Installée sur la plage aux côtés de Matthew, leurs enfants, Tinga & son oncle Kid, Lula prit une profonde inspiration et apprécia une dernière fois de plus l’air iodée qui circulait dans ses bronches. Rien de telle qu’un printemps à Hawaï pour oublier le rude hiver qu’ils avaient subi à New York. Pour elle, ce qu’elle venait de vivre aujourd’hui ressemblait presque à une journée typique à Palapag. Excepté qu’il ne restait plus grand-chose de son île natale. Pourtant, Lula n’était pas triste. Loin de là. Ces vacances improvisées lui permettaient de prendre un peu de recul par rapport à ces derniers mois et de s’apercevoir de la chance qu’elle avait ; ses êtres chers étaient tous présents aujourd’hui et, malgré quelques tensions, chacun des partis faisaient des efforts pour s’assurer de la bonne entente générale. Ses relations avec Matthew – bien qu’étranges – s’étaient aussi nettement améliorées. Il était présent, toujours aussi doux avec leurs enfants et attentif aux besoins de toute la famille. C’était à cette occasion qu’il avait organisé ce séjour sur l’archipel, laissant Snow aux bons soins d’un ami qui disposait d’un immense jardin. Lula avait dû faire preuve d’une sacrée retenue pour ne pas lui sauter au cou en apprenant que Kidlat, Kina, Jenny, Walter et Julian seraient également de la partie et qu’elle pourrait peut-être surfer. Bientôt, ils quittèrent l’endroit pour retourner dans leur chambre d’hôtel respective et se préparer à dîner dans l’un des nombreux restaurants face à l’hôtel où leur table était déjà réservée. Pendant que père et fils étaient parties de leur côté, mère et fille se relayaient pour s’occuper des jumelles. Repues et propres, elles étaient maintenant sous la surveillance de Toyiah qui venait de sortir de la douche, lui cédant ainsi la place. Ce n’est qu’une fois devant le miroir que la philippine remarqua les effets du soleil sur son teint. Ses joues s’étaient pourvues d’un rose naturel et le sel de la baie avait éclairci ses cheveux ; sa mine était beaucoup plus reposée que quelques mois auparavant et son passage dans la douche ne fit que la délasser davantage. Lula en sortit avec cette impression de légèreté qui lui faisait presque oublier les quelques capitons installés durant sa grossesse et qu’elle cacha sous une robe ample aux couleurs estivales. Même sa longue crinière brune était en vacances car, pour les sécher, Lula les brossa longuement en les laissant onduler à leur gré. Pour le reste, ne voyant pas l’intérêt de se maquiller, elle appliqua juste une crème sur son visage et un baume pour hydrater ses lèvres gommées par le sel. Pour sa défense, Lula était une maman débordée ! Il fallait bien avouer que, même si Toyiah faisait une nounou formidable, la jeune maman ne pouvait s’empêcher d’interrompre sa toilette pour jeter un œil dans la chambre ce qui ne lui laissait que très peu de temps pour elle, finalement.

« Hey, are you girls ready ? » entendit-t-elle depuis la salle de bain où elle terminait de remplir le sac à langer des petites. « Almost done, I prepare the diaper bag. ». En tendant l’oreille, Lula devina que Matthew ne l’écoutait qu’à moitié, trop occupé à s’émerveiller devant les petites dernières sous la tirade de leur fille aînée. Lorsqu’elle quitta la salle de bain et fut témoin de la scène, un sourire se dessina naturellement sur ses lèvres et elle s’appuya légèrement contre le chambranle de la porte. En la voyant porter le sac en bandoulière sur son épaule – deux fois plus lourd que ce qu’elle avait connu – Matthew s’approcha aussitôt de son ex-femme pour la débarrasser. « Let me take that. ». Et Lula ne se fit pas prier. Au passage, elle ne manqua pas de remarquer sa tenue soignée, son rasage impeccable et l’odeur de son parfum qui lui firent regretter de ne pas avoir passé plus de temps dans la salle de bain. D'ailleurs, Lula renifla discrètement sa peau ; elle sentait le baume d’aloé vera pour bébés, bien que l'odeur était agréable, elle se surprit à grimacer et par réflexe, passa nerveusement une main sur sa robe comme si ce simple geste suffirait à la mettre en valeur. Tandis que les aînés s’éloignaient d’eux pour rejoindre Tinga, Matthew en profita pour lui murmurer quelque chose qui lui donna un peu de l’assurance qu’elle cherchait. « You look stunning in that dress. ». Lula coinça une mèche derrière son oreille et lui sourit doucement. « Thank you, you're handsome too... » répondit-elle rapidement, convaincue de faire pâle figure à ses côtés, avant de détourner le regard. Depuis qu’ils s’étaient parlé plus ouvertement à son retour de la maternité, Lula était beaucoup plus réceptive aux propos de son ex-mari. Ils passèrent une soirée plus qu’agréable en famille, dans le coin le plus intimiste du restaurant, à se rappeler de vieilles anecdotes, à rire aux éclats ou à s’extasier devant les jumelles qui s’étaient endormies dès l’arrivée des plats principaux entre un biberon et un change. Ils en étaient au désert lorsque Kidlat – sous le regard implorant de sa fille adoptive – mentionna la projection d’un film d’animation en bord de plage où ils souhaitaient emmener Toyiah & Mason. Sous les supplications de leurs enfants, leurs parents cédèrent sans trop avoir besoin d’y réfléchir ; ils étaient en vacances et sous bonne garde, après tout. « Ce n’est pas très loin, vous pouvez nous accompagner jusque là... » proposa Kid. « Mh, je ne serais pas contre une promenade mais c’est que l’air marin a épuisé ces demoiselles et je pense qu’elles seront plus à l’aise dans leur lit. » Lula glissa néanmoins un regard vers Matthew pour avoir son avis, ce qu’elle n’avait plus fait depuis longtemps.

« Oui, on ferait mieux d’aller les coucher. » opina son ex-mari, provoquant aussitôt un mouvement de foule à leur table. Ils s’étaient tous levés en même temps pour se préparer à quitter le restaurant ; les uns pour la plage, les autres pour regagner leur chambre d’hôtel. Contrairement à Kina qui semblait avoir compris le petit manège de son frère aîné, Lula restait neutre face à la parade de son ex-mari. Ce n’était pas une question de charisme, Matthew était toujours aussi séduisant à ses yeux, mais après les déboires et les désillusions de ces dernières années, la philippine ne tenait plus à se faire de fausses idées. Selon elle, leurs relations s’étaient améliorées à cause de leur cohabitation forcée ainsi que pour l’intérêt de leurs enfants, car si son ex-mari s’était exprimé à leur sujet, il n’avait pas fait mention de la place qu’elle occupait à présent ou qu’elle occuperait à l’avenir et Lula s’en trouvait bloquée dans ses propres projets. Dans sa situation actuelle, la simple idée de construire un futur indépendamment de celui de son ex-mari n’était pas envisageable pour des raisons pratiques, mais surtout pécuniaires.

Ils atteignirent la chambre d’hôtel à peine quelques minutes plus tard. Pour déverrouiller la porte, Lula passa la carte magnétique dans le lecteur et tamisa les lumières afin de ne pas perturber le sommeil de ses filles. Lorsque la philippine remarqua que son ex-mari s’éloignait vers la salle de bain avec Mila dans les bras, elle prit Leah et la changea à son tour avec une délicatesse qui ne l’empêcha pas de se réveiller pour autant.

Bientôt, tous deux se retrouvèrent penchés au-dessus des berceaux de leurs filles et Mila s’étant rendormie à la seconde où Matthew l’avait bordé, Leah était devenue le centre d’attention de ses parents qui la cajolaient pour son plus grand bonheur. Tandis que papa jouait avec sa petite menotte, maman dévorait son petit pied de tendres baisers en lui murmurant de douces phrases dans sa langue natale ; les jumelles parleraient tagalog, elle y tenait ! D’ailleurs, la jeune femme crut apercevoir l’ébauche d’un sourire devant lequel elle ne manqua pas de fondre et de s’extasier avant que son ex-mari ne s’adresse à elle. « Tu veux rejoindre les autres ? » chuchota-t-il à son attention. Lula plongea les yeux dans ceux de Matthew sans se dépeindre du sourire et du regard doux destiné à Leah puis secoua la tête en signe de négation sans même avoir pris le temps de réfléchir à la question. « Pas ce soir. C’est leur petit moment rien qu’à eux. ». Avare de tendresse, Lula déposa trois derniers baisers sur la plante des petits pieds de Leah, puis se redressa à contre cœur. « Plus, je n’aurais pas été de très bonne compagnie. Tu me connais assez bien pour savoir que je n’aurais pas eu la conscience tranquille. Ou alors, au mieux, je me serais endormie sur la plage pendant le film. » dit-elle en riant doucement. En effet, Lula aurait été du genre à le harceler par téléphone et à se mettre dans un état de panique à la première occasion. « C’est gentil de le proposer, mais j’aurais d’autres opportunités de passer du temps avec eux... » ajouta-t-elle en haussant les épaules. Se disant, elle s’excusa puis s’enferma dans la salle de bain pour se rafraîchir et se changer.

Lorsqu’elle en sortit quelques minutes plus tard vêtue de son pyjama, Lula arborait une mine contrariée et reprit la conversation exactement là où elle s’était arrêtée. « Mais j’y pense, peut-être que tu me l'a demandé parce que tu veux les rejoindre ? Si c’est le cas, tu peux ! Ne t'occupes pas de nous, à en juger comme elles dorment, je ne pense pas que nous aurons un sommeil trop perturbé toutes les trois. » assura-t-elle en ponctuant ses propos d’un signe de tête.

[bah voilà, avec tout ça, je fantasme aussi x)]

Lorsqu’elle pénétra sur le balcon de la chambre d’hôtel pour y rejoindre Matthew, Lula admira la vue qui s’offrait à elle. Depuis qu’ils avaient étaient arrivés ici, la philippine n’avait pas vraiment pris le temps d’apprécier le paysage comme elle le faisait autrefois. En y repensant, c’était son arrivée à New York qui avait inhibé son émerveillement car, avec tous les gratte-ciels, la jeune femme n’avait guère eu le temps d’apprécier la nature. Bien sûr, lorsqu’elle n’était pas cloîtrée dans un bureau éclairé à outrance pour restaurer de vieilles œuvres, Lula s’accordait quelques escapades à Central Park avec ses enfants, mais la verdure n’avait rien de comparable à l’étendue de rizières philippines. En fin de compte, entre ça et tous les problèmes familiaux qu’elle avait rencontré, la jeune femme n’avait pas vraiment eu l’occasion de se poser et – surtout – de se reposer. C’est dire combien ce voyage improvisé tombait à point nommé ! « Oh, no, no, I didn’t plan on it. I’d rather stay… » répondit finalement son ex-mari, l’obligeant à délaisser le paysage du regard pour sonder son regard à la recherche d’un signe qui le trahirait, mais Lula le savait parfaitement sincère pour le coup. Il avait autant de difficulté qu’elle à quitter le chevet des jumelles depuis qu’elles étaient venues au monde. Sans doute parce qu’ils avaient failli les perdre ce jour-là...

Lula lui sourit doucement et glissa de nouveau un regard paisible sur le paysage en prenant une profonde inspiration ; elle se sentait bien ici. Ca, c’était plus que des vacances. C’était la Maison. Le calme retomba entre eux, seulement troublé par l’agitation lointaine de la plage qu’ils pouvaient apercevoir en partie. Même le silence avait une résonnance totalement différente ; ils étaient plus sereins et peut-être plus réceptif à l’autre. Au loin, la projection commençait et Lula se surprit même à prêter attention aux images qui défilaient.

« Hey, can we… talk ? » reprit finalement Matthew. La Philippine détourna son attention de l’écran pour rétablir le contact visuel avec son ex-mari. Il semblait nerveux et sa posture – bras croisés contre son torse – ne présageait rien de bon. « Sure. » dit-elle avant qu’il ne poursuive. « I mean, maybe you'd rather get some sleep. » ajouta-t-il en désignant son pyjama. Lula risqua alors un oeil à son accoutrement avant de lui adresser une grimace ressemblant curieusement aux tentatives de leurs filles pour esquisser un sourire. « Oh, no. It’s just Mila... She has regurgitated on me earlier. » dit-elle, lui faisant implicitement comprendre que ce côté de la maternité ne lui avait pas vraiment manqué. « You know I’m glad you agreed on this trip… » commença-t-il avant de s’interrompre. Lula fronça les sourcils de surprise mêlée à de l’incompréhension et pivota pour lui faire face. Honnêtement, elle n’aurait su dire s’il cherchait à la rassurer ou à lui annoncer une mauvaise nouvelle avec cet air grave qu’il affichait. « I’m glad you asked for it. This was unexpected and sudden from you. Everything is peaceful here and I think we all needed this break, especially after these last years of madness ». Il lui paraissait judicieux d’enchaîner sur un avis aussi positif que le sien, cependant Matthew semblait toujours aussi nerveux. « Hey, you okay ? You don’t have any trouble with the agency, don’t you ? » s’enquit-elle aussitôt d’un voix qu’elle voulait douce mais qui fut percée par l’angoisse. La philippine craignait déjà qu’il lui annonce devoir les laisser en plan pour partir en mission Dieu ne sait où.

Même après toutes ces années de séparation et d’incompréhension parfois, Lula le connaissait par cœur. Il s’apprêtait à lui annoncer quelque chose d’important, elle le sentait au plus profond d’elle, mais se trouvait incapable de deviner s’il s’agissait d’une bonne ou d’une mauvaise chose. Sa réflexion l’avait aussitôt amené à penser que la CIA voulait envoyer Matthew en mission et que toute leur petite famille allait devoir retourner sur le continent, mais sur ce point son ex-mari ce fit tout de suite plus rassurant malgré une nervosité toujours aussi palpable. Il était vraiment mal à l’aise. C’est à peine s’il osait la regarder ! Alors, la jeune femme se tût et prêta oreille attentive à ce qu’il avait à dire. Quelque chose dont elle ne doutait pas de l’importance. « No, no trouble at all… I’m not really active with them right now, and to be honest… I don’t know if I still want to be. I mean, I did what they came after me for. I've put my father behind bars, and I know there's nothing more I can do. I can't... stay on this case, I can't go after Francis. I wouldn't have mind killing Nikolas, but... I'm tired of it, I don't want to fight my little brother... ». D’abord surprise, Lula lui sourit. Elle était à la fois peinée par les épreuves que son ex-mari avait endurées et rassurée d’entendre qu’il envisageait de quitter la C.I.A : c’était un véritable soulagement pour la jeune femme car même s’ils étaient divorcés, Lula craignait toujours de recevoir une visite ou un coup de téléphone lui annonçant une mauvaise nouvelle. Matthew était trop important à ses yeux et elle ne voulait pas le perdre. Ce serait comme perdre une partie d’elle une fois encore. Il l’avait fait grandir ; c’était grâce et à cause de lui si elle était devenue une femme combative et une mère dévouée. « With Leah and Mila, I... I just realised my priorites were wrong since the moment I agreed for this job... I want to be a better father, for the twins but also for Toyiah and Mason...  And I want to be there for you too... Even though I know I may have... disappointed you enough. ». Là, maintenant, Lula avait l’impression de revoir l’adolescent dont elle était tombée amoureuse. Sa fausse assurance qui cachait une grande maladresse, ce qui l’avait faite craquée en premier lieu. « You’re a good father. Our lil' monkeys love you ! I can't let you have any doubt about it. Even if you aren't by our sides, you've always took care of them, protect them, cherish them... They know that ! I know that. » commença-t-elle, un sourire aux lèvres tandis qu’elle repensait à tous ces moments de tendresse en famille. Ce fut à son tour de s’appuyer contre la rambarde, non pas pour contrôler un tic nerveux mais pour chercher le regard de son ex-mari. « Speaking for myself, I can’t judge you 'cause I'm not whiter than white, specially with the immigration/pregnancy thing. I wasn’t there all that time so I can only imagine what you went through, the horrors you’ve seen, the danger, the loneliness… Now, I understand why you want to leave the CIA. In fact, I strongly encourage this initiative. It would be a relief for everyone. » dit-elle en ponctuant ses propos d'un signe de tête. « We don't blame you anymore for your choices, Matt. What's done is done but don't worry about us. We're fine. Really. Our kids are really strong, you know, and I... I'm... I... Well, I'm kinda... ». Elle était quoi dans tout ça ? Lula n'en savait rien, en fait. Elle clôt les paupières quelques instants, cherchant à retrouver contenance, mais aucun mot ne lui venait en tête. Émotionnellement perdue ? Seule malgré 4 enfants ? Non, Lula ne se sentait pas prête de le lui avouer. « ...busy to pay attention, I guess. I thinking about diapers, baby bottles, teething and other joys of motherhood all day loooong. ». Se disant elle pencha la tête en arrière en se donnant un air exténué, sourit le regardant de coin et laissa sa tête retomber. Elle en profita pour jeter un coup d’œil sur ce qu'il se passait en contre-bas. « But... What will you do after your resignation ? Keep your teaching job ? » demanda-t-elle avec réel intérêt.

Ses propres paroles sonnaient étrangement ; elles rappelaient l’époque où le dialogue n’était pas un problème entre eux. Le fait de parler aussi simplement l’aidait à faire le rapprochement avec le comportement de Matthew et, lorsqu’elle le vit se rapprocher, Lula le coupa dans son élan par réflexe alors qu’elle en avait probablement tout aussi envie que lui. Cette fois-ci, la philippine ne voulait pas brûler les étapes. « Well, that's a possibility... I don't really know, it will probably take months for me to get out of the CIA, and we'd have to move again, but... I was thinking maybe... Having a break, a real one, spend some time with you guys, with my mom... ». Lula acquiesça d’un signe de tête en affichant un air songeur ; elle se doutait que démissionner de l’agence d’espionnage ne se ferait pas du jour au lendemain. « Je n’en doute pas, mais ça reste un bon plan et tu vas vraiment faire des heureux. Prépares-toi à être traîné de force à tous les matchs de baseball. Ton fils est devenu un vrai fan des Yankees et ne rate aucune saison... » dit-elle dans un sourire. « And about the immigration... I've been awful to you, you didn't deserve any of what I told you, I already said it but... I didn't mean any of it, Lula, and if I didn't think you were a good mother, I would never have had 4 with you... ». Surprise que le sujet soit de nouveau évoqué, le cœur de Lula se serra un peu plus dans sa poitrine et elle accusa le coup en cherchant à son tour à fuir le regard de Matthew. « Thankyou » murmura-t-elle. Pourtant, dans ce qu’il lui avait dit quelques mois auparavant, il y avait aussi beaucoup de vrai. Elle aurait dû tirer la sonnette d’alarme et demander de l’aide à l’instant même où son renvoi avait été effectif, mais au lieu de ça, Lula avait tout mené de front parce que c’est ce qu’elle faisait en cas de coup dur. Sans s’en apercevoir, la jeune femme s’était enfermée dans ce mensonge qu’elle pensait contrôler, elle s’était coupée de tout et de tout le monde. Ca l’avait rendu vulnérable et elle avait détesté ça. Il n’avait pas eu tort non plus au sujet des enfants ; elle n’avait pas pensé à eux, mais à ce qui serait advenu d’elle si on venait à lui retirer. « Tu sais, ce qui est le plus horrible ? C’est de penser au typhon et à ce qui aurait pu se produire si tu n’étais pas venu me chercher à temps. – il y eut un court moment de silence avant qu’elle ne poursuive. – Sometimes, I feel I’m really blessed… ». Lula avouait ainsi que la tragédie qui avait touché les Philippines l’avait elle-même secouée. Beaucoup plus qu’elle ne le laissait paraître. Savoir qu’à quelques jours près, elle aurait pu faire partie de la longue liste des victimes, avec les jumelles qu’elle attendait, faisant de ses enfants des orphelins de mère... ; un frisson désagréable lui parcourut l’échine en lui flanquant aussitôt la chair de poule. « What about you ? What do you want to do ? If I quit, you'd have more time for yourself and your projects... ». Lula cligna des paupières plusieurs fois, désarçonnée par l’une des questions qui n’avait pas encore trouvé de réponses chez elle. Même sa vie professionnelle était un vrai désastre. Elle était perdue, incapable de faire le moindre projet concret sans craindre l’échec : c’est dire comme l’année écoulée lui avait perdre confiance et pourtant, elle avait déjà quelques pistes. Le fait est qu'elle n'était plus la jeune femme pleine d'assurance d'autrefois. « Me ? Well, uh… I… I don’t sure yet. » avoua-t-elle en haussant les épaules. « Il y a mon livre, bien sûr. Je voudrais faire don de quelques exemplaires aux orphelinats philippins… Sinon, une amie m’a demandée de rejoindre sa webmission en tant que chroniqueuse. Ca s’appelle MOMS, c’est très populaire sur la toile. Il y a quelques semaines, elle m’a invitée pour parler de mon expérience en tant que mère, de l’arrivée des jumelles et ça a été un moment formidable ! Enfin je lui ai dit oui, mais je ne sais pas trop. Il y a tellement de viewers et ce n’est pas non plus mon métier. D’un autre côté, sans inspiration, ça me parait difficile de retrouver un poste dans le domaine artistique à l’heure actuelle. ». Lula fit un mouvement de la main comme pour chasser cette dernière idée avant même que Matthew ne lui fasse part de son point de vue car elle avait peur qu’il trouve ça ridicule.

La discussion déviait toujours sur les enfants, sur ce qui était bon pour eux parce qu’ils représentaient maintenant le bien le plus précieux qu’ils avaient en commun, mais aussi parce qu’ils étaient un sujet de conversation confortable pour la philippine. Depuis des années, elle se cachait derrière son statut de mère, mais avoir failli à son rôle quelques mois plus tôt l’avait amené à revoir sa position. Matthew avait beau dire ce qu’il voulait pour la rassurer, Lula avait manqué à son devoir en leur cachant volontairement son renvoi du Musée de Greenwich Village où elle continuait à faire semblant de se rendre tous les matins. Son mariage mis à part, la philippine n’avait jamais été coutumière de l’échec. « Great, me neither. And I'm sure you're really glad about that right now, cause you must have SUFFERED. » . En l’écoutant rire, la jeune femme sourit et haussa légèrement les épaules. « Il y a pire comme torture… » répondit-elle. En réalité, elle était bien trop contente de voir son fils s’intéresser à ce sport et savait qu’il partageait une passion avec son père. D’ailleurs, Matthew n’avait pas seulement nourri celle-ci dans l’esprit de ses enfants ; ils chantaient également. Toyiah enseignait les rudiments de la guitare à son petit frère qui se débrouillait plutôt bien et Lula s’amusait de les voir aussi complices, à se transmettre la passion de leur père comme s’il avait toujours été là. Matthew ne la quittait pas non plus. Depuis son emménagement à New York, force était de constater que les enfants ressemblaient de plus en plus à leur père ; il lui était impossible de ne pas y penser, de ne pas s’attendrir lorsqu’elle croisait le regard de son fils ou les tics de sa fille. Et puis, il y avait les jumelles, maintenant ! « Don't think about that... De toute façon, je les aurais pas laissé t'emmener. » reprit-il lorsqu’elle mentionna avoir échappé de peu au typhon uniquement grâce à son intervention. Elle ouvrit la bouche, puis la referma. Incapable de dire quoi que ce soit pour exprimer convenablement sa gratitude. Lula était vraiment touchée par ses propos, tant et bien qu’elle baissa la tête pour ne pas qu’il puisse la voir rougir et réprimer un petit sourire.

Et finalement, la conversation dévia de nouveau sur elle et sur ses projets d’avenir. « You're on the internet and I'm not aware of that ? » reprit Matthew. Durant le court instant qui sépara sa phrase de son rire, Lula pensa qu’il s’agissait d’une forme de reproche et son cœur fit un bond dans sa poitrine. Finalement, elle se détendit et afficha une légère grimace. « « You can laugh all you want... » ronchonna-t-elle en ponctuant sa phrase d’une tape sur son bras. « I definitely want to see that ! And you seem pretty happy talking about it... If you feel like it's right, like it fits you, you should do it. What's stopping you ? And for the books, I back you up a 100%. ». Il avait raison. Lula était heureuse de participer à un tel projet et, concrètement, rien ne pouvait l’arrêter dans ses choix. Sauf peut-être la peur de l'engagement. Et elle ne parlait pas seulement de son investissement dans MOMS mais de tout le reste. « I don't know... J'imagine que le problème est plus profond que ça. J'ai peur de m'engager. I'm a mess. I'm... lost and confuse. Je ne sais plus ce que je vaux, ce que je suis, ce que je représente... Avant, je ne me serais pas posé la question, j'aurais foncé, mais aujourd'hui j'ai peur de l'échec, peur d'être déçue, de me faire de fausses idées. Je suis à bout moralement et ça ne me ressemble pas. Je veux que tout redevienne comme avant, que je puisse me lancer dans de nouveaux projets les yeux fermés avec confiance et assurance... ». Depuis le balcon, elle perçut le mouvement de l'une des jumelles et tourna aussitôt la tête vers les berceaux où le calme était finalement retombé.

Lula n’était pas sûre de saisir la véritable source de son problème : peut-être était-ce une accumulation de choses ? Peut-être avait-elle trop voulu gérer les choses par elle-même jusqu’à n’en plus pouvoir ? En tout cas, l’initiative de son ex-mari qui consistait à démissionner de son poste au sein de la C.I.A pour passer plus de temps en famille tombait vraiment à point nommé. Elle fut également surprise, après tout ce qu’ils avaient traversé, de voir que son ex-mari lui portait toujours une foi inébranlable alors que, pour sa part, Lula perdait le peu de fierté qu’il lui restait. Désormais, il n’y avait plus que ses enfants. D’ailleurs, elle glissa aussitôt son regard sur le berceau des deux dernières pour se donner un peu de courage. Lula ne voulait pas mettre son ex-mari mal à l’aise, mais elle avait l’impression d’être tout de même parvenue à le faire et décida de ne plus en parler. « Nevermind. » avait-elle murmuré en esquissant d’un sourire qui se voulait faussement rassurant. Puis, ses yeux avaient croisé les siens ; il la regardait d’une telle manière qu’il lui était impossible de s’en détacher malgré toutes les sensations étranges que cela éveillait en elle.

« Listen, Lula... You are the strongest woman I know. The smartest, too – I mean, excluded all those awkward specialists back at work. What I mean is... you've always managed. You had a baby when you were sixteen, and you managed to make yourself a brilliant way through high school and college. I've seen your books, I've seen how good and dedicated you were at your job when we were together – and look forward to watch the internet appearance – so for what my opinion's worth... Nothing can keep you from success on that path. And what if you fail ? At least you can say you've tried ; also, if you do, it would be perfectly okay. Even if it doesn't work, you'd still have us. You'd still have me. And I'm never letting any of us leave your side, from now on. I guess the way we've been living those past few months must have felt like martial law, and... I apologize about that. I just... I'm overprotective, and we both know some people who could support that. But despite anything I said, or however you feel since you lost your job and all went crazy, I don't believe for one second that you're worth any less than before. So... It's okay if you're lost, I'd say it would be awkward not to be after everything that happened, but... I believe in you. And  if it doesn't work out, we'll find something else. ». Dans le but de maîtriser le flux de ses émotions qui s’apparentait aux montagnes russes, Lula s’était figée, allant même jusqu’à contenir sa respiration, mais toute tentative pour rester de marbre fut soldée par un échec cuisant. Son cœur cognait toujours aussi fort dans sa poitrine sans qu’elle ne sache si c’était véritablement dû à sa fonction première ou s’il s’agissait des mots qui heurtaient violemment son cœur. Empêcher ses paupières de se fermer n’avait servi à rien ; un voile s’était posé sur ses yeux en les brûlant affreusement. Ses paroles étaient douces, mais brutales et douloureuses pour Lula parce qu’elles étaient la première étape que la jeune femme avait longtemps attendue. Un sourire tremblotant étira ses lèvres avant qu’elle ne se mette à rire nerveusement, amusée par le manque d’assurance de son ex-mari. Tout ça pour un je t’aime, pensa-t-elle. La philippine pencha légèrement la tête sur le côté et, malgré la petite larme qui avait réussi à se faire la malle, sourit de plus belle en creusant les fossettes de ses joues. « Me too, you know… » dit-elle simplement. Pas besoin d’en dire plus. Il savait. Finalement, elle attendit que la pseudo-douleur s’amenuise laissant place à un état de sérénité et de plénitude pour enrouler ses mains autour de sa nuque et sceller leurs lèvres en même temps que leur destin. Une fois de plus, c’était elle qui brisait le tabou entre eux. Elle se fit incroyablement douce jusqu’à serrer un peu plus son corps contre le sien, glissant ses doigts fins dans les cheveux bruns du père de ses 4 enfants. « I missed you... » murmura-t-elle contre ses lèvres.

Les lèvres de Lulani avaient épousé celles de Matthew des centaines et des centaines de fois ; elles avaient eu un goût d’interdit, un goût d’amour sincère et aujourd’hui, elles avaient surtout un goût de délivrance qui les rendaient irrésistibles et délicieuses. Un baiser unique. Au fur et à mesure qu’elle y goûtait, la philippine sentait un poids quitter son cœur. Jamais elle ne s’était sentie aussi légère qu’en cet instant précis, débarrassée de toutes les incertitudes de ces dernières années. Il n’y avait plus de malaise entre eux ; les choses étaient soudainement plus simples, évidentes même. Elle se sentait presque comme un aveugle retrouvant la vue après des années plongées dans un flou affectif total. Un soupir de contentement lui échappa, caressant la joue de son ex-mari, lorsque celui enroula ses bras musclés autour de sa frêle silhouette. Chaque parcelle de son corps trahissait la joie de le retrouver : le frisson, les papillons dans le ventre, leurs lèvres qui souriaient les unes contre les autres. Tout était absolument parfait et lorsqu’ils se séparèrent, Lula était toujours dans son état cotonneux. Ses mains quittèrent la nuque de Matthew pour se poser sur son torse et son regard s’accrocha au sien. « I know this is a stupid thing to say in this situation but, due to our past experiences... I'm not going anywhere. No CIA, no more secrets, I... I really want to make it work...  » murmura-t-il avant de l’embrasser de nouveau. Lula se laissa faire docilement, elle l’incitait même à reprendre la place qui lui revenait de droit autant au sein de leur famille que dans son cœur. Et il n’avait pas perdu la main : il la rendait toujours aussi folle qu’à l’adolescence. Lorsqu’ils se séparèrent de nouveau, Lula pinça les lèvres en donnant l’impression de ne pas être totalement rassasiée : elle était devenue avare et mettait tout en œuvre pour se contrôler. Ce soir, ce n’était pas une question de sexe, mais de sentiments. « Non, ça ne l’est pas. Ca fait des années que je rêve de te l’entendre dire. Ca doit faire de moi une idiote, je suppose ? ». Elle afficha une moue malicieuse tandis que Matthew lui souriait béatement, ce qui ne manqua pas de la faire fondre. « Awww, I almost forgot that goofy - but incredibly attractive - smile. Tu m’intimides toujours autant… » dit-elle dans un rire. La main de Lula glissa alors le long de son bras pour venir agripper sa main en s’émerveillant de la facilité avec lesquelles leurs jointures s’imbriquaient : comme les pièces d’un même puzzle. « C’mon, I need you. You will make a perfect pillow for the night. » dit-elle en l’attirant de nouveau à l’intérieur de la chambre, toujours en le tenant par la main. En passant à côté du berceau, elle ne manqua pas de jeter un énième regard à ses filles, puis à son ex-mari, tout sourire, les yeux empreint de fierté et d’amour. Elle s’arrêta finalement devant le lit pour s’y allonger, tira sur son bras pour qu’il vienne la rejoindre et ne manqua pas de l’embrasser de nouveau. Collée à lui, son visage proche du sien, Lula souriait paisiblement en admirant chaque parcelle de son visage comme si c’était la première fois qu’elle le découvrait. « Je crois qu’on vient de réaliser le rêve de la plupart des enfants aux parents divorcés. J’espère qu’ils ne seront pas trop perturbés. Tu sais, ils adorent les jumelles, mais ils ont mis du temps à accepter ma grossesse au début. ». Son sourire s’effaça quelque peu et son regard se fit plus lointain. « A ton avis, on leur dit ou on opte pour une transition en douceur ce qui implique faire chambre à part cette nuit et laisser passer les vacances ? » demanda-t-elle en se redressant, se servant de sa main comme d’un appuie-tête avant de rire nerveusement. « Je dois te donner l'impression de ne pas savoir ce que je veux, mais c'est pas le cas. Je veux juste faire les choses correctement. Ces dernières années n'ont pas été faciles pour eux non plus. Je me demande même comment ils font pour rester aussi calmes, d'ailleurs... ».

En serrant Matthew contre elle, Lula s’apercevait que rien n’avait changé. L’harmonie de leurs corps était encore parfaite tandis que son amour pour lui restait intact. Elle avait mis beaucoup de temps à se l’avouer, mais c’était un fait : la philippine n’avait d’yeux que pour lui. Il avait été le seul homme à toucher son âme, à la comprendre sans qu’elle n’ait forcément besoin de mettre les mots sur ce qu’elle ressentait et, même après l’avoir rejeté de la pire des manières possibles, il se tenait toujours à ses côtés. Lorsqu’elle doutait, il lui suffisait de plonger le regard dans les yeux de Matthew pour que ses doutes se dissipent, car même après tout ce temps, il continuait à la voir comme une femme parfaite. Lula aurait pu rester là des heures entières, à le regarder la dévisager avec cet amour, cette passion qu’elle restait convaincue de ne jamais trouver ailleurs. Si ça ne tenait qu’à elle, ils passeraient la nuit ensemble, mais c’était sans compter les enfants. Elle ne voulait pas les brusquer et savait parfaitement que son ex-mari comprendrait son point de vue et n’omettrait aucune objection malgré leur envie manifeste de profiter l’un de l’autre. « Non, non… Tu as raison de penser à eux. Et je pense aussi qu’on doit bien faire les choses… à tous les niveaux. Ils ont eu l’air plutôt contents de nous voir mieux nous entendre, ces dernières semaines, et… je pense vraiment pas qu’ils aient quelque chose contre l’idée de nous savoir ensemble. Laissons leur les vacances pour profiter, ils n’ont pas besoin de l’apprendre maintenant. Toyiah va se poser des tonnes de questions, je la vois déjà venir… Et ça nous laisserait un peu de temps à nous aussi… » le rassura-t-il, en déposant un baiser sur son front. Comme au bon vieux temps, pensa-t-elle. Instinctivement, Lula clôt les paupières et un sourire vint aussitôt se dessiner sur ses lèvres pulpeuses. Pour certain, ce geste pouvait paraître anodin, mais pas pour la philippine il signifiait beaucoup de choses : un retour à la normale, notamment. Lorsqu’ils étaient mariés, Matthew avait pris l’habitude de la « border » de cette façon et sans ce baiser sur le front, il lui était parfois difficile de trouver le sommeil. « J’espérais bien que tu dirais ça et je ne pensais pas dire ça un jour, mais ça va probablement être les vacances les plus longues de toute ma vie, pour le coup. Même si ça risque d’être difficile et frustrant, ça va être plutôt excitant de se cacher des autres. Ce serait comme… revenir à l’époque où nous n’étions encore que deux adolescents. » dit-elle, mutine, ne laissant aucun doute sur les souvenirs peu catholiques qui lui traversaient l’esprit. Un fin éclat de rire lui échappa et elle s’empressa de se nicher un peu plus contre son amant en quête de la position la plus confortable possible.

Sa mémoire tactile étant toujours intacte, ses vieilles habitudes comme si elles ne l’avaient jamais quitté. Une fois installée à son aise, la jeune femme garda néanmoins les yeux ouverts en dévisageant le visage de Matthew comme si elle craignait qu’il ne s’évapore à l’instant où elle se laisserait gagner par le sommeil. Ce qui allait probablement être le cas puisqu’ils avaient convenu de faire chambre à part au moins jusqu’à la fin des vacances. Cependant, Lula n’avait plus la force de lutter contre quoi que ce soit. Sa journée avait été épuisante et ses dernières défenses venaient tout juste de céder. Toutes les conditions étaient idéales à l’endormissement. Il y avait cette légère brise rafraîchissante qui circulait dans la chambre en caressant et stimulant sa peau, les bruits de la nature qui s’épanouissaient à l’extérieur, la présence de Matthew, son parfum, cette main délicatement posée sur sa taille et le rythme serein de sa respiration…

Elle le fixait toujours lorsque ses paupières montrèrent les premiers signes de fatigue. Petit à petit, elles se firent de plus en plus lourdes et Lula étouffa un bâillement, puis un autre. Elle semblait mettre un point d’honneur à ne pas s’endormir tout de suite. Ils avaient tellement de choses à rattraper tous les deux qu'elle ne pouvait pas s'endormir "comme ça"... ; elle s’acharna donc à se frotter les yeux en lui adressant un sourire à la fois gêné et innocent. En vain. Bientôt, la philippine se lança peu à peu aller contre Matthew puis, tout comme Leah avant elle, fut secouée d’un dernier spasme, serrant le bras de son ex-mari comme pour s’assurer qu’il était toujours là.

Je pense qu'on a fini ce RP
Je te laisse clôturer ?