L’idée que l’on puisse prendre le temps d’aller repeindre ou prendre des photos après un long moment avait traversé mon esprit. J’avais donc pris la direction de la plage afin de pouvoir assouvir ma pulsion de peindre. Il était donc pour une fois un lieu qui pourrait m’apaiser un peu plus. La mort de ma mère était bien entendu un peu loin, mais sa date était assez présente. Et je comptais juste prendre le temps de ne pas l’oublier. Alors que j’avais pris mon sac, de quoi dessiner et cette fameuse sensation que tout irait de travers, je me posais alors sur une portion de sable sachant que pour le moment, je pourrais donc peindre un peu. Ainsi, alors que je prenais mon crayon pour utiliser un peu mon imagination, je recevais sur le coin de la tête, un parasol qui s’était fait la malle. Alors que je me massais la tête, la personne venait s’excuser alors que je voyais bien que sur sa tête cela ne lui dérangeait pas tellement, il s’agissait d’un homme assez beau, je lui disais en souriant bien que ma tête me faisait souffrir : « Vous avez une drôle de façon de draguer vous… » Tandis que je ne souriais plus, je lui faisais donc comprendre que je ne tenais pas à le voir plus longtemps. Reprenant mon carnet, je voulais donc peindre à nouveau, il y avait un peu de soleil certes mais la vue sur la mer me plaisait bien. Le vent était presque léger et il en fallait peu pour que les serviettes s’envolent pour de bon. Cela ne tarda pas trop à me prendre pour cible, alors que je peignais une serviette m’arriva en plein sur la main. Regardant autour de moi pour voir tout cela pouvait venir, je ne voyais personne. La posant à côté de moi, je patientais le temps de savoir qui avait pris ma main pour une cible géante. Sans doute que la personne voudrait récupérer son bien par la suite.

Cette journée-là, Lizzie avait dans l’idée d’aller jeter un œil aux plages New Yorkaise. Bien qu’elle s’attendait à ce que celle-ci n’arrivent pas à la cheville des plages de son pays natal, elle espérait tout de même de retrouver ce sentiment marin qu’elle avait perdu depuis son arrivée en Amérique. Ainsi, emballant tout le nécessaire dont elle avait besoin pour passer une agréable journée, soit un livre, un chapeau, de l’écran solaire, une serviette et un maillot de bain déjà enfilé sous ses vêtements, la jeune femme était prête à partir, n’ayant pas une seule seconde à perdre, ses colocataires étant toujours endormis et ne désirant pas partager ce premier moment de plage avec quelqu’un d’autres. Il y a de ces moments où la solitude faisait du bien à la jeune Australienne et cette matinée en faisait partie.

Arrivée à la plage, quelle ne fut pas sa joie de constater que celle-ci était étonnement pratiquement vide. Quelques familles se baignaient, une jeune femme semblait peindre plus loin sur la plage et d’autres, comme elle, avaient optés pour la lecture. C’est ce qu’Elizabeth fit durant plus d’une demie heure avant que la faim ne s’empare d’elle et qu’elle se dirige vers le kiosque le plus près, faisant l’achat d’un plateau de sushis qu’elle ramenait vers son modique campement, lorsqu’elle réalisa qu’il manquait un élément important au-dit campement. Fronçant les sourcils à la fois d’étonnement et de mécontentement, Elizabeth alla déposer son repas dans son sac de plage avant de se mettre à la recherche de la fameuse serviette, la repérant finalement à côté de la femme qu’elle avait remarqué plus tôt pour être en train de peindre. Elle se dirigea donc vers elle, un peu embarrassée de devoir la déranger durant sa peinture, ne sachant pas comment allait réagir la peintre.

Une fois arrivée à sa hauteur, Elizabeth sourit doucement à la jeune femme puis commença : « Excusez-moi, je crois que ma serviette a volé dans votre direction plus tôt… je m’excuse à l’avance du désagrément que cela aurait pu vu poser » Ajouta la jeune Australienne, son accent très prononcé et légèrement embarrassé de devoir déranger la peintre trahissant dès le moment où elle ouvrit la bouche qu’elle était loin d’être New Yorkaise.

« Ce n’est pas de votre faute, c’est le vent. » J’avais entendu un accent qui était assez particulier. Pour ma part venant de Porto Rico, j’avais aussi un accent. Seulement, peu de gens le reconnaissaient étant donné qu’il ne l’entendait pas souvent. Refermant mon calepin, j’avais encore du mal à montrer mes peintures, mais ma toile, elle était visible à la vue des gens. Il y avait cette mer qui s’agitait mais qui finalement était presque calme. Elle avait son air bleu et doux, elle avait aussi une impression de violence alors qu’elle rejoignait les rochers sur le bord de la plage. Je trouvais que cet endroit n’était rien comparé à mon île. C’est vrai, on ne peut pas toujours êtes satisfait des endroits qui ne sont pas trop dans nos cœurs. Mon île natale était et sera toujours dans mon cœur en premier ! Je disais patiemment : « Elle est belle n’est-ce pas cette vue ? » Que dire de plus ? Je ne connaissais pas la personne, je ne savais pas d’où elle venait, je savais juste une chose : elle n’avait pas fait exprès pour sa serviette. Elle était juste là devant moi. Je me contentais donc d’attendre que la suite se fasse. Il y avait cette forte probabilité que je discute avec cette inconnue. Sauf que je ne savais pas vraiment quoi dire. Il y avait aussi l’envie de l’envoyer balader, mais cette compagnie finalement me faisait du bien. Je n’allais pas parler de ma mère ni rien. Juste avoir un peu de compagnie finalement, cela n’était pas totalement désagréable. Tout en préférant ne pas continuer sur ce blanc, je reprenais ma peinture, et je disais à la jeune femme : « Si vous voulez vous pouvez vous asseoir au lieu de rester debout. » Même si on était à la plage, il était bien nécessaire de dire si la personne pouvait rester ou pas. Je lui donnais sa serviette en souriant.

Lizzie sourit lorsque la jeune femme l’excusa. Au moins, elle ne lui tenait pas rigueur de sa serviette avide de liberté. Elle reprit ensuite la serviette qu’on lui tendit et, serrant son sac de plage contre elle, elle ne put s’empêcher de jeter un regard rapide au calepin de dessin de la jeune femme, puis à la toile qu’elle peignait. La toile dépeignait très bien le paysage qui s’offrait à leurs yeux et suivant du regard l’horizon, elle hocha la tête avant de répondre lorsque on lui demanda si elle trouvait la vue belle. « Oh oui, elle est très belle. » Elle prit une pause, replaça une mèche de cheveux qui volait au vent, derrière son oreille, puis repris : « L’océan… si beau et si dangereux à la fois. J’imagine que c’est parce que je suis née près de l’eau, mais l’océan m’a toujours beaucoup attiré. » Dit-elle tout en ramenant son regard vers la jeune femme assise devant elle. « C’est un morceau de la maison qu’on peut toujours avoir avec soit. »

On lui offrit ensuite de s’assoir, ce que Lizzie fit après avoir étendu sa serviette à la gauche de la jeune femme. Puis, posant son sac, elle rejeta un coup d’œil à la toile. « C’est très jolie ce que vous peignez. Pour ma part, je me suis essayée à la peinture, mais n’étant pas incroyablement talentueuse, je me contente de la conserver et d’aider à la préserver. » Dit-elle humblement, ayant toujours admiré ce talent qu’elle aurait aimé avoir, mais qu’elle n’avait pas. Puis, réalisant qu’elle ne s’était toujours pas présentée, elle tendit la main, reprenant la parole : « Excusez mes manières, je ne me suis même pas présentée. Elizabeth King. » Dit-elle sur un ton sympathique, mais craignant tout de même de déranger l’artiste dans son élan.

« Je suis née sur une île. Je ne peux pas me passer de la plage, il faut toujours que je vienne ici assez souvent afin de prendre un peu l’air. C’est vrai que la mer est un besoin pour les gens qui ont vécu sur une île ou autre lieu face à l’océan. » Je ne savais pas pourquoi est-ce que je l’avais dit, je trouvais juste que pour le moment, je désirais simplement continuer de faire et de voir la plage et l’océan. Il n’était pas le même que celui que je voyais de Porto Rico, je comprenais alors les gens qui préféraient parfois la plage et donc aimer ce genre d’endroit qui finalement se trouvait apaisant pour l’esprit et le corps. Je continuais donc de peindre et je savais que la suite serait importante pour moi. Je m’apercevais que la jeune femme avait aussi parlé une fois de plus sur l’art et j’écoutais alors patiemment. Il ne fallait pas que la vexe ou que je la blesse. Il était nécessaire pour moi que je sois gentille même si le jour finalement était un peu triste.

« Je repeins à cause d’une amie qui me pousse à le faire….Sauf que je ne pense pas que cela soit très bien. Je peins juste pour mon plaisir. Merci pour le compliment, on a tous un don. Il suffit juste de le travailler. La conserver ? Vous travaillez dans un musée ? » Je trouvais qu’il fallait des gens afin de garder cet art qui se baladait dans les musées. J’appréciais fortement y mettre les pieds, et j’y allais souvent pour me balader et j’avais toujours une idée en plus afin de peindre par la suite. Même si j’avais mon atelier maintenant chez moi, je prenais le temps de sortir quand même un peu. En y pensant Iloa devait être sur la terrasse sous la verrière au frais. Le verre que j’avais mis était bien pour garder la pièce au frais. Puis sinon, elle avait l’arbre dans le pot qui lui faisait de l’ombre. Je me demandais bien si elle n’allait pas faire le bazar dans la maison. Mais bon, il fallait donc aussi prendre son mal en patience. Voyant la main de mon interlocutrice, je me présentais : « Olive Denali, enchantée. »

Lizzie écoutait attentivement ce que son interlocutrice avait à lui dire et hocha de la tête, complètement d’accord avec ce qu’elle venait de lui dire. Elle n’aurait pas pu mieux mettre en mots ce qu’Elizabeth ressentait depuis son départ de Sydney. L’appel de la mer, parrait-il que ça toucherait toux les natifs des rives de l’océan. « Je n’aurais pas pu dire mieux » Répondit la jeune Australienne, souriant à son interlocutrice. On pouvait remarquer une pointe de nostalgie dans sa voix, alors qu’elle parlait de chez elle et de la mer. « Même chose, je suis native de Sydney… l’eau fait partie intégrante de notre paysage. C’est une magnifique ville. » Puis, un silence confortable s’installa. Pas le genre de silence où les gens se regardent bizarrement en cherchant quoi dire. Non, le genre de silence de ces gens qui comprennent et qui n’ont pas besoin de parler.
Voyant que la jeune femme retournait à sa peinture, Lizzie jeta un nouveau regard à la toile, puis son estomac la ramena sur terre, gargouillant de plus belle. Elle se rappella alors la cause de la fugue de sa serviette et se penchant sur son sac, elle en ressortit la boîte de sushis qu’elle avait acheté plus tôt et entama son repas, ravie d’enfin de remplir l’estomac. Lizzie ranima ensuite la conversation, l’orientant vers, l’art cette fois. Elle écouta attentivement la jeune femme qui lui expliquait qu’elle peignait pour le plaisir avant de répondre à ses question. « Oui, je suis assistante conservatrice au Métropolitain Museum of Art. Je travaille très rarement dans les sections plus moderne, je me spécialise personnellement dans l’Antiquité, Rome plus précisément, mais il nous arrive très souvent de sortir de nos champs de spécialité. J’adore mon travail, ça nous permet de voir tellement de belles œuvres. »

« Enchantée Olive. » Puis, une fois les présentations faites, Elizabeth avala un autre morceau de sushi avant de reprendre la conversation. «Vous que faites-vous comme travail si la peinture est un hobby? »

« Porto Rico pour moi…Parfois, elle me manque trop, et bien que…Ma vie soit ici, c’est fou comme cette ville manque de mer. L’océan est là, mais cela n’est pas pareil. » Je continuais mas peinture, et je savais donc que la suite serait toujours amicale. Je m’arrêtais juste un instant, et je reprenais le temps de voir où est-ce que j’en étais. Je me rendais compte que j’avais sans doute oublié un peu plus l’océan et le fait qu’elle bouge un peu plus que d’habitude. Je me rendais compte que je devais en rajouter un peu. Je mettais plus de bleu avec mon pinceau, et je disais en souriant : « C’est fou comme les artistes ne sont jamais contents de finir leurs toiles. Je ne suis jamais satisfaite de mes peintures. Je les considère toutes comme inachevées. J’ai beau me dire que la perfection n’existe pas, je continue de courir après. » Je souriais tout en sachant que pour l’instant, il était donc intéressant pour moi de continuer de discuter sachant que cela me changeait les idées.

Je reprenais ma peinture et je ne voyais pas trop quoi dire d’autres. Il fallait bien l’avouer, mais pour le moment, je voulais juste peindre. Seulement mon interlocutrice m’avait posé une question. Et il était nécessaire que je réponde. « Je suis libraire. J’ai ma boutique. Je peins juste pour le plaisir. Cela me détend. » Alors que je me rendais compte qu’il m’était plus facile pour moi de continuer sachant que la conversation était lancée. « Je trouve que les livres sont un moyen de s’apaiser, on peut voyager, on peut faire des rencontres littéraires. Les gens sont amusants lorsqu’ils cherchent un livre, ils ont les yeux qui pétillent et ils essayent de trouver leurs bonheurs dans tous les ouvrages. C’est comme dans réparer les œuvres que vous avez, vous faites en sortes qu’elles durent pour faire sourire les gens. »

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