Penchée au-dessus de la table du salon depuis près de deux bonnes heures, la jeune femme s’efforçait de rester concentrer. Entre ses doigts elle tenait un crayon qu’elle s’amusait à balancer comme si ce geste allait lui permettre de la détendre tout en l’aidant à se concentrer d’autant plus sur ses révisions. L’appartement qu’elle partageait avec Lullaby – et donnant sur la plage de Coney Island – était bien calme en cette fin d’après-midi et ce n’était pas la jeune femme qui allait s’en plaindre. Ses examens se rapprochaient à grands pas et puisque l’Irlandaise s’était avant tout concentrée sur l’enregistrement de son album, elle se devait de mettre les bouchées doubles si elle espérait obtenir son année. Le seul désavantage que la jeune femme pouvait avoir à l’heure actuelle était le fait qu’elle devait se contenter des cours envoyés par Columbia plutôt que de pouvoir discuter avec des professeurs à l’université en cas de besoin, toutefois elle aimait bien trop sa vie pour mettre sa carrière entre parenthèses si bien que, comme d’habitude, Deirdre évitait de se plaindre et gardait ses commentaires pour elle.

La luminosité dans la pièce diminuant en même temps que le soleil qui se couchait, elle se redressa sur la chaise et étira son dos qui émit un léger craquement avant d’en faire de même avec son cou. A force de ne quasiment pas dormir ces dernières nuits, elle avait la sensation que son corps était en train de se casser doucement mais sûrement et elle était persuadée qu’elle aurait pu avoir n’importe quel matelas, la sensation aurait été exactement la même. Lâchant son crayon qui alla se loger entre les pages du livre qu’elle avait gribouillé de différentes couleurs fluorescentes, la demoiselle quitta sa chaise pour rejoindre la cuisine à quelques pas où elle se prépara – comme à son habitude – un thé afin de se changer les idées. Prenant ensuite place sur l’un des meubles de la pièce, sa tasse brûlante dans une main, iPhone dans l’autre, elle entreprit de lire ces derniers mails lorsque son application disparue au profit de l’écran d’appel sur lequel apparu le prénom de Nate ce qui réveilla immédiatement la curiosité de l’Irlandaise qui s’empressa de décrocher et de porter son téléphone à son oreille.

Aussitôt l’Australien enchaîna ses mots à une telle vitesse que la jeune femme due lui demander de répéter plus calmement avant de comprendre aux pleurs qu’elle entendait en arrière qu’elle ferait mieux de le rejoindre. Un mot laissé à sa colocataire lui demandant de s’occuper d’Ewan le temps de son absence, Deirdre attrapa ses clés, son sac et sa veste puis quitta l’appartement pour rejoindre sa voiture et conduire jusqu’au logement de Nate. Arrivée à Staten Island, la jeune femme prit soin de se garer ni trop loin ni trop près de l’appartement du jeune homme et après avoir vérifié qu’aucun paparazzi n’étaient dans les parages elle gagna l’appartement de l’Australien, pénétra dans le hall et arriva devant la porte du logement où elle pressa le bouton poussoir de la sonnette. Entendant du mouvement à l’intérieur, elle garda la tête levée jusqu’à voir apparaitre son ami derrière la porte, l’un de ses fils dans les bras et qui était visiblement le petit bout qu’elle avait entendu pleurer lors de l’appel du père. « Désormais tu m’appelleras wonder woman. » Lâcha-t-elle dans un petit sourire avant de reporter son attention sur le petit garçon qui pleurait à chaudes larmes et qui la fixait sans pour autant s’arrêter. « Qu’est-ce qui se passe ? » Demanda-t-elle plus sérieusement en restant sur le seuil de la porte, adressant une petite moue boudeuse à l’enfant qui ne la quittait plus du regard.

Malgré le sale caractère qu’elle pouvait parfois avoir, Deirdre était une jeune femme tout de même très altruiste, parfois même un peu trop. Le bien-être des autres était quelque chose qui avait une grande importance pour la jeune femme qui ne supportait pas l’idée que des personnes puissent vivre chaque jour dans la misère ou qu’elles puissent être sans cesse malheureuses. Même si elle n’était pas née dans un milieu modeste mais plutôt aisé – voire plus encore – la jeune femme avait toujours porté beaucoup d’intérêt pour ce monde auquel elle aurait très bien pu appartenir si elle n’avait pas été adoptée par les O’Dwyer. L’Irlandaise s’efforçait de toujours voir les choses du bon côté même si ce n’était pas toujours simple, néanmoins elle jugeait s’en sortir plutôt bien au point d’être capable d’aider son prochain aussi souvent qu’elle le pouvait. Aller vers les autres était une chose qu’elle adorait et sa réputation lui permettait de prendre part à plusieurs associations afin d’aider les plus démunis, un fait très important aux yeux de la jeune femme qui donnait toujours le maximum d’elle-même pour venir en aide lorsqu’elle le pouvait. Mais, si elle le faisait avec de parfaits inconnus, c’était d’autant plus le cas avec ses proches, avec les personnes qui la soutenaient tous les jours et qui la connaissaient parfois mieux que la jeune femme elle-même. Dès qu’un proche avait besoin d’aide et l’appelait à la rescousse Deirdre était capable de laisser tomber tout ce qu’elle était en train de faire pour faire ce qu’elle considérait comme son devoir.

Elle savait qu’agir ainsi avait ces défauts, d’autant plus lorsqu’elle avait cette fâcheuse tendance à s’oublier au profit d’autrui, mais elle était ainsi et même si elle s’efforçait de se reprendre, c’était un trait de sa personnalité bien trop ancré en elle pour que la jeune femme soit capable de totalement le modifier. Alors, bien évidemment lorsque Nate l’avait appelé pour lui venir en aide l’Irlandaise n’avait pas hésité un seul instant. Elle avait quitté son appartement, laissant de côté une bonne fois pour toute les paroles qu’elle était supposée écrire au plus vite pour aller porter de l’aide à l’Australien qui l’avait toujours soutenu au point de rompre tout contact avec Chris qui, à la base, avait tout de même était celui qui avait permis à Nate et Deirdre de se rencontrer. Une fois sur place et sa touche d’humour bien à elle lâchée, son attention s’était immédiatement portée sur le petit bonhomme que son ami tenait dans ses bras et qui semblait bien malheureux. « Rentre wonder woman il faut que tu m’aides vraiment là ! » Son regard voyagea aussitôt vers l’Océanien et après un bref mouvement de la tête, la jeune femme s’exécuta, rentrant dans l’appartement de Nate de sorte qu’il puisse refermer la porte derrière eux et gagner un peu d’intimité. « Topo rapide: Ilian a une vilaine otite selon le doc, il ne fait que pleurer depuis la crèche, il ne veut pas dormir, et Lukyan était calme jusqu’à maintenant mais il ne veut pas dormir sans son frère… Sauf qu’il commence à fatiguer lui aussi donc devient couinouille… Je n’y arrive plus, j’ai eu une grosse journée en plus je suis épuisé ! Et les médicaments ne font pas effet, enfin à ce que je vois ! » Attentive aux paroles du jeune père, une petite moue se dessina sur le visage de l’Irlandaise avant qu’un petit sourire n’étire le coin de ses lèvres en voyant Lukyan venir se cacher dans les jambes de son père. Vraiment, les enfants étaient ce qu’il y avait de plus mignons au monde, même lorsqu’elle pensait l’inverse.

« Je vois … » Commença-t-elle en reportant son attention sur le père de famille et l’enfant qui se trouvait encore dans les bras de ce dernier. « Ewan a eu quelques soucis de digestion l’an dernier et il passait son temps à pleurer, j’ai cru que j’allais devenir folle et Lulla aussi, rien ne le calmait. » Une période qui avait été un véritable calvaire pour la jeune chanteuse qui n’avait pas eu une seule nuite complète de sommeil pendant pratiquement une semaine. Ceci dit, Deirdre fit un pas vers Nate et Ilian en tendant les bras vers le petit garçon, lâchant un « viens par là bonhomme » en le prenant dans ses bras pour commencer à le bercer tout en faisant les cents pas devant l’Australien, ses iris chocolat allant se poser aussitôt sur lui. « J’ai découvert ensuite que le bercer l’aidait à se calmer, mais j’ai toujours eu un avantage sur toi vu que je n’ai qu’un fils à charge. » Un nouveau petit sourire naquit sur les lèvres de l’Européenne qui ne cessa pas son geste tandis qu’elle s’adressait à son ami. Puis, baissant à nouveau les yeux vers Ilian, ses yeux croisèrent ceux de l’enfant qui ne la lâchait plus du regard et même si des sanglots semblaient toujours le secouer, il se calmait tout doucement permettant ainsi à Deirdre de s’inquiéter un peu plus de Nate. « Qu’est-ce qui a pu te vider autant de ton énergie aujourd’hui ? » Demanda-t-elle en continuant de bercer Ilian dans ses bras. Elle connaissait le rythme de vie plutôt mouvementée du jeune homme. Elle savait pertinemment ce par quoi il avait dû passer ces derniers temps et c’était bien assez pour expliquer le fait que l’Irlandaise s’inquiétait sincèrement pour lui.

C'était un don qu'elle avait selon certaines personnes, un don appréciable et qu'elle était toujours prête à mettre en avant au besoin. Les enfants avaient toujours apprécié la présence de la jeune femme sans qu'elle ne sache réellement pour quelles raisons, mais c'était ainsi et l'Irlandaise n'allait pas s'en plaindre, pas en étant elle-même mère. Depuis la naissance d'Ewan elle avait eu le temps de prouver ce dont elle était capable. Ses parents n'avaient été que très peu enchantés par la nouvelle de sa grossesse - pas étonnant lorsqu'on savait qu'à l'époque leur fille adoptive n'avait que dix-neuf ans - mais ils l'avaient soutenu malgré tout et surtout la jeune femme avait su prouver qu'elle était capable d'être une bonne mère malgré la carrière qu'elle avait lancée grâce à X-Factor. Avec les deux années qui s'étaient écoulées elle n'avait fait que développer ce "don" avec bien d'autres enfants dont certains dans d'autres pays grâce aux associations qu'elle avait accepté d'aider. Mais les enfants avec lesquels la jeune femme aimait le plus être étaient ceux de ses proches, comme les fils de Nate même si elle n'avait pas tant eu l'occasion que ça de passer du temps avec les fils de son ami, sa carrière et sa vie privée l'obligeant parfois à être distance contre son gré. Toutefois, dès que quelqu'un semblait avoir besoin de son aide l'Irlandaise répondait toujours présente, comme elle venait de le faire ce soir même. Peu importait l'importance de ce qu'elle était en train de faire, elle lâchait toujours tout pour venir en aide à ceux qui l'appelaient à la rescousse.

L'Australien avait été là pour elle dès sa rupture avec Chris et il ne l'avait jamais abandonné, pas une seule fois et ce même si cela le poussait à tirer un trait sur une amitié de longue date alors, évidemment, la jeune femme se devait de lui rendre la pareille. Nate ne lui aurait pas fait un résumé de ce qui se passait que l'Européenne l'aurait deviné au regard brillant du petit Ilian. Il était malade, c'était une chose qu'elle savait reconnaître à cause de toutes ces nombreuses fois où Ewan était lui-même tombé malade depuis sa naissance. C'était dans ces moments-là que les enfants étaient les plus difficiles à calmer, à côté de cela les crises pour un rien semblaient être une partie de plaisir, mais Deirdre savait prendre sur elle ... le plus souvent. Ainsi, l'enfant dans ses bras, elle ne tarda pas à le bercer doucement en faisant les cents pas, une habitude qu'elle avait pour calmer Ewan lorsqu'il n'était pas bien, une habitude qui l'aidait à s'endormir rapidement dans les bras de sa mère, une habitude qui semblait calmer le petit garçon tout contre elle. « Je l’ai pris dans mes bras, j’ai tenté de le bercer, de faire les cents pas mais je n’ai pas les mêmes atouts que vous pouvez avoir vous les femmes si tu vois ce que je veux dire ! » Deirdre leva les yeux vers Nate. Ses sourcils se froncèrent légèrement avant qu'elle ne parvienne à saisir son insinuation, un petit sourire ne tardant pas à naître au coin de ses lèvres avant qu'elle n'opine du chef en continuant de bercer l'un des fils de son ami. « Je pense juste que dans ce genre de situation leur maman leur manqué beaucoup trop… » Cette fois une expression triste et compréhensive se peint sur le visage de l'Irlandaise.

Elle n'avait jamais eu à perdre l'un de ses parents et elle espérait sincèrement ne pas avoir à vivre une telle expérience, mais les deux petits garçons présents se devaient de vivre sans leur mère à leur si jeune âge, elle comprenait le fait que Nate puisse être débordé par moment. « Pour répondre à ta question, j’ai eu une grosse réunion à préparer depuis plusieurs jours et cette grosse réunion s’est passée aujourd’hui… Je n’en ai pas souvent, mais le peu que j’ai ça tombe mal… Comme d’habitude ! » Lui adressant un sourire compatissant, Deirdre s'arrêta de marcher sans quitter l'Océanien du regard, puis ce dernier dévia vers le petit garçon dont les paupières se fermèrent doucement. « Et toi? Qu’est-ce que tu as fait de ta journée ? Tout va bien ? » Une moue étira ses traits pour tout début de réponse. Aussi tranquillement que possible la jeune femme se permis d'aller s'asseoir sur le canapé, Ilian toujours les bras et qui commençait à s'endormir avant qu'elle ne pose son regard en direction du père du garçon. « Moui ... Disons que je sais ce que ressent tout artiste atteint du syndrome de la page blanche. » Un soupire lui échappa tandis que Deirdre s'enfonçait dans le canapé en caressant doucement la petite main d'Ilian à l'aide de son pouce. « Mais je ne me plains pas, je pourrais avoir une vie bien pire ! Juste un petit manque affectif seulement je peux m'en prendre qu'à moi-même. » Et c'était peu dire. Depuis la rupture avec le père de son fils - soit deux ans plus tôt - l'Européenne refusait de s'attacher aux hommes voire même d'en laisser un seul entrer dans sa vie. Elle savait avoir besoin d'un homme à ses côtés, elle savait avoir besoin d'amour mais son manque de confiance à la gente masculine la poussait à agir de la sorte, mais peut-être parviendrait-elle à s'ouvrir de nouveau un jour …