BELLE & CASEY

❝ Loser of the year ❞

Casey avait beau tenir Norah dans ses bras, venant de passer un excellent moment en sa compagnie, la culpabilité ne disparaissait pas pour autant. Le jeune journaliste se répétait qu'il ne devait rien à Belle, qu'ils n'étaient en rien un couple - ce qu'elle approuvait d'ailleurs - mais se retrouver dans son appartement avec l'un de ses colocataires... c'était sans doute la limite à ne pas franchir. Il n'en avait pas la moindre idée et ne tenait surtout pas à le découvrir. Ces mauvaises pensées l'empêchaient de fermer l'oeil, Casey eut donc tout le loisir de regarder Norah s'assoupir contre lui tout en se demandant à quel moment il allait bien pouvoir partir pour ne prendre aucun risque. Il pouvait toujours passer la nuit ici et attendre que Belle soit au boulot, mais c'était risqué, surtout si la jolie brune dans ses bras lui demandait de quitter les lieux rapidement le lendemain. Au final, l'heure passait et à 4h du matin, Casey se décidait à s’éclipser discrètement du lit pour récupérer ses vêtements qu'il enfilait à moitié pour ne pas faire trop de bruit dans la chambre et risquer d'éveiller Norah. L'américain s'en voulait de partir tel un voleur, surtout en sachant l'importance que cette nuit pouvait avoir pour elle, mais il n'avait franchement pas d'autres choix.

Arrivé dans l'appartement - qu'il connaissait par coeur à présent -, le jeune homme prenait le temps de s'assoir sur le bord du fauteuil pour enfiler ses chaussures dans la pénombre. A croire qu'il était maudit, que l'obscurité ne suffisait pas à le dissimuler puisque des pas se dirigeait vers lui. Si le jeune homme priait pour découvrir l'une des colocataires de Belle, il notait bien rapidement que c'était raté, que c'était bien son amante qui se trouvait face à lui. Se levant rapidement, il attrapait le t-shirt qu'il n'avait pas encore eut le temps d'enfiler et posait son doigt contre ses propres lèvres d'un air suppliant. Casey ignorait si Belle allait l'ignorer ou lui faire une remarque, mais il ne fallait surtout pas qu'elle se mette à lui hurler dessus - se retrouver face à elle était bien assez difficile, il ne tenait pas à voir Norah les rejoindre. « Désolé... » Soufflait-il finalement en l'observant, sans trop savoir pourquoi il s'excusait. Pour avoir coucher avec une autre? Pour avoir choisi l'une de ses colocataires et être revenu avec elle jusqu'ici en sachant les risques de croiser Belle? Ou simplement pour avoir été pris la main dans le sac? Casey n'avait jamais parlé d'avoir une relation exclusive mais il faut bien avouer qu'il aurait pu chercher un peu plus loin, bien qu'il n'avait pu le constater qu'en franchissant le pas de la porte. Depuis le début de sa "relation" avec Belle, le jeune homme avait pris soin d'éviter ses colocataires et le résultat était là : sur tout New York, il avait fallut que Norah en fasse partie. Il n'imaginait même pas sa réaction si l'un de ses colocataires s'était ramené avec Belle, il ne l'aurait pas accepté de la part de l'un comme de l'autre - forte heureusement, ça ne risquait pas d'arriver puisqu'il vivait seul avec Mia. Toujours est-il qu'il redoutait la réaction de Belle, raison pour laquelle il se pressait vers la sortie après un bref baiser sur le front de la jeune femme, sans même attendre qu'elle ne lui dise quoi que ce soit.

Coup d'œil à sa montre. Un soupire lui échappa. Comment se faisait-il que le temps s'écoulait avec une telle lenteur ? Elle avait beau savoir que ce n'était qu'une histoire de perception, elle avait réellement la sensation que le temps s'écoulait tout doucement pour la narguer. Elle était épuisée même si elle s'efforçait de ne pas le montrer et de ne rien dire. Tenter de s'habituer à l'internat était mission impossible et pourtant la jeune femme n'avait guère le choix. Les horaires n'étaient jamais réellement les mêmes et s'ajoutait à cela le fait qu'elle avait sans cesse besoin de se plonger dans ses livres même s'il s'agissait plus d'un plaisir que d'une obligation la concernant. Les examens n'allaient également pas tarder à arriver et la jeune femme se devait d'être au meilleur de sa forme et la meilleure - pour faire simple - afin de s'assurer de passer son année en toute tranquillité. C'était là la chose qui l'angoissait le plus. Perfectionniste comme elle pouvait l'être, Belle refusait d'envisager l'échec, pas en ayant toujours réussi sans le moindre problème et pas en ayant les capacités qu'elle avait. Elle voulait prouver au chef du Lenox Hill qu'il avait eu raison de croire en elle, de lui donner sa chance alors qu'elle aurait dû continuer d'être sur les bancs de l'école de médecine. Mais par-dessus tout elle voulait que ses parents soient fiers d'elle, une manière comme une autre de tenter de se rattraper par rapport à toutes ces fois où elle avait pu faire des erreurs et les mettre en colère.

Ainsi, l'Américaine se forçait également à revenir sur le droit chemin même si avec un caractère comme le sien ce n'était pas toujours simple. Elle avait doucement réussi à passer au-dessus de la perte du bébé qu'elle aurait dû avoir et elle retrouvait goût à la vie tout en faisant en sorte de ne pas coucher à droite et à gauche comme elle en avait eu l'habitude ces derniers mois. Pourtant, elle continuait à voir Evan - son ancien titulaire - de temps en temps, mais à chaque fois une certaine culpabilité s'installait en elle sans qu'elle ne sache réellement à quoi elle était due. S'ajoutait à cela le fait qu'elle était incapable de sortir Casey de sa tête. Belle avait pourtant refusé de s'attacher à qui que ce soit et elle savait pertinemment que le journaliste ne cherchait pas à se stabiliser et si elle faisait toujours de son mieux pour laisser paraître qu'elle non plus, elle ne pouvait pas nier le fait qu'il la hantait et qu'elle se sentait toujours paisible dans ses bras. Cette prise de conscience l'avait poussé à prendre un tant soit peu ses distances avec l'Américain même si ça ne changeait strictement rien, preuve en était qu'assise dans la salle de repos du personnel de l'hôpital elle pensait encore à lui en priant pour que les vingt minutes de service qui lui restaient passent plus vite. Lorsque ce fut le cas un soupire de bonheur lui échappa et la jeune femme s'empressa de gagner les vestiaires pour troquer sa tenue bleu délavée pour ses propres vêtements après quoi elle sortit de l'hôpital pour gagner sa voiture et rejoindre son appartement.

Trois heures et demie, ce fut l'heure à laquelle Belle entra dans l'appartement qu'elle partageait avec Aloysia, Norah et Ozalee. Aussi discrètement que possible elle gagna sa chambre et alla se laisser tomber sur son lit toute habillée mais se releva une demi-heure plus tard lorsque une petite faim fit gargouiller son estomac. Connaissant l'appartement par cœur, Belle n'eut pas besoin d'allumer une seule lumière pour se diriger et pourtant elle s'arrêta brusquement comme si elle venait de rencontrer un mur bien que ce ne fut pas le cas. Non loin de la cuisine, elle sentit dans son dos la présence d'une tierce personne et se retourna aussi lentement que possible tandis que la panique la gagnait. Malgré l'obscurité, cette silhouette elle l'a reconnu aussitôt, ce qui n'était pas difficile tant il pouvait la hanter. Son cœur manqua un battement lorsqu'elle comprit la raison de sa présence dans l'appartement et la surprise fut-elle qu'aucune pique ne lui vint à l'esprit, Belle se contenta de rester bouche bée tandis que Casey s'approchait d'elle. « Désolé... » Les sourcils de l'Américaine se froncèrent et une grimace déforma son visage alors qu'il déposait un baiser sur son front avant de filer comme un voleur, laissant la jeune femme figée au beau milieu de la pièce tandis qu'elle essayait de rassembler ses idées.

Le laisser filer aurait sans doute été plus judicieux car l'inverse prouvait qu'elle était bien plus attachée à lui que ce qu'elle voulait bien dire, mais Belle fut incapable de rester de marbre et elle quitta l'appartement pour rattraper Casey dans le couloir. « T'es désolé ? Tu te fous de moi j'espère ? » S'exclama-t-elle en se moquant totalement du fait qu'il soit quatre du matin ou non. Elle brisa les derniers mètres qui la séparaient de lui, la colère se lisant sans le moindre mal sur son visage. « De toutes les personnes avec qui tu pouvais coucher il a fallu que tu choisisses une de mes colocataires ! Et ne me dis pas que tu pouvais pas savoir, l'appartement tu le connais. » Qu'était-elle en train de lui reprocher au juste ? Le fait d'être allé voir ailleurs alors que leur relation n'avait strictement rien d'exclusif ou le fait qu'il ait passé la nuit avec une de ses colocataires - bien qu'elle ignorait laquelle ? Sans doute un mélange des deux et si la jeune femme n'avait pas été aussi épuisée elle se serait probablement frapper face à sa réaction qui n'aurait pas dû avoir lieu d'être mais le fait était qu'elle tenait trop à lui pour réussir à passer outre, à faire comme si elle s'en moquait éperdument car ce n'était clairement pas le cas.

Malgré son hésitation à franchir le pas de la porte lorsque Norah l'avait emmené, Casey avait finalement choisi d'ignorer cette pseudo culpabilité et cette gêne qu'il ressentait car elles n'avaient pas lieu d'être. Depuis quand se souciait-il des contacts entre ses conquêtes? Il ne devait rien à Belle, avait couché avec d'autres filles au début de leur "relation" sans penser à elle et pourtant, il ne pouvait s'empêcher de le faire à présent. Le fait d'être dans son appartement jouait forcément mais au fond, le jeune journaliste savait parfaitement que ce n'était pas l'unique chose qui l'avait quelque peu freiné avec Norah. Cela n'avait pas suffit à l'arrêter, pas après des semaines à lui tourner autour sans aucun résultat : la jeune femme avait enfin décidé de lui faire confiance et il en avait tiré profit. Casey était d'ailleurs certain de l'avoir aidée cette nuit, première qu'elle passait volontairement avec un homme, elle pouvait à présent le faire sans crainte. Normalement. Toujours est-il que croiser Belle dans le salon lui faisait oublié en une fraction de seconde le bon temps qu'il venait de passer pour lui envoyer en pleine figure les doutes qu'il avait eut la veille. Même s'il tentait de se la jouer cool face à elle en prenant la fuite, l'américain se sentait misérable devant la porte de l'ascenseur qui peinait à s'ouvrir pour lui permettre de s'échapper. Il n'avait aucun colocataire mais Casey ne s'imaginait pas quelle aurait été sa réaction si Belle était sortie de la chambre de l'un d'eux. Qu'il le veuille ou non, il serait sans doute sortit de ses gongs comme la jeune femme risquait de le faire dans quelques secondes.

Grimaçant dés qu'il entendit la porte s'ouvrir à sa suite, Casey restait de dos jusqu'à ce que sa voix lui parvienne. « T'es désolé ? Tu te fous de moi j'espère ? » Arquant un sourcil, le journaliste prenait une inspiration, plaquait ses mains dans ses poches avant de lui faire face dans un silence de plomb, attendant de voir ce qu'elle lui reprochait exactement. Non pas qu'il n'en ai pas idée mais disons qu'à la base, ils ne se devaient rien l'un l'autre, il n'avait aucune envie de se justifier. « De toutes les personnes avec qui tu pouvais coucher il a fallu que tu choisisses une de mes colocataires ! Et ne me dis pas que tu pouvais pas savoir, l'appartement tu le connais. » Voir à quel point la jeune femme était en colère le fit grimacer de plus belle, ayant pourtant comme seule réaction de hausser les épaules. Je ne sais pas, je m'en fou, peu importe comment elle l'interprétait, il n'avait pas les mots pour expliquer la soirée d'hier. Casey n'allait pourtant pas tourner les talons et fuir – bien qu'il en mourrait d'envie maintenant que le bip lui signalait la présence de l'ascenseur. Il était suffisamment grand pour assumer les conséquences de ses actes et allait - comme toujours quand il ne savait pas quoi faire – se la jouer relaxe pour faire passer cela comme un détail. « C'était pas voulu! Tu crois que je me suis pointé à l'appart en choisissant au hasard une autre chambre que la tienne? » Demandait-il sur le ton de l'interrogation, tout en baissant le ton pour qu'elle en fasse de même. Certes il avait eut le choix de partir ou de rester en le découvrant, mais ce n'est pas comme s'il pouvait planter Norah devant la porte en lui signalant qu'il avait déjà une relation avec l'une de ses amies, surtout pas alors qu'elle s'ouvrait enfin à quelqu'un à propos de son passé. Et puis il mourrait d'envie de finir dans son lit, accessoirement, surtout après plusieurs jours sans voir Belle et des semaines à chercher Norah. « On a toujours fait en sorte que je ne croise pas tes colocs, je ne pouvais pas deviner que Norah vivait ici! » Casey tentait de garder un ton le plus neutre possible, il ne la suppliait pas de lui pardonner puisqu'à ses yeux il n'avait rien fait de mal, que sa conscience approuve ou non. « Je l'ai suivie et voilà… tu voulais que je la plante en lui signalant que je passais par ton lit de temps en temps? » Ce qui aurait totalement cassé leur soirée, il en était certain. Norah refusait de faire confiance à un homme, si ca avait été le cas il lui aurait peut-être signalé mais là il avait juste sauvé leur nuit en gardant le silence sur ce détail. Poussant un long soupire, Casey osait émettre une requête bien que ça risquait simplement de mettre de l'huile sur le feu. « Évite de lui en vouloir, ou lui en parler... elle n'en sait rien. Si tu ne l'as pas réveillée entre temps… » Vu comment elle lui avait crié dessus, c'était probable ! S'apprêtant déjà à passer un sale quart d'heure avec Belle, le journaliste préférait ne pas se retrouver avec une deuxième personne présente. Il réalisait que lui donner des ordres, bien que ça n'en soit pas vraiment un, n'allait pas la calmer mais l'américain était certain que Norah se fermerait à nouveau à toute relation si Belle lui apprenait la vérité. Bien joué Casey.

Pourquoi réagissait-elle aussi vivement ? Que lui passait-il par la tête cette fois encore ? Tant de questions se bousculaient désormais dans sa tête et sa fatigue ne l’aidait en rien à rester calme. De quel droit se permettait-elle de lui en vouloir alors que, dès le début, ils avaient été très clairs concernant leur relation ? Elle ne devrait pas réagir ainsi, toute logique aurait voulu que, étant donné leur relation, elle accepte sans rien dire le fait qu’il voit d’autres femmes plutôt que de piquer une crise comme elle était en train de le faire. Qu’il aille voir ailleurs était une chose à laquelle elle s’était faite puisqu’elle-même le faisait, mais elle était bien incapable de supporter le fait qu’il ait couché avec l’une de ses colocataires. Cette simple information la rendait malade et éveillait en elle une rage qu’elle n’avait jamais connue. Etait-ce de la jalousie ? Probablement mais si c’était le cas elle aurait dû faire tout son possible pour la refouler au plus profond de son être et ainsi éviter de lui faire une scène, seulement elle n’y arrivait pas. L’avoir vu dans le noir au beau milieu de l’appartement en train de filer comme un voleur, l’avoir imaginé dans les bras de l’une de ses colocataires lui faisait atrocement mal et s’il y avait bien une chose que l’Américaine refusait c’était bien de souffrir à cause d’un homme. Elle aurait aimé être capable de ne rien dire et de retourner bien sagement dans sa chambre après qu’il ait passé le seuil de la porte mais sa force de caractère habituelle l’avait quitté et la faiblesse l’avait commandé.

Belle ne pouvait pas le regarder partir aussi facilement sans rien dire, pas alors que clairement la situation la rendait malade. Elle voulait qu’il sache à quel point elle lui en voulait. Elle voulait lui faire comprendre sa souffrance tout en sachant qu’elle n’avait pas le moindre droit d’agir de la sorte. Des deux Casey était celui qui agissait le plus normalement dans cette situation et, quelque part, l’Américaine l’admirait pour ça. Lorsqu’il considérait ne pas avoir à s’impliquer dans une relation il le faisait alors qu’elle … et bien il n’y avait qu’à voir l’état dans lequel elle se trouvait désormais. Elle se faisait presque peur et elle savait que si elle ne parvenait pas à se contrôler un tant soit peu elle allait exploser. Voilà des jours – si ce n’était pas des semaines – qu’elle pensait à lui, qu’il hantait pratiquement chacune de ses pensées au point de la rendre littéralement folle. Belle passait une grande partie de son temps à penser à lui ainsi qu’à rêver du moment où elle le reverrait pour être saisi de l’euphorie qui la gagnait à chaque fois qu’elle se retrouvait dans ses bras. Elle se sentait si stupide maintenant, une véritable pré-pubère qui s’extasiait sur le gars qui la faisait craquer. Oui, Casey la faisait fondre même si elle avait été assez douée pour le cacher jusque-là. Toutefois, elle ne pouvait pas faire comme si de rien n’était, pas alors que son cœur s’emballait un peu trop lorsqu’il était si près d’elle ou lorsqu’il la prenait contre lui.

Elle était stupide et probablement amoureuse, une simple constatation qu’elle ne voulait pourtant pas s’avouer, pas même alors qu’elle venait de quitter l’appartement au bord de la crise de nerfs afin de poursuivre le journaliste pour s’énerver contre lui. Belle refusait de le laisser s’en sortir aussi facilement quand bien même une petite voix ne cessait de lui répéter qu’elle était en train de se vendre et qu’elle aurait mieux fait de faire profil-bas. « C'était pas voulu! Tu crois que je me suis pointé à l'appart en choisissant au hasard une autre chambre que la tienne? » Bras croisés contre sa poitrine, l’Américaine ne le quittait pas du regard, mâchoire crispée avec la furieuse envie de lui en coller une, envie qu’elle refoula bien vite. « On a toujours fait en sorte que je ne croise pas tes colocs, je ne pouvais pas deviner que Norah vivait ici! Je l'ai suivie et voilà… tu voulais que je la plante en lui signalant que je passais par ton lit de temps en temps? » Continua-t-il, lui faisant d’autant plus prendre conscience de son idiotie. Si elle commençait à douter qu’il ne soit qu’une relation du type « amitié améliorée » pour elle, c’était clairement ce qu’elle était pour lui. Belle ignorait comment prendre la chose. Elle resta silencieuse, passant nerveusement le bout de sa langue sur ses lèvres afin de les humecter, serrant un peu plus ses bras contre elle comme pour contenir sa colère. « Évite de lui en vouloir, ou lui en parler... elle n'en sait rien. Si tu ne l'as pas réveillée entre temps… » Et ces paroles furent la goutte de trop.

L’interne laissa ses bras retomber le long de son corps et dévisagea Casey quelques instants, bouche bée et incapable de savoir quoi répondre à cette requête avant que les portes de l’ascenseur ne s’ouvrent et la fassent revenir à elle. « Dégage ! » Cracha-t-elle en le poussant de toute sa petite force dans l’ascenseur, le regard meurtrier et le guidant jusqu’au fond sans même se rendre compte qu’elle-même se trouvait à l’intérieur. « Que ça soit clair ! Je lui en voudrais si j’en ai envie mais pour le moment c’est toi que je déteste, toi et uniquement toi ! Tu n’as aucun droit de me demander quoi que ce soit ! » Sur ces mots, Belle se tourna prête à quitter l’ascenseur mais fit face aux portes closes de ce dernier. Appuyant rageusement sur le bouton pour les forcer à s’ouvrir, elle due se rendre à l’évidence que la descente avait été amorcée, de quoi l’énerver un peu plus. « Et merde ! » Grogna-t-elle en tapant l’une des portes avec colère avant d’appuyer son front contre ces dernières, paupières closes. Voilà qu’elle était à présent coincée avec l’homme qu’elle détestait le plus sur cette fichue planète jusqu’à ce que l’ascenseur ait gagné le rez-de-chaussée, des secondes qui lui paraissaient être déjà bien trop longues à son goût. Belle poussa un soupire mais continua de tourner le dos à l’Américain, tout contact visuel était hors de question, pas si elle tenait à éviter tout excès de colère qui la pousserait à lui en coller une comme elle en mourrait d’envie depuis quelques minutes.

Encore une fois, Casey prouvait qu'il pouvait être complètement irresponsable, sans la moindre réflexion quant aux personnes qui l'entouraient et qu'il pouvait blesser sans chercher à le faire. Le journaliste avait beau se répéter n'avoir rien fait de mal, être tout à fait en droit de s'amuser avec qui bon lui semblait, la culpabilité qu'il ressentait lui prouvait tout le contraire. Qu'il le veuille ou non, l'américain avait fini par s'attacher à la petite soeur de son ex colocataire et la trahir n'avait pas fait partie de ses plans. Tout comme s'intéresser à elle d'ailleurs, du moins plus qu'il ne tenait à tout autre conquête passagère. Il n'avait pas réfléchi une seule seconde en commençant cette relation et cela avait plutôt bien fonctionné jusqu'ici : ils passaient de bons moments sans la moindre prise de tête, soit la relation parfaite pour un gars allergique aux relations comme lui. Au final, il en était au point ou il refusait de lui rendre des comptes mais se sentait obligé de le faire, non pas pour faire plaisir à la jeune femme mais bien parce que sa conscience ne pouvait pas en supporter autant. A cet instant précis, Casey se maudissait simplement d'avoir coucher avec elle à plusieurs reprises, alimentant involontairement leur "relation" qui n'en était pas une et qui les menait à cette scène aujourd'hui. Il se maudissait mais n'arrivait pas à regretter les moments passés en sa compagnie.

De marbre devant l'ascenseur, il serrait la mâchoire en espérant de tout coeur que la conversation s'arrête là. Casey venait sans doute de ruiner tout ce qu'il y avait - ou n'y avait pas entre eux - et savait parfaitement qu'ils n'étaient pas prêts de se revoir. Quitte à ce que ce soit le cas, partir sans un mot lui convenait parfaitement. Qu'il tente de s'expliquer ou non, son geste n'était pas vraiment pardonnable et Belle allait le maudire, autant donc fuir la conversation, il était très doué à ce petit jeu. La facilité, toujours. « Dégage ! » C'est ce qu'il espèrait, de tout coeur et c'est précisément à ce moment que l'entrée lui apparaissait, lui permettant de répondre positivement à la requête de la jeune femme. Il faut croire que s'y rendre seul ne suffisait pas à libérer la rage de belle qui le poussait à présent, le prenant par surprise au point de le faire reculer d'un bon mètre, heurtant ainsi de son dos le fond de l'ascenseur. Casey ne réagissait pas, se contentant de se rattraper et de l'observer sans un mot et surtout retenant son envie de sourire face à la maigre force qu'elle utilisait pour s'en prendre à lui. Le journaliste préférait ne pas faire le fier à présent mais plutôt la laisser vider son sac, lui faire part de sa colère une bonne fois et le laisser partir ensuite. « Que ça soit clair ! Je lui en voudrais si j’en ai envie mais pour le moment c’est toi que je déteste, toi et uniquement toi ! Tu n’as aucun droit de me demander quoi que ce soit ! » Baissant les yeux, Casey battait en retraite et n'avait rien à répondre à ça. Il ne pouvait pas changer ce qu'elle ressentait contre ou pour lui et l'avait mérité, assez pour que son orgeuil ne le pousse même pas à réagir. Il s’inquiétait pour Norah, pour la confiance qu'elle avait mit en lui - et donc aux hommes en général - et qu'elle allait perdre à l'instant ou Belle allait tout lui avouer... mais cela restait le moindre de ses soucis à l'heure actuelle. Après tout, il la connaissait à peine, contrairement à Belle qu'il avait appris à découvrir ces derniers mois, tant physiquement que mentalement. « Et merde ! » Un sourire se dessinait sur ses lèvres, sourire qu'il était fier de ne pas lui montrer vu qu'elle lui tournait le dos et qu'il cachait donc rapidement.

L'américain laissait quelques secondes de silence s'écouler, réfléchissant à la meilleure façon de reprendre la conversation - bien que l'idée de ne pas prononcer un mot jusqu'au zéro lui passait par l'esprit aussi. « Ta réaction est un peu excessive pour quelqu'un qui ne fait que s'amuser, qui ne veut pas s'attacher. » Finissait-il par lâcher, bien qu'il craignait toujours la suite. Au lieu de s'excuser - ce qu'il avait de toute façon déjà fait - il l'attaquait de plus belle, mais dans le simple but de voir ce qu la gênait réellement. « Ta coloc' ou la première que je vais croiser en sortant, ça change quoi au juste? » Mode provocation activé, Casey ne savait même pas ou il cherchait à en venir. Peut-être obtenir la preuve qu'elle tenait à lui comme il tenait à elle, ce qui était complètement ridicule puisqu'il ne risquait pas de l'admettre. « Il n'a jamais été question qu'il n'y aie que nous deux ou alors tu as oublié de me prévenir... Regarde moi et jure moi qu'il n'y a eut personne d'autre depuis que ça a commencé? Parce que je suis certain que ce n'est pas le cas. Il est ou le problème exactement Belle? » Casey ne voulait pourtant pas l'entendre, il ne voulait pas savoir qu'elle s'était retrouvée dans les bras d'un autre homme entre deux moments passés avec lui mais il avait la certitude que c'était arrivé. C'était le genre de chose qu'il pouvait aisément ressentir et il avait pris sur lui pour ne pas lui poser de question à ce sujet, fermant simplement les yeux. Il avait en quelques sortes espéré qu'elle en fasse autant, colocataire ou ps puisqu'au final, cela restait une autre fille, peu importe la relation entre elles.

Voilà qu’elle se donnait en spectacle ! Ce n’était clairement pas sa soirée ou plus exactement sa nuit. Elle était hors d’elle et priait intérieurement pour que l’ascenseur arrive au plus vite à destination afin de pouvoir s’éloigner au maximum de l’Américain et de prendre la fuite au plus vite. Qu’importe qu’elle ait à monter les escaliers au pas de course, elle souhaitait tant s’éloigner à cet instant que le moindre effort ne lui posait pas de problème, pas même alors qu’elle était épuisée et ce autant physiquement que mentalement. Elle n’avait pas la moindre envie de rester plus longtemps en présence du jeune homme et dans cet ascenseur elle se sentait bien trop proche de lui comme si le simple fait de se retourner aurait comme conséquence de se retrouver nez à nez avec lui. Belle avait bien conscience de totalement délirer. Elle était épuisée et regrettait d’avoir quitté l’appartement sur un coup de colère. Elle regrettait son lit, le calme de sa chambre et le fait d’ignorer totalement que dans une chambre voisine Casey se trouvait dans les bras de l’une de ses colocataires. A cette pensée, l’Américaine sentit la rage redoubler en elle. Serrant fermement la mâchoire, paupières closes, elle lutta pour ravaler les larmes qui venaient lui picoter les yeux.

Ce n’était absolument pas le moment de se mettre à pleurer, elle ne pouvait pas se permettre de craquer, pas alors que Casey se trouvait derrière elle, pas alors qu’elle n’était pas supposée être autant attachée à lui que ce qu’elle pouvait pourtant être. Pourquoi fallait-il que cela lui tombe dessus ? Elle avait pourtant toujours réussi à ne pas s’attacher aux hommes avec qui elle avait une aventure. La jeune femme avait beau espéré avoir un jour une relation digne de celle de ses parents, elle avait toujours réussi à être détachée au maximum et ce fut le cas avec le journaliste … dans les débuts. Désormais, elle se surprenait à penser à lui trop régulièrement. Elle en venait à se rendre malade en l’imaginant dans le bras d’autres femmes même si c’était toujours plus acceptable que l’une de ses colocataires. Belle frappa son front contre le métal froid des portes de l’ascenseur. Il fallait réellement qu’elle sorte de là au plus vite. Pourquoi avait-il fallu qu’elle le pousse à l’intérieur ? Après tout Casey était capable d’entrer dans l’ascenseur par lui-même et c’était sans doute ce qu’il espérait avec impatience afin de pouvoir s’éloigner de sa folie. Décidemment, elle ne faisait qu’enchaîner les erreurs cette nuit, comme quoi elle aurait bien mieux fait de rester sous sa couette malgré la faim qui la tiraillait.

Paupières toujours fermées, Belle poussa un long soupire dans l’espoir d’évacuer un peu sa frustration mais le simple fait de sentir la présence de l’Américain derrière elle lui suffisait à se sentir de nouveau mal au point d’avoir besoin de lutter à nouveau contre les larmes qui l’assaillaient. Elle était pourtant plus forte que ça, son sale caractère l’avait toujours aidé mais voilà qu’il la fuyait au moment où elle avait le plus besoin de lui. « Ta réaction est un peu excessive pour quelqu'un qui ne fait que s'amuser, qui ne veut pas s'attacher. » Belle serra de nouveau les dents. Sans blague ? Lui aussi l’avait remarqué ? Toujours dos à lui, elle ouvrit lentement les yeux et fixa le gris du métal sans prendre la peine de lui répondre quoi que ce soit. « Ta coloc' ou la première que je vais croiser en sortant, ça change quoi au juste? » Elle continua de lutter contre l’envie de pleurer. Elle continua de se maudire intérieurement pour sa faiblesse et pour avoir laissé sa colère ainsi que sa douleur diriger ses actions. Elle continua de lui tourner le dos et de regarder droit devant elle tandis que l’ascenseur continuait sa descente et plus que tout elle continua de se murer dans son silence. « Il n'a jamais été question qu'il n'y ait que nous deux ou alors tu as oublié de me prévenir... Regarde-moi et jure-moi qu'il n'y a eu personne d'autre depuis que ça a commencé? Parce que je suis certain que ce n'est pas le cas. Il est où le problème exactement Belle? » L’hésitation s’empara d’elle quelques secondes au cours desquelles son cœur manqua plusieurs battements.

Lentement, elle se tourna, lui faisant enfin face. Ses iris se posèrent vers son regard aussi douloureux que cela pouvait être pour elle. « Ce n’était pas une personne avec qui tu vis, ce n’était pas dans ton propre appartement. » Dit-elle d’une voix dénuée d’émotions. Elle ne pouvait pas lui jurer qu’elle n’était pas allée voir ailleurs, ce serait mentir, et pourtant lorsqu’elle avait commencé à se rendre compte de ce qui se passait dans sa tête à chaque fois qu’elle pensait à lui elle avait mis un terme à sa « relation » sans avoir vraiment conscience de ce qui se passait réellement en elle. « Et tu tiens à savoir où est le problème ? Le problème il est dans ma tête. Je n’ai rien vu venir, rien du tout ! Ce n’était pas dans mes intentions de m’attacher et ça s’est fait sans que je m’en rende compte et maintenant je suis la pauvre fille stupide qui commence à avoir des sentiments en contradiction avec sa façon de penser pour un type qui lui au moins a su respecter ce qui a été dit dès le début, voilà où est le problème. » Belle massa l’arête de son nez et détourna son regard. De toute manière au point où elle en était la vérité était la seule chose capable de la libérer un tant soit peu même si elle était douloureuse qu’elle allait tomber de très haut … si ce n’était pas déjà le cas.