CHARLIE & SORA

L’attente était interminable. Deux minutes qu’elle faisait les cents pas dans la salle de bain tel un lion en cage et Sora avait l’impression de s’y trouver déjà depuis des heures. Son cœur battait à tout rompre si bien qu’elle était étonné que ce dernier ne se soit pas déloger de sa cage thoracique. Elle sentait son estomac se nouer douloureusement et la guatémaltèque était incapable de ne pas insulter ce fichu test qui mettait bien trop de temps à lui donner une réponse. Voilà près d’une semaine qu’elle avait du retard et ça doublé au fait qu’elle était incapable de garder de la nourriture dans l’estomac, son cerveau avait bien rapidement fait le calcul et l’avait poussé à acheter un test dans la pharmacie au coin de la rue où elle vivait. Un bref regard à son montre lui indiqua que les trois minutes étaient écoulées et la jeune femme se précipita vers le test près du lavabo qu’elle amena près de ses yeux avant de manquer de le lâcher sous le choc. « Nom de Dieu … » Elle ne voyait pas réellement quoi dire d’autre, ni comment réagir autrement. Sora passa rapidement une main sur son visage pour tenter de faire disparaître la pâleur qui y avait pris place, puis après avoir rassemblé son courage elle quitta la salle de bain et rejoignit le salon où Charlie, sa colocataire, attendait le verdict. « Il va complètement paniquer. » Déclara-t-elle en se laissant tomber sur le canapé, au bord de la crise de larmes. Traduction : elle était bel et bien enceinte et elle ne préférait pas imaginer la réaction de Danjel une fois la nouvelle tombée. Ils venaient à peine de se mettre ensemble après plusieurs mois à refuser de voir la réalité en face, qu’elle attende son enfant si soudainement alors qu’il tentait tout juste d’être stable avec une femme n’allait pas l’aider à rester calme, loin de là.

Charlie était leur petit salon, elle aussi était stressé. Assise sur le canapé, sa jambe bougeant frénétiquement elle attendait que Sora sorte de la salle de bain. La jeune femme lui avait annoncé qu’elle allait faire un test de grossesse depuis elle était enfermé dans le salle de bain. Sa colocataire n’était parti que depuis 5 minutes à peine et elle avait l’impression que cela faisait déjà une heure à croire que c’était elle qui avait des doutes. La jeune femme changea de position une dizaine de fois et se leva précipitamment lorsqu’elle entendit la porte s’ouvrir. Sora en sortit rapidement « Il va complètement paniquer. ». Alors elle était donc enceinte. Charlie ne savait pas trop comment réagir, elle comprenait que c’était une situation délicate mais elle voulait aussi savoir ce que Sora ressentait. « il va être un peu surpris oui ... mais c’est un bon gars, il sera là pour toi ...» Charlie essayait de réconforter son amie, elle n’était pas très douée pour faire face à ce genre de situation, c’était la première fois ... « mais est toi ? comment tu te sens ? es-ce que tu es contentes ?» La jolie brune était venu s’asseoir à côté de la jeune femme blonde, elle avait posé sa main sur la sienne pour lui apporter son soutient. C'était une situation totalement inédite pour la jeune femme qui n'avait pas beaucoup d'amie féminine et surtout aucune amie qui était tombé enceinte, elle n'arrivait pas à savoir s'il fallait qu'elle se réjouisse pour Sora ou qu'elle pleure. Une chose était certaine même si elle ne connaissait pas Sora depuis longtemps elle n'était pas le genre de fille à laisser ses amies dans la merde. Elle l'aiderait quoi que le copain de Sora fasse.

C’était la fin du monde … tout du moins aux yeux de la jeune femme. Comment était-elle supposée prendre la nouvelle ? Bien peut-être … tout du moins si sa relation avec Danjel n’avait pas été aussi compliquée qu’elle pouvait l’être actuellement. Certes tous les deux étaient à présent ensemble – c’était un fait – et la jeune femme savait qu’il l’aimait tout autant qu’elle pouvait l’aimer mais un bébé c’était bien trop tôt, tout du moins pour leur relation. Sora en était encore au stade où elle craignait de le perdre, où elle avait peur de le voir prendre la porte pour ne plus jamais revenir, ce qu’elle ne saurait supporter. La guatémaltèque le connaissait par cœur après tout ce temps passé à ses côtés et elle savait que trop bien le fait qu’il allait totalement paniquer lorsqu’elle allait lui faire part de cette grossesse qui était loin de tomber au bon moment. Assise sur le canapé, Charlie l’ayant rejoint, elle poussa un long soupire en fixant le mur droit devant elle tout en tâchant de se calmer. « Il va être un peu surpris oui ... mais c’est un bon gars, il sera là pour toi ... » Doucement, la jeune femme tourna la tête vers sa colocataire et ne put s’empêcher de lui adresser un petit sourire en guise de remerciement. Même si toutes les deux n’étaient pas colocataires depuis bien longtemps, elles étaient rapidement parvenues à s’entendre et à devenir proches. « Mais et toi ? Comment tu te sens ? Est-ce que tu es contente ? » Une petite moue prit place sur son visage tandis que Sora fronçait doucement son nez. Était-elle contente ? Excellente question. Haussant les épaules sans détourner son regard, la guatémaltèque se mordilla la lèvre inférieure. « Je ne sais pas … Je crois. » Sa réponse était plutôt vague, elle en avait conscience, mais Sora ignorait quoi penser de tout ça. Quelque part elle était heureuse, oui … probablement. « Mais là je suis plus paniquée qu’autre chose. » Avoua-t-elle tandis qu’un rire nerveux lui échappa.

Sora se sentait tellement perdue, partagée entre deux émotions totalement contradictoires. Elle ne savait pas quoi penser de cette révélation, elle ne savait pas si elle devait s’en réjouir ou rester aussi terroriser qu’elle pouvait l’être. Cette grossesse lui semblait si soudaine, loin d’être attendue mais, elle ne pouvait la considérer comme non voulue. La guatémaltèque s’évertuait de prendre les choses comme elles venaient, que ces dernières soient douloureuses ou non. Bien sûr, elle n’avait en rien fait en sorte d’attendre l’enfant de Danjel, mais tout au fond d’elle, elle sentait que son petit cœur rêvait de pouvoir se réjouir de ce qui lui arrivait alors que, extérieurement, elle laissait avant tout voir la peur qui la rongeait. Sora avait également envie de pleurer, d’aller s’enfermer dans sa chambre mais elle resta assise sur le canapé, Charlie près d’elle, consciente que dans une situation comme celle-ci elle avait grandement besoin de soutien. Sa colocataire ne tarda d’ailleurs pas à en faire preuve, posant doucement sa main sur celle de la jeune guatémaltèque. « Je suis là pour toi, et je serais là pour toi quoi que tu décides ... je sais qu’on ne se connait pas depuis longtemps ... mais je te considère comme une amie, tu as été là pour moi lorsque je ne me sentais pas bien ici ... alors je veux être là pour toi ... » Un léger sourire parvint à étirer le coin des lèvres de Sora. Son regard se posa sur Charlie dont elle serra doucement la main, la remerciant du regard. « C’est un sentiment partagé et merci Charlie, merci de me soutenir. » Et voilà qu’à nouveau elle avait envie de pleurer, son regard se voilant, devenant plus brillant à cause des larmes qui tentaient de s’échapper mais que Sora ravala aussi vite que possible en mordillant l’intérieur de sa joue. « En tous cas, je peux t’aider !! Il faudrait prendre rendez vous avec le médecin ... tu veux que je le fasses pour toi ? Une chose est sûr, tu dois faire attention à toi maintenant, tu n’es plus seule ... quoi que tu décides ... » Une légère moue prit place sur le visage de la jeune femme qui ne tarda pas à soupirer, ses épaules s’affaissant. « Je veux bien, je crois que je serais tellement en panique que je serais incapable de prononcer le moindre mot. » Une légère grimace mal à l’aise prit place sur son visage, puis Sora se mordilla la lèvre inférieure en s’efforçant de se tenir droite. « Pitié, dis-moi que tu as un moyen de me changer les idées parce que je sens que je vais pas tarder à me transformer en fontaine. » Une moue boudeuse peinte sur son visage, son regard se fit suppliant tout en espérant que sa colocataire aurait le truc pour lui changer les idées au plus.

« Aucun problème, je me charge de ça ... » Un sourire reconnaissant étira doucement les lèvres de Sora. Elle avait longtemps eu pour habitude de vivre seule dans un appartement deux fois trop grand pour elle et dans les débuts elle avait quelque peu craint de vivre en colocation, mais aujourd’hui il lui semblait clair qu’elle n’aurait jamais pu tomber sur une meilleure colocataire que Charlie. Cette jeune demoiselle était un amour, toujours prête à aider son prochain comme elle pouvait le démontrer en aidant la jeune guatémaltèque totalement en panique après avoir eu la confirmation du fait qu’elle était enceinte – une vraie catastrophe selon elle. Pourtant, même si elle était ravie de l’aide que l’américaine acceptait de lui apporter, elle n’avait pas la moindre envie de s’attarder plus longtemps sur ce sujet et elle rêvait sincèrement de se changer les idées et pour ça, elle espérait pouvoir compter sur Charlie, une fois de plus. « Bien sûr que oui, j'appellerais un peu plus tard, le meilleur moyen de retrouver le sourire c’est de faire de la pâtisserie, et tu as devant toi la reine de la pâtisserie. Un gâteau au chocolat, voilà ce que l’on va faire, le chocolat c’est le meilleur remède lorsque l’on n’est pas en forme. » Chocolat … rien que l’évocation de ce simple mot la mettait déjà de meilleure humeur … soit c’était ça, soit il s’agissait de la perspective de manger en grande gourmande qu’elle était. Voyant sa colocataire s’éloigner en direction de leur cuisine, Sora se contenta d’abord de la suivre du regard avant de se décider à quitter le canapé et à la rejoindre, prenant appuie contre le plan de travail tandis que Charlie s’afférait à sortir tous les ingrédients nécessaires. « J’adore le chocolat, je pourrais en manger des tonnes si je m’écoutais ... je ne peux pas m'empêcher de goûter et puis c’est un gâteau assez simple, même une novice comme toi peu le réussir » Un nouveau petit sourire apparu sur les lèvres de la guatémaltèque tandis qu’elle écoutait la demoiselle avec attention. Puis, une légère grimace déforma son visage lorsqu’il fut question de réussir le gâteau. « Wooh … tu fondes de grands espoirs en moi, je te rappelle que je suis une catastrophe en cuisine, c’est presque si je sais cuire un steak. » Et c’était peu dire. Sora se souvenait parfaitement de la dernière fois qu’elle avait tenté l’expérience, le steak avait tout simplement fini carbonisé et l’appartement enfumé … elle doutait sincèrement d’être capable de cuisine, mais si elle apprenait des meilleurs peut-être y parviendrait-elle ?

« Oui mais tu oublies que tu as la meilleure pâtissière du pays pour te superviser » Un nouveau sourire étira les lèvres de Sora. Visiblement Charlie comptait réellement lui prouver le contraire de ce que pouvait penser la guatémaltèque qui était que la jeune femme était parfaitement incapable de cuisiner sans transformer la situation en une véritable catastrophe. Elle aimait cette confiance que sa colocataire pouvait avoir en elle, c’était vraiment agréable si bien que la jeune femme opina du chef en prenant appuie sur le plan de travail de la cuisine. « Mais on peut dire que tu n’as pas tord, je me demande d’ailleurs comment tu faisais avant de me rencontrer ? Je ne sais pas comment tu as fait pour survivre. » Une légère moue prit place sur le visage de la demoiselle qui tapota doucement ses lèvres pour se donner un air de réflexion. « Hm … les plats pré-cuisinés étaient mes meilleurs amis, mais je suppose que ce n’est plus vraiment conseillé maintenant que … enfin maintenant quoi. » Autant dire que Sora vivant seule chez elle et devant cuisiné pour elle-même était une très mauvaise idée. Longtemps elle avait eu ses parents adoptifs pour lui sauver la vie, puis Dean avait prit le relais – dieu merci ! – et durant la période où elle avait vécu seule autant dire que le mot « équilibré » elle l’avait quelque peu oublié. Désormais, elle avait Charlie et sa colocataire n’avait pas idée à quel point elle pouvait lui en être reconnaissante. « Tiens regarde dans le livre de cuisine qui est là tu vas trouver la recette du gâteau au chocolat. Je vais te prouver que tu vas réussir à faire de la cuisine sans mettre le feu à l’appartement. » La demoiselle tourna sur elle-même jusqu’à trouver le livre de cuisine dont Charlie venait de lui parler, le feuilletant tandis que la demoiselle amenait les ingrédients nécessaires près d’elles. « Si ici ça fini en champ de bataille, je serais pardonnée ? » Demanda-t-elle, un large sourire aux lèvres tandis qu’elle plaçait le livre devant elles de sorte à pouvoir le consulter l’une comme l’autre.

Il fallait à tout prix qu’elle chasse la nouvelle de son esprit et qu’elle se concentre sur autre chose pour ne pas fondre en larmes d’une minute à l’autre. Pourtant, Sora avait l’impression que chaque sujet qu’elle se risquait à entamer aurait un rapport direct ou non avec ce qu’elle venait d’apprendre quoi qu'elle fasse. Et ce ne fut qu'en sentant les mains de Charlie se poser sur ses épaules que la guatémaltèque redressa la tête pour poser son regard sur sa colocataire, ses pensées précédentes s’évanouissant immédiatement. « C’est certain ... mais je suis là ... tu n’es pas toute seule. » De nouveau, un léger sourire apparu au coin des lèvres de Sora qui opina lentement du chef afin de confirmer le fait qu’elle n’était pas seule, elle le savait et elle devait bien avouer que ça lui faisait le plus grand bien. « Aller ! Go au travail » Sur ces mots, Sora gonfla ses poumons à bloc pour regrouper toute sa motivation tandis qu’elle tournait les pages du livre de recette jusqu’à trouver celle que Charlie lui avait demandé de chercher. Elle regarda les divers ingrédients disposés devant elles et ne fut même pas surprise qu’elle n’ait pas la moindre idée du fait qu’elles avaient ces derniers en leur possession tant elle faisait peu la cuisine. Une légère moue prit place sur son visage tandis qu’elle tentait de savoir ce que contenaient certains bocaux mais sans succès et ce fut encore moins possible lorsque son regard fut brouillé par un nuage blanc qui lui aspergea le visage. « Tu veux dire comme ceci ??? » Dégageant ses yeux tandis que son visage et ses cheveux étaient pleins de farine, elle lança un regard outré en direction de Charlie. « Alors là ! Tu vas le regretter ! » Aussitôt dit, aussitôt la guatémaltèque attrapa l’un des œufs que Charlie avait posé sur le plan de travail et sans laisser le moindre temps à sa colocataire de réagir, elle lui écrasa l’œuf sur la tête, un large sourire fier aux lèvres.