J'arrivai vers vingt-et-une heure un quart à destination, au bar où elle travaillait, dans le Bronx. Enfin un bar où je n'allais pas avoir à sortir ma carte d'identité... ! Une fois rentré, je partis m'installer au bar. Comme à mon habitude, je retirai ma veste, sortis mon portable, le posai sur le comptoir, posai ma veste sur le tabouret avant de m'asseoir dessus. Remarquant que la place à côté de moi était libre, je ramenai le tabouret vers moi et posai mon sac dessus. Je préférai l'avoir à côté plutôt qu'à mes pieds, comme ça j'étais sûr de ne pas l'oublier. Et valait mieux que je ne l'oublie pas, parce que dedans il y avait mon journal et donc mon adresse mais aussi – et surtout – l'arme que je devais toujours avoir sur moi. En relevant la tête, je vis Jae-Lyn et ses cheveux rose vif. « Ça faisait un bail petit Oswald ! Qu’est-ce que tu deviens ? » Elle me pinça la joue. Je devais vraiment avoir une tête de gosse... c'était aux enfants qu'on faisait ça, habituellement. C'était aussi à eux qu'on demandait leur carte d'identité lorsqu'ils achetaient de l'alcool. Je n'eus pas le temps de lui répondre qu'elle ajouta : « Et qu’est-ce que je te sers ? » Je ne réfléchis pas même une seconde avant de répondre, avec entrain. « Je prendrai bien un petit verre de tequila ! Enfin, petit... » Je réalisai ensuite que je n'avais pas pris le temps de répondre à ses questions. « Ça fait si longtemps que ça ? Je n'en n'ai pas l'impression, pourtant... bah, avec le temps que me prend mon travail, je devais ne pas avoir eu le temps de passer te dire bonjour. » Je privilégiais les bars près de chez moi, enfin, de chez Alexander. « Ce que je deviens... bah... je continue mes études de littérature hispanique et lusitanienne, rien de bien extraordinaire. » Mieux valait que je me fasse passer pour étudiant plutôt que pour sans emploi... c'était plus crédible. « Et toi, quoi de neuf ? », demandai-je.

« Rien de rien, tout est vieux mon pauvre. T’es sérieux pour tes études ? Je veux dire… Tu vas faire quoi avec ça plus tard ? Ça m’a l’air… euh… Ennuyant. » Je hochai la tête, pour dire que oui j'étais sérieux.  « C'est très intéressant, je trouve ! Ben pour être honnête je ne sais pas trop ce que je ferais après. J'ai pris ça car la littérature est l'une de mes passions. Depuis que je suis petit j'écris beaucoup et puis, les langues espagnoles et portugaises font partie de mes origines. », J'aurais bien aimé avoir pu continuer mes études, mais Alexander m'avait bien dit qu'il avait besoin de moi en permanence. Il était impensable que je reprenne mes études. En plus je n'aurais pas le temps de travailler. Je n'étais pas vraiment intelligent, je devais mes bonnes notes à mon travail acharné... encore aujourd'hui, je donnais mon maximum dans mon travail. j'étais un peu ce qu'on peut appeler un workhaolic... Peu importait le travail qu'on me donnait, j'avais toujours essayé de faire de mon mieux. Même la première fois que j'ai tué quelqu'un... maintenant même si c'est un peu bizarre à dire je m'y suis habitué, je ne ressens plus rien à part la satisfaction qu'Alexander soit débarrassé d'un encombreur. Je me faisais sûrement du mal à penser ainsi, mais je ne pouvais pas m'en empêcher. « Tu veux du sel et du citron pour faire une téquila paf ? Ou tu bois la téquila comme ça ? » J'hésitai un instant avant de répondre. « Je la bois comme ça, ça ira, merci. », répondis-je. Tequila. La tequila était ma déesse, ma lumière dans la nuit, mon étoile dans l'espace sombre...  bref, j'aimais ça. Mais je n'étais pas alcoolique pour autant... j'étais sûr que je pourrais très bien me passer de tequila plusieurs semaines. Si je buvais tous les jours, c'était uniquement parce que c'est bon et non pas parce que j'en avais besoin. J'attrapai mon verre et en bu une première gorgée. « DIeu que c'est bon. », soufflai-je avec un sourire aux lèvres.

« Je vois. T’a grandi par là-bas ? T’es déjà allé en France du coup ? J’ai vécu en France, c’est cool comme endroit. La langue est belle d’ailleurs. Je crois que le français et l’espagnol se ressemblent pas mal. Mais je ne sais pas parler Espagnol ceci dit… » Je secouai la tête en signe de négation, avant de répondre : « Je n'ai même pas grandi dans cet hémisphère.  Je suis né en Nouvelle-Zélande et j'ai vécu à Londres, à partir de mes quinze ans. Je ne suis pas d'origines européennes, mais sud-américaines. Je ne suis jamais allé en France, je ne peux pas dire si c'est bien... et pour le français, je sais pas. Je parle pas mal de langues, mais pas le français. À vrai dire, je ne sais même pas à quoi ça ressemble... peut-être certains mots mais pas plus loin, je ne pourrais pas te dire si ça ressemble à l'espagnol. Du coup tu connais un peu de français si tu y as vécu, je suppose ? » Je ne savais même pas à quoi ressemblait le français. Ça craignait un peu, quand même... D'un côté, la France ne m'avait jamais vraiment attiré. Sur les photos, ça n'a pas l'air moche, mais je préfère la Nouvelle-Zélande, la Thaïlande ou l'Islande. Que des pays dont je parlais la langue, en fait. Pourquoi se compliquer à aller quelque part où l'on ne connaissait pas la langue ? Ça empêche de profiter au maximum, c'était d'ailleurs pour cette raison que j'étais partis visiter les États-Unis et non pas faire un tour d'Europe comme mes parents me l'avait conseillé. Selon eux l'Europe était plus diversifiée. Tout ce dont j'étais sûr, c'est que j'avais aimé mes petites vacances aux USA. Et un peu moins le fait d'avoir dû y rester de force, mais bon, ce n'était pas grave. Je préférais être séparé de ma famille plutôt que de l'être d'Alexander... « Je ne t’avouerai pas que j’aime ça aussi. », assura Jae-Lyn après avoir posé une coupelle d'olive à côté de mon verre. J'en pris une tandis qu'elle partit prendre une commande. L'homme servi, elle s'assit. « La soirée est calme ça change… Et ce n’est pas plus mal… » Je souris, puis reprit une gorgée de mon verre. « Tu m'étonnes. Tu dois être fatiguée à travailler autant... en plus, tu as l'air plus jeune que moi. Déjà que je ne suis pas bien vieux ! Tu devrais peut-être te reposer. », soufflai-je avant de reprendre une olive. Après, je disais ça, mais je ne connaissais pas sa vie privée. Elle avait peut-être besoin d'argent. En ce qui me concernait, j'étais bien payé, enfin, je n'avais pas à me plaindre.

« Je vois. Et humm, oui je parle français, comme je parle l’anglais. Je parle aussi Coréen et j’ai les bases en Chinois. En fait l’Espagnol et le français descende du latin, alors beaucoup de mot se ressemble. Disons que pour un français l’espagnol sera plus facile à apprendre ou l’italien que n’importe quelle autres langues. » Le français est une langue qui ne m'avait jamais vraiment attiré... peut-être devrai-je me renseigner histoire, au moins, de savoir quelle tête ça avait. « Ah oui, c'est vrai, ça descend du latin ces langues-là. Je parle un peu italien et c'est vrai qu'être quasi-billingue en latin ça a rendu les choses plus simples. » Je ne savais pas pourquoi je ne m'étais pas plongé dans l'apprentissage de l'italien. Peut-être par manque de temps... J'avais jeté un œil à deux-trois leçons sur internet, puis m'étais finalement décidé à apprendre le thaï. C'était l'été où j'étais arrivé à Londres. Et autant dire que lorsqu'on n'a pas le droit de sortir seul trop loin et que l'on ne connaît personne, et bien on s'emmerde grave. C'était sûrement à cause du fait que je ne pouvais pas sortir à ma guise que je parlais autant de langues, maintenant que j'y pensais... Et aussi à cause de mon amour inconsidéré pour le travail. L'expression n'était peut-être pas réellement appropriée, mais j'avais bien conscience que je travaillais bien trop. C'était grâce à mes heures passées à étudier que j'avais été tant de fois premier de ma classe malgré le fait que je n'étais pas spécialement intelligent. Quand je pensais que le second de ma classe en troisième l'était en se tournant les pouces, ça me faisait rager. Enfin bon. Il ne faut pas trop travailler, c'est mauvais pour la santé, à long terme. Surtout lorsqu'on est jeune. « Peut-être, mais j’ai besoin d’argent. Je suis seule pour subvenir à mes besoins, alors… Entre le lycée et le reste… Je me reposerai surement une fois le bac en poche. J’irai pas à l’université, alors je n’aurai pas à cumuler trente-six milles jobs dans une journée. » Jae-Lyn était encore lycéenne ? Raison de plus pour se reposer un peu ! Comment réussissait-elle à trouver du temps pour ses révisions ? Bon, après, comme elle le dit, si elle a besoin d'argent elle n'a pas vraiment le choix. Je continuai mon verre avant de répondre. « D'accord. Mais fais quand même attention. Ne travaille pas au point de tomber malade d'épuisement, tu as aussi besoin de te reposer de temps en temps. » Elle était jeune, un peu plus que ce que je pensais, d'ailleurs. À cet âge, le corps a besoin de presque dix heures de sommeil, je doutais qu'elle dormait autant...

« Ouais le latin ça aide, puisque la souche de leurs mots descendent pour la plus part du latin ou du grec. Enfin, le français est une langue très difficile, c’est différent de l’anglais ou du Coréen. Leurs phrases sont différentes. Ils font sujet verbe objet. Alors qu’en anglais ou en coréen, c’est sujet objet verbe. » Hm... beaucoup de langues étaient compliquées, de toutes façons. Et apparemment le français n'était pas une exception. « Je vois. En résumé, il faut être motivé pour apprendre le français. » D'un côté, ça ne devait pas être plus compliqué que le chinois par exemple. Au moins, il n'y avait pas de nouvel alphabet à apprendre avec le français. Il y avait les accents, je crois, mais bon, c'est comme avec toutes les langues. Il y avait des difficultés plus ou moins grande dans toutes. Ce qui était normal, d'un sens. « Oh non, ne t’inquiète pas pour moi, je ne tombe jamais malade, un vrai roc ! Je vais mourir vieille et en bonne santé. » Je l'espérais pour elle ! Je ris, amusé par sa conviction. On ne pouvait jamais être sûr de ce que l'avenir nous réservait... la preuve. À mon dernier jour à New York, j'étais persuadé que j'allais retrouver Londres, cette ville que j'aimais tellement – ironie – et que j'allais reprendre bien tranquillement mes études, en seconde année. J'avais eu la bonne idée de m'acquitter de ma dette et je m'étais retrouvé obligé de rester à New York jusqu'à... ad vitam eternam en fait. C'était peut-être exagéré pourtant j'avais l'impression que c'était exactement ça. « Vieille, en bonne santé, c'est un beau programme ça. Et dans un futur moins éloigné, tu penses faire quoi ? Tu comptes passer ta vie à travailler comme serveuse ou ce genre de chose ? » , demandai-je. Je réalisai un peu trop tard que Jae-Lyn pourrait mal interpréter mes paroles. « Je ne disais pas ça méchamment, hein ! »[/color] , ajoutai-je. Mes paroles pourraient être interprétées comme une critique. Être serveur pouvait être un bon métier, si on prenait par exemple les serveurs des grands restaurants étoilés, c'était bien.