« Comment ça des petits Bennett !?! » Maggie frôla immédiatement la syncope alors qu’elle pensait toucher au but concernant le problème de sa porte. S’il y avait bien une personne au monde à ne pas se trouver douée avec les enfants, c’était bien l’américaine. D’une part, elle ne se voyait pas du tout en mode grossesse, vomissements et autres sautes d’humeur insupportables qui donneraient envie à son entourage de la plastiquer aussitôt. D’autre part, elle ne voyait pas très bien avec qui elle pourrait bien faire un gamin, qui aurait envie de la supporter ET de supporter sa progéniture… non, vraiment, il valait mieux oublier l’idée ! « Tu seras maman avant moi, personnellement ce sera jamais » maugréa-t-elle non pas envers Lizzie, qui n’était pour rien dans cette sorte de ressenti pourri vis-à-vis d’une potentielle grossesse, mais bien envers elle-même. « Pour sûr, vu comment Papa nous harcèle pour être grand-père, on ne verrait pas les gosses à peine sorties de la maternité ! Mais non, vraiment, même avec la meilleure volonté du monde je pense que tu es mille fois plus taillée que moi. » Maggie soupira à cette constatation. Lizzie avait toujours été la plus sage et la plus équilibrée des deux. Voilà pourquoi elle s’en sortait bien professionnellement et qu’elle avait manifestement rencontré quelqu’un qui pourrait potentiellement la combler ! « La nuit mon cerveau est très productif, d’abord ! Mais il faudrait me donner de sérieuses raisons pour que j’abandonne mon précieux boulot. Au moins, il ne me fait pas chier, ne me couvre pas de reproches, ne me trompera jamais… avec un peu de chance, ne mourra jamais non plus ! Quant à prendre ton temps sœurette, j’ai presque envie de dire amen ! Rien de presse, on a pas quatre-vingt dix ans… »

Autant dire que Maggie poussa un terrible soupir de soulagement : Lizzie parlait de son cas personnel, ouf ! La pétillante businesswoman s’en serait voulu de devoir encore et encore s’expliquer sur le fait qu’elle ne se sente absolument pas taillée pour la maternité. Après tout, toutes les femmes ne sont pas forcément nées pour être des pondeuses en série… il fallait dire que Maggie ne voyait vraiment pas la maternité d’un bon œil et que personne n’avait su la convaincre du contraire jusqu’ici. « Non mais sérieusement, tu as vu combien je suis chiante en temps normal, avec des hormones mais ce serait l’apocalypse ma parole !! En plus pendant les vingt-quatre heures où j’ai dû m’occuper du gamin de ma voisine, qui n’a que six mois, je te dis pas combien de fois je me suis répété que j’avais réussi à monter un générateur autonome et que je pouvais donc gérer ce genre de chaos aussi ! Non, vraiment, donne-moi des bidules à réparer tant que tu veux mais ça, maintenant ou plus tard, ce sera toujours pareil ! » D’autant pour faire un gamin, encore fallait-il avoir l’homme sous la main. Maggie n’était pas du genre à croire en l’immaculée conception, après tout… « Mais toi, ton Gaspar c’est peut-être un bon candidat, après tout… » souffla-t-elle tout en lui donnant un petit cou de coude entendu, accompagné d’un clin d’œil bien évidemment. « Puisque tu es là tu sais très bien que je vais aménager ma semaine ! Comme si j’étais du genre à te laisser en plan comme une courge… »

« Braillard, c’est le mot !! Je n’en pouvais plus, ça s’arrête jamais de beugler ces choses ! » Maggie leva les yeux au ciel avant de rejoindre sa jumelle contre le carrelage, soupirant face à leur discours commun mais particulièrement fière d’avoir su réparer sa porte d’entrée en deux coups de cuillère à pot. Vraiment, elle n’avait pas besoin d’un homme à demeure quand elle voyait tout ce qu’elle savait faire et qu’elle pouvait voler à la gent masculine, cela ne lui donnait pas vraiment envie de faire des efforts. Même si… « Si tu passes par là, Daryl a une peau de bébé… » lâcha-t-elle sans même s’en rendre compte. D’accord, ils avaient joué au Monopoly et fait péter la banque, mais et alors ? Il n’y a pas de mal à se faire du bien dans la vie ! Certes, sa jumelle allait probablement sauter sur l’occasion pour avoir plus de détails mais Maggie n’était pas obligée de TOUT lui dire, n’est-ce pas ? « Pas qu’il te fuie justement, qu’il t’épouse et de fasse plein de petiots ! » Mais question épineuse désormais : le programme ! Lizzie n’était pas vraiment du genre casanière, au même titre que sa sœur d’ailleurs, mais Maggie avait quelque peu la tête vide pour l’heure. L’inspiration viendrait sûrement ! « Tout dépend si tu veux que l’on reste à New York ou que l’on choisisse un programme autre part, loin des hommes et de leurs emmerdements… vous avez la parole miss Elise Bennett ! »

« Non, une vache ça meugle ma poulette… » ironisa Maggie sans louper une seule seconde la tête de sa jumelle, et ce avant d’exploser de rire. Justement, le verbe « beugler » n’était pas trop fort pour définir cette abominable petite chose lui ayant crevé les tympans non stop. A se couper l’envie d’en avoir un à soi, c’est une certitude ! Mais de toute évidence, si maternité il devait y avoir un jour, ce ne serait pas avant très, très longtemps et pas avant d’avoir la certitude certaine qu’elle se trouverait avec un homme fiable. En d’autres termes, avec sa formidable capacité à faire fuir tout ce qui appartenait au camp masculin, elle n’était pas dans la merde ! « Vérifié ? Pas besoin, il était nu dans mes bras il n’y a pas si longtemps ! » Maggie n’avait pas envie de mentir à sa jumelle, bien qu’elle ne sache pas du tout où cet épisode la mènerait justement. Le problème épineux de la chose résidait dans le fait que Daryl faisait partie des soldats travaillant avec son père… il n’avait pas envie de se faire mal voir de celui-ci, chose logique, et Maggie n’était pas fâchée qu’il veuille rester discret pour l’heure. Mais jusqu’à quand cela la satisferait-elle ? « Quelque chose me dit que ça signifie que tu veux partir en croisière, avoue ! » lança la pétillante businesswoman d’un air parfaitement entendu, prête à prendre des vacances bien méritées, après tout ça ne pourrait pas lui faire du mal. Depuis le temps qu’elle n’en n’avait pas pris ! « J’espère que tu as un maillot de bain sous la main ! »

« Tu sais bien que je ne sais pas danser, voyons ! » reprit-elle soudainement, un sourire taquin aux lèvres. « Je suis plus d’avis de dire que l’on a joué au Monopoly mais que l’on ne sait pas qui de lui ou de moi a fait sauter la banque ! » Mais de toute évidence, Maggie était loin de savoir où elle en était vis-à-vis de cela. Elle avait quelque peu brillé par son silence dernièrement, et personne ne pouvait réellement la maudire pour cela. Son veuvage se poursuivait quoi qu’il en soit, et le souvenir de Bill n’allait pas s’effacer de sitôt, pas même si le tireur d’élite avait réussi à se frayer tout de même un chemin dans son existence. Cruel destin… « Faire bronzette ? Ah non si on se paye une croisière, je veux la TOTALE ! Genre massages, sauna, jacuzzi, champagne… on passe la plupart de notre temps le nez fourré dans nos carrières respectives, alors si on franchit le pas et qu’on se dit qu’on part, autant y aller carrément et ne pas lésiner sur les moyens ! Le tout c’est de savoir où partir… la dernière fois, nous avions fait les Antilles si ma mémoire est bonne. Par quelle région du globe es-tu attirée pour ta part ? » Maggie parlait plusieurs langues, Lizzie aussi, ce n’était donc pas un souci, elles seraient toujours capables de se débrouiller où qu’elles aillent. Le tout était juste de se décider quant à la destination effective de leur croisière ! « Au moins on se videra l’esprit et on ne se prendra pas la tête avec les hommes ! »

« Je ne le ferais pas à la maison si tu es là, je suis une grande fille, je peux prendre un hôtel ! » souffla Maggie sans l’ombre d’une hésitation, un petit sourire en coin. Il valait peut-être mieux ne pas continuer sur cette conversation et se concentrer sur l’essentiel de ce qui les occupait actuellement : leurs vacances ! Ce fut d’ailleurs ce qui poussa la pétillante businesswoman à se relever de ce froid et dur carrelage, se dirigeant vers la table du salon où son ordinateur portable était toujours posé, fermé et éteint. Elle ne manqua pas de l’allumer sans attendre, pensant qu’il serait sûrement plus simple pour elles deux de faire des projets avec leur meilleur ami à leur côté : ce bon vieux internet ! « On peut se lancer dans une croisière ou alors opter pour l’option thalasso aussi… il y en a des tas en France d’après mon assistant, même si toutes ne valent pas forcément le coup d’œil ! » Dès que son appareil fut allumé, la jeune femme ne manqua pas de tapoter quelques mots-clefs sur le moteur de recherche Google, prête à leur concocter des vacances de rêve. Pour sûr, son assistant n’allait pas manquer de criser si elle s’absentait comme ça, du jour au lendemain, avec ses rendez-vous s’accumulant sur des semaines… tant pis, elle avait envie de s’écouter pour une fois et de profiter de sa jumelle qu’elle avait quelque peu délaissée ces derniers temps. Ses parents viendraient après. « Alors qu’en dis-tu, France ou ailleurs ? »

Ah, la France ! Un rêve de gamine qui ne s’était fondamentalement jamais réalisé. Maggie et Lizzie n’avaient eu de cesse d’en parler sans que jamais l’une d’entre elles ne franchisse le pas, même professionnellement. L’éditrice n’était guère amenée à quitter le sol américain, quant à la pétillante businesswoman, elle ne possédait pas encore de contrat avec la France. Cela pouvait venir bien sûr, mais dans l’état actuel des choses, hormis lors de vacances… aucun risque qu’elles ne mettent les pieds sur le sol de Molière ! « Bretagne, Saint Malo check ! Il y a de très bonnes thalassos d’après les sites que j’ai sous les yeux, à prix attractifs… suivant l’hôtel que l’on prend bien sûr mais quitte à être chouchoutées autant y mettre les moyens par conséquent je suggère l’hôtel cinq étoiles du centre ! Qu’en penses-tu ? Par contre je te préviens, mon français est juste ultra rouillé… je ne le parle jamais ! » Oh bien sûr, Maggie avait pris de nombreux cours au lycée et à l’université mais elle avait perdu beaucoup de ses réflexes à force de ne jamais le parler. Voilà qui lui donnerait l’occasion de dépoussiérer tout ça et, pourquoi pas, de faire de belles rencontres françaises ! « Tu as embauché cette assistante quand ? Montre-lui qui est le patron, mords-y l’œil !! Et puis au pire, si elle ne convient pas, tu peux toujours embaucher quelqu’un d’autre… ne fait pas dans le sentiment car tu as quand même un poste à hautes responsabilités et si tu as un boulet vissé à ta cheville, bonjour l’ambiance… ! »

« Ca me rassure, tu feras la traductrice pendant que pour une fois je ne prendrais pas les choses en main ! » lâcha Maggie, particulièrement rassurée. Bien qu’en France, et à plus forte raison dans les environnements touristiques, l’anglais soit parlé un peu partout, l’américaine ne pouvait pas s’empêcher de craindre le pire s’il fallait se faire comprendre en français. On n’avait pas idée d’inventer une langue aussi compliquée, après tout ! « Bus ?! On peut louer une voiture durant le temps du séjour, ce sera plus simple ! Tu imagines si on veut vraiment bouger ? Ce sera la croix et la bannière et tu sais bien à quel point je n’aime pas ne pas avoir de plan b sous la main… mon assistant a fini par m’appeler la matrice à plans b à force ! » Mais la jeune femme haussa les épaules, continuant à parcourir les sites des différentes thalassos avec avidité et curiosité. Il fallait vraiment que l’offre soit terriblement alléchante et parfaite à ses yeux pour qu’elle ne débourse une somme importante tout en fermant soigneusement les yeux. Prudente, pas avare. « Fille du big boss ?! Bah tu n’es quand même pas obligée de lui moucher le nez, rassure-moi ? Si elle est intelligente, pointe quand même ce qui ne va pas, sinon elle ne progressera jamais et ce n’est pas un service à lui rendre. Et puis… si ça peut te permettre d’avoir la conscience plus tranquille, moi je dis pourquoi pas hein ! »

« Si tu veux conduire tu conduis mais je peux tout à fait me sentir d’attaque, aucun problème pour ça ! J’ai l’habitude du décalage horaire qui plus est… » Maggie n’était pas nécessairement tout le temps entre les quatre murs du building de son entreprise, il lui arrivait de bouger. Mieux, lorsqu’elle avait des rendez-vous à l’étranger, elle appréciait tout particulièrement le dépaysement car en général, les voyages étaient longs, fatigants mais forts en souvenirs. Vraiment, la pétillante businesswoman n’avait aucunement à se plaindre à ce sujet, son boulot la comblait tout à fait même au niveau des voyages. « Bien sûr que mon passeport est à jour ! Je reviens tout juste de Tokyo je te rappelle, encore heureux… tu sais à quel point les relations américaines et japonaises sont à couteaux tirés, alors sans passeport ni visa, impossible de quitter le sol américain ! » Maggie avait finalement choisi UN endroit en particulier pour la thalasso, en Bretagne comme le souhaitait sa jumelle, et qui offrait un hôtel cinq étoiles moyennant le pécule nécessaire… chose qui n’était absolument pas un problème vu que l’une comme l’autre gagnaient très bien leur vie. « J’ai trouvé la perle rare ! Hammam, Sauna, bains à remous, massages au Monoï… je te fais la liste des joyeusetés ou on découvrira sur place ? Et ne commence pas à nous la jouer secrétaire sur le retour hein ! Qui dit vacances dit on lâche prise, on profite et on garde le smile, vu ? » La jeune femme lui lança un regard entendu avant de soupirer au sujet de l’assistante… « Je connais ! Si tu savais le nombre de guignols que j’ai vus passer par mon bureau, qui ne savaient pas aligner trois mots et se prenaient pour les maîtres du monde… mais tu prendrais qui si tu parvenais à la changer de service cette greluche impudente ? »

« Ne t’inquiètes pas, le décalage horaire on s’y fait vite, question d’habitude ! » énonça Maggie sans détour et tout en pensant ce qu’elle venait de dire. Lors de ses tous premiers voyages d’affaire, l’adaptation avait pris du temps mais maintenant, ce n’était qu’une légère fatigue ordinaire que ressentait son corps, rien de bien sinistre. Lizzie ayant une bonne endurance elle-même, il n’y avait plus qu’à parier que les deux jumelles n’auraient pas mis un pas au spa que déjà le jet lag n’aurait plus d’effet sur elles. « Tu sais j’ai vraiment fait un passage éclair à Tokyo, j’étais blindée de rendez-vous ! Sinon tu sais très bien que je te ramène toujours un petit quelque chose ! Cela dit si tu es déjà allée en France tu ne m’as rien ramené non plus ! » râla Maggie en faisant une fausse moue de petite fille pourrie gâtée qui n’obtient pas ce qu’elle convoite. Cela dit, la pétillante businesswoman ne manqua pas de froncer les sourcils aux paroles de sa Lizzie adorée : elle n’allait pas être mise à la porte, il ne fallait rien dramatiser ! Après tout, elle restait l’une des éditrices les plus en vogue de son temps et son talent n’était plus à prouver depuis des lustres. Marvel ne l’aurait pas augmentée par quatre fois en l’espace de seulement deux ans dans le cas contraire ! « Mais t’inquiètes pas, ce n’est qu’une petite couillonne ! Personne ne va te renvoyer et s’ils le font j’irais leur casser la gueule moi-même tu peux compter sur moi ! »

« Bon, d’accord ça va pour cette fois ! Mais que je ne t’y reprenne plus ! » ironisa Maggie avant de s’empiffrer deux ou trois palets d’à filée avec grand plaisir. Il faut dire qu’elle était extrêmement bec sucré, lui mettre par conséquent l’équivalent d’une boîte de gâteaux devant le nez ne pouvait qu’être une gravissime erreur tactique… diantre, elles allaient se l’enfiler en moins de deux ! Mais en attendant, elles pourraient également réserver l’intégralité de leur séjour ensemble, choisir le type de chambre –ou même de suite ! – qu’elles souhaitaient prendre avant que de poser leurs congés dans leurs entreprises respectives. Il ne manquerait plus que la mission valise… et les connaissant toutes les deux, cela risquait de prendre un moment ! « De toute façon, on va rapidement se barrer à l’autre bout de la planète donc oublie cette jeune couillonne et pense plutôt que tu pourras très certainement te faire bientôt masser par un bel Apollon ! Regarde… dans le programme y’a de nombreuses séances de massage, alors on aurait tort de s’en priver non ? » Si Maggie s’écoutait, elles seraient déjà en mode commando pour boucler les valises afin de partir rapidement, voire même tout de suite… après tout, l’américaine n’était pas réellement connue pour sa patience ! « Tu veux partir quand, toi, au juste ? Demain ? Dans une semaine ? Tu sais je suis ma propre patronne, donc si je décide du jour au lendemain que je n’ai plus de rendez-vous mon assistant n’aura qu’à s’adapter ! C’est plus pour toi… »